Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
1ère Chambre - Section D
ARRET DU 09 AVRIL 2008
(no 61 , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/20038
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2007 du Tribunal de Commerce de PARIS ( 4ème chambre)- RG no 2007/10465
DEMANDEUR
SNC VALAVIA représentée par son gérant
Espace Chancel Valsud
83160 LA VALETTE DU VAR
représentée par Me Jean-Jacques LE PEN, avocat au barreau de PARIS, toque : K 114
DEFENDEUR
Société CESSNA AIRCRAFT COMPANY
One Cessna Blvd
Whichita
KANSAS 67209 ETATS-UNIS
représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour,
assistée de Me Catherine PEULVE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1575
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 Mars 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Paul BETCH, Président (MAS)
Madame Marie KERMINA, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre MARCUS, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Paul BETCH, Président (MAS) et par Mlle Véronique COUVET, Greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
La SNC VALAVIA a formé, le 29 novembre 2007, un contredit motivé contre la décision rendue le 15 novembre 2007 par le Tribunal de Commerce de Paris qui d'une part a ordonné la jonction de différentes instances suivies entre les SAS CESSNA CITATION EUROPEAN SERVICE CENTER, la SNC VALAVIA, M. Y... et la SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE PORTE, d'autre part rejeté la demande de jonction de l'instance introduite entre la SNC VALAVIA et la Société américaine CESSNA AIRCRAFT COMPAGNY, dit alors l'exception d'incompétence soulevée par celle-ci recevable et renvoyé ces deux parties, seulement, à mieux se pourvoir.
Elle retient essentiellement, dans leurs rapports, qu'elle exploite un aéronef fabriqué par la société américaine CESSNA, appareil dont la maintenance a été confiée à la société CESSNA CITATION EUROPEAN SERVICE CENTER dont le siège est au Bourget et avec laquelle elle est aujourd'hui en litige sur les opérations ainsi accomplies sur l'avion.
Elle prétend qu'aux termes d'un rapport d'expertise judiciaire déposé, la responsabilité de la SOCIÉTÉ CESSNA AIRCRAFT COMPAGNY est engagée pour les préjudices subis de sorte qu'elle est fondée, par application des dispositions des articles 14, 325 et 333 du code de procédure civile, à en rechercher la reconnaissance par sa mise en cause lors de demandes originaires formées contre le prestataire de services domicilié au Bourget. Elle affirme, sur ce point, qu'elle n'a pas renoncé au privilège de juridiction édicté par l'article 14 du code civil et qu'il convient de déclarer fondé son contredit, renvoyer la connaissance de leurs rapports au Tribunal de Commerce de Paris, ce, avec attribution d'une somme de 10.000€ pour frais irrépétibles.
La société de droit américain CESSNA souligne que les dispositions de l'article 14 du code civil ne peuvent pas être invoquées dès lors que la SNC VALAVIA a renoncé, sans équivoque, à s'en prévaloir durant le déroulement des opérations d'expertise et, qu'en tout état de cause, aucune convention ne lie ces deux sociétés. Elle ajoute que rien dans les transferts successifs de garantie dont la SNC VALAVIA entend se prévaloir ne permet de retenir ni la compétence entre elles du Tribunal de Commerce de Paris et pas davantage l'application au litige du droit français, litige qui se rattache essentiellement par sa nature, son objet et l'immatriculation même de l'avion aux Etats Unis.
Elle dénonce encore la présentation délibérément donnée du litige qui oppose la SNC VALAVIA à son prestataire de service, la société CESSNA CITATION EUROPEAN SERVICE CENTER, la spécificité de celui-ci et critique son extension retenue, artificiellement organisée au constructeur de l'appareil pour rejeter, dans leurs rapports, la possibilité d'une application des dispositions des articles 42, 331, 333 du code de procédure civile.
Elle conclut donc au rejet du contredit mais avec allocation d'une somme de 10.000€ pour frais irrépétibles.
Les observations orales que les parties ont présentées à l'audience sont celles qu'elles ont, pour la SNC VALAVIA énoncées à l'appui du contredit et pour la société de droit américain CESSNA reprises par les écritures déposées à cette audience et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé de leurs argumentations respectives.
A l'audience il a été demandé aux parties de présenter leurs observations sur l'absence de recours contre une mesure d'administration judiciaire soit le refus de jonction prononcé par le jugement déféré (article 368 et 537 du code de procédure civile).
CELA EXPOSE
Considérant que la décision de rejet de la jonction de l'instance introduite par la SNC VALAVIA, dans ses rapports avec la société américaine CESSNA, avec celles intentées par le prestataire de services de la SNC VALAVIA lui-même domicilié au BOURGET, n'est, par application des dispositions des articles 367, 368 et 537 du code de procédure civile pas susceptible de recours ;
Considérant que la Cour ne se trouve donc saisie que la désignation de la juridiction devant connaître du seul litige opposant la SNC VALAVIA à la société américaine CESSNA ;
Considérant qu'il s'agit, sur demande en paiement de factures de prestations d'entretien de l'avion formée par la société CESSNA CITATION EUROPEAN SERVICE CENTER, domiciliée au Bourget, d'une demande en garantie pour vices cachés, alors intentée par la SNC VALAVIA, contre le fabriquant de l'appareil, la société américaine CESSNA ;
Considérant que si la SNC VALAVIA invoque la responsabilité de la société CESSNA, société de droit américain domiciliée au Etats Unis, force reste de constater que les deux parties ne sont pas liées par un contrat conclu ou signé entre elles ; Que les transferts successifs de garanties du constructeur afférentes à l'avion litigieux, transferts dont la SNC VALAVIA entend se prévaloir, n'emportent pas, à eux seuls, désignation convenue, entre la SNC VALAVIA et la société américaine CESSNA à laquelle ils sont opposés, du Tribunal de Commerce de Paris comme juridiction compétente pour connaître, entre elles, de la présente affaire ;
Considérant qu'ainsi la SNC VALAVIA ne se trouve donc que la cessionnaire d'une éventuelle créance de garantie pour vices cachés mais non la créancière d'une obligation directement contractée envers elle par la société américaine CESSNA ;
Considérant que rien ne permet d'établir, par ailleurs, que la société WELLS FARGO qui a consenti à la SNC VALAVIA un contrat d'exploitation de l'avion, bénéficie, dans ses rapports avec la société CESSNA, d'une attribution de juridiction au Tribunal de Commerce de Paris ;
Considérant que durant le déroulement de l'expertise de l'appareil expertise dont il n'est pas établi qu'elle soit opposable à la société américaine CESSNA, la SNC VALAVIA a annoncé à l'expert qu'elle intenterait une action aux Etats Unis contre le constructeur Cessna pour avoir posé un train... au lieu de ... comme noté dans la documentation (page 33 du rapport) ;
Considérant que cette déclaration, opérée lors d'une expertise judiciairement ordonnée, vaut renonciation sans équivoque, renonciation elle-même licite et en l'espèce exercée, au privilège prévu par l'article 14 du code civil de sorte que l'intégralité de l'argumentation développée par la SNC VALAVIA au titre de cet article devient inopérante et ce alors surtout que le fabriquant de l'avion est de nationalité américaine, que son propriétaire actuel l'est aussi, que l'avion lui-même qui y est immatriculé, que sa livraison à son propriétaire initial a eu lieu là, que la loi applicable au litige serait celle de l'Etat du Kansas et que, pour ces motifs, l'existence de liens de rattachement caractérisés du litige avec la France n'est pas démontrée ;
Considérant que, comme déjà relevé, la décision de rejet de la jonction des instances n'est pas susceptible de recours ; Qu'en tout état de cause, la SNC VALAVIA n'a en l'espèce, fait assigner la société CESSNA que par acte du 6 février 2007, soit alors que les demandes présentées à l'encontre de la société CESSNA CITATION EUROPEAN SERVICE CENTER n'étaient pas encore formées puisqu'elles ne l'ont été que le 5 avril 2007 ;
Considérant qu'il ne peut donc pas être valablement soutenu que les demandes présentées par la SNC VALAVIA contre la société américaine CESSNA n'ont été que des demandes en intervention forcée dans une instance déjà existante entre d'autres parties originaires ; Que ces demandes s'analysent donc, par leur nature et leur objet, comme les éléments d'une action autonome intentée contre le constructeur ;
Considérant que les deux litiges sont distincts et sans lien de connexité entre eux ; Qu'ils n'entraînent aucun risque de contrariété de décisions puisque l'un a pour objet le paiement de prestations accomplies, l'autre une responsabilité du constructeur recherchée pour vices cachés et que les décisions attendues sur ces deux litiges répondent à des questions restant différentes ;
Considérant, par ailleurs, que les dispositions de l'article 333 du code de procédure civile ne sont pas applicables en matière internationale ;
Considérant que, pour ces motifs, l'intégralité de l'argumentation développée par la SNC VALAVIA reste inopérante et qu'il convient de rejeter le contredit ;
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Rejette le contredit ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse les frais du contredit à la charge de la SNC VALAVIA ;
LE GREFFIER LE PRESIDENT