La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/03/2008 | FRANCE | N°06/09823

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0139, 06 mars 2008, 06/09823


22ème Chambre C
Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 09823
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 avril 2006 par le conseil de prud'hommes de Bobigny-section industrie-RG no 05 / 01273

APPELANTE SA PROPHIL 6 rue Isaac Newton ZI du Coudray 93155 LE BLANC MESNIL représentée par Me Véronique LEMERCIER HENNON, avocat au barreau de PARIS, toque : K 97

INTIMEE Madame Zohra X...... 93150 LE BLANC MESNIL comparante en personne, assistée par Me Lionel PARIENTE, avocat au barreau de PARIS, toque : B 372 substitué par Me Olivier GADY, avoca

t au barreau de PARIS,

PARTIE INTERVENANTE : ASSEDIC EST FRANCILIEN Unite d'ap...

22ème Chambre C
Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 09823
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 avril 2006 par le conseil de prud'hommes de Bobigny-section industrie-RG no 05 / 01273

APPELANTE SA PROPHIL 6 rue Isaac Newton ZI du Coudray 93155 LE BLANC MESNIL représentée par Me Véronique LEMERCIER HENNON, avocat au barreau de PARIS, toque : K 97

INTIMEE Madame Zohra X...... 93150 LE BLANC MESNIL comparante en personne, assistée par Me Lionel PARIENTE, avocat au barreau de PARIS, toque : B 372 substitué par Me Olivier GADY, avocat au barreau de PARIS,

PARTIE INTERVENANTE : ASSEDIC EST FRANCILIEN Unite d'appui-Service Contentieux 59 / 65 rue Victor Hugo 93177 BAGNOLET CEDEX, représenté par Me Véronique DAGONET, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC003

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 janvier 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Evelyne GIL, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président Madame Françoise CHANDELON, conseiller Madame Evelyne GIL, conseiller

Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats

ARRET :

-CONTRADICTOIRE-prononcé publiquement par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président-signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.

Vu l'appel régulièrement formé par la SA PROPHIL contre un jugement du Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY en date du 3 avril 2006 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancienne employée, Zohra X....

Vu le jugement déféré ayant :-dit le licenciement de Zohra X... dépourvu de cause réelle et sérieuse,-condamné la SA PROPHIL à payer à Zohra X... les sommes de 15 931 € à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 4 500 € à titre d'indemnité pour non-respect des critères d'ordre des licenciements, 800 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, avec, sur les créances de nature salariale, intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 26 avril 2005, et sur les créances à caractère indemnitaire, intérêts à compter du jugement,-débouté Zohra X... du surplus de ses demandes,-condamné la SA PROPHIL aux dépens.
Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

La SA PROPHIL, appelante, poursuit :-l'infirmation du jugement entrepris,-la constatation du bien-fondé du licenciement intervenu le 18 février 2005,-la constatation du respect des critères d'ordre du licenciement,-le débouté de Zohra X... de l'ensemble de ses demandes,-sa condamnation à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Zohra X..., intimée, conclut à :-la confirmation du jugement,-la condamnation de la SA PROPHIL à lui payer les sommes de : 19 117, 68 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 3 716, 55 € en règlement des heures supplémentaires de janvier 2003 à mars 2005, 371, 65 € à titre de congés payés sur heures supplémentaires, subsidiairement, 9 558, 84 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l'ordre des licenciements, en tout état de cause, 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en sus des entiers dépens.

L'ASSEDIC de l'Est francilien, intervenante volontaire, demande :-la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,-la condamnation de la SA PROPHIL à lui verser les sommes de : 5 042, 40 € en remboursement des allocations chômage versées à la salariée, 500 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en sus des entiers dépens.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La SA PROPHIL a pour activité l'importation de textile et la fabrication de prêt-à-porter destiné à la grande distribution.
Elle employait 24 salariés et applique la Convention Collective de l'industrie de l'Habillement.
Aux termes d'une convention de formation professionnelle en date du 21 décembre 1999, elle a embauché Zohra X... en vue de sa préparation en alternance à la qualification de " modéliste série " pour une durée de 24 mois du 15 décembre 1999 au 14 décembre 2001.
Suivant lettre valant contrat de travail à durée indéterminée signée le 17 décembre 2001, elle l'a engagée en qualité d'aide modéliste moyennant une rémunération brute mensuelle de 1 445, 46 € pour un horaire hebdomadaire de travail de 38 heures 30.
Le 2 février 2005, elle l'a convoquée à se présenter le 9 février 2005 pour un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement pour raisons économiques.
Le 18 février 2005, elle lui a notifié son licenciement dans les termes suivants :
"..... votre contrat est rompu pour le motif économique suivant :
-Nos principaux clients se tournent vers leurs bureaux en Asie pour effectuer leurs achats-Ceci entraîne un fort ralentissement de l'activité économique-Notre chiffre d'affaires a fortement diminué ces derniers mois (27 %)-Nos carnets de commandes à court et moyen terme confirment cette tendance-Nous n'avons pour l'instant pas d'espoir d'amélioration de cette situation-Nous sommes donc obligés de réorganiser tous nos services-La petite taille de notre structure ne nous permet pas de vous reclasser au sein de l'entreprise

