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07/02/2008 | FRANCE | N°06/11920

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0139, 07 février 2008, 06/11920


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
22ème Chambre C

ARRET DU 7 février 2008

(no, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 11920

Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après cassation du 14 juin 2006 de l'arrêt rendu par la 18o Chambre C de la Cour d'Appel de Paris le 20 novembre 2003, sur appel d'un jugement rendu le 17 janvier 1990 par le conseil de prud'hommes de Paris, section encadrement-

APPELANT
Monsieur Michel X...
...
...
30140 TORNAC
représen

té par Me Michel PIERCHON, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE
SA SOFRECO
...
92115 CLICHY CEDEX
comparant en p...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
22ème Chambre C

ARRET DU 7 février 2008

(no, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 11920

Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après cassation du 14 juin 2006 de l'arrêt rendu par la 18o Chambre C de la Cour d'Appel de Paris le 20 novembre 2003, sur appel d'un jugement rendu le 17 janvier 1990 par le conseil de prud'hommes de Paris, section encadrement-

APPELANT
Monsieur Michel X...
...
...
30140 TORNAC
représenté par Me Michel PIERCHON, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE
SA SOFRECO
...
92115 CLICHY CEDEX
comparant en personne, assistée de Me Emmanuel Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : P505

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 décembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Michel DE POMMIER, Président
Madame Françoise CHANDELON, Conseiller
Madame Evelyne GIL, Conseiller
qui en ont délibéré

Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats

ARRET :

-CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président
-signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.

Vu le jugement du Conseil de Prud'hommes de PARIS en date du 17 janvier 1990
ayant statué sur le litige qui oppose Michel X... à son ancien employeur,
la SA SOFRECO et ayant :
-condamné la SA SOFRECO à payer à Michel X... la somme de :
12 120 francs à titre de frais de retour en France, avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande,
-débouté Michel X... du surplus de sa demande,
-condamné la SA SOFRECO aux dépens ;

Vu l'arrêt de la cour d'appel de PARIS du 20 novembre 2003 ayant :
-réformé le jugement du 17 janvier 1990 en ce qu'il a débouté Michel X... de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
-alloué au salarié 1500 € de ce chef,
-confirmé le jugement pour le surplus,
-dit que les intérêts assortissant la condamnation prononcée par le Conseil de prud'hommes de PARIS confirmée par la Cour seront capitalisés,
-dit n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
-mis les dépens de la procédure d'appel à la charge de la société SOFRECO ;

Vu l'arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, en date du 14 juin 2006, ayant :
-cassé et annulé l'arrêt du 20 novembre 2003, seulement en ce qu'il a débouté Michel X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
-remis, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt,
-renvoyé, pour être fait droit, devant la Cour d'appel de PARIS, autrement composée,
-laissé à chaque partie la charge de ses dépens,
-rejeté la demande de la société SOFRECO formée en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience
aux termes desquelles :

Michel X..., appelant, poursuit :
-la constatation de la rupture injustifiée avant le terme du contrat à durée déterminée,
-en conséquence, la condamnation de la société SOFRECO à payer à Michel X... les sommes de :
70   881, 17 € correspondant à la totalité des salaires restant dus jusqu'au terme de la mission telle qu'évaluée dans le contrat de travail,
6   745, 87 € au titre de l'indemnité de fin de contrat (44   250 francs),
-subsidiairement, sur la rupture d'un contrat à durée indéterminée, la condamnation de la société SOFRECO à payer à Michel X... la somme de 74   090, 22 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (486   000 francs),
-la fixation du point de départ des intérêts au taux légal à compter du 5 avril 1989, date de la demande en justice, et la capitalisation par année entière desdits intérêts,
-la condamnation de la société SOFRECO à payer à Michel X... la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en sus des entiers dépens

La SA SOFRECO, intimée, conclut à :
-la qualification du contrat de travail de Michel X... en contrat de mission,
-la confirmation du jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de PARIS le 17 janvier 1990 en ce qu'il a débouté Michel X... de sa demande d'indemnité pour licenciement abusif,
-la condamnation de Michel X... au paiement de 2 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par lettre du 12 août 1986 comportant contrat de travail, la Société Française de Réalisation, d'Etudes et de Conseil (SOFRECO) a engagé Michel X... en qualité d'ingénieur position 23 coefficient 150 pour travailler, avec le statut d'expatrié, au CARDER OUEME à PORTO NOVO au BENIN en tant que " Technicien Brigade Routière " " pour l'exécution de la convention entre le Ministère du Développement Rural et de l'Action Coopérative (MDRAC) / CARDER OUEME et SOFRECO.

Les appointements mensuels du salarié étaient fixés au montant forfaitaire brut de 13   000 francs français et augmentés d'une prime annuelle versée le 31 décembre de chaque année.

Le 14 octobre 1988, l'employeur a résilié le contrat de Michel X... dans les termes suivants :

" Ainsi que vous le savez, le blocage du financement BADEA a provoqué l'arrêt des travaux des brigades routières et a fait que nos honoraires concernant nos prestations d'Assistance Technique au Carder-Ouémé au Bénin, en particulier ceux concernant votre poste de Superviseur des travaux des brigades routières, sont restés impayés pour toute la période du 1 / 3 / 1987 à ce jour.

Devant ces faits, notre client, le Carder-Ouémé, nous a demandé, au cours de la séance de travail du 13 / 10 / 88, d'arrêter votre mise à disposition sur ce projet.

Nous sommes donc au regret de résilier par la présente le Contrat en date du 12 / 08 / 86 qui vous lie à notre société, la période de préavis commençant à la date de réception de la présente.

Comme convenu au cours de la réunion entre nous du 13 / 10 / 88, vous effectuerez votre période de préavis sur votre lieu travail à Porto-Novo, Bénin (date de départ pour la fin de l'année envisagée avec le client). "

Michel X... fait valoir :
-que son contrat de travail avait été conclu avec la société SOFRECO pour une durée
déterminée,
-qu'il a été rompu en dehors de toutes règles légales, de façon anticipée, à l'initiative de l'employeur sans qu'aucune faute n'eût été invoquée à l'encontre du salarié,
-que cette rupture n'a pas été demandée par le client Carder-Ouémé,
-qu'elle n'est pas davantage justifiée par la fin du chantier,
-que la société SOFRECO lui est donc redevable d'une indemnité correspondant aux salaires et congés payés dus jusqu'à l'expiration de son contrat de travail conclu pour quatre ans, soit jusqu'au 9 septembre 1990 (70   881, 17 €) ;

La SA SOFRECO soutient :
-que la demande de Michel X... tendant à la constatation de la rupture injustifiée
avant le terme d'un contrat à durée déterminée et les demandes pécuniaires qui en découlent sont irrecevables, l'arrêt de renvoi de la Cour de Cassation ne permettant à la Cour de renvoi que l'examen du point de savoir si les travaux auxquels le salarié participait avaient été ou non poursuivis,
-qu'elle est également irrecevable comme incompatible avec les exigences d'un procès équitable, l'appelant ayant tardé plus de 12 ans avant de demander la réinscription de son affaire au rôle de la Cour d'appel de Paris en 2002,
-subsidiairement, que le chantier s'est achevé à l'initiative du client qui a demandé une modification des prestations d'assistance technique et le remplacement du poste de " technicien brigade routière " par un poste de " comptable informatique ",
-que l'arrêt du chantier résultant de la demande des autorités béninoises, le licenciement de Michel X... repose sur une cause réelle et sérieuse,
-très subsidiairement, que faute de justification du préjudice subi, les dommages et intérêts alloués doivent être limités à six mois de salaire, soit à 11   891, 02 €.

SUR CE :

-Sur la recevabilité des demandes

En remettant, sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif de Michel X..., la cause et des parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 20 novembre 2003, la Cour de Cassation, dans son arrêt du 14 juin 2006, n'a pas limité le renvoi devant la Cour d'appel de Paris au seul examen de la poursuite ou non du chantier du Carder Ouémé sur lequel travaillait le salarié.

Par ailleurs, la société SOFRECO ne justifie pas que la durée de la procédure prud'homale engagée par Michel X... lui fait grief.

Les fins de non recevoir opposées par l'intimée doivent donc être rejetées.

-Sur la qualification du contrat de travail

Le contrat de travail signé par Michel X... et le directeur général de la SA SOFRECO stipule qu'il est " un contrat à durée indéterminée, temporaire, motivé par l'exécution de la mission confiée à SOFRECO par le MDRAC / CARDER OUEME ".
Il dispose " de convention expresse entre les parties que la fin de la mission... constituera la cause légitime de rupture du contrat, sous respect du préavis conventionnel " et prévoit que la partie de la mission concernant Michel X... a une durée prévisible de quatre ans.

Ce contrat n'a pas été conclu dans les circonstances énumérées par l'article L. 122-1-1 du Code du travail, il n'a donc pu être conclu pour une durée déterminée. Il en résulte qu'il s'agit d'un contrat à durée indéterminée.

-Sur le licenciement

La lettre de résiliation du contrat de travail, datée du 14 octobre 1988, énonce deux motifs : d'une part, le blocage du financement BADEA, d'autre part, la demande du client Carder-Ouémé de mettre fin à la mission de Michel X... sur le projet des travaux des brigades routières.

Le blocage du financement allégué est contredit par un document portant l'en-tête du ministère du développement rural et de l'action coopérative de la république populaire du Bénin, en date du 3 octobre 1988, qui indique que 50 millions de francs CFA ont été débloqués par la caisse autonome d'amortissement et que pour les trois mois à venir le compte BADEA devra employer 13 millions pour les travaux sur les pistes rurales, la brigade routière devant entamer un tronçon de 14 km. Dans une lettre portant la même date du 3 octobre 1988, le conseiller technique principal du Carder-Ouémé confirme l'information en vue de la reprise de la réalisation de 14 km de pistes. Le chantier auquel participait Michel X... n'était donc pas achevé.

Par ailleurs, si le client Carder-Ouémé a pu souhaiter dans le cadre de ses conventions avec la société SOFRECO la suppression d'un poste de technicien pour le remplacer par un poste de comptable informatique, il appartenait à la SOFRECO de préciser les motifs du choix qu'elle a porté sur le poste de Michel X....

Il apparaît donc que le licenciement a été notifié à ce dernier sans cause réelle et sérieuse.

-Sur le préjudice

Le contrat de travail mentionnait une durée prévisible de mission au Bénin de quatre ans.

Le salarié a donc pu légitimement élaborer ses projets en fonction de cette durée.
Après plus de deux années d'expatriation au Bénin, il justifie qu'il a eu des difficultés pour se réinstaller en France. Le licenciement lui a causé un préjudice important qui, compte tenu du salaire mensuel de 13   000 francs qu'il a cessé de percevoir, sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 44   000 euros.

Les intérêts courront sur cette somme à compter de la présente décision et seront capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil.

-Sur la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Au vu des circonstances de la cause et compte tenu de la position respective des parties, il serait inéquitable de laisser à la charge de Michel X... les frais non taxables qu'il a été contraint d'exposer, il convient de lui allouer à ce titre une indemnité de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR

Vu l'arrêt de renvoi de la Cour de Cassation, chambre sociale, en date du 14 juin 2006 ;

Infirme le jugement du Conseil de prud'hommes de PARIS en date du 17 janvier 1990 en ce qu'il a débouté Michel X... de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive ;

Statuant à nouveau,

Condamne la SA SOFRECO à lui payer les sommes de :
44   000 € (quarante quatre mille euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,
2 000 € (deux mille euros) en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la SA SOFRECO aux entiers dépens.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0139
Numéro d'arrêt : 06/11920
Date de la décision : 07/02/2008

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-02-07;06.11920 ?
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