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14/05/2008 | FRANCE | N°06/17875

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0165, 14 mai 2008, 06/17875


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section A

ARRET DU 14 MAI 2008

(no , 20 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/17875

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Novembre 2002 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 199868051

APPELANTE

S.A.R.L. SOCIETE BUDDE MUSIC

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

ayant son siège 5 RUE DENIS POISSON - 75017 PARIS -

représentée

par la SCP VERDUN - SEVENO, avoués à la Cour

assistée de Me André SCHMIDT, avocat au barreau de PARIS, toque : E523

INTIMEES

STE M P...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section A

ARRET DU 14 MAI 2008

(no , 20 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/17875

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Novembre 2002 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 199868051

APPELANTE

S.A.R.L. SOCIETE BUDDE MUSIC

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

ayant son siège 5 RUE DENIS POISSON - 75017 PARIS -

représentée par la SCP VERDUN - SEVENO, avoués à la Cour

assistée de Me André SCHMIDT, avocat au barreau de PARIS, toque : E523

INTIMEES

STE M PRODUCTIONS

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège 5 RUE FREDERIC PASSY

92200 NEUILLY SUR SEINE

non représentée

STE LES PRODUCTIONS FEELING INC

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège 2540 DANIEL JOHNSON 755 LAVAL QUEBEC CANADA H7T2S3

représentée par la SCP FANET - SERRA, avoués à la Cour

assistée de Me Florence DAUVERGNE, avocat au barreau de PARIS, toque : L 237

plaidant pour Me LAUVAUX du Cabinet NOMOS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Mars 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Alain CARRE-PIERRAT, Président

Madame Dominique ROSENTHAL-ROLLAND, Conseiller

Madame Brigitte CHOKRON, Conseiller

qui en ont délibéré

ARRET :REPUTE-CONTRADICTOIRE

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Nous, Alain CARRE-PIERRAT, président et par Nous Jacqueline VIGNAL, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel interjeté, le 3 mars 2003, par la société BUDDE MUSIC d'un jugement rendu le 19 novembre 2002 par le tribunal de commerce de Paris qui a :

* dit l'annexe signée entre les sociétés EDITIONS NOUVEAUX VISAGES, M PRODUCTIONS et CANADA INC, le 7 avril 1986, opposable à la société BUDDE MUSIC,

* constaté qu'il a été mis fin le 15 juin 1993, en ce qui concerne la société EDITIONS NOUVEAUX VISAGES, aux droits de laquelle vient la société BUDDE MUSIC, à la coproduction fixée au contrat général de coproduction en date du 31 mars 1986,

* dit qu'en application du paragraphe "e" de l'annexe du 31 mars 1986, les royalties dues à la société BUDDE MUSIC, pour les titres BILLY, COMMENT T'AIMER, EN AMOUR, JE NE VEUX PAS (vocale), JE NE VEUX PAS (maxi), LA RELIGIEUSE, NE PARTEZ PAS SANS MOI et NE PARTEZ PAS SANS MOI (inst.), sont celles fixées au contrat général et en conséquence a débouté les sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING de leurs demandes formulées à ce titre,

* dit les sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING mal fondées en leurs demandes de dommages et intérêts, au titre de prétendues fautes de gestion de la société BUDDE MUSIC, les en a déboutées,

* constaté que les contrats de licence signés par la société BUDDE MUSIC pour des pays autres que ceux expressément cités à l'article 1. Exclusivité d'enregistrement du contrat d'artiste du 31 mars 1986, l'ont été en violation dudit contrat,

* dit la société M PRODUCTIONS mal fondée en ses demandes de remboursement de la somme de 55.288 euros au titre des commissions prélevées pour la période du1er janvier 1996 au 30 juin 1998 et en ses demandes annexes, l'en a déboutée,

* ordonné aux sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING de produire, sous astreinte de 400 euros par jour de retard, passé 30 jours à compter de la signification du jugement, tous les relevés semestriels des comptes d'exploitation pour l'Amérique du Nord, concernant les titres D'AMOUR OU D'AMITIE, VISA POUR LES BEAUX JOURS et TELLEMENT J'AI D'AMOUR POUR TOI, ainsi que le contrat de cession intervenu entre les sociétés LES PRODUCTIONS FEELING et SONY MUSIC ENTERTAINEMENT CANADA INC, à défaut les clauses attestant des droits réservés à la société BUDDE MUSIC,

* condamné la société BUDDE MUSIC à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 373.093,70 euros,

* condamné la société BUDDE MUSIC à payer à chacune des sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 9.247,40 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2000,

* pris acte de ce que la société BUDDE MUSIC a versé aux débats le contrat conclu avec la société DYNAMICRO SHARP et les décomptes de commission, en conséquence, dit n'y avoir lieu à en ordonner la production,

* constaté que la société BUDDE MUSIC n'a pas toujours rendu compte spontanément de sa gestion, mais qu'elle a dans le cadre de la présente procédure satisfait à son obligation,

* dit les sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING mal fondées en leurs demandes de paiement de la somme de 20.882,42 euros pour retenue injustifiée sur la part d'avance leur revenant, les en a déboutées,

* pris acte de l'engagement de la société BUDDE MUSIC de réajuster les comptes s'il s'avérait que les redevances de l'artiste aient été retenues deux fois,

* constaté la révocation de la société BUDDE MUSIC en sa qualité de gérant de la coproduction à la date du 31 décembre 1997,

* désigné M PRODUCTIONS en qualité de gérant de la coproduction en remplacement de la société BUDDE MUSIC,

* nommé la société BUDDE MUSIC en qualité d'administrateur provisoire, pour une durée de 30 jours à compter de la signification du jugement, avec pour seule mission d'encaisser les redevances des divers licenciés et de payer les sommes dues aux coproducteurs et à l'artiste interprète,

* dit la société la société BUDDE MUSIC mal fondée en sa demande de paiement de la somme de 152.449 euros à titre de dommages et intérêts pour révocation fautive de la gérance,

* dit que les contrats passés par la société BUDDE MUSIC après le 2 juillet 1998 ont causé un préjudice aux sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING, et condamné la société BUDDE MUSIC à payer à chacune la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts,

