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19/03/2008 | FRANCE | N°06/08657

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0149, 19 mars 2008, 06/08657


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 19 MARS 2008

(no , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/08657

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Mars 2006 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 05/77284

APPELANT

Monsieur Henri X...

...

75016 PARIS

représenté par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avoués à la Cour

assisté de Me Yvon THIANT, avocat au barreau

de PARIS, toque : D142

INTIMÉE

La Société RASAR HOLDING NV

ayant son siège social Willemstad Curaçao Antilles Néerlandaises

MEES PIERSON INTE...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 19 MARS 2008

(no , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/08657

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Mars 2006 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 05/77284

APPELANT

Monsieur Henri X...

...

75016 PARIS

représenté par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avoués à la Cour

assisté de Me Yvon THIANT, avocat au barreau de PARIS, toque : D142

INTIMÉE

La Société RASAR HOLDING NV

ayant son siège social Willemstad Curaçao Antilles Néerlandaises

MEES PIERSON INTERTRUST - RASAR HOLDING BERG ARRARAT 1

BP 3889

CURACAO (ANTILLES NEERLANDAISES)

représentée par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour

ayant pour avocat Christiane Me ARON-LEFEVRE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Février 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Marcel FOULON, Président

Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Melle Delphine LIEVEN

ARRÊT :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur Marcel FOULON, Président

- signé par Monsieur Marcel FOULON, président et par Melle Delphine LIEVEN, greffier présent lors du prononcé.

*

FAITS CONSTANTS :

Suivant convention de partenariat des 8 mars et 13 juin 2002, M. X... a accepté de collaborer avec la société RASAR HOLDING NV (société RASAR) et/ou ses sociétés licenciées et/ou sous-licenciées dans le domaine de la « matière active » et des technologies « plasmotroniques » pour une durée de 20 ans en « effectuant les futurs dépôts de propriété intellectuelle au nom de la société RASAR HOLDING » moyennant le paiement de redevances, une prime de cession de droits de propriété intellectuelle et un pourcentage des revenus en licence.

Faisant grief à la société RASAR de ne pas avoir payé les redevances depuis le mois d'août 2005, M. X... l'a assignée, ainsi que sa licenciée dans le domaine « plasma », la société ASKAIR TECHNOLOGIES AG (société ASKAIR), non intimée, en paiement d'une provision de 3 109 980 euros représentant les redevances dues jusqu'en juin 2022, terme du contrat.

Par ordonnance réputée contradictoire du 8 mars 2006, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :

- rejeté les exceptions d'incompétence territoriale et d'attribution, et s'est déclaré compétent,

- dit n'y avoir lieu à référé ni à application de l'article 700 du CPC,

- laissé les dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, à la charge de M. X....

M. X... a interjeté appel de cette décision le 11 mai 2006.

Par arrêt contradictoire du 19 septembre 2007, la cour d'appel de Paris, après avoir relevé que la société RASAR soulevait l'incompétence du juge français au profit de la juridiction des Antilles Néerlandaises où elle a son siège social, en se prévalant des dispositions de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, tandis que M. X... concluait à la compétence du juge français en application de l'article 5 de ladite Convention en soutenant que son activité se déroule en France, a jugé :

« Considérant que dès lors que les parties sont domiciliées sur le territoires d'Etats contractants, le litige qui les oppose se trouve soumis, en ce qui concerne la compétence, aux dispositions du Règlement CE n 44.2001 du 22 décembre 2000 qui s'est substitué à la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, dont l'article 3 exclut l'application des règles de compétence nationale figurant à l'annexe I, à savoir, en France, les articles 14 et 15 du code civil ;

« Qu'aux termes de l'article 5 a) du Règlement, une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre, en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée ;

« Qu'en l'espèce, s'agissant d'une demande en paiement d'une provision, l'obligation qui sert de base à la demande n'est pas l'obligation de M. X... de fournir une prestation mais celle contractée par RASAR de verser une redevance mensuelle à M. X... ; qu'il est nécessaire, pour savoir où cette obligation doit s'exécuter, de déterminer, selon les règles de conflit de la juridiction saisie, la loi applicable au contrat liant les parties, qui ne le précise pas, seul le protocole signé le 3 février 2005 pour mettre fin à un différend antérieur étant expressément soumis au droit français aux termes de son article 7 ; »

La cour a, en conséquence, ordonné la réouverture des débats à l'audience du 21 novembre 2007 afin de recueillir les explications des parties sur les questions suivantes :

« - la loi qui régit l'obligation litigieuse est-elle la loi française ? La loi néerlandaise ? Une autre loi ?

« - comment doit-elle être déterminée ? Par la Convention de Rome du 19 juin 1980 ? Par un autre moyen, et si oui, lequel ?

« - quelles sont les dispositions de la loi applicable, ainsi déterminée, quant au lieu du paiement, quérable ou portable (article 1247 du code civil si la loi française est applicable) ? » .

A l'audience du 21 novembre 2007, l'affaire a été renvoyée au 19 février 2008.

PRETENTIONS ET MOYENS DE M. X... :

Par dernières conclusions du 17 janvier 2008, auxquelles il convient de se reporter, M. X... fait valoir :

- que la compétence du juge français doit être retenue à raison de la loi qui régit l'obligation litigieuse, pour les motifs suivants :

- que l'article 2 alinéa 4 de la Convention de Rome de 1980, en raison de ce que les deux contrats sont conclus en langue française uniquement, de même que les brevets, qui sont déposés à l'INPI, organisme français, et que la prestation principale a lieu en France,

- que l'article 31 du règlement CE n 44.2001 du 22 décembre 2000 permet de prendre des mesures provisoires, nonobstant la compétence des juridictions du fond d'un autre Etat membre,

- que le lieu de paiement est en France, sur son compte à Paris de M. X..., étant observé que RASAR ne l'a jamais directement réglé ; c'est ASKAIR qui assure les règlements, et il a reçu, le 9 septembre 2007, un règlement de M. B..., directeur de RASAR, lequel a une résidence en France,

- que cette analyse est confortée par un arrêt de la Cour de cassation (Civ. 1è du 22 février 2005) à propos d'un paiement par virement « swift»,

- qu'en outre, la compétence du juge français doit être retenue en raison de l'acquiescement de la société RASAR à cette compétence, résultant de ce que RASAR prétend qu'il sollicite la résiliation du contrat et conclut à l'incompétence du tribunal de commerce au profit du tribunal de grande instance de Paris.

Il demande :

- l'infirmation partielle de l'ordonnance,

- le rejet de toutes les demandes, fins et conclusions de la société RASAR,

- la condamnation de RASAR à lui payer une provision de 3 109 980 euros au titre de l'exécution du contrat, avec intérêts de droit et anatocisme et ce, à compter de l'assignation,

- 300 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- la condamnation de la société RASAR aux entiers dépens, qui seront recouvrés par la SCP BAUFUME GALLAND VIGNES, Avoué, dans les conditions de l'article 699 du CPC.

PRETENTIONS ET MOYENS DE LA SOCIETE RASAR :

Par dernières conclusions du 16 novembre 2007, auxquelles il convient de se reporter,

la société RASAR fait valoir :

- que le président du tribunal de commerce statuant en la forme des référés ayant statué dans une même décision à la fois sur sa compétence et sur le fond du référé, sa décision ne peut, en application de l'article 78 du CPC, être attaquée que par la voie de l'appel et non du contredit, de sorte qu'elle a formé appel incident,

- que le juge français n'est pas compétent, eu égard à l'obligation objet de la convention, que celle-ci a été conclue à l'étranger, et n'est pas conclue entre deux personnes de nationalité française, elle ne comporte aucun élément de rattachement à la France, aucune disposition du contrat n'attribue de juridiction aux tribunaux français, et M. X... n'apporte pas la preuve que, conformément à l'article 5 de la Convention de Bruxelles, l'obligation spécifique du contrat doive être exécutée en France, toutes les pièces qu'il produit concernant ASKAIR, qui n'est pas dans la cause, et non RASAR seul cocontractant de M. X...,

- que le juge français n'est pas non plus compétent eu égard à l'obligation de paiement, car le contrat ne détermine pas le lieu de règlement des redevances, que « la prestation spécifique du contrat » devant permettre de définir la loi applicable à défaut de choix, est la collaboration que doit fournir M. X... qui a sa résidence habituelle en France au moment de la conclusion du contrat, de sorte que le lieu de paiement sera déterminé par la loi française,

- que la loi française considère que le paiement est quérable en application de l'article 1247 al. 3 du code civil, que M. X... produit des règlements d'ASKAIR effectués sur indication de sa part, pratique de mandat ponctuel, courante dans le monde des affaires, qui, en raison de son caractère ponctuel et exceptionnel, n'emporte pas reprise de ses obligations par ASKAIR et ne saurait déterminer le lieu tant matériel que juridique du règlement dû,

- que le règlement allégué, de M. C..., effectué pour une cause personnelle, est étranger au présent litige,

- qu'étant le débiteur et ayant son siège est aux Antilles Néerlandaises, le juge français est incompétent,

- subsidiairement, que si le juge français devait être compétent, s'agissant d'une demande de provision portant en réalité sur les conséquences de la rupture du contrat, et concernant des redevances au titre de brevets, seul le tribunal de grande instance de Paris serait compétent, en application de l'article L. 615-17 du code de la propriété intellectuelle,

- plus subsidiairement, que le juge des référés ne serait pas compétent pour prononcer la résiliation du contrat,

- « de façon particulièrement subsidiaire », que l'ordonnance entreprise a considéré à bon droit qu'il n'y avait pas lieu à référé en raison d'une contestation sérieuse sur l'existence de l'obligation et de l'inexistence d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite du fait de RASAR.

Elle demande :

- de dire valable et bien fondé son appel incident,

- à titre principal, dire le juge français incompétent et renvoyer M. X... à saisir les juridictions des Antilles Néerlandaises,

- à titre subsidiaire, dire incompétent le tribunal de commerce de Paris et renvoyer M. X... à saisir le tribunal de grande instance de Paris,

- à titre plus subsidiaire, dire incompétent le juge des référés,

- à titre particulièrement subsidiaire, confirmer la décision en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé,

- à titre infiniment subsidiaire, rejeter toutes les demandes de M. X...,

- condamner ce dernier à 10 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- le condamner aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par la SCP GUIZARD selon l'article 699 du CPC.

SUR QUOI, LA COUR

Qu'en réponse aux questions qui leur ont été posées par la cour dans son arrêt du 19 septembre 2007, les parties s'accordent à dire que la loi qui régit l'obligation litigieuse, à savoir l'obligation qu'a RASAR de payer une redevance, qui doit déterminer la compétence du juge, est la loi française ;

Que l'article 1247, alinéa 3, du code civil, dispose que « le payement doit être fait au domicile du débiteur » ; que les parties peuvent convenir d'écarter cette règle ou le débiteur renoncer à se prévaloir du caractère quérable du paiement ;

Que M. X... produit deux avis de crédit sur son compte, du 07/09/07 et 09/11/07 émanant de M. C..., lesquels ne prouvent pas que ces paiements, ponctuels, ont été faits au nom et pour le compte de la société RASAR en exécution du contrat de partenariat liant les parties ;

Que les avis de crédit « d'ordre d'ASKAIR » du 23/02/05, 18/04/05, 27/05/05, 05/07/05 et 09/08/05, à qui la société RASAR admet avoir donné un mandat ponctuel de paiement, sont insuffisants à démontrer la volonté commune des parties d'écarter la règle du texte précité ou la renonciation non équivoque par la société RASAR à cette disposition, alors que M. X... a fait grief à la société RASAR de ne pas avoir payé les redevances dues depuis le mois d'août 2005, au titre du contrat du 8 mars 2002 et qu'il ne fournit aucun élément sur le lieu de paiement des redevances durant les trois années et demi durant lesquelles le contrat aurait été régulièrement exécuté ;

Qu'en concluant, à titre subsidiaire, à la compétence du tribunal de grande instance de Paris au lieu du tribunal de commerce, la société RASAR ne peut être tenue pour avoir acquiescé à la compétence du juge français ;

Qu'ainsi, le lieu de paiement étant, en application de la loi française, celui du siège social de la société RASAR, situé aux Antilles Néerlandaises, il convient de dire le juge français incompétent et d'infirmer l'ordonnance entreprise ;

Qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société RASAR les frais irrépétibles qu'elle a exposés en appel ; qu'il y a lieu de condamner M. X... à lui payer la somme de 2000 euros à ce titre ;

Que M. X..., qui succombe, devra supporter la charge des dépens d'appel, qui pourront être recouvrés selon l'article 699 du CPC ;

PAR CES MOTIFS :

Déclare la société RASAR HOLDING NV recevable en son appel incident,

Infirme l'ordonnance, sauf en ce qu'elle a laissé les dépens (dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 18, 73 euros TTC), à la charge de M. X...,

Satuant à nouveau :

Dit le juge français incompétent,

Renvoie M. X... à mieux se pourvoir,

Y Ajoutant :

Condamne M. X... à payer à la société RASAR HOLDING NV la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

Condamne M. X... aux dépens d'appel, qui seront recouvrés , conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0149
Numéro d'arrêt : 06/08657
Date de la décision : 19/03/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 08 mars 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-03-19;06.08657 ?
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