Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
8ème Chambre - Section A
ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2007
(no , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 06/05790
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Février 2006 - Tribunal d'Instance d'AUBERVILLIERS - RG no 05-001558
APPELANT
Monsieur Mohammed X...
né le 31 janvier 1954 à ORAN (Algérie)
de nationalité française
demeurant ...
représenté par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avoués à la Cour
assisté de Maître Anne BROCHARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1580
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro BAJ : 06/006782 du 24/03/2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMÉ
Monsieur Patrick Z...
né le 2 avril 1960 à SAINT DENIS (93)
de nationalité française
profession : commerçant
demeurant ... - 93200 SAINT DENIS
représenté par la SCP MIRA - BETTAN, avoués à la Cour
assisté de Maître Stéphane CAMPANA, avocat au barreau de BOBIGNY
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral de Madame Viviane GRAEVE, l'affaire a été débattue le 2 octobre 2007, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente,
Madame Viviane GRAEVE, conseillère
Madame Catherine BOUSCANT, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier :
lors des débats : Madame Marie-France MEGNIEN
lors du prononcé de l'arrêt : Madame Christiane C...
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par Madame Viviane GRAEVE, conseillère la plus ancienne en remplacement de Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente, empêchée, et par Madame Christiane C..., greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Vu l'appel interjeté par M. Mohamed X... du jugement du 7 février 2006 du tribunal d'instance d'Aubervilliers qui l'a condamné, au titre de deux reconnaissances de dette par lui souscrites les 2 novembre 2002 et 16 septembre 2003, à verser à M. Patrick Z... la somme de 12.792,37 € et lui a accordé des délais de paiement ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 21 août 2007 par M. X... qui demande à la cour :
- d'infirmer et le jugement rendu par le tribunal d'instance sur une demande excédant son taux de compétence et, si elle l'estime utile, de statuer sur le fond du litige en application de l'article 79 du nouveau code de procédure civile?
- d'apprécier la recevabilité de l'intervention volontaire en cause d'appel de l'épouse de M. Z...,
- de dire que ce dernier est irrecevable à agir, la dette en question ayant été contractée
auprès de Mme Z..., ès-qualités d'exploitante du débit de boissons LE MALIBU,
- d'annuler la reconnaissance de dette dont se prévaut le créancier,
- en tout état de cause, de le débouter en application de l'article 1165 du code civil qui dispose que «la loi n'accorde aucune action pour une dette de jeu ou pour le paiement d'un pari» ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 6 juillet 2007 par M. Z... qui demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu le principe de sa créance,
- de le réformer, s'agissant du montant des condamnations, et de condamner M. D... à lui payer :
- 13.841,90 € en principal avec intérêts de droit à compter du 7 février 2003,
- 500 € à titre de dommages-intérêts,
- 1.200 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- y ajoutant, de condamner M. X... à lui verser une indemnité de procédure, au titre de la procédure d'appel, de 1.500 € ;
SUR CE, LA COUR :
Considérant que les époux Z... ont acheté un fonds de commerce situé ... a Aubervilliers ; que la femme exploite le débit de tabac sous l'enseigne commerciale Au Malibu les Vertus, son époux étant son salarié ; que, de 2001 à 2003, M. X... a acheté, pour des sommes importantes, des tickets de jeux, validés alors qu'ils n'étaient pas réglés par lui mais par M. ou Mme Z... ; qu'il a signé au profit de M. Z... deux reconnaissances de dette, la première le 2 novembre 2002 pour un montant de 15.778,20 € et la seconde le 16 septembre 2003 pour un montant de 13.841,90 €, les parties admettant que la seconde s'est substituée à la première ; qu'après avoir effectué quelques remboursements, M. X... a cessé d'honorer son engagement ;
Sur la procédure
Considérant que l'incompétence du tribunal d'instance, en raison du montant de la demande, devait être soulevée in limine litis, ce que n'a pas fait M. X... qui a comparu devant le premier juge ; qu'il convient d'observer que, par l'effet dévolutif de l'appel, cette cour, juridiction d'appel du tribunal d'instance d'Aubervilliers, est saisie de l'entier litige et peut donc statuer ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient l'appelant, Mme Z... n'est pas intervenue en cause d'appel ;
Sur la qualité à agir de M. Z...
Considérant que les reconnaissances litigieuses ont été signées par M. X... au profit de M. Z... qui a qualité à agir, étant rappelé qui si c'est son épouse qui gère le fonds de commerce de débit de tabac, il est son salarié tandis que les époux Z... sont mariés sous le régime de la communauté légale ;
Considérant que M. Z... a donc qualité pour agir ;
Sur la nullité alléguée des reconnaissances de dette
Considérant qu'il ne sera pas fait droit à la demande de l'appelant d'annuler les reconnaissances de dettes litigieuses, sur le fondement, dit-il dans ses écritures, de l'article 1130 du code civil, pour défaut de cause, la cause étant indiquée dans la deuxième reconnaissance comme étant une dette de jeux ;
Sur l'exception visée par l'article 1965 du code civil
Considérant que ce texte dispose que la loi n'accorde aucune action pour le paiement d'une dette de jeu ou pour le payement d'un pari ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats que M. X... prenait dans le débit le Malibu des tickets de jeux édités par la Française des jeux qu'il ne réglait pas mais qui étaient validés par M. ou Mme Z... lesquels inscrivaient la somme due par leur client sur un compte de régularisation sur lequel l'appelant était désigné sous le surnom de Mousse ;
Considérant que la seconde reconnaissance de dette mentionne expressément comme cause une dette de jeux de sorte que M. Z... ne démontre nullement que la somme due concernait également des consommations dans le bar, des achats de cigarettes etc ..... ;
Considérant que les sommes litigieuses ont donc pour origine une ouverture de crédit en vue de la pratique des jeux de hasard, de sorte que M. X... peut se prévaloir des dispositions de l'article 1965 du code civil, sans qu'il y ait lieu de distinguer là où ce texte ne distingue pas, entre les jeux réglementés ou les autres, comme l'a fait le premier juge, ni, comme le soutient l'intimé, selon que le prêteur est l'organisateur du jeu ou pas, comme en l'espèce ;
Considérant que le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions et M. Z... débouté de toutes ses demandes contre M. X... ;
Considérant que M. Z... supportera la charge des dépens de première instance et d'appel, aucun élément ne justifiant d'accueillir la demande formée par M. X..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
PAR CES MOTIFS :
Déclare l'appel recevable,
Infirmant le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau ;
Déboute M. Z... de toutes ses demandes en paiement contre M. X...,
Rejette toute autre demande,
Condamne M. Z... aux dépens de première instance et d'appel et dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile et la loi sur l'aide juridictionnelle.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,