* débouté la société M PRODUCTIONS de sa demande de résolution des contrats de coédition conclus le 17 juin 1983 entre la société M PRODUCTIONS et la société EDITIONS MUSICALES CLAUDE C..., devenue la société BUDDE MUSIC,

* condamné la société BUDDE MUSIC à payer à la société M PRODUCTIONS la somme de 55.000 euros à titre de dommages et intérêts,

* dit la société M PRODUCTIONS mal fondée en ses plus amples demandes relatives aux contrats de coédition, l'en a déboutée,

* condamné la société M PRODUCTIONS à payer à la société BUDDE MUSIC la somme de 1.485,36 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mai 1999, au titre des recette éditoriales des chansons du 1er novembre 1997 au 30 octobre 1999,

* dit la société M PRODUCTIONS mal fondée en toutes ses demandes relatives à la gestion de son catalogue éditorial, l'en a déboutée,

* dit la société BUDDE MUSIC mal fondée en sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, l'en a déboutée,

* dit les parties mal fondées en leurs plus amples demandes,

* dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire et de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

* condamné la société BUDDE MUSIC aux dépens ;

Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état, en date du 2 novembre 2004, déclarant parfait le désistement d'instance de la société BUDDE MUSIC à l'égard de la société M PRODUCTIONS ;

Vu le retrait du rôle ordonné le 2 novembre 2004 ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 18 février 2008, aux termes desquelles la société BUDDE MUSIC demande à la Cour de :

* infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit l'annexe signée entre les sociétés Editions NOUVEAUX VISAGES, M. PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING du 7 avril 1986 lui était opposable, et, en ce qu'il a jugé qu'il a été mis fin le 15 juin 1993 au contrat de coproduction en date du 31 mars 1986,

* confirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'en application du paragraphe "e" de l'annexe du 31 mars 1986, les royalties qui lui été dues pour les titres BILLY, COMMENT T'AIMER, EN AMOUR, JE NE VEUX PAS (vocale), JE NE VEUX PAS (maxi), LA RELIGIEUSE, NE PARTEZ PAS SANS MOI et NE PARTEZ PAS SANS MOI (inst.), sont celles fixées au contrat général de coproduction du 31 mars 1986 et, en conséquence, a débouté la société LES PRODUCTIONS FEELING de sa demande formulée à ce titre,

* dire irrecevable et non fondée la société PRODUCTIONS FEELING Inc. et infirmer le jugement en ce qu'il a constaté que les contrats de licence qu'elle a signés pour les pays autres que ceux expressément visés à l'article 1er : « Exclusivité d'enregistrement» du contrat d'artiste du 31 mars 1986, l'ont été en violation dudit contrat,

* confirmer le jugement en ce qu'il a dit la société PRODUCTIONS FEELING Inc. mal fondée en sa demande de dommages et intérêts au titre de prétendues fautes de gestion qui lui seraient imputables,

* infirmer partiellement le jugement et voir ordonner à la société PRODUCTIONS FEELING Inc. de produire, sous astreinte de 400 euros par jour de retard passé 30 jours à compter de la signification du présent arrêt, tous les relevés semestriels des comptes d'exploitation pour l'Amérique du Nord concernant l'ensemble des titres coproduits (29) ainsi que le contrat de cession intervenu entre la société LES PRODUCTIONS FEELING et la société SONY MUSIC ENTERTAINMENT CANADA,

* infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 373.093,70 euros et voir suspendre le paiement de cette somme jusqu'au moment où la société LES PRODUCTIONS FEELING aura fourni les comptes justifiés de leur exploitation en Amérique du Nord et lui aura payée les redevances dues au titre de cette exploitation et ce, depuis 1986,

* dire que lesdites redevances pourront être payées par compensation à due concurrence avec les sommes dues à la société LES PRODUCTIONS FEELING,

* à titre subsidiaire, condamner la société LES PRODUCTIONS FEELING à lui payer, à titre d'indemnité provisionnelle, la somme de 75.000 euros à raison des redevances d'exploitation dues pour l'Amérique du Nord et celle de 75.000 euros à titre de dommages et intérêts à propos des manoeuvres dolosives constitutives d'une tentative d'escroquerie constituant une faute lourde au sens de l'article 1382 du Code civil,

* infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 9.247,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2000,

* confirmer le jugement en ce qu'il a dit mal fondée la société LES PRODUCTIONS FEELING en sa demande de paiement de la somme de 20.882,42 euros pour retenue injustifiée sur la part d'une avance à lui revenir,

* dire que faute d'indications fournies par la société LES PRODUCTIONS FEELING aucun réajustement des comptes à ce titre n'avait à être-et n'a pu être assuré,

* lui donner acte que sa révocation comme gérant de la coproduction a pris effet au 31 décembre 1997,

* la voir désigner toutefois en qualité de gérant de la coproduction avec pour mission :

- de conclure ou/et renouveler les contrats de licences et d'exploitation, après consultation préalable des autres coproducteurs,

- l'encaissement des avances et redevances et répartitions entre les divers ayants droit après prélèvement des frais autorisés par le contrat de coproduction,

* la désigner en qualité d'admirateur provisoire et ce, jusqu'à nouvel décision judiciaire ou accord commun des coproducteurs sur les nouvelles modalités de gestion,

* lui donner acte de ce qu'elle se désiste de sa demande de paiement de dommages et intérêts pour révocation fautive de la gérance,

* infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que les contrats d'exploitation phonographiques qu'elle a négociés après 1998 ont causé un préjudice à la société LES PRODUCTIONS FEELING et en ce qu'elle a été condamnée à payer à cette dernière la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts,

* sur les demandes nouvelles en appel de la société LES PRODUCTIONS FEELING, voir déclarer contraires à l'article 564 du Code de procédure civile :

¤ la demande de condamnations à des intérêts capitalisés relativement aux droits (362.658,04 euros H.T.) représentant le montant des sommes dues à la société LES PRODUCTIONS FEELING et restées impayées, dans l'attente des comptes et des règlements de l'exploitation en Amérique du Nord des enregistrements par la même société canadienne,

¤ la demande de sa condamnation à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING, au titre des licences consenties en violation des contrats d'artiste, l'intégralité des sommes perçues jusqu'à ce jour au titre de ces exploitations hors territoire contractuel,

¤ la demande de désignation d'un expert non sollicité en première instance,

¤ et la demande de constater qu'en application de l'article 3 de l'annexe au contrat de coproduction du 31 mars 1986, en raison du décès de M. Eddy Marnay, la société FEELING Inc. dispose seule des droits d'exploitation des enregistrements objets de la coproduction,

* pour le surplus, voir débouter la société LES PRODUCTIONS FEELING de toutes ses autres demandes et la voir condamner à la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens ;

Vu les ultimes conclusions, en date du 12 février 2008, par lesquelles la société LES PRODUCTIONS FEELING Inc, poursuivant l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit les sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING mal fondées en leurs demandes de dommages et intérêts, au titre des prétendues fautes de gestion de la société BUDDE MUSIC, ordonné à ces sociétés de produire, sous astreinte de 400 euros par jour de retard, passé 30 jours à compter de la signification du jugement, tous les relevés semestriels des comptes d'exploitation pour l'Amérique du Nord, concernant les titres D'AMOUR OU D'AMITIE, VISA POUR LES BEAUX JOURS et TELLEMENT J'AI D'AMOUR POUR TOI, ainsi que le contrat de cession intervenu entre les sociétés LES PRODUCTIONS FEELING et SONY MUSIC ENTERTAINEMENT CANADA INC, à défaut les clauses attestant des droits réservés à la société BUDDE MUSIC, pris un acte de ce que la société BUDDE MUSIC a versé aux débats le contrat conclu avec la société la société D SHARP et les décomptes de commission, en conséquence, dit n'y avoir lieu d'en ordonner la production, constaté que la société BUDDE MUSIC n'a pas toujours rendu compte spontanément de sa gestion, mais qu'elle a dans le cadre de la présente procédure satisfait à son obligation, dit les sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING mal fondées en leurs demandes de paiement de la somme de 20.882,42 euros pour retenue injustifiée sur la part d'avance leur revenant, pris acte de l'engagement de la société BUDDE MUSIC de réajuster les comptes s'il s'avérait que les redevances de l'artiste aient été retenues deux fois, demande à la Cour, statuant à nouveau, de :

¤ sur les licences consenties en violation des contrats d'artiste,

* condamner la société BUDDE MUSIC à lui payer l'intégralité des sommes perçues jusqu'à ce jour au titre de ces exploitations hors territoires contractuels, ainsi que la somme de 377.074,71 euros au titre de l'exploitation des enregistrements sur des territoires non concédés portant atteinte à ses droits,

¤ sur l'exception d'inexécution :

* juger que la société BUDDE MUSIC ne disposait s'agissant de l'exploitation en Amérique du Nord, de droits que sur les enregistrements qui faisaient l'objet du contrat de coproduction du 6 juillet 1982, en application du contrat d'artiste de la même date,

* constater qu'elle a procédé aux redditions de comptes et payer les redevances correspondant aux exploitations desdits enregistrements,

* constater que les enregistrements D'AMOUR ET D'AMITIE, VISA POUR LES BEAUX JOURS et TELLEMENT J'AI D'AMOUR POUR TOI ont été cédés pour l'Amérique du Nord, à la société SONY MUSIC ENTERTAINEMENT CANADA, le 26 mai 1994, et que la quote-part du prix, soit 11.250 $ canadiens, a été payé le 10 juillet 1995,

* constater que la société BUDDE MUSIC ne justifie d'aucune créance certaine, liquide et exigible,

* rejeter la demande d'exception d'inexécution formée per la société BUDDE MUSIC,

* débouter la société BUDDE MUSIC de sa demande de provision de 75.000 euros et de sa demande de dommages et intérêts de 75.000 euros au titre de prétendues manoeuvres frauduleuses,

¤ sur le mandat de gestion,

* débouter la société BUDDE MUSIC de sa demande de nomination en qualité d'administrateur provisoire de la coproduction,

* prendre acte de ce que la société BUDDE MUSIC renonce à sa demande de dommages et intérêts au titre de la révocation de son mandat de gérante de la coproduction,

* constater qu'en application de l'article 3 de l'annexe au contrat de coproduction du 31 mars 1986, en raison du décès de Eddy MARNAY, elle dispose seule des droits d'exploitation des enregistrements objets de la coproduction,

* la désigner en qualité de gérant de la coproduction avec pour mission d'assurer la conclusion du contrat de licence et leurs éventuels renouvellements, encaisser les redevances des divers licenciés, d'établir les états de redevances et de payer aux producteurs les sommes dues ainsi qu'à l'artiste interprète,

¤ sur la violation des droits de producteurs,

* juger qu'en poursuivant les actes de gestion alors que son mandat avait pris fin à compter du 31 décembre 1997, la société BUDDE MUSIC a commis une faute entraînant sa responsabilité,

*condamner la société BUDDE MUSIC à lui payer la somme de 657.832,23 euros de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation au titre du manque-à-gagner du fait de la négociation fautive des contrats de licence, sauf à parfaire,

* condamner la société BUDDE MUSIC à lui payer la somme de 10.441,21 euros avec intérêts au taux légal au titre des détournements effectués,

¤ en tout état de cause,

* condamner la société BUDDE MUSIC à lui verser la somme de 20.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties; qu'il suffit de rappeler que :

* le 6 juillet 1982, les sociétés LES PRODUCTIONS FEELING, M PRODUCTIONS et EDITIONS MUSICALES CLAUDE C..., devenue la société BUDDE MUSIC, ont signé un accord de coproduction portant sur trois enregistrements de l'artiste Céline E..., D'AMOUR OU D'AMITIES, VISA POUR LES BEAUX JOURS et TELLEMENT J'AI D'AMOUR POUR TOI, en vertu d'un contrat d'enregistrement exclusif signé par l'artiste avec la société EDITIONS MUSICALES CLAUDE C..., portant sur l'exploitation de ces trois enregistrements, pour le monde entier, la gestion commerciale de la coproduction étant confiée à cette dernière société, seule habilitée à signer les accords de distribution à l'étranger, et, par un contrat du même jour la société EDITIONS MUSICALES CLAUDE C... a confié à la société LES PRODUCTIONS FEELING leur distribution aux États-Unis et au Canada,

