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27/09/2007 | FRANCE | N°54

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0262, 27 septembre 2007, 54


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre-Section F
ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2007

AUDIENCE SOLENNELLE
(no 54,5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 00004 ; 07 / 00085 ; 07 / 00399
Décision déférée à la Cour : décision du 19 décembre 2006 rendue par l'Ordre des Avocats de Paris-Conseil de Discipline
DEMANDEURS AU RECOURS :

M. LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE PARIS

COUR D'APPEL DE PARIS 34, quai des Orfèvres 75055 P

ARIS CEDEX 01

Représenté lors des débats par M. Olivier LAMBLING, Avocat Général

M. Charles X......

Non c...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre-Section F
ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2007

AUDIENCE SOLENNELLE
(no 54,5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 00004 ; 07 / 00085 ; 07 / 00399
Décision déférée à la Cour : décision du 19 décembre 2006 rendue par l'Ordre des Avocats de Paris-Conseil de Discipline
DEMANDEURS AU RECOURS :

M. LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE PARIS

COUR D'APPEL DE PARIS 34, quai des Orfèvres 75055 PARIS CEDEX 01

Représenté lors des débats par M. Olivier LAMBLING, Avocat Général

M. Charles X......

Non comparant Représenté par Me Pierre HAIK Avocat au Barreau de Paris Toque E 1305

M. LE BATONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE PARIS ES-QUALITE D'AUTORITE DE POURSUITE :

Conseil de l'Ordre des Avocats de Paris 11, Place Dauphine 75053 PARIS LOUVRE RP SP

Représenté par Me Albert CASTON Avocat au Barreau de Paris... Toque P156

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Juin 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
-Monsieur Claude GRELLIER, Président-Monsieur Jacques DEBÛ, Président-Madame Françoise KAMARA, Président-Monsieur Pierre-Alain WEILL, Président-Madame Catherine PIERCE, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Mlle Sabine DAYAN

DÉBATS : à l'audience tenue le 28 Juin 2007, on été entendus :

-M. Claude GRELLIER, en son rapport-M. Olivier LAMBLING, en sa demande et en ses observations-Me Albert CASTON, avocat représentant M. Le Bâtonnier de l'Ordre des avocats du Barreau de PARIS es-qualité d'autorité de poursuite, en sa demande et en ses observations-Me Pierre HAIK, avocat de M. Charles X..., en sa demande et en ses observations

ARRÊT :
-contradictoire
-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
-signé par M. Claude GRELLIER, président et par Mlle Sabine DAYAN, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

* * *

Inscrit au barreau d'Aix en Provence de 1958 à 1961, M. Charles X..., professeur agrégé des facultés de droit, conseiller à la présidence de la République de 1978 à 1981, a sollicité le 2 juillet 1989, se prévalant de la caution morale du vice président du conseil d'Etat et de celle du premier président de la Cour de cassation, son admission, très favorablement accueillie, au tableau de l'ordre des avocats au barreau de Paris, effective le 18 juillet 1989.

Le 15 mars 1981, M.X..., sur proposition du peintre Victor A..., a été nommé président de la Fondation par l'assemblée générale de l'association gestionnaire et l'est demeuré jusqu'au 8 avril 1993, date de la nomination de M.B..., en qualité d'administrateur provisoire. La nomination de M.X..., auquel le peintre était tout dévoué, avait été précédée par la signature, le 10 février 1981 par les époux A..., d'une convention avec l'Université d'Aix Marseille III, qui stipulait que l'Université acceptait d'assurer la direction de la Fondation avec la volonté de respecter la raison d'être et l'esprit de la Fondation A... tout en développant ses moyens d'action.
Trois ans plus tard, Victor A..., interrogeant M.X... sur la gestion des stocks de la Fondation qui comprenait des oeuvres lui appartenant, n'obtint pas de réponse. Le décès de l'épouse de Victor A... nourrit la méfiance puis accentua l'animosité de la famille envers le président de Fondation en raison des difficultés à reconstituer le patrimoine de la famille de l'artiste ; aussi trois plaintes ont elles été déposées, les 23 octobre 1992,5 janvier 1993 et 24 février 1994.
Une information judiciaire a été ouverte aux termes de laquelle M.X..., ainsi que M. Pierre C..., désigné en 1983 secrétaire général de la Fondation, puis à compter du 25 janvier 1988, délégué général de la Fondation chargé des expositions à l'étranger, ont été renvoyés devant la juridiction répressive sous diverses qualifications, s'analysant, outre les délits douaniers, en des abus de confiance commis en tant que président de la Fondation ou délégué général de la Fondation.
Par arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence en date du 11 mai 2005, devenu définitif aux termes du rejet, en date du 14 décembre 2005, de son pourvoi, M.X..., relaxé de divers chefs de la prévention retenu à son encontre par le magistrat instructeur, a été définitivement condamné à la peine de trois ans d'emprisonnement et à une amende de 18 293,89 €, la peine d'emprisonnement étant assortie du sursis à hauteur de deux ans ; M.X... a été placé, pour une durée de trois ans, sous le régime de la mise à l'épreuve avec l'obligation d'indemniser les victimes, étant précisé que la décision du 7 janvier 2003 a confirmé la peine d'interdiction des droits civils, civiques et de famille ; M.X... a été interdit de droit de vote et d'élection, d'éligibilité, privé du droit d'être appelé ou nommé aux fonctions de juré ou autres fonctions publiques, ou aux emplois de l'administration ou d'exercer ces fonctions ou emplois pendant une durée de cinq ans, conformément aux dispositions des article 42 et 408 du code pénal applicable à l'époque des faits et 131-26 du code pénal.
M.X... a, sur l'action civile, été condamné à verser à titre de dommages et intérêts aux consorts A... la somme de 350 000 € au titre du détournement des sommes versées par Circle Fine Art Corporation, à la Fondation A... la somme de 55 000 € au titre de ses dépenses personnelles, et solidairement avec M.C..., à titre de dommages et intérêts, la somme de 64 028 € correspondant à la valeur en douane des oeuvres AVEG et HAZAY, ainsi que 150 000 € en réparation de son préjudice moral, à André A..., Michèle A... et Pierre A..., ès qualités d'ayants droit de Victor A... et Jean-Pierre A... la somme de 45 000 € chacun en réparation de leur préjudice moral ; la Cour a ordonné la restitution des oeuvres GALL, LETZ IMBITUBA 2 et FONDAU appartenant à Victor A..., ordonné la restitution des oeuvres ALOM REES OSTOR et SURES appartenant à la Fondation, condamné M.X... à verser la somme de 30 000 €, solidairement avec M.C..., à la Fondation par application de l'article 475-1 du code de procédure pénale, et celle de 30 000 €, chacun, à André, Michèle et Pierre A... par application du même article.
Par courrier du 19 janvier 2006, le Procureur général a transmis pour enquête disciplinaire au bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris la copie de l'arrêt de rejet du pourvoi du 14 décembre 2005.
L'enquête déontologique a donné lieu à un rapport clôturé le 4 septembre 2006 par son rédacteur, M.E..., membre du conseil de l'ordre, et de la formation d'instruction. Ses investigations l'ont conduit à conclure que M.X..., qui n'a pas été entendu, mais a fait connaître par l'intermédiaire de son conseil M. Haïk ses observations et les motifs de sa carence, que justifierait son âge, son état de santé et une situation pénale complexe, devant le rapporteur, se serait rendu coupable de manquements à l'honneur et à la probité et qu'il n'exercerait pas sa profession d'avocat dans un domicile professionnel situé à Paris.
Par acte du 30 novembre 2006, M.X... a été cité à son domicile professionnel parisien... (75116) à comparaître devant le conseil de discipline du conseil de l'ordre du barreau de Paris pour y répondre de deux manquements déontologiques, tels qu'ils résultent de l'enquête déontologique à la quelle est annexée l'arrêt du 7 mai 2003 ci dessus rappelé, ce qui est passible d'une sanction disciplinaire en vertu de l'article 183 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, la dite enquête ayant en outre révélé que la domiciliation de M.X... à Paris, ... semblait fictive, ce qui est constitutif d'un second manquement, prévu par l'article 165 du décret précité qui dispose que l'avocat est tenu de fixer son domicile professionnel dans le ressort du tribunal de grande instance auprès duquel il est établi.
Par arrêté du 19 décembre 2006, le conseil de discipline a :-dit que M.X... s'était rendu coupable de manquements aux principes essentiels de la profession, notamment à l'honneur et à la probité, de même que d'un manquement à l'obligation d'exercer la profession d'avocat en conformité avec les dispositions du règlement intérieur du barreau de Paris et a violé les dispositions des article 1. 3 et 1. 5 dudit règlement.-prononcé à l'encontre de M.X... la sanction de trois ans d'interdiction temporaire de l'exercice de la profession d'avocat,-privé M.X... du droit de faire partie du conseil de l'ordre, du conseil national des barreaux et des autres organismes professionnels et d'exercer les fonctions de bâtonnier.

Le 3 janvier 2007, le Procureur général près la cour a formé un recours contre cette décision et en a informé le même jour le bâtonnier de Paris.
Le 9 janvier 2007, M. Larrére-Genevoix, substituant M. Haïk, avocat de M.X... a formé un recours incident contre cette même décision.
Par lettre du 11 janvier 2007, reçue au greffe de la cour le 19 janvier 2007, le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau deParis a déclaré former appel de cette décision.
Sur quoi, la cour,
Considérant que les trois recours concernent une seule et même décision ; qu'il convient d'ordonner la jonction des dossiers portant les numéros 07 0004,07 0085 et 07 00399 et de statuer par une seule et même décision ;
Considérant qu'au soutien de son recours, le Procureur général fait valoir que le conseil de discipline tout en relevant que les faits concernant la Fondation A... étaient d'une extrême gravité, n'a cependant pas tiré les conséquences qui s'imposaient de cette constatation, en ne prononçant pas la radiation, peine pourtant demandée à juste titre par l'autorité de poursuite ; qu'à l'audience il a développé cette argumentation en sollicitant que M.X... soit écarté de la profession d'avocat, en raison de la gravité des détournements en cause, du retentissement médiatique de l'affaire, et de la notoriété de M.X..., juriste de renom, aux éminentes qualités reconnues par les plus hautes autorités de la République ;
Considérant que M. Haïk, avocat de M.X..., absent à l'audience, réitérant sur les agissements constitutifs de manquements aux principes essentiels de probité la teneur des observations rédigées par M.X... déposées dans le cadre de l'enquête déontologiques ainsi que ses écritures développées oralement devant le conseil de discipline, excipe de l'irrégularité des poursuites disciplinaires, délimitées par l'acte de saisine de l'instance disciplinaire, au motif qu'elles incluent des faits commis antérieurement à l'inscription au barreau de Paris de M.X..., cette inscription, selon l'acte de saisine de l'instance disciplinaire, ayant eu lieu en décembre 1995 ;
Que le bâtonnier, en sa qualité d'autorité de poursuite, poursuivant la peine de la radiation, a pour sa part développé oralement ses conclusions écrites parvenues au greffe de la cour le 4 juin 2007 ; qu'il souligne que la répétition et la gravité des abus de confiance avérés ont clairement montré l'absence de scrupules de M.X... qui se considère comme en dehors de la loi commune, ce que confirme d'ailleurs son refus de déférer au mandat délivré à son encontre ; qu'il souligne en outre que le rapport d'enquête déontologique a démontré que la domiciliation de M.X... à Paris n'est pas réelle, l'intéresé s'étant étabi au Togo ; qu'ainsi la violation de l'article 1. 5 du règlement intérieur du barreau de Paris est avéré, ce qui constitue, à lui seul, un manquement habituellement sanctionné par la radiation ;
Considérant qu'il est constant que M.X... est inscrit au barreau de Paris depuis le 18 juillet 1989, comme énoncé en page deux du rapport d'instruction disciplinaire, qui précise que M.X... a prêté le serment d'avocat le 15 décembre 1958, dont en aucune occasion il n'a pu s'estimer délié ; que l'exception de nullité de la poursuite qui viserait des agissements antérieurs à la prestation de serment d'avocat de M.X... manque en fait, la date de 1995, manifestement erronée, seulement indiquée en page deux du rapport du 3 février 2006 de M.F... ne viciant nullement la saisine de l'instance disciplinaire ; que celle de 1995 n'est pas reprise dans le rapport d'instruction disciplinaire du 4 septembre 2006 de M.E... ;
Considérant de surcroît qu'il résulte suffisamment de l'instruction disciplinaire et des débats à l'audience que les agissements reprochés, constitutifs d'abus de confiance, sont autant de manquements aux principes essentiels, tels qu'édictés par l'article 183 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ; que ces manquements ont été commis alors que M.X... était inscrit au barreau de Paris ;

Considérant enfin que l'absence de domicile professionnel réel à Paris de M.X... est avérée ; qu'en effet, l'intéressé s'est établi, selon ses propres déclarations, au Togo, laissant son cabinet parisien à la seule disposition de son collaborateur, M.G....
Considérant qu'il convient en conséquence de prononcer, eu égard à la gravité des manquements reprochés à M.X..., la peine de la radiation.

PAR CES MOTIFS

-Ordonne la jonction des procédures enregistrés sous les numéros RG 07 / 00004,07 / 00085,07 / 00399 ;-rejette l'exception d'irrégularité de la saisine de l'instance disciplinaire ;-prononce à l'encontre de M. Charles X... la peine de la radiation du tableau de l'ordre des avocats du barreau de Paris ;-condamne M. Charles X... aux depens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0262
Numéro d'arrêt : 54
Date de la décision : 27/09/2007

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-09-27;54 ?
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