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14/05/2008 | FRANCE | N°08/04636

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0149, 14 mai 2008, 08/04636


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 14 MAI 2008

(no , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/04636

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 26 Février 2008 -Tribunal de Commerce de MONTEREAU - RG no 2007003136 - Monsieur GAILLARD, président -

ASSIGNATION A JOUR FIXE

APPELANTE

LA SOCIÉTÉ COVEA RISKS

SA

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représ

entants légaux

ayant son siège social aux 19/21, allée de l'Europe

92110 CLICHY

représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 14 MAI 2008

(no , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/04636

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 26 Février 2008 -Tribunal de Commerce de MONTEREAU - RG no 2007003136 - Monsieur GAILLARD, président -

ASSIGNATION A JOUR FIXE

APPELANTE

LA SOCIÉTÉ COVEA RISKS

SA

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social aux 19/21, allée de l'Europe

92110 CLICHY

représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour

assistée de Me Jean François DELRUE, avocat au barreau de PARIS, toque : P 174

INTIMEE

LA SOCIÉTÉ AUDITS CONSEILS ASSURANCES

SAS

ayant son siège social au 4, rue Grande

77250 MORET SUR LOING

représentée par la SCP MENARD - SCELLE-MILLET, avoués à la Cour

assistée de Me PAILLE-ARDILLY Florence, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Avril 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Marcel FOULON, Président

Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Melle Delphine LIEVEN

ARRÊT :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur Marcel FOULON, Président

- signé par Monsieur Marcel FOULON, président et par Melle Delphine LIEVEN, greffier présent lors du prononcé.

*

FAITS CONSTANTS :

Aux termes d'un protocole d'agrément du 21 janvier 2003, avec effet au 10 janvier 2003, les sociétés AZUR ASSURANCES et AZUR VIE ont conclu avec la SAS AUDITS CONSEILS ASSURANCES, courtier, ayant son siège social à Moret-sur-Loing, un protocole d'agrément du courtier pour une durée indéterminée et pour tous les produits commercialisés par AZUR.

Le 29 janvier 2003, ce protocole a été complété par une « convention informatisation courtage » conclue entre la société AZUR ASSURANCES IARD et la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES, devant permettre au courtier d'accéder directement, au moyen d'un code confidentiel, à un site « Extranet » (Web Azur Courtage), des sociétés d'assurances pour les produits "grand public et entreprises".

Le 1er juillet 2007, la société COVEA RISKS est venue aux droits de la société AZUR ASSURANCES à la suite d'une fusion d'activité.

Par acte du 25 octobre 2007, la SAS AUDITS CONSEILS ASSURANCES a assigné la société COVEA RISKS aux fins de voir condamner celle-ci à rétablir le code d'accès à un site Extranet dédié au grand public qu'elle reprochait à la société COVEA RISKS de lui avoir supprimé à partir du 1er juillet 2007 et de voir ordonner la publication de la décision à intervenir aux frais de COVEA RISKS dans L'Argus de l'Assurance.

Par ordonnance contradictoire du 26 février 2008, le juge des référés du tribunal de commerce de Montereau Fault Yonne (77) a :

- reçu la société COVEA RISKS en sa demande d'incompétence, l'a déclarée mal fondée et en conséquence, l'a déboutée,

- s'est déclaré compétent,

- confirmé que les droits et obligations des parties sont maintenues conformément aux termes des protocoles des 21 et 29 janvier 2007,

- condamné la société COVEA RISKS à rétablir le code courtier dédié au grand public du cabinet AUDITS CONSEILS ASSURANCES, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé un délai de cinq jours à compter de la signification de l'ordonnance,

- ordonné la publication de l'ordonnance, aux frais de la société COVEA RISKS, dans « L'Argus de l'Assurance »,

- condamné la société COVEA RISKS à payer à la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions des parties,

- constaté que l'exécution provisoire est de droit,

- condamné la société COVEA RISKS en tous les dépens.

La société COVEA RISKS a interjeté appel le 18 mars 2008.

Par ordonnance du 19 mars 2008, elle a été autorisée à assigner la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES à jour fixe conformément aux dispositions des articles 917 et suivants du CPC.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er avril 2008.

