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04/12/2007 | FRANCE | N°06/14423

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0007, 04 décembre 2007, 06/14423


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre - Section A

ARRET DU 04 DECEMBRE 2007

(no , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/14423

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2006 rendu

par le Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2003/086784

APPELANTE

La S.N.C. KORN FERRY INTERNATIONAL et CIE,

ayant son siège : 49/53 avenue des Champs Elysées

75008 PARIS

agissant poursuites et diligences

en la personne de ses représentants légaux,

représentée par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour

assistée de Me Hervé LEHMAN (SCP LEHMAN...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre - Section A

ARRET DU 04 DECEMBRE 2007

(no , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/14423

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2006 rendu

par le Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2003/086784

APPELANTE

La S.N.C. KORN FERRY INTERNATIONAL et CIE,

ayant son siège : 49/53 avenue des Champs Elysées

75008 PARIS

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux,

représentée par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour

assistée de Me Hervé LEHMAN (SCP LEHMAN et Associés), avocat au barreau de PARIS, toque : P 286

INTIMEES

La S.A. SOCIETE D'APPLICATION DES TECHNIQUES D'EXPERTISE COMPTABLE (SATEC),

ayant son siège : 7 rue de Turbigo

75001 PARIS

prise en la personne de ses représentants légaux

représentée par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour

assistée de Me Brigitte AUBRY GLAIN (SCP RAFFIN et Associés), avocat au barreau de PARIS, toque : P133

La Société MUTUELLES DU MANS ASSURANCES

ayant son siège : ...

72030 LE MANS CEDEX 9

prise en la personne de ses représentants légaux

représentée par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour

assistée de Me Brigitte AUBRY GLAIN (SCP RAFFIN et Associés), avocat au barreau de PARIS, toque : P133

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 Octobre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. GRELLIER, président

M. DEBÛ, président

Mme HORBETTE, conseiller

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du nouveau Code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Valérie Z...

Le Ministère Public, représenté lors des débats par M A..., Substitut général, qui a fait connaître son avis.

ARRET :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par M. GRELLIER, président et par Madame SAGUI, greffier présent lors du prononcé.

****

La Société KORN FERRY INTERNATIONAL, ci-après KFI, est une société de services qui a une activité de conseil en management et de recherche de personnel.

Après avoir fusionné avec une société DVA, de même activité, par absorption de cette dernière, selon traité du 16 mars 1999, la Société KFI a reproché à son expert-comptable, la société d'application des techniques comptables, SATEC, le redressement fiscal qui lui a été imposé du fait de l'absence de tenue du registre des plus values en report d'imposition sur biens non amortissables et pour n'avoir pas joint à la liasse fiscale du résultat de l'exercice de l'année de fusion les états de suivi des sursis d'imposition et des +reports d'imposition.

Par jugement du 19 mai 2006, le tribunal de commerce de Paris a condamné la Société SATEC, solidairement avec son assureur la société mutuelle du Mans Assurances à verser à la Société KFI la somme de 284 797 €.

CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,

Vu l'appel de ce jugement en date du 1er août 2006 par la Société KFI,

Vu ses conclusions déposées le 28 septembre 2007 selon lesquelles elle poursuit la confirmation du jugement en ce qu'il retenu une faute de la Société SATEC mais son infirmation pour le surplus et sa condamnation à lui payer 854 242 € représentant le montant du redressement fiscal, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et 15 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Vu les conclusions déposées le 16 octobre 2007 par lesquelles la Société SATEC et la société mutuelle du Mans Assurances, appelants incidents, demandent de réformer le jugement au motif que les conditions de la responsabilité de la Société SATEC ne sont pas réunies et, en conséquence, de débouter la Société KFI de ses demandes et de la condamner à payer 10 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

SUR QUOI,

Considérant qu'il est constant que, aux termes du traité de fusion du 16 mars 1999, les parties sont convenues "qu'elles entendent soumettre la présente fusion au régime prévu par l'article 210 A du code général des impôts." ;

Que selon ce texte : "Les plus-values nettes et les profits dégagés sur l'ensemble des éléments d'actif apportés du fait d'une fusion ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés." à condition que la société absorbante s'engage à respecter un certain nombre de prescriptions, notamment "calculer les plus-values réalisées ultérieurement à l'occasion de la cession des immobilisations non amortissables qui lui sont apportées d'après la valeur qu'elles avaient, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée."; que pour ce faire, la société absorbante doit, conformément à l'article 54 septies du même code, d'une part "joindre à sa déclaration de résultat un état... faisant apparaître... les renseignements nécessaires au calcul du résultat imposable de la cession ultérieure des éléments considérés." et d'autre part porter "sur un registre tenu par l'entreprise qui a inscrit ces biens à l'actif de son bilan" "les plus-values dégagées sur les éléments d'actif non amortissables à l'occasion d'opérations... de fusion... et dont l'imposition a été reportée" ;

Considérant qu'il est tout aussi constant que le redressement fiscal opéré, qui portait sur la période du 1er mai 1998 au 31 avril 2001, a été motivé, selon le courrier de cette administration en date du 11 octobre 2002, par l'absence de présentation du "registre des plus-values en report d'imposition sur biens non amortissables", ce qui induit une "amende de 1% du montant des plus-values omis sur le registre", en application de l'article 1734 ter du code général des impôts, et par le fait que "les états de suivi des sursis d'imposition et des reports d'imposition n'ont pas été joints aux déclarations de résultats des exercices clos les 30/04/1999, 30/04/2000 et 30/04/2001", ce qui entraîne l'exigibilité immédiate de l'imposition ou une amende de 1% du montant des plus-values omis si l'oubli est réparé lors de la déclaration des résultats ultérieurs, ce courrier rappelant que les plus-values qui ont bénéficié du sursis d'imposition doivent être comprises dans le résultat imposable et que l'état de suivi de celles-ci doit être déposé au titre de l'exercice au cours duquel s'est réalisée la fusion ;

Considérant que la Société KFI soutient que les déclarations fiscales étaient confiées à la Société SATEC et qu'il lui appartenait donc de joindre à la liasse fiscale de 1999 l'état de suivi d'imposition et des reports d'imposition afin qu'elle puisse, comme indiqué dans le traité de fusion, bénéficier du sursis d'imposition sur les biens non amortissables ;

Considérant que la Société SATEC, qui ne conteste plus avoir été le comptable habituel de la Société KFI en charge de l'établissement des comptes de fin d'exercice et des déclarations fiscales, fait au contraire valoir que cette tâche particulière à cet exercice ne lui incombait pas, dans la mesure où elle avait été mise à l'écart de la fusion, qu'elle ignorait au moment de l'établissement des dites déclarations ;

Mais considérant qu'il résulte sans équivoque des pièces versées aux débats, notamment du compte rendu d'une réunion tenue le 9 juillet 1998 pour préparer la fusion, à laquelle participait M.MERY, expert-comptable habituel de la Société KFI et membre de la Société SATEC, d'une télécopie qui lui est adressée à ce sujet le 3 septembre 1998 ou de la note d'honoraires de la Société SATEC, datée du 24 novembre 1998 et signée de M. B..., qui comporte une ligne intitulée "assistances diverses et fusion" qu'elle ne pouvait ignorer l'existence de cette opération, peu important à cet égard que la Société KFI se soit entourée, pour y procéder, d'un avocat et d'un cabinet de conseils et expertise comptable supplémentaire ;

Considérant dès lors que, si l'expert comptable n'est tenu que d'une obligation de moyens en fonction des éléments fournis par son client, il résulte des pièces citées que la Société SATEC, qui n'ignorait pas l'existence de la fusion, devait, à tout le moins, demander à sa cliente de lui fournir tous les documents utiles afin de remplir complètement sa mission dans le respect des obligations légales ; qu'il lui incombait en particulier de demander l'accord de fusion, afin de savoir quel avait été le choix fiscal opéré, et l'interroger sur l'existence de plus values issues de la fusion et d'en tirer toutes conséquences quant à la déclaration fiscale de l'exercice concerné en joignant à la liasse l'état de suivi d'imposition et des reports d'imposition ; qu'elle ne saurait utilement avancer que le redressement a pu être motivé par le fait que la fusion comportait également des biens amortissables, alors qu'il ressort de la lecture de celui-ci que le seul actif pris en considération à ce titre a été le fonds de commerce de la société absorbée ;

Considérant que la Société SATEC fait également valoir, à raison, que l'un des reproches de l'administration fiscale a porté aussi sur l'absence de tenue du registre des plus-values en report d'imposition sur biens non amortissables ; que toutefois, comme le fait justement observer la Société KFI, la notification de redressement indique que cette carence n'est justiciable que du paiement d'une amende de 1% du montant des plus-values omis sur le registre, fort loin du montant réclamé, et, sans être contredit, que ce montant ne lui a même pas été réclamé lors de la transaction qui s'en est suivie avec l'administration ; qu'en tout état de cause, pour les mêmes raisons, il appartenait à la Société SATEC d'appeler l'attention de sa cliente sur cette obligation et de l'informer des risques par elle encourus en cas de non respect de celle-ci ;

Considérant qu'il résulte de tout ceci que la décision des premiers juges sera confirmée en ce qu'elle a retenu une faute à la charge de la Société SATEC de nature à engager sa responsabilité professionnelle ;

Considérant toutefois que la Société SATEC n'étant pas chargée de la comptabilité générale de la Société KFI, c'est à cette dernière, ainsi qu'il a été rappelé, qu'incombait, selon les dispositions de l'article 54 septies du code général des impôts, la responsabilité de la tenue du registre des plus values devant permettre l'établissement par la Société SATEC de l'état de suivi d'imposition afférent à l'opération de fusion ; qu'il appartient en effet au client de tenir et de fournir au professionnel les pièces nécessaires à l'établissement par lui des déclarations fiscales ; que la Société KFI a donc participé à la naissance de son préjudice, dans la proportion que la cour estime à la moitié ;

Considérant qu'il n'appartient pas à la cour de se prononcer sur l'existence éventuelle de fautes commises par des tiers à la présente instance ;

Considérant dès lors que le jugement sera réformé et la Société SATEC condamnée à indemniser la Société KFI de la moitié du montant du redressement fiscal issu de la transaction ;

Qu'en effet le préjudice actuellement subi est constitué de la part du redressement directement lié à l'absence de déclaration de ces éléments dans la mesure où, l'administration n'ayant pris en compte que le fonds de commerce, élément non amortissable, sans les fautes commises, l'imposition n'aurait jamais été exigée tant que la cession de cet élément n'intervenait pas, de sorte qu'il est sans intérêt à ce titre d'entrer dans des conjectures sur ce qu'aurait été le montant de l'imposition si la dite cession était intervenue ;

Considérant en conséquence que la Société SATEC et son assureur la société mutuelle du Mans Assurances seront condamnés à payer à la Société KFI la somme de 416 513,50€ représentant la moitié du montant du redressement directement lié au défaut d'établissement de la déclaration de suivi, soit la somme de 833 027 €, cette somme étant assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

Considérant qu'il n'y a, dans ces conditions, pas lieu à octroi d'indemnités procédurales ; que chaque partie, succombant partiellement, gardera la charge de ses dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

Réforme le jugement et statuant à nouveau,

Condamne la Société SATEC et la société mutuelle du Mans Assurances in solidum à payer à la Société KFI la somme de 416 513,50 € (quatre cent seize mille cinq cent treize euros et 50 cents) à titre de dommages et intérêts,

Dit que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

Rejette toute autre demande,

Dit que les parties garderont la charge de leurs dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0007
Numéro d'arrêt : 06/14423
Date de la décision : 04/12/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 19 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-12-04;06.14423 ?
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