* le 30 mars 1983, un nouveau contrat d'enregistrement exclusif a été signé entre Céline E... et les trois coproducteurs pour une durée de trois ans, à savoir du 30 mars 1983 jusqu'au 30 mars 1986, concernant l'enregistrement de 18 titres, étant précisé que le même jour, un nouvel accord de coproduction et de gestion commerciale a été signé entre les trois coproducteurs, aux termes duquel, notamment, la gestion commerciale a été, à nouveau, confiée à la société EDITIONS MUSICALES CLAUDE C..., moyennant une commission de 10 %,

* par avenant, en date du 30 mars 1986, les parties sont convenues de résilier pour l'avenir le contrat d'artiste du 30 mars 1983 conclu avec Céline E..., étant, toutefois, précisé que les enregistrements réalisés dans le cadre de ce contrat restaient régis par celui-ci,

* le 31 mars 1986, un nouveau contrat d'enregistrement exclusif a été signé entre Céline E... et les sociétés LES PRODUCTIONS FEELING, M PRODUCTIONS et LES EDITIONS NOUVEAUX VISAGES, pour une durée allant du 31 mars 1986 jusqu'au 30 octobre 1989, pour l'enregistrement d'un minimum de 6 titres par an, le même jour, un nouvel accord de coproduction et de gestion commerciale a été signé entre ces trois sociétés, étant précisé que LES EDITIONS NOUVEAUX VISAGES, qui se substituait à la société EDITIONS MUSICALES CLAUDE C..., se voyait confier la gestion commerciale sans commission de gestion,

* le 7 avril 1986, les sociétés LES PRODUCTIONS FEELING et M PRODUCTIONS ont signé un avenant prévoyant que la société LES EDITIONS NOUVEAUX VISAGES ferait appel à Claude C..., en qualité de conseil,

* le 2 septembre 1988, la société EDITIONS MUSICALES CLAUDE C... a obtenu l'accord des deux autres coproducteurs aux fins de racheter la part de coproduction de la société LES EDITIONS NOUVEAUX VISAGES sur les 8 enregistrements produits en application de l'accord de coproduction du 31 mars 1986, étant relevé que cet accord stipulait également que à l'issue de la période contractuelle de coproduction, les trois coproducteurs laisseront s'exécuter le présent accord et les accords du 30 mars 1983 et 31 mars 1986 jusqu'à résiliation éventuelle et solidaire des autres coproducteurs,

* en 1994, la société LES PRODUCTIONS FEELING a cédé, pour les territoires de l'Amérique du Nord, à la société SONY MUSIC ENTERTAINEMENT les droits qu'elle détenait sur les enregistrements de Céline E..., parmi lesquels figuraient les trois enregistrements objets du premier accord de coproduction du 6 juillet 1982,

* les sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING, estimant que la société BUDDE MUSIC, anciennement EDITIONS MUSICALES CLAUDE C..., n'aurait fait aucun effort particulier pour donner aux enregistrements de Céline E..., alors même qu'elle était devenue une artiste mondialement connue, une exploitation en rapport avec cette nouvelle notoriété et qu'elle aurait, en outre, commis des anomalies dans la gestion des comptes, lui ont, au cours de l'année 1997, demandé de reprendre la gestion de la coproduction phonographique,

* devant le refus exprimé, selon elles, par la société BUDDE MUSIC, elles ont, par courrier du 21 août 1997, mis fin à son mandat de gestion à compter du 1er octobre 1997,

* le 4 novembre 1997, la société BUDDE MUSIC a estimé que cette résiliation ne pouvait s'appliquer aux deux premiers contrats de coproduction des 6 juillet 1982 et 30 mars 1983, ceux-ci étant conclus, selon elle, pour une durée illimitée sans possibilité de résiliation,

* la situation s'étant détériorée entre les parties, c'est dans ces circonstances que les sociétés M PRODUCTIONS et LES PRODUCTIONS FEELING ont engagé la présente procédure tendant essentiellement à voir juger que la société BUDDE MUSIC aurait failli à ses obligations de mandataire du catalogue phonographique leur causant un préjudice et qu'elles seraient seules habilitées à gérer pour le compte de la coproduction ;

* sur les droits de la société BUDDE MUSIC sur les enregistrements de Céline E... de 1986 :

Considérant que la société LES PRODUCTIONS FEELING entend se prévaloir de l'avenant conclu, le 7 avril 1986, entre les trois coproducteurs stipulant que, d'une part, la société LES EDITIONS NOUVEAUX VISAGES s'engage à utiliser les services de M. Claude C..., à titre de Conseil, pour les phonogrammes de Mlle Céline E... et que si M. Claude C... décidait de mettre fin à sa collaboration avec "N.V." concernant Céline E..., "N.V." s'engagerait à mettre fin pour ce qui le concerne, à la coproduction fixée au Contrat Général Accord général signé le 31 mars 1986 et que, d'autre part, dans le cas où une telle décision interviendrait "N.V." recevrait, exclusivement pour les phonogrammes distribués sous le régime des contrats signés par lui et pour le phonogramme qu'il n'aurait pas coproduit, une royalie de 1% sur 90% des ventes, calculée sur le prix de détail. Pour les autres phonogrammes dont il est et reste copropriétaire, la royaltie du contrat de coproduction s'appliquerait ;

Que la société LES PRODUCTIONS FEELING revendique donc, sur le fondement de cet avenant, la propriété des enregistrements fixés en 1986 portant sur les titres suivants,

BILLY, COMMENT T'AIMER, EN AMOUR, JE NE VEUX PAS (vocale), JE NE VEUX PAS (maxi), LA RELIGIEUSE, NE PARTEZ PAS SANS MOI et NE PARTEZ PAS SANS MOI (instrumental) ;

Considérant que, pour s'opposer aux prétentions de la société intimée, la société BUDDE MUSIC soutient que l'acte précité ne lui serait pas opposable dès lors qu'il est exclusivement signé par les trois coproducteurs et que Claude C... qui n'y était pas partie, ne l'a pas contresigné ; que, en toute hypothèse, si cet avenant avait été transféré à la société EDITIONS MUSICALES CLAUDE C..., cet acte aurait du être, en application des dispositions de l'article 50, alinéa 1er de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, assujetti au contrôle de l'assemblée générale de la société, formalité dont il n'est pas rapporté la preuve, circonstance qui serait, selon la société appelante, de nature à rendre suspect cet acte et à faire douter de son existence même à l'époque des faits ;

Mais considérant que, en premier lieu, les premiers juges ont, par une motivation pertinente que la Cour adopte, justement retenu que l'avenant contesté était opposable à la société BUDDE MUSIC, venant aux droits de la société LES EDITIONS NOUVEAUX VISAGES, partie à cet acte et que, par voie de conséquence, elle a, à compter du 15 juin 1993, date à laquelle Claude C... a cessé ses fonctions, perdu tout droit de coproduction des titres précités produits dans le cadre du contrat de coproduction de 1986 ;

Qu'en effet, par contrat en date du 15 septembre 1988, la société EDITIONS MUSICALES CLAUDE C... a acquis la part de coproduction de la société LES EDITIONS NOUVEAUX VISAGES sur les enregistrements de 1986 et s'est, par ailleurs, engagée à exécuter les droits et obligations des EDITIONS NOUVEAUX VISAGES concernant les mêmes phonogrammes et déclare en avoir pris connaissance ;

Qu'il ne peut être sérieusement contesté que, au nombre des obligations mentionnées au contrat précité, figure celle stipulée à l'annexe du 7 avril 1986 aux termes de laquelle, la société devait s'attacher la collaboration de Claude C... ;

Considérant que, en second lieu, les dispositions de l'article L.223-19, alinéa 1er, du Code de commerce auquel fait référence la société appelante en invoquant celles de l'article 50, alinéa 1er, de la loi du 24 juillet 19666 sur les sociétés commerciales, ne sont pas applicables en l'espèce dès lors qu'aucune convention, au sens du texte précité, n'a été passée entre elle et son gérant Claude C... ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré l'annexe litigieuse opposable à la société BUDDE MUSIC, de sorte que cette dernière ne saurait se prévaloir, à compter du 15 juin 1993, date de la démission de Claude C..., de la qualité de coproducteur ;

* sur les licences consenties hors territoires :

Considérant que la société appelante critique le jugement déféré en ce que le tribunal a retenu qu'elle avait signé des contrats au mépris des dispositions territoriales du contrat d'exclusivité phonographique du 31 mars 1986, motif pris que la diffusion de l'album dans les territoires non contractuels n'aurait jamais fait l'objet de la moindre réclamation, ni des coproducteurs ni de Céline E... qui n'auraient subi le moindre préjudice ;

Mais force est de constater qu'il résulte des documents versés aux débats que les contrats litigieux ont été signés, notamment ceux relatifs aux Pays-Bas, à la Grande Bretagne, aux pays scandinaves, au Portugal ou encore au Japon, en violation des dispositions territoriales stipulées, peu important l'absence d'éventuelles contestations, d'autant qu'il est établi que la société BUDDE MUSIC a renouvelé ces contrats de licence à leur expiration, alors même que la présente procédure était engagée et que ses coproducteurs avaient émis des protestations à ce titre ; que, en outre, la société appelante a, le 24 janvier 2006, signé un nouveau contrat de licence avec la société UNION SQUARE MUSIC Limited pour le territoire anglais, à une date postérieure celle jugement déféré ;

Que de plus il ressort des pièces communiquées par la société BUDDE MUSIC que les redditions de compte ont été adressées à la société M PRODUCTIONS de sorte que la société LES PRODUCTIONS FEELING ne pouvait avoir connaissance de l'existence de ces contrats ;

Que, en outre, il n'est pas sans intérêt de relever que les contrats de licence litigieux sont intervenus alors que Claude C... avait quitté ses fonctions au sein de la société appelante ;

Considérant, encore, que contrairement à l'argumentation de la société appelante, les accords de licence conclus par la société BUDDE MUSIC, hors les territoires contractuellement fixés aux contrats d'artiste, en date des 30 mars 1983 et 31 mars 1986, consécutivement aux accords de coproduction en découlent, portent directement atteinte aux droits de la société LES PRODUCTIONS FEELING ;

Que, enfin, il y a lieu de souligner que, ainsi qu'en atteste Claude C..., et le démontrent les contrats produits aux débats, l'accord des coproducteurs n'était pas nécessaire pour la cession, par la société LES PRODUCTIONS FEELING à la société société SONY MUSIC ENTERTAINEMENT, des enregistrements consentis, dès lors que la société intimée disposait seule des droits sur les territoires autres que ceux expressément visés au contrat conclu avec l'artiste ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer, sur ce point, le jugement déféré ;

Considérant que, en réparation du préjudice qu'elle aurait subi en raison des manquements retenus, la société LES PRODUCTIONS FEELING sollicite la condamnation de la société BUDDE MUSIC à lui payer la somme de 377.074,71 euros ;

Considérant que, pour s'opposer à cette demande, la société BUDDE MUSIC soutient, sur le fondement des dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile, que cette prétention serait irrecevable comme étant nouvelle puisque, selon elle, non formulée devant le tribunal ;

Mais considérant que, selon les dispositions de l'article 566 du même Code, les parties peuvent aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises aux premiers juges et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ;

Or considérant qu'il résulte des écritures signifiées par la société LES PRODUCTIONS FEELING que celle-ci avait sollicité la réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi en raison du comportement de la société appelante, mais sans le chiffrer explicitement, de sorte que l'évaluation faite, au vu des pièces communiquées par la société appelante dans le cadre de la procédure d'appel, était virtuellement comprise dans lesdites écritures et que, à tout le moins, les dommages et intérêts tels qu'ils sont sollicités doivent être regardés, au sens du texte précité, comme la conséquence de la prétention initiale émise au titre des licences consenties hors territoires, de sorte que cette demande est recevable ;

Considérant qu'il s'ensuit que la société BUDDE MUSIC doit être condamnée à reverser à la société LES PRODUCTIONS FEELING l'intégralité des sommes perçues au titre des exploitations hors territoires contractuels pour lesquels la société intimée dispose seule des droits d'exploitation ;

Qu'il résulte des pièces produites par la société appelante que le montant des redevances indûment perçues par cette société ressort à la somme de 377.074,71 euros, suivant le décompte exactement reproduit par la société LES PRODUCTIONS FEELING, somme à laquelle il convient de condamner la société BUDDE MUSIC qui, au demeurant, ne la conteste pas expressément ;

* sur le paiement de redevances à la société LES PRODUCTIONS FEELING :

Considérant que la société BUDDE MUSIC conteste la condamnation prononcée à son encontre par le tribunal en paiement de la somme de 373.093,70 euros à la société LES PRODUCTIONS FEELING correspondant à sa part de coproduction sur l'exploitation des enregistrements, motif pris qu'elle aurait retenu cette somme en l'absence de paiement par la société intimée des redevances dont elle serait redevable à ses coproducteurs, au titre de l'exploitation des enregistrements de Céline E... en Amérique du Nord ;

Mais considérant que les premiers juges ont, à bon droit, retenu que la société appelante ne saurait valablement invoquer une exception d'inexécution dès lors que la créance dont elle entend se prévaloir n'est pas certaine et son quantum non défini ;

Que, en effet, s'il n'est pas contesté que la société BUDDE MUSIC est redevable envers la société intimée de la somme de 373.093,70 euros, correspondant à sa part de coproduction sur l'exploitation des enregistrements de Céline E... pour les années 1994 à 1999, force est de constater que cette société ne justifie pas être créancière de la société LES PRODUCTIONS FEELING dès lors que, d'une part, s'agissant des enregistrements relevant du contrat du 6 juillet 1982 ceux-ci ont été, le 26 mai 1994, cédés à la société SONY MUSIC ENTERTAINEMENT, la société appelante ayant perçu la rémunération qui lui était due en raison de cette cession, soit la somme de 11.250 dollars canadiens et que, d'autre part, s'agissant des enregistrements relevant du contrat de distribution du 21

mars 1986, la société BUDDE MUSIC ne produit aucune pièce probante quant à l'exploitation des enregistrements concernés sur le territoire du Canada et/ou des États-Unis ;

Qu'il convient de relever que l'attestation établie par Renata RESZETIN, gérante de la société BUDDE MUSIC, quant à la raison qui a présidé au versement de la somme précitée de 11.250 dollars canadiens, est démentie par celle émanant de Claude C..., ancien dirigeant de cette société à l'époque de ce règlement qui précise que cette cession était intervenue, même si cet accord n'était pas nécessaire, avec l'aval de l'ensemble des coproducteurs, qui avaient conscience que le développement de la carrière de Céline E... avec l'appui de SONY MUSIC, contribuerait à relancer en Europe notamment les ventes des anciens enregistrements, en ajoutant que l'ensemble des coproducteurs a profité pleinement de cette cession consentie sur le territoire des USA, le principal sacrifice étant fait par la société FEELING qui disposait des droits d'exploitation sur place ;

Qu'il convient, en conséquence, d'infirmer, sur ce point, le jugement déféré ordonnant à la société LES PRODUCTIONS FEELING la production, sous astreinte, du contrat intervenu avec la société SONY MUSIC ENTERTAINEMENT, ainsi que des relevés semestriels des comptes d'exploitation pour l'Amérique du Nord ;

Considérant, en revanche, que le jugement déféré mérite confirmation en ce qu'il a, en premier lieu, écarté le moyen tiré de l'exception d'inexécution dont entend se prévaloir la société appelante en raison du non-paiement des droits d'exploitation pour l'Amérique du Nord et, en second lieu, en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société intimée la somme de 373.093,70 euros ;

Que, en effet, il convient de relever que, d'une part, l'exception d'inexécution ne saurait être invoquée, ainsi que le soutient justement la société intimée, qu'au regard d'obligations nées d'une même convention, situation juridique qui fait défaut en l'espèce dès lors que les sommes dues par la société BUDDE MUSIC trouvent leur cause dans le mandat de gestion du catalogue phonographique qui lui a été confié par trois coproducteurs, sur les enregistrements de Céline E..., en application d'accords de coproduction de 1982, 1983 et 1986, alors que, selon cette société, l'inexécution imputée à la société LES PRODUCTIONS FEELING porterait sur l'absence de reddition de compte et paiement des redevances correspondantes, au titre de l'exploitation des enregistrements de cette même artiste sur le territoire d'Amérique du Nord, en vertu d'un contrat de distribution attribuant à la société intimée l'exploitation des enregistrements sur ce territoire ;

Qu'il convient d'observer que la société appelante n'est pas fondée à invoquer l'existence d'un groupe de contrats qui constituerait un ensemble unique et indivisible, motifs pris que les parties seraient les mêmes, l'objet des contrats porterait sur l'exploitation des enregistrements de Céline E... et que dans les deux cas il s'agirait de reddition de compte, dès lors que chacun des contrats invoqués définit l'objet, les termes et les obligations réciproques des parties, qui sont distincts entre le contrat de coproduction et le contrat de distribution ;

Que, en outre, il résulte de ce qui précède que la société BUDDE MUSIC ne justifie pas de l'existence d'une créance certaine liquide et exigible ;

* sur le détournement de redevances (D SHARP) :

Considérant que la société BUDDE MUSIC poursuit l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING, ainsi qu'à la société M PRODUCTIONS à l'égard de laquelle elle s'est désistée de son appel, la somme de 9.247,40 euros, chacune, avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2002, en raison de détournement de redevances correspondant aux prélèvements effectués au titre d'une commission versée à la société D SHARP ;

Mais considérant que les premiers juges ont, sur le fondement des dispositions des articles a-b-c sous 3o intitulé comptes, retenu avec pertinence que si la société appelante devait avoir recours à des tiers pour effectuer la mission de gestion du catalogue phonographique qui lui était confiée, elle seule devait en assumer les frais ;

Or considérant que, à l'évidence, les commissions versées à la société la société D SHARP n'entraient dans aucune catégorie de dépenses, mentionnées aux articles précités, pouvant être déduites par la société BUDDE MUSIC ;

Considérant qu'est inopérant l'argument développé devant la Cour par la société appelante selon lequel l'intervention de la société D SHARP aurait permis l'exploitation des enregistrements concernés dans de nouveaux pays, dès lors que, ainsi que précédemment rappelé, la commission versée à la société intervenante n'avait pas à être supportée par les producteurs, alors que, au surplus, les licences ayant donné lieu à la commission litigieuse concernent des pays hors territoires contractuels ; que l'argument relatif à l'absence d'objection de la part de la société intimée est tout aussi inopérant en l'absence de toute justification par la société BUDDE MUSIC d'avoir procédé, à l'époque concernée, à une quelconque reddition de compte ;

Qu'il convient donc de confirmer sur le principe le jugement déféré et de l'infirmer sur le montant de la condamnation prononcée qui, compte tenu de l'état récapitulatif établi par la société appelante, doit être portée à la somme de 10.444,94 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2002 ;

* sur la révocation de la société BUDDE MUSIC en qualité de gérante de la coproduction :

Considérant que la société BUDDE MUSIC conteste le jugement déféré en ce qu'il a constaté sa révocation en qualité de gérante de la coproduction à compter du 31 décembre 1997, désigné la société M PRODUCTIONS en ses lieu et place en cette qualité et l'a nommée en qualité d'administrateur provisoire pour une durée de 30 jours avec pour seule mission d'encaisser des redevances et payer les sommes correspondantes, au motif

que, d'une part, la révocation serait fautive et que, d'autre part, la société M PRODUCTIONS n'aurait pas les moyens pour assurer la gestion du catalogue phonographique ;

Mais considérant que la société LES PRODUCTIONS FEELING relève, avec pertinence, tout en sollicitant de la Cour sa désignation en qualité d'administrateur provisoire de la coproduction, que la société BUDDE MUSIC reconnaît la validité de la révocation de son mandat de gestionnaire à compter du 31 décembre 1997 qui, en tout état de cause, repose, contrairement à ce qu'elle soutient, sur des fautes de gestion qui sont caractérisées, en particulier par les licences consenties en violation des engagements contractuels, au présent arrêt, entraînant nécessairement la perte de confiance des autres coproducteurs, étant, en outre, relevé que la société appelante renonce dans ses dernières écritures à sa demande de dommages et intérêts pour révocation abusive de son mandant de gestion ;

Que, en tout de cause, la société BUDDE MUSIC sollicite dans ses dernières conclusions de lui donner acte que sa révocation, en qualité de gérant de la coproduction, a pris effet au 31 décembre 1997 ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer, sur ce point, le jugement déféré ainsi que la désignation de la société M PRODUCTIONS en qualité de gérant de la coproduction, dès lors que la société LES PRODUCTIONS FEELING n'est pas fondée, en l'état de la procédure, à solliciter l'infirmation du jugement déféré, et à sa désignation en lieu et place de la société M PRODUCTIONS, dès lors que cette dernière n'est plus partie à la procédure d'appel en raison du désistement d'instance de la société appelante à son encontre ;

* sur la violation des droits des producteurs :

Considérant que la société la société BUDDE MUSIC poursuit l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la signature, postérieurement à la révocation de son mandat de gestion, de contrats en vue de l'exploitation des enregistrements de Céline E... ; qu'elle fait valoir que la société M PRODUCTIONS n'aurait pris aucune espèce d'initiatives pour assurer la passation des pouvoirs et qu'elle a été amenée à poursuivre sa mission de gestion en raison de la carence de cette société alors qu'il était de l'intérêt de la coproduction de renouveler les contrats venus à terme, afin, comme l'y autoriserait l'article 815-3 du Code civil, d'assurer la conservation des biens indivis ; que, en outre, la société intimée ne démontrerait nullement avoir subi, du fait de la poursuite des opérations courantes d'administration, le moindre préjudice ;

Mais considérant, en premier lieu, que, d'abord, la société appelante reconnaît elle-même dans ses dernières écritures que la société M PRODUCTIONS avait adressé une lettre circulaire aux licenciés phonographiques, circonstance qui, contrairement aux allégations de la société BUDDE MUSIC, démontre la volonté de la société M PRODUCTIONS d'assurer le mandat de gestion des coproducteurs et que, ensuite, il résulte des pièces versées aux débats que, contrairement aux allégations de la société appelante, celle-ci n'a pas exclusivement procédé à des renouvellements de contrats mais également à la signature de nouveaux contrats, sans jamais en informer ses coproducteurs, étant précisé que, ainsi que précédemment relevé, un tel comportement à perdurer postérieurement au jugement déféré ; que, enfin, l'application des dispositions de l'article 815-2 précité implique l'accomplissement d'actes matériels ou juridiques ayant pour finalité de soustraire le bien indivis à un péril imminent sans compromettre sérieusement le droit des indivisaires, circonstance qui, en l'espèce, n'est pas démontrée s'agissant de l'exploitation des enregistrements, étant, au surplus, observé que la signature de nouveaux contrats ne saurait constituer une mesure conservatoire ;

Que, en second lieu, la société intimée a incontestablement subi un préjudice en raison des agissements précédemment retenus, en continuant à exercer les fonctions de gérant de la coproduction qui a été justement estimé par les premiers juges à la somme de 30.000 euros, ladite somme devant porter intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2002 ;

Que le jugement déféré mérite donc confirmation de ce chef ;

¤ les demandes reconventionnelles de la société LES PRODUCTIONS FEELING :

* sur l'absence de négociation des licences :