PRETENTIONS ET MOYENS DE LA SOCIETE COVEA RISKS :

Dans sa requête (du 19 mars 2008) afin d'être autorisée à assigner à jour fixe,, la société COVEA RISKS fait valoir :

- que la société AZUR VIE n'est pas partie à la convention d'information courtage,

- que la connection au site Extranet autorisée par cette convention n'est pas indispensable au courtier,

- que les sociétés AZUR ASSURANCES IARD et MMA IARD ayant fusionné, la production et la gestion des affaires nouvelles via la réseau courtage furent assurées par COVEA RISKS et que cette fusion a impliqué la redéfinition des produits d'assurances et de leur répartition géographique à compter du 1er juillet 2007,

- qu'un système Extranet a été dédié à la gestion des produits COVEA RISKS, les fonctionnalités du système antérieur n'étant maintenues que pour la gestion des polices d'assurances déjà souscrites,

- que tous les courtiers ont été informés qu'à la suite de la fusion, les produits « grand public » AZUR seraient fermés à la vente et que les fonctions de l'Extranet AZUR permettant la souscription de nouvelles polices AZUR seraient supprimées,

- qu'elle a informé AUDITS CONSEILS ASSURANCES que dans la zone géographique de celle-ci, seuls les produits d'assurances liés aux entreprises seraient susceptibles d'être mis en vente, à l'exclusion des produits "grand public",

- que les courtiers n'ont aucun engagement d'exclusivité de distribution vis-à-vis de COVEA RISKS et que cette dernière n'a aucun engagement quant à la nature des produits susceptibles d'être distribués par le courtier,

- que le 6 juillet 2007, après la fermeture à la vente de la gamme AZUR et ouverture de la "gamme convergence" COVEA RISKS, cette dernière a relancé AUDITS CONSEILS ASSURANCES afin qu'elle lui fasse connaître son choix parmi les différents modes de gestion de sinistres proposés,

- qu'aucune résiliation n'a été envisagée des conventions passées avec l'intimée ni aucune fermeture de « compte courtier », un nouveau compte étant, au contraire, ouvert, seul l'enregistrement de nouvelles polices AZUR étant supprimé puisque ces polices n'existent plus,

- que le juge des référés du tribunal de commerce de Montereau était territorialement incompétent, le juge territorialement compétent étant celui du siège social (Clichy 92), de la société COVEA RISKS et que le premier juge a fait une interprétation erronée de la clause attributive de compétence, prévue au contrat pour se déclarer compétent,

- que le premier juge a outrepassé les pouvoirs du juge des référés en interprétant la convention des parties, donc en statuant au fond pour prononcer la condamnation de COVEA RISKS à rétablir une fonction de souscription devenue obsolète du site Extranet,

- que l'ordonnance se fonde, sans aucune motivation, sur l'urgence, non prouvée,

- que la mesure ordonnée sous astreinte, de surcroît démesurée, est impossible à exécuter puisqu'elle tend à remettre en œuvre des fonctions d'un site Extranet dédié à des produits qui n'existent plus,

- que la publication ordonnée porte gravement atteinte à sa réputation commerciale, sans apporter un quelconque avantage au courtier,

- que par réciprocité, elle demande la publication de l'arrêt à intervenir.

Elle demande à la Cour :

- de dire et juger que le tribunal de commerce de Montereau était territorialement incompétent,

- de dire et juger qu'il aurait, en conséquence, dû se déclarer incompétent territorialement et renvoyer la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES à se mieux pourvoir devant le tribunal de commerce du siège de l'appelante (Nanterre),

- de dire et juger que pour se déclarer territorialement compétent et faire droit aux demandes de l‘intimée, le premier juge s'est livré à une interprétation et à la dénaturation de clauses contractuelles, excédant sa compétence matérielle et commettant un excès de pouvoir,

- de dire et juger qu'il y a des contestations sérieuses,

- de dire et juger que le premier juge ne pouvait la condamner à remettre en œuvre les fonctions d'un site « Web Azur Assurance » dédié à des produits AZUR qui n'existent plus,

- de dire et juger que la publication ordonnée est injustifiée,

- en conséquence, d'infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,

- d'ordonner la publication de la décision à intervenir dans un numéro de «L'Argus de l'Assurance » sans que le coût de cette insertion ne puisse excéder la somme de 5 000 euros, sous réserves de la décision à intervenir dans le cadre de l'instance en suspension de l'exécution provisoire diligentée à la requête de COVEA RISKS,

- de débouter AUDITS CONSEILS ASSURANCES de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner elle-ci à 5 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel,

- de lui accorder le bénéfice des dispositions de l'article 699 du CPC.

