RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
18ème Chambre A
ARRET DU 16 Septembre 2008
(no, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 13193
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Septembre 2006 par le conseil de prud'hommes de Sens-section commerce-RG no 06 / 00080
APPELANTE
Madame Catherine X...
...
89770 BOEURS EN OTHE
représentée par Me Chantal DEVELAY-BARDE, avocat au barreau de SENS
INTIMEE
S. A. R. L. FEELINGS GESTION prise en la personne de son gérant M. Jean-Luc Y....
...
89000 AUXERRE
comparant en personne, assistée de Me Pierre Z..., avocat au barreau d'AUXERRE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Juin 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claudine PORCHER, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Charlotte DINTILHAC, présidente
Madame Claudine PORCHER, conseiller
Madame Anne BAMBERGER, Vice-Présidente placée, faisant fonction de Conseillère,
Greffier : Mme Michelle MARTY, lors des débats
ARRET :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par Madame Charlotte DINTILHAC, présidente,
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, présidente et par Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.
Madame Catherine X..., a été engagée le 1er avril 1990 en qualité de coiffeuse à temps partiel par la société NEW LOOK DIFFUSION située à JOIGNY.
Le 12 août 2001, elle a signé avec la société COIFFURE FLORENTINOISE, représentée par son gérant Monsieur Jean-Luc Y... un contrat à durée indéterminée à temps partiel pour un emploi de coiffeuse mixte au salon situé place des Fontaines à SAINT FLORENTIN et comportant une clause de mobilité.
Par avenant du 12 novembre 2001, l'horaire hebdomadaire de 8heures 30 a été porté à 26heures30, la salariée cessant de travailler pour la SARL NEW LOOK.
Le 24 juin 2005, la société FEELINGS GESTION, dénomination de la société COIFFURE FLORENTINOISE depuis le 1er juillet 2001, a informé Madame Catherine X... qu'en raison de la réorganisation de l'entreprise et notamment de la vente du fonds Florentinois à effet du 1er août 2005, elle était affectée à compter de cette date au salon FRANCK B..., place du Maréchal Leclerc à AUXERRE, avec la même qualification et une augmentation de 300 € brut par mois, son attention étant attirée sur la clause de mobilité contenue dans son contrat de travail.
Le 12 juillet 2005, Madame Catherine X... a répondu à son employeur qu'elle n'acceptait pas en l'état la proposition de modification de son contrat de travail.
Le 22 juillet 2005, la société FEELINGS GESTION a vendu le fonds de commerce de coiffure exploité à SAINT FLORENTIN.
Le 29 juillet 2005, la société FEELINGS GESTION a convoqué Madame Catherine X... à un entretien préalable fixé au 11 août avant de lui notifier, par lettre du 17 août 2005, son licenciement pour faute grave au motif de son refus de se conformer à la clause de mobilité contractuellement prévue.
Contestant la mesure prise à son encontre, Madame Catherine X... a saisi, le 14 septembre 2005, le Conseil de Prud'hommes de SENS qui, par jugement rendu le 21 septembre 2006 et notifié le 23 juin suivant, a condamné la société FEELINGS GESTION à lui verser 1 224, 72 € de prime d'ancienneté et 250 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et a rejeté le surplus des demandes des parties.
Le 30 octobre 2006, Madame Catherine X... a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions visées et développées à l'audience, elle invoque l'inopposabilité de la clause de mobilité en raison de son ignorance de l'étendue des actifs de l'employeur et de la situation juridique de la SARL COIFFURE FLORENTINOISE au moment de la signature du contrat et de l'avenant du 12 novembre 2001, les man œ uvres frauduleuses de la société et la méconnaissance par celle-ci des dispositions d'ordre public de l'article L 122-12 du code du travail constitutive d'un abus de droit rendant le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Elle demande en conséquence de réformer le jugement déféré en condamnant la société FEELINGS GESTION à lui verser 2 572, 50 € d'indemnité de préavis, 2 046, 41 € d'indemnité légale de licenciement, 330, 20 € d'indemnité de congés payés, 15 000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions visées et développées à l'audience, la SARL FEELINGS GESTION fait valoir que la salariée pour avoir participé tous les mois à la réunion des managers des salons du groupe FEELINGS en connaissait la structure et que son refus de son affectation à AUXERRE alors que le fonds n'avait pas encore été vendu, par application d'une clause de mobilité parfaitement valable et dont la mise en jeu n'a pas été abusive, justifie le licenciement pour faute grave même si cette affectation faisait obstacle à l'article L 122-12 du code du travail et que la prime d'ancienneté était incluse dans ses rémunérations.
Elle demande d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement d'une prime d'ancienneté et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de le confirmer pour le surplus et de lui allouer 1 500 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Sur Ce, La Cour
Il est justifié par la production du procès verbal de l'assemblée générale du 25 juin 2001 que la société COIFFURE FLORENTINOISE a changé de dénomination pour FEELINGS GESTION et que si les contrats du 12 août 2001 et l'avenant du 12 novembre 2001 sont sous l'ancien nom, il s'agit du même employeur.
La clause de mobilité insérée au contrat de travail du 12 août 2001 prévoit que « selon les besoins, Mme C... Catherinepourra faire l'objet d'une mutation temporaire, voire même définitive, dans tout autre salon adhérent au groupe Feelings. Dans les deux cas, Mme C... Catherinene pourra prétendre à aucune indemnité et ce à quel titre que ce soit ».
Elle est ainsi clairement limitée au salon adhérent au groupe Feelings.
Il n'est aucunement justifié de man œ uvres frauduleuses de la part de l'employeur pour contraindre la salariée à accepter cette clause ni de la méconnaissance par cette dernière des salons de coiffure dépendant du groupe FEELINGS et tous situés au demeurant dans l'Yonne, à proximité entre JOIGNY, AUXERRE et SAINT FLORENTIN soit, dans un même secteur géographique.
La clause de mobilité insérée au contrat du 12 août 2001 signé par la salariée est par conséquent valable.
L'employeur, tenu d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, ne doit pas abuser du droit qui lui est reconnu de mettre en oeuvre la clause de mobilité.
Il résulte clairement de la lettre de licenciement que la mutation de Madame X... est motivée par la vente du fonds de commerce où elle était affectée et qu'ainsi la clause de mobilité a été mise en oeuvre dans le but de déroger aux dispositions d'ordre public de l'article L 122-12 (L 1224-1) du Code du travail imposant le transfert automatique des contrats de travail des salariés au cédant et au cessionnaire.
Le transfert des contrats de travail s'effectue à la date du transfert effectif de l'activité de l'entreprise.
Il convient de noter qu'au terme de l'acte de cession, le transfert effectif de l'activité de l'entreprise est antérieur à la date du 1er août 2005 à compter de laquelle la salariée était affectée au salon d'AUXERRE.
La clause de mobilité ayant été ainsi mise en oeuvre de façon abusive, le licenciement de Madame Catherine X... est par conséquent dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Il convient donc d'infirmer le jugement déféré, de faire droit aux demandes de la salariée au titre du préavis, de l'indemnité de licenciement et de congés payés et, compte tenu de son ancienneté et en l'absence d'éléments justifiant de sa situation au regard de l'emploi de lui allouer la somme de 8 000 € en réparation du préjudice subi du fait de la rupture abusive de son contrat de travail.
La prime d'ancienneté n'ayant pas fait l'objet avant janvier 2005 d'une ligne distincte sur le bulletin de paie doit conformément à l'article 2 du chapitre III de la convention collective nationale de la coiffure être considérée comme ne pas avoir été payée.
Il convient de confirmer le jugement déféré qui a condamné la société FEELINGS GESTION à payer à Madame Catherine X... la somme de 1 224, 72 € à ce titre.
Par ces motifs, la cour
Infirmant partiellement le jugement déféré,
Condamne la société FEELINGS GESTION à payer à Madame Catherine X... 2 572, 50 € (deux mille cinq cent soixante douze euros cinquante centimes) d'indemnité de préavis, 2 046, 41 € (deux mille quarante six euros quarante et un centimes) d'indemnité légale de licenciement, 330, 20 € (trois cent trente euros vingt centimes) d'indemnité de congés payés, 8 000 € (huit mille euros) de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.
Confirme le jugement pour le surplus.
Condamne la société FEELINGS GESTION aux dépens et à payer à Madame Catherine X... la somme de 1 000 € (mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE