RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
22ème Chambre C
ARRET DU 18 octobre 2007
(no , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 04/30085
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 octobre 2003 par le conseil de prud'hommes de Paris (8o Ch) - section commerce - RG no 02/13023
APPELANTE
S.A.R.L. PA DIV
118-130 Avenue Jean Jaures
75019 PARIS
représentée par Me Mohamed LOUKIL, avocat au barreau de PARIS, toque : J 69 substitué par Me Nathalie RENARD, avocat au barreau de PARIS,
INTIMES
Me Gérald Y... - Mandataire liquidateur de la S.A.R.L. JMS
5/7 rue de l'Amiral Courbet
94165 SAINT MANDE CEDEX
représenté par Me Christophe SANTELLI-ESTRANY, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1734 substitué par Me Isabelle Z..., avocat au barreau de PARIS,
Monsieur Rabia A...
41 Rue de Belleville
75019 PARIS
comparant en personne, assisté de M. Stéphane B... (Délégué syndical ouvrier)
PARTIES INTERVENANTES :
UNEDIC - AGS CGEA IDF OUEST
90, rue Baudin
92300 LEVALLOIS PERRET,
représenté par Me Hélène NEGRO DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : R 297
Société PACT
67 rue du Pieu
78130 LES MUREAUX,
représentée par Me Mohamed LOUKIL, avocat au barreau de PARIS, toque : J 69 substitué par Me Nathalie RENARD, avocat au barreau de PARIS,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 septembre 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise CHANDELON, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président
Madame Françoise CHANDELON, conseiller
Madame Evelyne GIL, conseiller
Greffier : Mme Danielle PAVARD, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président - signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.
Vu l'appel régulièrement interjeté par la société PADIV à l'encontre d'un jugement prononcé le 7 octobre 2003 par le Conseil de prud'hommes de PARIS, section commerce, chambre 8, qui a statué sur le litige qui l'oppose à Rabia A... sur les demandes de celui-ci relatives à la rupture de son contrat de travail,
Vu le jugement déféré qui a condamné la société PADIV à payer à Rabia A... :
- 1.460,89 €. au titre de rappel de congés payés,
- 2.921,78 €. au titre de l'indemnité de préavis et 292,17 €. pour les congés payés afférents,
- 1.227,14 €. au titre de l'indemnité de licenciement,
- 4.382,67 €. au titre des salaires dus pour la période du 1er juillet au 25 octobre 2002,
avec intérêts au taux légal à compter de la saisine,
- 4.050 €. à titre de dommages intérêts pour rupture abusive,
avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
et à remettre sous astreinte les bulletins de paie, certificat de travail et l'attestation ASSEDIC conformes à la décision,
- 300 €. au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Vu l'arrêt de ce siège en date du 8 décembre 2005 qui a :
- confirmé le jugement en ce qu'il a analysé la rupture du contrat de travail de Rabia A... en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- avant dire droit sur l'indemnisation du salarié, ordonné la mise en cause de la société PACT et la production des bulletins de salaires du salarié à compter du mois de mars 2002 ;
Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience, aux termes desquelles :
La société PADIV, appelante, poursuit l'infirmation du jugement déféré, sollicite sa mise hors de cause et la condamnation de Rabia A..., solidairement avec Mo Y... ès qualités, au paiement de la somme de 2.000 €. au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
La société PACT, intervenante forcée, juge irrecevable son appel en la cause et conclut subsidiairement au débouté de Rabia A..., au motif que le contrat de location gérance conclu avec la société JMS aurait été résilié et qu'il n'aurait pas reçu d'exécution,
Mo Y..., ès qualités et l'UNEDIC-AGS CGEA IDF OUEST (UNEDIC), intimés, concluent à la confirmation du jugement, le premier sollicitant le paiement de la somme de 1.500 €. en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et la seconde rappelant les conditions de sa garantie ;
Vu les observations orales de Rabia A... qui conclut à la confirmation du Jugement quant au montant des sommes allouées, s'en remettant à l'appréciation de la Cour pour déterminer quelle partie en supportera la charge, précise n'avoir pas reçu d'autres bulletins de salaires que ceux déjà communiqués et avoir travaillé sous la direction de M. C... ;
CELA ETANT EXPOSE
Rabia A... a été embauché par une société FOURCADE, exploitant un fonds de commerce de restaurant sous l'enseigne "le CHALET MAYA", sis 5 rue des Petits Hôtels à Paris Xème, le 13 février 1995.
A la suite de la cession du fonds à la société JMS, il signait un nouveau contrat avec celle ci le 29 octobre 1997.
Il exerçait aux termes de cette convention les fonctions de plongeur, niveau 1, échelon 1 pour un salaire mensuel de 7.355,54 F.
Par acte sous seing privé du 20 février 2002 à effet au 11 mars 2002, la société JMS donnait son fonds en location gérance à la société PACT en formation qui devait être immatriculée le 28 novembre 2002, M. C... en étant le gérant.
A compter du 1er juillet, le salarié ne percevait plus son salaire.
Le 2 septembre 2002, il constatait que le restaurant avait brûlé.
Il sollicitait le 13 suivant sa mise en chômage technique et, ne recevant ni réponse, ni paiement de la rémunération due, prenait acte de la rupture de son contrat le 25 octobre après avoir saisi le Conseil de prud'hommes le 17 précédent.
Par Jugement du 5 novembre 2002 le tribunal de commerce de Paris prononçait la liquidation judiciaire de la société JMS et par courrier recommandé du 19 novembre 2002 MoAYACHE, nommé mandataire liquidateur, notifiait à Rabia A... son licenciement économique.
Rabia A... ayant à cette date saisi la juridiction prud'homale ne se déplaçait pas pour effectuer les démarches nécessaires au paiement des sommes dont il était redevable.
Mo Y... ayant retrouvé l'acte de location gérance mettait en cause dans cette instance la société PADIV qui ne comparaissait pas à l'audience de jugement.
Rabia A... déduisant de l'existence de ce même contrat que la société PADIV était son seul employeur ne formulait plus de demande à l'encontre de la liquidation et le conseil des prud'hommes prononçait la mise hors de cause de Mo Y..., ès qualités et de l'UNEDIC, condamnant la société PADIV dans les termes de la demande.
En cause d'appel, la société PADIV exposait ne pas être le locataire gérant et sollicitait sa mise hors de cause.
La Cour estimant ne pouvoir statuer sur le transfert du contrat de Rabia A... hors la présence du gérant de droit, la société PACT, ordonnait son intervention forcée.
SUR CE
Sur l'irrecevabilité de la mise en cause de la société PACT
Considérant qu'aux termes de l'article 552 du nouveau Code de procédure civile, la
Cour peut ordonner d'office la mise en cause de tous les coïntéressés ;
Considérant qu'aux termes de l'article L122-12 alinéa 2 du Code du travail, texte d'ordre public, la mise en location gérance d'un fonds de commerce entraîne de droit le transfert des contrats de travail des salariés au nouvel exploitant ;
Qu'il en résulte que la mise en cause de la société PACT entre bien dans les prévisions du texte précité ;
Considérant encore que l'article 555 du nouveau Code de procédure civile autorise l'appel des personnes concernées par le litige devant la Cour même aux fins de condamnation dès lors que l'évolution du litige implique leur mise en cause ;
Considérant qu'en l'espèce, l'évolution du litige résulte de la position juridique prise en cause d'appel par la société PADIV, défaillante en première instance, qui a nié sa qualité de gérant de fait que laissaient supposer les pièces produites devant la juridiction prud'homale ;
Qu'il apparaît en effet que même si juridiquement la société PACT, alors en formation et qui ne sera finalement immatriculée que le 28 novembre 2002, apparaît comme le signataire du contrat de location de gérance produit devant les premiers juges, c'est à M. C..., en sa qualité de gérant de la société PADIV que M. D... s'est adressé le 28 février 2002 pour "dénoncer" ledit contrat s'estimant victime d'un vice de consentement ;
Que l'exception d'irrecevabilité sera donc rejetée ;
Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d'appel
Considérant qu'aux termes de l'article R516-2 du Code du travail toute demande nouvelle même en cause d'appel est recevable dès lors qu'elle dérive d'un même contrat de travail ;
Considérant ainsi que le salarié peut étendre ses prétentions à toute partie que la Cour retiendrait comme son employeur ;
Sur la qualité d'employeur
* De la société PACT
Considérant que la mise en location gérance d'un fonds de commerce a pour objet de transférer une entité économique dont l'activité est poursuivie par le locataire gérant ;
Que sa publication n'étant pas une condition de validité de l'acte, la société PACT ne saurait le considérer comme dénué de valeur au motif qu'il n'a pas été procédé à cette formalité ;
Considérant qu'elle ne saurait davantage se prévaloir du courrier de résiliation de son bailleur dès lors que non seulement elle n'a pas donné son accord pour cette résiliation amiable mais que la société PADIV, agissant en son nom, a accepté, par courrier du 25 novembre 2002, de payer à MoAYACHE, es qualité, le montant du loyer dû depuis le mois de juillet 2002 ;
Considérant enfin que si elle n'a pas exploité personnellement le fonds comme il sera précisé ci-dessous, la société PADIV s'est substituée à elle comme l'établissent :
- le document intitulé "REMISE DE CLE" aux termes duquel cette personne morale a fait signer au préposé de Mo Y... venu récupérer les clés du local la réalité de la restitution à la date du 13 mars 2003, de celles de porte d'entrée, précisant n'avoir jamais été en possession des celles du bureau du sous-sol ou de la cave,
- le témoignage de Rabia A... sur la présence de M. C... à compter de la cession ;
Considérant enfin que la société PACT ne saurait se prévaloir du licenciement opéré par Mo Y..., qui s'imposait à titre conservatoire au regard de la complexité de la situation juridique ;
Qu'il convient en conséquence de considérer la société PACT comme employeur du salarié et tenue en cette qualité au paiement des indemnités de rupture ;
* De la société PADIV
Considérant que le gérant de cette société a entretenu une confusion sur la qualité en laquelle il intervenait dans cette opération, en écrivant parfois sur papier à en-tête de la société PADIV tout en donnant le numéro d'immatriculation de la société PACT, en gardant les clés de la porte d'entrée ou en versant personnellement, ou par l'intermédiaire de son gérant, personne physique une partie des sommes dues au salarié ;
Que par ailleurs il convient de constater qu'après avoir signé le contrat de location gérance, la société a retardé son immatriculation à laquelle elle n'a procédé qu'en novembre soit après la prise d'acte de rupture du salarié ;
Qu'elle doit dans ces conditions être considérée comme co-employeur de Rabia A... tenue in solidum avec elle du paiement des indemnités de rupture ;
Sur la mise hors de cause de Mo Y... ès qualités et de l'UNEDIC
Considérant qu'il convient, confirmant le jugement, de l'ordonner, la société JMS n'ayant plus la qualité d'employeur à la date de la prise d'acte de rupture ;
Sur les indemnités de rupture
Considérant que le salarié ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail le 25 octobre 2002 il convient de confirmer le jugement en ce qu'il lui a alloué outre le paiement de ses salaires jusqu'à cette date, une indemnité de préavis, les congés payés afférents, et une indemnité conventionnelle de licenciement ;
Considérant que compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle ci, la Cour estime que les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice subi en l'évaluant à la somme de 4.050 € en application des dispositions L.122-14-5 du code du travail,
Sur la remise de documents sociaux conformes
Considérant qu'il convient de confirmer la décision rendue ;
Sur l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile
Considérant que l'équité commande de confirmer la condamnation prononcée de ce chef et de débouter Mo Y... de sa demande fondée sur cette disposition ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Dit et juge les sociétés PACT et PADIV co-employeur de Rabia A...,
En conséquence ;
Confirme le Jugement en toutes ses dispositions et, y ajoutant, dit que les condamnations prononcées seront supportées, in solidum par les sociétés PACT et PADIV responsables l'une et l'autre de la remise, selon les modalités ordonnées par les premiers juges, de documents sociaux conformes ;
Déboute Mo Y... ès qualités de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne in solidum les sociétés PACT et PADIV aux dépens.
LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :