Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
14ème Chambre - Section A
ARRÊT DU 19 DÉCEMBRE 2007
(no , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/12531
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 27 Juin 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 07/04319
APPELANTE
RES HUMANA
SA
agissant poursuites et diligences de son Directeur Général
ayant son siège social Immeuble Le Britannia, Allée C
...
69432 LYON CEDEX 03
représentée par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avoués à la Cour
assistée de Me Gaël X... (AGUERA), avocat au barreau de LYON
INTIME
Monsieur Denis Y...
...
69003 LYON
représenté par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour
assisté de Me Joël Z... (SEDLEX), avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 20 Novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Marcel FOULON, Président
Madame Marie-José PERCHERON, Conseiller
Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Melle Delphine LIEVEN
ARRÊT :
- Contradictoire
- prononcé publiquement par Monsieur Marcel FOULON, Président
- signé par Monsieur Marcel FOULON, président et par Melle Delphine LIEVEN, greffier présent lors du prononcé.
FAITS CONSTANTS
1- Monsieur Denis Y... était engagé par la SA RES HUMANA (RES HUMANA) le 1er décembre 2002 en "qualité de responsable de la recherche et du développement informatique".
2- Il était licencié pour faute lourde le 4 mars 2005.
3- Par ordonnance, sur requête de RES HUMANA, du 23 mars 2005 le président du tribunal de grande instance de Paris désignait un huissier de justice avec pour mission de se rendre dans les locaux de la société TISCALI ACCESS afin :
4- de sommer celle-ci : de "lui exposer ses procédures d'archivage des e-mails en ligne et sur support et notamment les durées et les méthodes de restauration ;
5- de se faire remettre le contenu des e-mails adressés à l'adresse ddepoorter@libertysurf.fr, du 18 février 2004 au 4 mars 2005, à la condition que les expéditeurs de ces e-mails puissent être identifiés comme étant Monsieur Y..., Monsieur A..., Monsieur B..., Monsieur C... ou encore Monsieur de D... ;
6- de se faire remettre le contenu des e-mails émis à partir de l'adresse ddepoorter@libertysurf.fr, du 18 février 2004 au 4 mars 2005, à la condition que les destinataires de ces e-mails puissent être identifiés comme étant Monsieur Y..., Monsieur A..., Monsieur B..., Monsieur C... ou encore Monsieur de D... ;
7- de se faire remettre tous documents ou supports relatifs à ces échanges et prendre copie de ceux qui seront présentés.
8- La société TISCALI ACCESS était le fournisseur d'accès internet au service messagerie de Monsieur Y....
9- Messieurs A... et C... sont avec Monsieur Y..., les trois associés d'une société AVEIS (cf §22).
10- L'huissier dressait son procès verbal de sa mission le 13 avril 2005 et 21 juillet 2005.
11- Monsieur Y... saisissait le conseil de prud'hommes de Lyon.
12- Par ordonnance du 27 juin 2007 "prise comme en matière de référé" le président du tribunal de grande instance de Paris (chambre des requêtes) :
- rejetait l'exception d'incompétence,
13- - rétractait l'ordonnance du 23 mars 2005 "prise en violation du secret des correspondances",
14- annulait le procès verbal du 13 avril et 21 juillet 2005,
15- condamnait RES HUMANA à payer à Monsieur Y... 2000 € au titre de l'article 700 du NCPC.
16- RES HUMANA interjetait appel le 12 juillet 2007.
17- L'ordonnance de clôture était rendue le 20 novembre 2007.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DE RES HUMANA
Par dernières conclusions du 13 septembre 2007 auxquelles il convient de se reporter, RES HUMANA soutient :
18- * que la présence de Monsieur Y... à la mission de l'huissier n'était pas requise puisque ce dernier n'était plus salarié de RES HUMANA, et puisque la requête excluait l'adresse de Monsieur Y... au sein de RES HUMANA,
19- * qu'en droit il peut être porté atteinte au secret des correspondances,
20- * que copie de la requête et de l'ordonnance ont été signifiées à TISCALI, mais pas à Monsieur Y... qui n'était pas la personne contre laquelle l'ordonnance est opposée,
21- * que les pièces figurant sur le bordereau n'ont pas à être signifiées avec l'ordonnance,
22- * qu'elle avait un intérêt légitime à obtenir les renseignements réclamés compte tenu des activités de Monsieur Y... au sein d'une société AVEIS (cf §9) qui est une société concurrente,
23- * que les pièces recueillies démontrent que Monsieur Y... en travaillant pour AVEIS violait ses obligations contractuelles (avec RES HUMANA),
24- * que Monsieur Y... a tardé à agir en rétractation.
Elle demande :
25- * la "rétractation de l'ordonnance rendue le 27 juin 2007 par le tribunal de grande instance de Paris" (§ 12),
26- * de dire que l'atteinte portée au secret des correspondances était licite,
27- de débouter Monsieur Y... de ses prétentions,
* 3000 € au titre de l'article 700 du NCPC.
Cette partie entend bénéficier des dispositions de l'article 699 du NCPC.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DE M. Y...
Par dernières conclusions du 6 novembre 2007 auxquelles il convient de se reporter, Monsieur Y... expose :
28- * avoir pris connaissance de l'ordonnance sur requête le 28 juillet 2006 au cours de l'instance prud'homale,
29- * qu'il n'était plus salarié de RES HUMANA lors du dépôt de la requête,
30- * que la mission ordonnée a porté sur une messagerie personnelle et non pas professionnelle, et ne pouvait être faite hors sa présence,
31- * que copie de la requête et de l'ordonnance ne lui a pas été laissée, ce qui constitue la violation du principe de la contradiction,
32- * que les pièces invoquées dans la requête ont changé d'appellation dans la procédure de rétractation,
33- * que rien ne vient démontrer les allégations de RES HUMANA.
Il demande :
34- * la confirmation de l'ordonnance,
35- * à titre subsidiaire de dire que le principe de la contradiction a été violé et d'ordonner la rétractation de l'ordonnance sur requête,
36- * 3500 € au titre de l'article 700 du NCPC.
Cette partie entend bénéficier des dispositions de l'article 699 du NCPC.
SUR QUOI, LA COUR
Considérant que l'article 495 alinéa 3 du NCPC qui vise à faire respecter le principe de la contradiction exceptionnellement mis en sommeil temporaire pour permettre l'exécution de la mesure ordonnée sur requête, suppose la signification de l'ordonnance (et de la requête avec laquelle elle fait corps) à la personne à laquelle elle est opposée, c'est à dire la personne contre laquelle un procès est envisagé - et ou - la personne chez qui la mesure est exécutée ;
Considérant que l'ordonnance sur requête litigieuse - qui ne relève pas du décret 2005-1678 du 28 décembre 2005 ayant créé le nouvel article 58 du NCPC, applicable au 1er mars 2006 - n'a pas été signifiée à Monsieur Y..., alors que la requête expose clairement que RES HUMANA "est bien fondée à se ménager la preuve d'éléments de faits dont pourrait dépendre l'issue des débats judiciaires qu'elle pourrait introduire à l'encontre de Monsieur Y..." (page 10 de la requête) ;
Qu'une telle violation du principe de la contradiction justifiait la rétractation de l'ordonnance sur requête, les articles 496 et 497 du NCPC ne prévoyant aucun délai pour en référer au juge ayant rendu cette dernière ;
Qu'il convient dans ces conditions de confirmer l'ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris statuant en référé, et non pas "comme en matière de référé" ;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Y... les frais non compris dans les dépens, qu'il y a lieu de lui accorder à ce titre la somme visée dans le dispositif ;
PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance entreprise ;
Y ajoutant :
Condamne la SA RES HUMANA à payer 2000 € à Monsieur Denis Y... au titre de l'article 700 du NCPC ;
Condamne la SA RES HUMANA aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du NCPC
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT