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22/11/2007 | FRANCE | N°06/06853

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0139, 22 novembre 2007, 06/06853


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 22 novembre 2007

(no , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/06853

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 septembre 2005 par le conseil de prud'hommes de Paris (2o Ch) section encadrement - RG no 02/00161

APPELANTE

SA EFI (EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE)

...

75008 PARIS

représentée par Me Grégory CHASTAGNOL (SCP FROMONT BRIENS ET ASSOCIES), avocat au barreau de PARIS, t

oque : P.107

INTIME

Monsieur Christophe-Olivier X...

Birket 1

D 82064 STRASSLACH-DINGHARTING

ALLEMAGNE

représenté par Me Pierre-L...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 22 novembre 2007

(no , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/06853

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 septembre 2005 par le conseil de prud'hommes de Paris (2o Ch) section encadrement - RG no 02/00161

APPELANTE

SA EFI (EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE)

...

75008 PARIS

représentée par Me Grégory CHASTAGNOL (SCP FROMONT BRIENS ET ASSOCIES), avocat au barreau de PARIS, toque : P.107

INTIME

Monsieur Christophe-Olivier X...

Birket 1

D 82064 STRASSLACH-DINGHARTING

ALLEMAGNE

représenté par Me Pierre-Luc NISOL, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 octobre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Françoise CHANDELON, Conseiller

Madame Evelyne GIL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.

Vu l'appel régulièrement interjeté par la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE à l'encontre d'un jugement prononcé le 27 septembre 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS ayant statué sur le litige qui l'oppose à Monsieur Christoph X... sur ses demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Vu le jugement déféré qui a condamné la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE à payer à Monsieur Christoph X... les sommes suivantes :- 20 031,80 € au titre de l'indemnité de préavis et 2 003,18 € pour les congés payés afférents,

- 25 000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

avec intérêts au taux légal,

- 500 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

et l'a débouté du surplus de ses demandes.

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

La S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE, appelante, poursuit l'infirmation du jugement déféré et sollicite la condamnation de Monsieur Christoph X... au paiement de 2 500 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Monsieur Christoph X..., intimé, conclut à la confirmation du jugement du chef de la condamnation au titre de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents ; il demande en outre que soit portés à 40 000 € les dommages-intérêts pour rupture abusive ainsi que la condamnation de la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE à lui payer 90 000 € de rappel de commissions et 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

Après avoir réalisé à compter de juillet 2000 de la prospection commerciale en Allemagne pour le compte de la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE, Monsieur Christoph X... a conclu avec cette société un contrat de travail daté du premier avril 2001, lequel prévoyait notamment une période d'essai de 6 mois. Par courrier du 21 septembre 2001, la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE a signifié à Monsieur Christoph X... qu'elle mettait un terme à la période d'essai.

SUR CE

Sur le contrat de travail.

1/ La période antérieure au premier avril 2001.

Spécialisée dans l'introduction en bourse sur la place de Paris, la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE a souhaité élargir sa clientèle aux sociétés allemandes. Elle est ainsi entrée en relation avec Madame Renate Y... avec laquelle ont été conclues des conventions d'apport d'affaires. Madame Y... a présenté à la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE son fils, Monsieur Christoph X..., qui disposait déjà d'une expérience professionnelle dans le milieu de la finance. Monsieur Christoph X... a lui-même oeuvré au développement d'EFI en Allemagne et soutient que c'était dans le cadre d'un contrat de travail non écrit.

Cependant, il résulte clairement des pièces versées aux débats que les interventions de Monsieur Christoph X... venaient au soutien de l'activité de sa mère et qu'il était rémunéré par cette dernière sur les commissions que lui versait la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE. Monsieur Christoph X... percevait donc non des salaires mais des honoraires qui n'étaient même pas négociés par lui avec la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE puisque c'est Madame Y... qui se chargeait de la redistribution (son courrier à la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE en date du 26 février 2001). Si l'employeur peut payer son salarié par l'intermédiaire d'un tiers, encore faut-il que cette opération soit clairement définie, notamment quant à la nature et au montant des sommes dues comme à la régularité de leur versement, éléments qui ne se rencontrent pas en l'espèce, Monsieur Christoph X... se contentant d'invoquer sans preuve une commodité voulue par la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE.

Monsieur Christoph X... n'avait pas de contact direct constant avec la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE, il ne recevait pas d'elle des instructions pouvant caractériser un lien de subordination et il ne lui rendait pas compte de son activité à la manière d'un subordonné. Pour démontrer l'inverse, il produit un fax datant du début de la collaboration (10 juillet 2000) dans lequel il remercie pour le bon accueil qu'il a reçu, expose son activité commerciale et il termine son message ainsi : "merci de me faire savoir si je dois vous adresser les coordonnées des destinataires des mailings ou si préférez que ceci soit géré en Allemagne." Toutefois il ne résulte pas de cette pièce que Monsieur Christoph X... était dans l'attente d'ordres d'un employeur mais plutôt qu'il cherchait à préciser le modus vivendi d'une coopération commerciale naissante.

Monsieur Christoph X... se prévaut également du titre de directeur Allemagne de la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE qu'il utilisait habituellement et qui était repris sur des documents de la société, notamment son site internet. Toutefois cette appellation, qui apparaît plutôt en l'espèce comme une facilité de langage dans l'attente de la création d'une filiale allemande et permettait de positionner Monsieur Christoph X... aux yeux des tiers, n'implique pas nécessairement un statut de salarié. D'ailleurs dans la pièce 19 qu'il produit, une plaquette de présentation d'EFI en langue allemande, Monsieur Christoph X... figure, pour l'Allemagne, à une place identique à celle des membres de la famille Z... et de sa mère pour la France ; il est ainsi sur un pied d'égalité avec les membres du directoire et du conseil de surveillance de la société anonyme et avec Madame Y..., qui s'intitule consultante et qui n'a de son côté jamais prétendu à un statut de salarié. Ces documents établissent l'existence d'une relation commerciale mais non d'un contrat de travail.

Le projet d'organigramme constituant la pièce 2 de Monsieur Christoph X... n'est pas plus probant puisqu'il est postérieur au premier avril 2001, date du contrat de travail écrit.

Enfin, Monsieur Christoph X... s'appuie sur l'attestation de Madame Nadine A..., ancienne salariée de la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE, qui indique être entrée dans l'entreprise le 5 février 2001 et s'être vu présenter Monsieur Christoph X... comme chargé du développement commercial en Allemagne et rendant compte directement à Monsieur Louis Z.... Compte tenu de la proximité chronologique entre l'embauche de Madame Nadine A... et la conclusion du contrat de travail écrit de Monsieur Christoph X..., et en dehors de toute autre précision de la part du témoin, il n'est pas possible de dire si elle décrit la situation avant ou celle après le premier avril 2001.

Mais l'invraisemblance d'un contrat de travail tacite remontant à juillet 2000 résulte au premier chef du courrier de Monsieur Christoph X... lui-même en date du premier avril 2001 dont les termes sont sans ambiguïté : "J'ai bien reçu votre proposition d'embauche au sein de votre groupe EFI à compter du 2 avril 2001. Votre proposition est honorable et j'adhère à celle-ci en mesurant pleinement sa valeur. Le contenu de cette offre correspond parfaitement à mes attentes..."

Il se déduit bien des termes de ce courrier que Monsieur Christoph X... a conscience de changer de statut par l'effet du contrat proposé. Il ne fait aucunement valoir que ce contrat ne serait que la régularisation d'une situation de fait. Il se réjouit d'entrer "au sein (du) groupe EFI", ce qui exprime bien qu'il n'en faisait pas partie précédemment et qu'il n'entretenait jusqu'alors que des relations commerciales dans un cadre au demeurant mal défini tandis que son embauche lui confère un statut clair et pérenne.

2/ La période postérieure au premier avril 2001.

Titulaire d'un contrat de travail, Monsieur Christoph X... reçoit sa rémunération de la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE dès avril 2001 et doit rendre compte régulièrement de son activité. Sa situation de fait change donc immédiatement du tout au tout et cela par l'effet de la modification juridique apportée par le contrat de travail.

Les parties s'opposent sur la date à laquelle ce contrat a été formellement signé. Il est en tout cas incontestable que sa date d'effet est le 2 avril 2001, la date de signature important peu.

Ce contrat prévoit une période d'essai de 6 mois, comme l'autorise la convention collective applicable. Monsieur Christoph X... soutient qu'il a été dupé sur ce point. Toutefois la disposition relative à cette clause figure de manière très évidente sur le document, en majuscule gras souligné et dans un format de police particulièrement lisible ; Monsieur Christoph X... a porté son paraphe sur la page où elle est formulée. Ancien cadre bancaire, homme d'affaires, il est particulièrement à même de lire un document juridique de cette nature et d'en comprendre la portée. Il n'établit d'ailleurs aucune manoeuvre, de quelque sorte que ce soit, qui l'aurait poussé à signer ce document contre son gré ou simplement de manière inattentive.

Monsieur Christoph X... ne peut prétendre que la période d'essai a commencé dès ses premières relations avec la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE, quel qu'en soit le cadre juridique, car sa collaboration antérieure avec cette société n'impliquait pas les mêmes droits et obligations, de part et d'autre.

Monsieur Christoph X... dénonce le procédé ayant consisté à lui faire signer son contrat de travail le jour même où lui était expédiée la lettre de rupture. La date précise de signature n'est pas établie mais la thèse de Monsieur Christoph X... sur ce point, corroborée par l'attestation de Madame Nadine A..., est recevable. Toutefois Monsieur Christoph X... ne peut contester que ce contrat, même non signé, s'exécutait normalement depuis avril 2001 et que sa signature ne constituait qu'une régularisation. Il ne peut être surpris qu'un tel contrat contienne une clause sur la période d'essai. Par ailleurs il n'ignorait pas que la direction de la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE s'inquiétait de la réalité et de la qualité de son travail, puisqu'il avait reçu des messages de relance. Le procédé dénoncé, à défaut d'être élégant, est donc juridiquement valide.

La rupture de la période d'essai étant spécifiée sans indemnité, il convient de débouter Monsieur Christoph X... de ses demandes relatives au préavis et aux dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le rappel de commissions.

Le contrat de travail de Monsieur Christoph X... comportait un article 7 consacré à la rémunération et dont l'alinéa premier est rédigé en ces termes : "En contrepartie de l'accomplissement de ses fonctions, Monsieur Christoph X... percevra une rémunération forfaitaire annuelle brute (...) et d'une partie variable qui fera l'objet d'un avenant ultérieur sur le principe d'un commissionnement de 10 % sur la marge brute des honoraires fixes encaissés générés par vos actions commerciales (...)".

Il est ainsi constant que l'entrée en vigueur du commissionnement était soumis à la rédaction d'un avenant qui n'est jamais intervenu, ces dispositions étant prises pour permettre le passage du système des honoraires à celui de la rémunération variable destinée à s'appliquer après la création de la filiale allemande.

Il convient donc là encore de débouter Monsieur Christoph X... de ses demandes.

Le présent arrêt, infirmatif du jugement déféré, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution de ce jugement, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande formée par la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE de ce chef.

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens.

Succombant au principal, Monsieur Christoph X... sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

Il y a lieu, en équité, de laisser à la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE la charge de ses frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement déféré.

Déboute Monsieur Christoph X... de l'ensemble de ses demandes.

Condamne Monsieur Christoph X... aux dépens de première instance et d'appel.

Laisse à la S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE la charge de ses frais non compris dans les dépens.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0139
Numéro d'arrêt : 06/06853
Date de la décision : 22/11/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 27 septembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-11-22;06.06853 ?
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