Votre licenciement prendra effet à la fin de votre période de préavis d'une durée de deux mois dont le délai court à compter de la première présentation de la présente lettre à votre domicile.
Nous vous confirmons par ailleurs notre proposition de bénéficier, pendant votre préavis d'une convention de PRE-PARE. Vous disposez d'un délai de huit jours à compter de la présente notification pour nous faire connaître votre position à ce sujet.

De même, si vous décidez d'opter pour ce PRE-PARE, vous devrez dans le délai de huit jours sus indiqué, vous présenter à l'ASSEDIC avec tous les documents nécessaires à l'enregistrement de votre dossier.
L'absence de réponse dans ce délai équivaudrait à un refus du PRE-PARE.

Vous bénéficiez d'une priorité de réembauchage pendant un an à condition de manifester votre désir d'user de cette priorité dans un délai d'un an compter de l'expiration de votre contrat de travail.

Au terme de votre contrat, nous tiendrons à votre disposition votre certificat de travail et votre solde de tout compte. Vous bénéficiez de deux heures par jour pour rechercher un nouvel emploi. À défaut d'accord de votre part, elles seront prises alternativement à notre convenance puis à la vôtre. "

La SA PROPHIL soutient :-qu'en raison de la baisse alarmante de son chiffre d'affaires, due notamment à la concurrence des produits importés du Sud-Est asiatique proposés à sa clientèle à des prix de plus en plus compétitifs, elle avait dû envisager, au début de l'année 2005, afin d'assurer sa survie, de se réorganiser en réduisant sensiblement sa masse salariale,-qu'ainsi, cinq procédures de licenciement pour motif économique sont intervenues sur la même période au sein des divers services de l'entreprise,-que ses difficultés économiques sont réelles, ses principaux clients étant de grandes surfaces telles que CARREFOUR qui ne lui passent plus de commandes à long terme,-que son chiffre d'affaires et ses résultats ont baissé substantiellement en 2002, 2003 et 2004,-que la petite taille de la société ne permettait pas d'envisager le reclassement de Zohra X... notamment au sein de sa filiale JESSIGARY qui, ayant cédé son fonds de commerce en mars 2004, était en sommeil, n'avait aucune activité et n'employait aucun salarié,-que l'ordre des licenciements a été respecté,-que seule parmi les modélistes, Léna Z... avait une ancienneté inférieure à celle de Zohra X... mais, à la différence de celle-ci, elle est une modéliste confirmée, formatrice sur PAD systèmes, bénéficiant donc de la priorité selon les critères retenus pour l'ordre des licenciements,-qu'en tout état de cause, les dommages et intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements ne peuvent se cumuler avec les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-que depuis le passage aux 35 heures, les heures majorées au taux de 25 % figurent sur les bulletins de salaire,-que Zohra X... qui n'a pas travaillé plus de 37, 5 heures par semaine, soit 162, 50 heures par mois, n'a jamais rien réclamé à ce titre.

Zohra X... fait valoir :-qu'en réalité, elle occupait un poste de " patronnière gradueuse ",-que depuis 2003, l'employeur utilisait une méthode de calcul des salaires qui n'aboutissait pas à la comptabilisation d'un salaire de base de 1 542, 20 € majoré de 10, 83 heures au taux horaire de 11, 66 €,-que de janvier 2003 à mars 2005, il lui était dû à ce titre 3 716, 55 € ainsi que 371, 65 € pour les congés payés correspondants,-que la seule baisse du chiffre d'affaires et des bénéfices ne suffit pas à établir la réalité des difficultés économiques alléguées par l'employeur,-que le lien entre ces difficultés et la suppression de son poste n'est pas démontré,-qu'aucune tentative n'a été menée en vue de son reclassement,-qu'elle maîtrisait le logiciel " PAD-Système " et avait formé sa collègue Léna dont l'ancienneté était moindre,-que sa compétence et sa polyvalence justifiaient qu'elle fût maintenue en poste,-que l'ordre des licenciements n'a donc pas été respecté.

L'ASSEDIC de l'Est francilien renouvelle sa demande de remboursement des allocations chômage versées à Zohra X....

SUR CE :

-Sur le licenciement et ses conséquences
La lettre de licenciement adressée à Zohra X... mentionne les difficultés économiques de la société PROPHIL et l'obligation dans laquelle elle se trouve de réorganiser ses services.
L'examen de ses comptes de résultats du 30 septembre 2003 au 30 septembre 2005 montre une diminution du bénéfice de 911 082 € en 2003 à 597 319 € en 2004 et à 159 757 € en 2005. Parallèlement, le montant des commandes reçues au 18 février 2005, qui se chiffraient à 945 338, 09 €, en nette diminution par rapport au montant des commandes reçues au 18 février 2004 qui totalisaient 1 174 382, 85 €, et la perte de commandes provenant de clients importants tels que GALEC-LECLERC, SYSTEME U et DAXON, ne laissaient pas espérer une amélioration prochaine de la situation de l'entreprise.
À la date du licenciement de Zohra X..., non seulement les difficultés économiques étaient réelles mais l'évolution ultérieure prévisible justifiait la réorganisation des services et la diminution de la masse salariale mises en oeuvre par la société pour sauvegarder sa compétitivité alors que la concurrence des produits importés à bas prix constituait une menace manifeste pour son activité de fabrication de prêt-à-porter destiné à la grande distribution.
C'est dans ces circonstances qu'ont été supprimés, outre le poste de femme de ménage, un poste de coupeur, un poste d'assistante du service échantillon, un poste de mécanicienne modèles et le poste d'aide modéliste de Zohra X....
L'examen du registre du personnel de la société montre qu'en 2005, le poste d'aide modéliste n'a pas été remplacé.
L'organigramme de la société PROPHIL au 31 décembre 2004, les bilans et les comptes de sa filiale JESSIGARY ainsi que l'attestation de Monsieur Pierre Y..., expert-comptable, selon laquelle cette SARL, créée en 1995 pour exploiter un magasin à PARIS, sans relation commerciale avec la SA PROPHIL, avait été mise en sommeil après la cession de son fonds de commerce en mars 2004, rapportent la preuve qu'aucun reclassement de Zohra X... n'était possible au sein de la société PROPHIL ou de sa filiale.
Zohra X... qui occupait le seul poste d'aide modéliste de la société ne justifie pas la qualification de " patronnière gradueuse " qu'elle prétend avoir.
La société PROPHIL employait deux autres modélistes : Amel MEDJDOUB CHERFAOUI et Alain ANDRIANONIVEL ainsi qu'une modéliste gradueuse, Léna Z....
Cette dernière, bien que bénéficiant d'une ancienneté moindre que Mademoiselle X..., justifie d'une formation plus approfondie sur systèmes informatiques et d'une expérience plus étendue de 1994 à 2004. Dans ces conditions, il apparaît que les critères de l'ordre des licenciements fixés en fonction de la formation professionnelle et de l'expérience ont été respectés.
La cause économique du licenciement de Zohra X... est justifiée et le jugement déféré doit être réformé en toutes ses dispositions.
En conséquence, l'ASSEDIC de l'Est francilien, recevable en son intervention volontaire, n'est pas fondée à réclamer à l'employeur le remboursement des allocations chômage versées à la salariée.
-Sur l'exécution du contrat et la demande en paiement des heures supplémentaires
Les parties sont d'accord sur le nombre d'heures de travail effectuées par la salariée, soit 162, 50 heures par mois (37, 5 heures par semaine), mais celle-ci se plaint que, depuis le 1er janvier 2003, les 10, 83 heures supplémentaires qu'elle a effectuées n'ont pas été correctement majorées de 25 %.
Il ressort cependant de ses bulletins de salaire qu'en 2003, 2004 et jusqu'en avril 2005, 10, 83 heures bonifiées lui ont été payées chaque mois au taux de 125 %.
Sa demande ne paraît donc pas justifiée.

-Sur les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Au vu des circonstances de la cause, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais non taxables qu'elles ont exposés chacune pour leur part à l'occasion de la présente instance prud'homale.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR

Infirme le jugement déféré.

Dit le licenciement économique de Zohra X... fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Rejette le surplus des demandes.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dit que les entiers dépens seront à la charge de Zohra X....
LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0139
Numéro d'arrêt : 06/09823
Date de la décision : 06/03/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Bobigny, 03 avril 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-03-06;06.09823 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award