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07/02/2008 | FRANCE | N°07/08417

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0262, 07 février 2008, 07/08417


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre - Section F

ARRÊT DU 07 FEVRIER 2008

AUDIENCE SOLENNELLE

(no , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/08417

Décision déférée à la Cour : Décision du 23 Avril 2007 rendue par le conseil de discipline de l'ordre des avocats de PARIS

DEMANDEUR AU RECOURS :

M. Karim X...

10, bld Raspail

75007 PARIS

Comparant

Assisté de :

- Me PUDLOWSKI Fr

ancis , avocats au barreau de Paris

Toque D162

- Me TEMIME Hervé, avocats au barreau de Paris

Toque M27

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débat...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre - Section F

ARRÊT DU 07 FEVRIER 2008

AUDIENCE SOLENNELLE

(no , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/08417

Décision déférée à la Cour : Décision du 23 Avril 2007 rendue par le conseil de discipline de l'ordre des avocats de PARIS

DEMANDEUR AU RECOURS :

M. Karim X...

10, bld Raspail

75007 PARIS

Comparant

Assisté de :

- Me PUDLOWSKI Francis , avocats au barreau de Paris

Toque D162

- Me TEMIME Hervé, avocats au barreau de Paris

Toque M27

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Décembre 2007, en audience publique , devant la Cour composée de :

- Monsieur Jacques DEBÛ, Président

- Monsieur Claude GRELLIER, Président

- Monsieur André DELANNE, Président

- Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller

- Madame Marie-Françoise ALBERT, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Mlle Sabine DAYAN

MINISTERE PUBLIC :

L'affaire a été communiquée au Procureur Général, représenté lors des débats par M. Olivier LAMBLING, Avocat Général qui a fait connaître son avis.

M. LE BATONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE PARIS ES-QUALITE D'AUTORITE DE POURSUITE:

Conseil de l'Ordre des Avocats de Paris

11, Place Dauphine

75053 PARIS LOUVRE RP SP

Représenté par Me Denis TALON

Avocat au Barreau de Paris

Toque A.0428

DÉBATS : à l'audience tenue le 20 Décembre 2007, ont été entendus :

- M. Claude GRELLIER , en son rapport

- Me PUDLOWSKI Francis , avocat de M. Karim X... en sa plaidoirie

- Me TEMIME Hervé , avocat de M. Karim X... en sa plaidoirie

- Me Denis TALON, avocat représentant M. Le Bâtonnier de l'Ordre des avocats du Barreau de PARIS es-qualité d'autorité de poursuite, en ses observations

- M.Olivier Z..., Avocat Général, en ses observations

- M. Karim X... , en ses observations

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par M. Jacques DEBÛ, président et par Mlle Sabine DAYAN, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

* * *

M. Karim X..., avocat au barreau de Paris, a été cité le 30 janvier 2007 à comparaître devant le conseil de l'ordre, en tant que juridiction disciplinaire ordinale, du barreau de Paris pour

- "avoir procédé à un chantage auprès de son client, menaçant en cas de non paiement d'honoraires réclamés, de communiquer au juge d'instruction des éléments défavorables dont il a laissé entendre qu'ils pourraient remettre en cause le contrôle judiciaire en cours.

Ce fait constitue un manquement aux principes essentiels notamment à l'honneur, la probité, la dignité, et la loyauté, (article 1.3 du règlement intérieur du barreau de Paris)".

Cette citation est consécutive à l'ouverture d'une procédure disciplinaire dans les circonstance suivantes:

Le 20 octobre 2005, M. A..., médecin obstétricien, a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris de l'attitude de deux avocats audit barreau, M. David-Olivier Bac et M. Karim X..., à l'occasion d'une affaire impliquant ses deux fils, Herbert et Anthony C..., gardés à vue, le 10 août 2005, au commissariat de Courbevoie puis mis en examen, le 12 août 2005 par un juge d'instruction du tribunal de grande instance de Nanterre.

L'auteur de ce courrier, auquel il avait joint une lettre, en date du 10 octobre 2005, adressée par M. X... à son fils Herbert, entendait appeler l'attention du bâtonnier sur le manque de probité des avocats ayant eu à connaître de cette affaire et en particulier de M. X..., présenté comme un avocat "pénaliste" en mesure de faire rapidement aboutir l'affaire moyennent le versement d'une somme de 25 000 €.

La lettre du 10 octobre 2005, adressé par M. X... à son client est ainsi rédigée:

"Je vous informe que le chèque de règlement que vous m'avez remis est revenu impayé.

Deux choses l'une:

-vous procédez à un règlement immédiat de mes honoraires et je poursuis votre défense,

-vous ne régularisez pas la situation et je suis contraint de faire dresser à votre encontre un certificat de non-paiement et d'en aviser le juge d'instruction auprès duquel je ne défendrai plus vos intérêts. Je serai contraint d'en référer au bâtonnier.

Il est évident qu'il en tirera toutes les conséquences eu égard au fait notamment qu'il a rejeté votre demande de modification de contrôle judiciaire jeudi dernier".

Au cours de son audition au cours de la procédure d'instruction disciplinaire , le 30 novembre 2006, M. X... a dénié que les circonstances dans lesquelles il a assuré la défense de M. Herbert A... aient été entachée d'irrégularité, expliquant que la lettre du 10 octobre 2005 avait été écrite à son client pour lui reprocher d'avoir présenté une demande de modification de son contrôle judiciaire, alors qu'il lui avait indiqué qu'il n'était pas souhaitable de formuler une telle demande.

Par arrêté du 23 avril 2007, le conseil de l'ordre, statuant en tant que juridiction ordinale, du barreau de Paris, a rejeté les exceptions de procédure soulevées par M. X... et l'a sanctionné, pour s'être rendu coupable de faits constituant un manquement aux principes essentiels visés par l'article 1.3 du règlement intérieur du barreau de Paris, et notamment aux principes d'honneur et de probité, en prononçant à son encontre la sanction d'interdiction temporaire d'exercice de la profession pendant une durée de six mois dont trois mois assortis du sursis.

Pour statuer ainsi, le conseil de l'ordre a considéré que le lettre du 10 octobre 2005, dont M. X... est à tout le moins l'auteur intellectuel, était de nature à inciter le juge d'instruction à prendre à l'encontre de M. Herbert A... des mesures coercitives à son encontre en cas de non respect des échéances fixées dans le cadre du contrôle judiciaire consistant en un cautionnement dont le paiement était échelonné.

Le 18 mai 2007, le conseil de M. X... a, par déclaration au greffe, frappé d'appel l'arrêté du 23 avril 2007.

À l'audience, le conseil de M. X... a déposé des conclusions, développées oralement, par lesquelles il sollicite au visa des article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, la nullité des poursuites, et subsidiairement l'infirmation de la décision, l'audition de M. Herbert A... et sa confrontation avec M. X... et, encore plus subsidiairement, le renvoi de ce dernier des fins de la poursuite disciplinaire, sans peine ni dépens.

Le ministère public entendu en ses observations orales a conclu au rejet de la demande de nullité, et au prononcé d'une sanction au motif que le manquement disciplinaire poursuivi est, en l'état, constitué.

Sur quoi, la cour,

1-sur la demande de nullité de la procédure

Considérant qu'au soutien de la nullité de la poursuite, le conseil de M. X... fait observer que la procédure se fonde sur une lettre adressée par un avocat à son client, et couverte, comme telle, par le secret professionnel conformément aux dispositions de l'article 65 -1 de la loi du 31 décembre 1971 selon lesquelles:

"sont couvertes par le secret professionnel, en toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères, les notes d'entretien, et plus généralement toutes les pièces du dossier"; qu'il observe que les conditions dans lesquelles M. Gilbert A... a pu obtenir cette lettre n'ont pas été révélées, et en tout cas, méconnaissent les dispositions de l'article précité ainsi que le principe de la loyauté des preuves, ce qui ne peut être le cas d'une dénonciation articulé sur une lettre d'un avocat à son client; qu'il importe peu, selon le conseil de M. X..., que l'irrégularité en cause affecte l'instruction préparatoire, dès lors que la preuve du manquement repose sur un acte obtenu de manière illicite;

Considérant que le conseil de M. X... expose encore que tant le rapporteur que le conseil de discipline ont expressément refusé l'audition de M. Herbert A... et sa confrontation avec M. X...; que ce refus méconnaît la jurisprudence de la cour européenne de Strasbourg qui a peu à peu élaboré le principe du droit au témoin, autonome par rapport aux autres droits énoncés à l'article 6§3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme, cette jurisprudence étant parfaitement transposable au droit disciplinaire, qui relève de la matière pénale; qu'il expose enfin, n'être pas le signataire du courrier du 10 octobre 2005, dont son associé, M. Guillaume D..., a été, comme le confirment les initiales portées sur l'en-tête, le rédacteur;

Considérant, cependant, que le moyen de nullité tiré de la violation du secret professionnel de l'avocat est en l'espèce inopérant; qu'en effet, en dépit de la généralité du texte précité, issu de la loi du 7 avril 1997, ayant modifié le texte de 1971, le secret professionnel dont bénéficie l'activité judiciaire de l'avocat ne peut être entendu comme ayant un caractère absolu, sauf à priver de toute portée les dispositions relatives aux devoirs de l'avocat envers son client, et notamment son devoir de probité et de délicatesse; qu'il s'ensuit que le moyen de nullité de la poursuite sera rejeté, alors que de surcroît il n'est pas démontré ni même allégué que la transmission du courrier litigieux à M. Gilbert A... soit en quelque manière frauduleuse;

Considérant, ensuite, que le droit au témoin comme l'organisation d'une confrontation, laissés à l'appréciation du magistrat chargé, par son office même, d'en évaluer l'intérêt, ne sont pas de nature à vicier la procédure dans la mesure où ni le témoignage de M. Herbert E... ni sa confrontation avec M. X... ne sont apparus nécessaires à une meilleure appréciation des manquements poursuivis, dès lors que l'instruction conduite par le rapporteur avait recueilli les éléments suffisants à permettre d'en apprécier l'existence;

2- sur le fond

Considérant qu'il est constant que M. X..., en tant que conseil de M. Herbert A..., mis en examen du chef d'escroquerie, est, lui seul, à l'origine de l'envoi de la lettre litigieuse, ci-dessus reproduite; qu'en toute hypothèse, le sens et la portée du texte ne sont pas discutés, que M. X... l'ait écrite ou dictée dans le contexte décrit lors de son audition par le rapporteur;

Considérant que le conseil de l'ordre statuant en tant que juridiction ordinale disciplinaire a en conséquence retenu à juste titre que le texte de ce courrier doit être regardé comme un manquement au devoir de probité et de d'honneur prévu par l'article 1.3 du règlement intérieur du barreau de Paris; que cette lettre s'analyse en effet en une intimidation, une menace voire une trahison des intérêts de M. Herbert A..., au cas où il ne verserait pas les sommes aux échéances prévues;

Considérant qu'il s'ensuit que le recours formé par M. X... sera rejeté;

Par ces motifs :

-rejette les moyens de nullité

-rejette le recours,

-condamne M. X... aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0262
Numéro d'arrêt : 07/08417
Date de la décision : 07/02/2008

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-02-07;07.08417 ?
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