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31/01/2008 | FRANCE | N°09/00968

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0139, 31 janvier 2008, 09/00968


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 31 janvier 2008

(no , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/00968

Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après cassation du 25 janvier 2006 d'un arrêt rendu par la 21o B de la Cour d'Appel de Paris le 24 avril 2003 sur appel d'un jugement rendu le 19 septembre 2001 par le conseil de prud'hommes de Paris (2o Ch) - section commerce - RG no 01/00647

APPELANTE

Madame Marie X...

C/O Mme Y...
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75008 PARIS

comparant en personne, assistée de Me Bouziane Z... (SELARL BEHILLIL et ASSOCIES), avocat au barreau de PAR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 31 janvier 2008

(no , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/00968

Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après cassation du 25 janvier 2006 d'un arrêt rendu par la 21o B de la Cour d'Appel de Paris le 24 avril 2003 sur appel d'un jugement rendu le 19 septembre 2001 par le conseil de prud'hommes de Paris (2o Ch) - section commerce - RG no 01/00647

APPELANTE

Madame Marie X...

C/O Mme Y...

...

75008 PARIS

comparant en personne, assistée de Me Bouziane Z... (SELARL BEHILLIL et ASSOCIES), avocat au barreau de PARIS, toque : P.557

INTIMEES

Me A... - Commissaire à l'exécution du plan de S.A. CHEQUE POINT FRANCE

...

75009 PARIS

représenté par Me Suzanne BENTO CARRETO, avocat au barreau de PARIS, toque : C.1916

Me Marie-Josée B... - Représentant des créanciers de S.A. CHEQUE POINT FRANCE

...

75001 PARIS

représenté par Me Sophie ROUVERET, avocat au barreau de PARIS, toque : D.223

UNEDIC AGS - CGEA - IDF EST

...

92309 LEVALLOIS-PERRET

représenté par Me Isabelle TOLEDANO (SELARL LAFARGE ET ASSOCIÉS), avocat au barreau de PARIS, toque : T.10

PARTIE INTERVENANTE :

S.A.S. GLOBAL CHANGE

...

75008 PARIS

représentée par Me Gilles HITTINGER-ROUX, avocat au barreau de PARIS, toque : P.497

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 décembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Michel DE POMMIER, Président

Madame Françoise CHANDELON, Conseiller

Madame Evelyne GIL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président

- signé par Monsieur Jean-Michel DE POMMIER, président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.

Vu l'appel régulièrement formé par Marie X... à l'encontre d'un jugement prononcé le 19 septembre 2001 par lequel le Conseil de prud'hommes de Paris a déclaré sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail irrecevable au motif qu'elle exerçait les fonctions de représentante du personnel ;

Vu l'arrêt confirmatif de la Cour d'appel de Paris, 21ème Chambre B du 24 avril 2003,

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 25 janvier 2006 qui a annulé cette décision, estimant qu'un salarié protégé ne pouvait "être privé de la possibilité de poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquement de ce dernier à ses obligations" ;

Vu l'arrêt de cette Chambre en date du 3 mai 2007 ordonnant la mise en cause de la société GLOBAL CHANGE ;

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience, aux termes desquelles :

Marie X..., appelante, poursuit l'infirmation du jugement déféré et sollicite, à titre principal, de constater la rupture de son contrat de travail, aux torts exclusifs de la société CHEQUE POINT FRANCE à la date du 23 novembre 2000, de l'analyser comme un licenciement nul en raison de la violation de son statut protecteur et de fixer sa créance aux sommes suivantes :

- 3.506,32 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 350,63 € à titre de congés payés afférents,

- 1.577,84 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 100.000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 50.000 € à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice moral subi,

- 32.945,22 € à titre de la violation de son statut protecteur,

- 10.518,96 € au titre du respect de la clause de non concurrence illicite,

ces sommes devant être garanties par l'UNEDIC dans la limite du plafond 13 et porter intérêts de droit à compter de l'introduction de la demande,

Elle sollicite encore la demande de documents sociaux rectifiés.

Mo A..., commissaire à l'exécution du plan de la société CHEQUE POINT FRANCE, intimé, soutient que les effets de la résiliation judiciaire du contrat doivent être fixés au 15 avril 2002, date de son licenciement par la société GLOBAL CHANGE et précise que la demande d'indemnisation ne peut être accueillie pour les postes déjà pris en compte au titre de cette rupture ;

C... JOSSE, représentant des créanciers de la société CHEQUE POINT FRANCE, intimé, sollicite sa mise hors de cause ;

L'UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA IDF OUEST, intervenante, dénie sa garantie, la rupture du contrat de travail n'étant pas intervenue dans le mois du redressement judiciaire ou de la cession.

Elle rappelle subsidiairement la nature des créances qu'elle a vocation à garantir.

La société GLOBAL CHANGE, intervenante forcée, conclut à l'irrecevabilité de sa mise en cause.

CELA ETANT EXPOSE

Par contrat à durée indéterminée en date du 22 juin 1992, Marie X... a été engagée par la société CHEQUE POINT FRANCE, qui exploite différents établissements se consacrant aussi bien aux opérations de change qu'à la vente d'objets touristiques, en qualité de caissière.

En juillet 1996, elle était promue responsable d'agence.

Elle était élue, le 19 décembre 1999, déléguée du personnel.

Le 23 novembre 2000, elle a été victime d'une agression sur son lieu de travail.

Par Jugement définitif du 15 janvier 2003, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS) de Paris, relevant l'absence de sécurité du site sur lequel elle était affectée, malgré les mises en garde adressées par les salariés, reconnaissait l'employeur coupable d'une faute inexcusable et ordonnait une expertise médicale avant de liquider son préjudice le 20 janvier 2004.

A la suite de cet accident de travail, Marie X... était placée en arrêt maladie.

Elle ne devait plus jamais reprendre son poste de travail, le médecin du travail la déclarant inapte à tout poste dans l'entreprise le 2 janvier 2002.

Par Jugement du Tribunal de Commerce en date du 25 mars 1999, la société CHEQUE POINT FRANCE a été admise au bénéfice du redressement judiciaire.

Le 13 décembre 2000, les Juges consulaires autorisaient sa cession à la société BNC pour le compte de la société GLOBAL CHANGE en cours de formation.

Le 17 janvier 2001, Marie X... saisissait la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation de son contrat de travail.

Le 10 avril 2002, la société GLOBAL CHANGE licenciait Marie X... pour inaptitude après avoir informé les délégués du personnel et le Comité d'entreprise, ce dernier émettant un avis favorable le 13 février 2002 et obtenu, le 25 mars 2002, l'autorisation de l'inspection du travail.

Elle bénéficiait d'un préavis de deux mois et percevait la rémunération afférente aux mois de janvier et février 2002.

SUR CE

Sur la mise hors de cause de MoJOSSE, ès qualités

Il résulte des pièces produites que par jugement en date du 28 octobre 2004, le Tribunal de commerce de Paris a mis fin à la mission de C... JOSSE.

Il convient en conséquence de faire droit à sa demande de mise hors de cause, ce dernier n'ayant plus qualité à comparaître dans la présente procédure.

Sur l'irrecevabilité de la mise en cause de la société GLOBAL CHANGE

La présente juridiction a considéré, aux termes des motifs décisoires de l'arrêt du 3 mai 2007, qu'il convenait d'accueillir la demande de résiliation du contrat de travail aux torts de la société CHEQUE POINT FRANCE.

Marie X... estimant que dans l'hypothèse où la date de la rupture à une date postérieure à la cession de la société CHEQUE POINT FRANCE à la société, impliquait la mise en cause de cette partie, cette mesure était ordonnée.

Dès lors qu'aucune partie ne sollicite à ce jour une quelconque condamnation contre la société GLOBAL CHANGE, l'UNEDIC ayant renoncé à la barre à sa demande tendant à ordonner sa garantie du chef de l'indemnité de non concurrence, le moyen d'irrecevabilité se trouve sans objet.

L'équité ne commande pas d'accueillir sa demande d'indemnité fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Sur la date de la résiliation du contrat

Tout salarié a le pouvoir de rompre immédiatement son contrat si les faits reprochés à son employeur le justifient.

Il prend alors acte de la rupture, à ses risques et périls, sa décision pouvant produire les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse si les faits invoqués la justifiaient mais s'analysant dans l'hypothèse inverse comme une démission.

S'il estime, comme en l'espèce, devoir se fonder sur les dispositions de l'article 1184 du Code civil, en saisissant le Juge d'une demande de résiliation, il poursuit l'exécution de son contrat et bénéficie, jusqu'à la décision à intervenir, du régime de prévoyance, des retraites et des divers avantages avancés à son statut.

Marie X... a ainsi perçu ses bulletins de salaire, même s'ils ne s'accompagnaient d'aucun versement effectif en raison de sa prise en charge au titre de l'assurance maladie, exception faite des mois de janvier et février 2002 au cours desquels son salaire lui a été réglé, sur le fondement manifeste de l'article L122-24-4 du Code du travail, son licenciement n'ayant pu intervenir dans le mois en raison des formalités imposées à l'employeur du fait de son mandat de déléguée du personnel.

La résiliation ne peut cependant intervenir au jour de la décision judiciaire que si le salarié est encore à cette date au service de son employeur.

Tel n'est pas le cas ici, son licenciement pour inaptitude lui ayant été notifié par courrier du 10 avril 2002, reçu le 15 suivant.

C'est donc à cette date du 15 avril qu'il convient de fixer la résiliation aux torts de l'employeur.

Sur la garantie de l'UNEDIC

Marie X... ne contestant pas que dans l'hypothèse où la Cour retiendrait comme date de rupture le 15 avril 2002, sa créance ne pourrait pas être garantie, faute de rentrer dans les prévisions de l'article L143-11-1 du Code du travail, cet arrêt ne peut être déclaré opposable à l'UNEDIC.

Sur l'indemnisation

La résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse mais ne peut être analysé comme un second licenciement lorsqu'une telle mesure est déjà intervenue, une même relation de travail ne pouvant être rompue deux fois.

Il en résulte que si Marie X... peut prétendre voir inscrire au passif de la société CHEQUE POINT FRANCE les indemnités sanctionnant les torts de cet employeur, elle ne saurait obtenir le versement des sommes déjà allouées afférentes à la rupture notifiée le 15 avril 2002, ni de celles auxquelles elle aurait pu prétendre à cette occasion.

Il en est ainsi des indemnités de préavis ou de licenciement mais également du préjudice évoqué consécutif à son respect d'une clause de non concurrence illicite en l'absence de contrepartie financière, tous postes sans rapport avec la faute commise par la société CHEQUE POINT FRANCE.

Sur le préjudice moral subi

Pour le caractériser, Marie X... évoque la violente agression dont elle a été victime, frappée à deux reprises à la tête par un des malfaiteurs avec la crosse d'un revolver lui occasionnant un traumatisme crânien.

Il apparaît cependant que ce préjudice a déjà été indemnisé aux termes de la procédure engagée devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale qui, après avoir retenu, le 15 janvier 2003, la faute inexcusable de l'employeur, a examiné, après avoir fait diligenter une expertise, tant le stress post traumatique subi, que les séquelles physiques consécutives aux coups reçus.

Elle sera donc déboutée de cette demande.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Compte tenu des motifs de la résiliation du contrat, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle ci, la Cour estime le préjudice subi à la somme de 20.000 € en application des dispositions L.122-14-4 du code du travail.

Sur l'incidence de son statut protecteur

Marie X... exerçait depuis le 19 décembre 1999 les fonctions de déléguée du personnel. Elle bénéficiait en conséquence d'une période de protection expirant le 19 juin 2002.

La sanction de la méconnaissance du statut protecteur doit être égale au montant des salaires dont la salariée à été privée à compter de la date de la résiliation jusqu'à la fin de la période de protection, soit en l'espèce 2 mois et 4 jours.

Il convient en conséquence de fixer sa créance de ce chef à la somme de 3.734,32 €.

Sur les intérêts sollicités

Cette demande ne saurait prospérer en application de l'article L621-48 du Code du commerce applicable aux créances salariales.

Sur la remise de documents sociaux conformes

Elle sera ordonnée dans les termes de la demande.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Met hors de cause C... JOSSE, ès qualités de représentant des créanciers de la société CHEQUE POINT FRANCE ;

En l'absence de demande dirigée contre la société GLOBAL CHANGE, la met également hors de cause ;

Infirme le jugement déféré ;

Vu l'arrêt du 3 mai 2007,

Fixe au 15 avril 2002 la résiliation judiciaire du contrat liant Marie X... à la société CHEQUE POINT FRANCE aux torts de cette dernière ;

En conséquence,

Fixe la créance de Marie X... aux montants suivants :

- 20.000 € (vingt mille euros) au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.734,32 € (trois mille sept cent trente quatre euros trente deux centimes) au titre de son incidence sur son statut protecteur ;

Dit que ces créances ne sont pas garanties par l'UNEDIC ;

Ordonne à MoBOUYCHOU, ès qualités de remettre à Marie X..., une attestation ASSEDIC, un certificat de travail et un solde de tout compte conforme à cette décision ;

Déboute Marie X... de ses autres prétentions ;

Déboute la société GLOBAL CHANGE de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0139
Numéro d'arrêt : 09/00968
Date de la décision : 31/01/2008

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 avril 2003


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-01-31;09.00968 ?
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