PRETENTIONS ET MOYENS DE LA SOCIETE AUDITS CONSEILS ASSURANCES :

Par dernières conclusions du 1er avril 2008, auxquelles il convient de se reporter, la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES fait valoir :

- qu'il existe bien, aux termes du protocole d'agrément, un engagement de l'assureur quant à la nature des produits d'assurances distribués par le courtier,

- que la convention d'informatisation courtage était indispensable à son activité,

- que cette dernière convention prévoyait les conditions de la résiliation,

- que le 26 juin 2006, le représentant d'AZUR ASSURANCES lui avait confirmé la pérennité des protocoles conclus avec AZUR après la fusion et que COVEA RISKS l'avait autorisée à vendre ses produits « grand public » à compter du 1/07/2007,

- que c'est par lettre simple du 14 juin 2007, qu'elle n'a jamais reçue, que COVEA RISKS prétend l'avoir informée de l'interdiction qui lui était faite de commercialiser toute nouvelle affaire dans le domaine « grand public » désormais réservé aux grandes agglomérations,

- que par lettre du 26 juillet 2007, le président du directoire de COVEA RISKS confirmait la cessation des relations commerciales,

- qu'il n'y a aucun péril imminent du fait de l'ordonnance, COVEA RISKS ne cherchant qu'à éviter les effets négatifs d'une publication,

- qu'elle a attrait à juste titre COVEA RISKS, liée par les protocoles souscrits antérieurement à la fusion,

- que le tribunal de commerce de Montereau s'est à bon droit déclaré compétent, sur le fondement du lieu d'exécution de la prestation de services, qui est le lieu de son siège, - qu'il n'y a aucune clause attributive de compétence territoriale mais une clause de compétence rationae materiae du tribunal de commerce, du siège du courtier,

- que le juge des référés était « compétent » sur le fondement de l'article 808 du CPC (urgence) et 809, alinéa 1er, du même code (trouble manifestement illicite),

- que l'impossibilité pour elle d'accéder à l'Extranet après le 1er juillet 2007 a vidé les conventions antérieures de leur substance,

- qu'elle sollicite la bonne exécution des conventions conclues sans qu'il soit nécessaire de les interpréter, dont l'accessoire est le rétablissement du code Extranet,

- qu'elle ne sollicite pas l'autorisation de commercialiser des produits AZUR qui n'existent plus mais la gamme de convergence COVEA RISKS telle qu'annoncée, dont on constate qu'elle est diffusée sous l'enseigne « MMA » à quelques mètres de ses locaux,

- que l'astreinte, qui a été fixée, à bon droit, à 500 euros par le premier juge, devra être portée à 1 000 euros par la Cour,

- que la demande de publication est destinée à porter à la connaissance des professionnels les pratiques de COVEA RISKS,

- qu'en raison de l'appel à jour fixe, elle a donné toutes garanties de non publication de l'ordonnance, de sorte que la demande de publication formée par COVEA RISKS est inopportune.

Elle demande à la Cour :

- de confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,

- de dire et juger que le tribunal de commerce de Montereau était compétent,

- de retenir l'absence de contestation sérieuse et la « compétence » du juge des référés »,

- de dire et juger que les droits et obligations des parties doivent être maintenus entre les parties, conformément aux conventions conclues entre elles, sauf à constater que COVEA RISKS se trouve aux droits d'AZUR ASSURANCES IARD,

- de condamner, en conséquence, COVEA RISKS à rétablir le code courtier dédié au grand public du cabinet AUDITS CONSEILS ASSURANCES lui permettant de commercialiser l'ensemble de la gamme de la compagnie d'assurances et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, passé un délai de cinq jours à compter de la signification de l'ordonnance,

- d'ordonner la publication de la « présente ordonnance » aux frais de COVEA RISKS dans «L'Argus de l'Assurance »,

- de condamner COVEA RISKS à 5 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du CPC.

SUR QUOI, LA COUR

Sur la compétence territoriale :

Considérant que la société COVEA RISKS n'invoque pas l'incompétence territoriale de la Cour ; qu'elle est dès lors sans intérêt à soulever l'incompétence territoriale du juge des référés du tribunal de commerce de Montereau ;

Sur le « fond » du référé :

Considérant que le protocole d'agrément conclu le 21 janvier 2003 pour une durée indéterminée, avec effet au 10 janvier 2003, entre les sociétés AZUR ASSURANCES IARD et AZUR VIE, aux droits desquelles vient la société COVEA RISKS, et le Cabinet AUDITS CONSEILS ASSURANCES, en qualité de courtier, portait sur les « opérations d'assurances dans les domaines IARD et VIE » ;

Qu'une lettre d'AZUR ASSURANCES du 27 janvier 2003 accompagnant la transmission du protocole précisait que l'engagement du courtier portait sur une « production annuelle de qualité d'au moins 120 affaires nouvelles en Risques de Masse » définis comme « Automobile, Habitation, Santé, Multirisque Professionnelle » ;

Que ce protocole d'agrément a été complété le 29 janvier 2003, par une « convention informatisation courtage » signée entre la société AZUR ASSURANCES IARD et le courtier ayant pour objet de mettre à la disposition de la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES un accès, via l'internet, à un site « Web Azur Courtage » au moyen d'un code confidentiel attribué au courtier ;

Que ladite convention prévoyait, en son Article 16, les conditions de cessation de la convention, sur l'initiative de la Société (AZUR ASSURANCES IARD), « sans préavis » (B) ou (C ) « avec préavis » de « 6 mois, notamment, en cas de remplacement du mode d'informatisation Web Azur Courtage par un nouveau système proposé par la Société » ;

Que par lettre recommandée avec AR du 26 juillet 2006, le directeur général de la société MMA IARD SA confirmait à la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES, à la suite du rapprochement MMA et AZUR ASSURANCES », le respect « par le nouvel ensemble (..) de ses engagements, notamment envers ses réseaux de distribution » et précisait : « depuis la réalisation de la fusion, sachez que les dispositions des protocoles conclus entre AZUR-Assurances IARD et votre cabinet demeurent inchangées, en ce qui concerne votre portefeuille AZUR et les affaires nouvelles (hors Flottes Automobiles et risques d'Entreprises) » ;

Que par lettre du 27 avril 2007, la société COVEA RISKS, « dans le cadre de la mise en vente courtage grand public du 1er juillet 2007 suite au rapprochement d‘AZUR et de COVEA RISKS, (a) informé (AUDITS CONSEILS ASSURANCES) procéder à l'ouverture de son compte COVEA RISKS » ; que le 27 juin 2007, la société COVEA RISKS proposait à son courtier « un nouveau service, le prélèvement bancaire » ;

Que le 21 juin 2007, la société COVEA RISKS indiquait à la société « AUDITS CONSEILS ASSURANCES » que « dans le cadre du rapprochement entre AZUR et COVEA, nous arrivons à la date de mise en place d'une gamme de convergence commune sur nos différents produits risques de masse au 1er juillet 2007. A partir de la date du 1er juillet 2007, tous les produits risques de masse actuels de la gamme AZUR seront fermés à la vente (à l'exception de certains). Les produits fermés seront remplacés par les produits de la gamme de convergence COVEA RISKS » (..) Cela signifie que vous ne pourrez plus commercialiser ces produits à partir du 1er juillet 2007 » ;

Que par une lettre du 6 juillet 2007, la société COVEA RISKS a fait savoir à la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES que « compte tenu du fait que la nouvelle gamme produit de convergence se met en place début juillet, avec de nouveaux modes d'organisation, (et que) nous sommes tenus, de ce fait, d'adapter nos protocoles sans attendre » ; qu'il était précisé que « sans choix de la part du courtier d'ici au 20 juillet, nous vous enverrons et soumettrons à votre signature un protocole reprenant ces caractéristiques » ; que le 10 juillet 2007, AUDITS CONSEILS ASSURANCES s'inquiétait auprès de COVEA RISKS de la « mesure de fermeture de code dédié au développement de vos produits "Grand Public" à compter du 1er juillet 2007 »;

Que le 16 juillet 2007, la société COVEA RISKS répondait à cette lettre, en confirmant au courtier qu'elle ne « travaillait en courtage sur la cible du Grand Public que sur des zones de courtage limitées aux grandes villes », que son cabinet « ne se situait pas dans une de ces zones », et que cette mesure « signifiait que COVEA RISKS n'accepterait plus d'affaires nouvelles Grand Public, que son portefeuille Grand Public n'était pas impacté et était maintenu en l'état, et qu'en matière de risques d'entreprises, le développement d'affaires nouvelles était toujours possible » ; l'assureur joignait à cette lettre, un lettre datée du 14 juin 2007 par laquelle elle prétend avoir informé AUDITS CONSEILS ASSURANCES de cette situation et que cette dernière conteste avoir reçue ;

Que bien qu'ayant transmis, le 19 juillet 2007, à AUDITS CONSEILS ASSURANCES un document intitulé « Kit Grand Public », la société COVEA RISKS confirmait au courtier, le 26 juillet 2006, sa « décision de mettre fin à nos relations commerciales en affaires nouvelles Grand Public » ;

Considérant, au vu de ces éléments, que la société COVEA RISKS a modifié unilatéralement les conditions du contrat liant les parties ;

Qu'aux termes de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et qu'elles doivent être exécutées de bonne foi ;

Considérant qu'en interdisant à la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES de commercialiser des produits d'assurances « Grand Public » à compter du 1er juillet 2007 et en fermant l'accès au site « Web Azur Assurances », en violation des engagements résultant des conventions du 21 janvier 2003 et 29 janvier 2003, conclues par les sociétés du groupe AZUR, aux droits desquelles elle admet venir, et dont elle s'est elle-même dit tenue dans une lettre adressée au courtier (LR avec AR du 26 juillet 2006), la société COVEA RISKS a occasionné un trouble manifestement illicite, qu'il convient de faire cesser en application de l'article 808, alinéa 1er, du CPC ;

Considérant que l'intimée demande l'autorisation à poursuivre la commercialisation de produits « Grand Public », en l'occurrence les produits « Grand Public » de la gamme de convergence COVEA RISKS qui a remplacé l'ancienne gamme AZUR ASSURANCES et à voir rétablir le code courtier dédié au « Grand Public » ;

Que cependant, les mesures sollicitées ne peuvent être prises, dès lors que les produits « Grand Public » AZUR et le code d'accès « Web Azur Courtage », tels qu'ils existaient au moment de la conclusion des conventions précitées, ont disparu et que le juge des référés ne saurait leur substituer la commercialisation de produits et un accès à un site Extranet, dans des conditions contractuelles, notamment en termes géographiques, modifiées ; que les demandes d'AUDITS CONSEILS ASSURANCES à ce titre seront, par conséquent, rejetées ;

Que cette impossibilité pour le juge des référés d'ordonner des mesures de cessation du trouble n'exclut pas la faculté pour les juges du fond d'examiner une éventuelle demande de dommages et intérêts, non réclamés à titre provisionnel ;

Qu'en revanche, il convient d'accueillir la demande de publication du présent arrêt, aux frais de la société COVEA RISKS, dans un numéro du journal « L'Argus de l'Assurance », selon les modalités précisées au dispositif ;

Qu'il convient, en conséquence, d'infirmer ladite ordonnance en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande d'incompétence, condamné la société COVEA RISKS à payer à la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du CPC et aux dépens et rejeté toutes les autres demandes ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES les frais irrépétibles qu'elle a exposés pour la présente instance ; qu'il y a lieu de lui accorder 5 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

Considérant que la société COVEA RISKS, qui succombe, devra supporter les dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC ;

PAR CES MOTIFS :

Infirme l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a reçu la société COVEA RISKS en sa demande d'incompétence et l'a déclarée mal fondée, condamné la société COVEA RISKS à payer à la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du CPC, rejeté toutes les autres demandes et condamné la société COVEA RISKS aux dépens,

Statuant à nouveau :

Rejette les demandes de la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES tendant à la commercialisation des produits de la gamme de convergence COVEA RISKS ou à l'accès à un site « Extranet » géré par la société COVEA RISKS,

Ordonne la publication du texte ci-après dans un numéro du journal « L'Argus de l'Assurance », aux frais de la société COVEA RISKS dans la limite de 5 000 euros :

« Par arrêt du 14 mai 2008, la cour d'appel de Paris, statuant en matière de référé, a jugé que la société COVEA RISKS, dont le siège social est 19-21 allée de l'Europe à Clichy (92110), a, en modifiant unilatéralement les conditions des contrats dont elle était tenue à l'égard de son courtier, la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES, ayant son siège 4 rue Grande à Moret-sur-Loing (77250), à la suite de sa fusion avec les sociétés du Groupe AZUR, lui interdisant de commercialiser des produits d'assurances « Grand Public » et fermant l'accès au site « Web Azur Assurances », causé un trouble manifestement illicite que le juge des référés ne peut, cependant, dans le cas d'espèce, faire cesser, quitte pour le juge du fond, à examiner une éventuelle demande de dommages et intérêts",

Y ajoutant :

Condamne la société COVEA RISKS à payer à la société AUDITS CONSEILS ASSURANCES la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

Condamne la société COVEA RISKS aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0149
Numéro d'arrêt : 08/04636
Date de la décision : 14/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Montereau-Fault-Yonne, 26 février 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-05-14;08.04636 ?
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