Considérant qu'il résulte des documents versés aux débats que, contrairement à l'appréciation portée par les premiers juges, la société LES PRODUCTIONS FEELING est fondée à faire grief à la société BUDDE MUSIC de ne pas avoir exploité la notoriété de Céline E... en concluant notamment avec des sociétés peu connues et/ou pour des taux de rémunération insuffisants ;

Que, en effet, il est manifeste que la société BUDDE MUSIC n'a pas eu une gestion adaptée à l'évolution de la notoriété mondiale incontestable de Céline E... en concluant des contrats sur des bases de redevances insuffisantes au regard de cette notoriété, de même que, contrairement aux usages et la pratique la plus courante, elle n'a jamais négocié un taux progressif en fonction de franchissement de pallier ; qu'ainsi, en 1994, époque à laquelle la notoriété de Céline E... était établie, la société SONY MUSIC a demandé à la société BUDDE MUSIC de prolonger pour cinq ans l'accord initial conclu en 1992, à des conditions identiques à celles négociées à une époque à laquelle Céline E... n'était qu'une jeune artiste, alors que la société gérante de la coproduction aurait dû procéder à une nouvelle négociation tant en ce qui concerne le taux de redevances que la mise en oeuvre de palliers en fonction des enregistrements vendus ; qu'il convient de relever la même carence quant au second renouvellement du contrat en 1999, dans des conditions strictement identiques, alors même que la notoriété de l'artiste était incontestablement devenue mondiale ;

Qu'il résulte des examens des contrats conclus par la société BUDDE MUSIC que ceux-ci n'ont fait l'objet d'aucune réelle négociation et donc d'un travail spécifique puisque ceux-ci sont quasiment identiques quel que soit le pays concerné, alors que la notoriété de Céline E... était nécessairement différente d'un pays à l'autre, de sorte qu'aucun travail d'adaptation des contrats aux conditions locales des marchés concernés n'a été effectué ;

Qu'il s'ensuit que la société LES PRODUCTIONS FEELING a incontestablement subi un préjudice en raison des manquements caractérisés de la société BUDDE MUSIC ; que, toutefois, il ne saurait être retenu pour apprécier le préjudice subi par cette société le décompte purement mathématique présenté, dès lors que ce préjudice revêt le caractère d'une perte de chance dans la mesure où il n'est pas établi que, dans le cadre de négociations, les licenciés auraient systématiquement accepté les taux de redevances et les palliers dont entend se prévaloir la société coproductrice ;

Qu'il convient, en conséquence, de fixer le préjudice subi par la société LES PRODUCTIONS FEELING, eu égard aux contrats conclus et aux éléments qui peuvent être raisonnablement retenus et eu égard à sa part de coproduction, à la somme de 300.000 euros ;

Qu'il s'ensuit que, sur ce point, le jugement déféré sera infirmé et la société BUDDE MUSIC condamnée au paiement de cette somme ;

* sur les manipulations comptables :

Considérant que la société LES PRODUCTIONS FEELING impute à la société BUDDE MUSIC des manipulations comptables fautives à savoir :

- d'avoir reçu une avance de la part d'un licencié et d'avoir reversé aux coproducteurs non le tiers mais l'équivalent du quart des redevances, ainsi que cela ressortirait de la comparaison des décomptes des licenciés et des décomptes établis à l'attention des coproducteurs,

- de s'être octroyée une trésorerie sur les sommes devant revenir à ses coproducteurs,

- de faire fictivement payer aux coproducteurs deux fois les redevances de l'artiste ; que le détournement s'élèverait, selon elle, au minimum à la somme de 20.882,42 euros ;

Considérant, force est de constater, que la société BUDDE MUSIC qui s'était engagée devant le tribunal à réajuster les comptes s'il s'avérait que les redevances de l'artiste avaient été retenues deux fois, n'a procédé à aucun réajustement des comptes et n'a justifié d'aucune vérification comptable à ce titre ;

Que, tout au contraire, il résulte de l'examen comparatif du tableau récapitulatif des redevances versées à chacun des coproducteurs et de la reddition de comptes, pour les années 1997 et 2004, des différences telles que mentionnées à la page 36 des dernières conclusions de la société LES PRODUCTIONS FEELING, de sorte qu'il sera fait droit à la demande de la société intimée ;

Qu'il s'ensuit que le jugement déféré sera infirmé de ce chef et la société BUDDE MUSIC condamnée à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 10.441,21 euros, avec intérêts au taux légal ;

* sur les autres demandes :

Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que la société BUDDE MUSIC sera, d'une part, déboutée de l'ensemble de ses demandes et que, d'autre part, elle ne saurait bénéficier des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que, en revanche, l'équité commande de la condamner, sur ce fondement, à verser à la société LES PRODUCTIONS FEELING une indemnité de 15.000 euros ;

PAR CES MOTIFS

Confirme, dans les limites de l'appel, le jugement déféré, sauf en ce qui concerne les fautes de gestion de la société BUDDE MUSIC, le montant des détournements de redevances, des communications ordonnées sous astreinte et des manipulations comptables,

Et, statuant à nouveau,

Donne acte à la société BUDDE MUSIC de ce qu'elle se désiste de sa demande de paiement de dommages et intérêts pour révocation fautive de la gérance de la coproduction,

Condamne la société BUDDE MUSIC à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 377.074,41 euros au titre de l'exploitation des enregistrements concernant des territoires non contractuellement prévus,

Dit que la société BUDDE MUSIC a commis une faute entraînant sa responsabilité en poursuivant les actes de gestion postérieurement à la fin de son mandat le 31 décembre 1997 et la condamne à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING une indemnité de 300.000 euros, avec intérêt au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance,

Condamne la société BUDDE MUSIC à payer à la société LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 10,444,94 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2002, au titre du détournement de redevances,

Dit que la société BUDDE MUSIC a commis des manipulations comptables et la condamne à reverser à la société LES PRODUCTIONS FEELING la somme de 10.441,21 euros, avec intérêts au taux légal,

Condamne la société BUDDE MUSIC à verser à la société LES PRODUCTIONS FEELING une indemnité de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société BUDDE MUSIC aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0165
Numéro d'arrêt : 06/17875
Date de la décision : 14/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 19 novembre 2002


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-05-14;06.17875 ?
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