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06/09/2007 | FRANCE | N°06/01481

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0139, 06 septembre 2007, 06/01481


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 06 septembre 2007

(no , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/01481

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 mai 2005 par le conseil de prud'hommes de Paris (5o Ch) - section encadrement - RG no 02/07549

APPELANTE

S.A. TRIGANO

100 rue Petit

75019 PARIS

représentée par Me Olivier FASSI, avocat au barreau de PARIS, toque : B 857

INTIMEE

Mme Hélène X...


...

75002 PARIS

comparant en personne, assistée de Me Elisabeth MEYER, avocat au barreau de PARIS, toque : A 686

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affai...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 06 septembre 2007

(no , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/01481

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 mai 2005 par le conseil de prud'hommes de Paris (5o Ch) - section encadrement - RG no 02/07549

APPELANTE

S.A. TRIGANO

100 rue Petit

75019 PARIS

représentée par Me Olivier FASSI, avocat au barreau de PARIS, toque : B 857

INTIMEE

Mme Hélène X...

...

75002 PARIS

comparant en personne, assistée de Me Elisabeth MEYER, avocat au barreau de PARIS, toque : A 686

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 mai 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Gérard PANCRAZI, président

Mme Françoise CHANDELON, conseillère

M. Eric MAITREPIERRE, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Mme Françoise CHANDELON, conseiller,

- signé par Mme Françoise CHANDELON, conseiller, par suite d'un empêchement du président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.

Vu l'appel régulièrement formé par la société TRIGANO contre un jugement du Conseil de prud'hommes de Paris en date du 31 mai 2005 qui a statué sur le litige qui l'oppose à Hélène X... sur ses demandes en paiement relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail,

Vu le jugement déféré, qui a requalifié la faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société TRIGANO à payer à Hélène X..., avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et jusqu'au jour du paiement, les sommes suivantes :

- 1 952,94 € à titre de complément maladie en deniers ou quittance,

- 1 712 € au titre du 13ème mois,

- 2 031,53 € à titre de prime,

- 20 544,40 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 2054,44 € pour les congés payés afférents,

– 76 715,28 € à titre d'indemnité de licenciement,

Avec intérêts au taux légal à compter du jugement, celle de 34 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que la somme de 450 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Hélène X... étant déboutée du surplus de sa demande,

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience, aux termes desquelles :

La société TRIGANO, appelante, poursuit l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de constater qu'Hélène X... a, de son propre chef, décidé de quitter la société le 31 mai 2002 alors que ni sa fonction ni ses prérogatives n'étaient mises en cause et que ce n'est qu'à l'issue d'un délai qui lui a été laissé pour réintégrer son poste, qu'elle n'a pas mis à profit, qu'elle s'est vue notifier son licenciement, de la débouter en conséquence de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Hélène X..., intimée, demande à la cour de dire :

– quelle a été victime d'une rétrogradation injustifiée,

– que la société TRIGANO a exécuté de manière fautive le contrat de travail,

– que la modification imposée à son contrat de travail justifiait sa prise d'acte de rupture,

– que la rupture de son contrat de travail constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Elle demande en conséquence la confirmation des sommes allouées en première instance mais conclut à l'infirmation du jugement sur les heures supplémentaires et des congés payés afférents qu'elle réclame à hauteur respectivement de 379,95 € et 37,99 €,

Elle sollicite la réforme du jugement du chef de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, réclamant 76 715,28 € au lieu des 34 000 € alloués, outre 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Y ajoutant, elle réclame la somme de 14 590 € à titre de dommages et intérêts pour perte du droit d'exercer les 250 options qui lui avaient été attribuées dans le cadre d'un plan de souscription d'actions et sollicite que les sommes allouées aux différents titres soient capitalisées et portent intérêts à partir de l'introduction de la demande,

Elle conclut, enfin, au rejet des demandes de l'appelante et lui réclame 3 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

CELA ETANT EXPOSE

Par contrat en date du 28 mars 1975, Hélène X... a été engagé par la société TRIGANO LOISIRS en qualité de secrétaire générale,

À compter du 1er janvier 1978, son contrat de travail a été transféré à la société COMPAGNIE TRIGANO devenue par suite la société TRIGANO,

Par lettre du 31 mai 2002, Hélène X... a signifié à son employeur qu'elle quittait l'entreprise en imputant à celui-ci la responsabilité de la rupture et saisi le conseil des prud'hommes le 12 juin 2002 en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société TRIGANO,

Par lettre en date du 6 février 2003, elle a été licenciée pour faute grave pour les motifs suivants :

« (..) Nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour faute grave en raison de votre absence injustifiée depuis plus d'un mois (...) »

SUR CE

Sur la prise d'acte

Considérant que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail, en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient,

Que si le comportement fautif de l'employeur n'est pas établi, la prise d'acte aura les effets d'une démission,

Considérant que dans son courrier du 31 mai 2002, Hélène X... reproche à son employeur une rétrogradation depuis février 2002 caractérisée par une perte de responsabilité « sans fondement » ;

Considérant qu'il résulte des pièces des débats que, jusqu'à une note du 22 février 2002, existait au sein de la société TRIGANO un service juridique qui avait la responsabilité de la rédaction des contrats et protocoles, de la gestion des contentieux, du secrétariat des sociétés (partiellement), du droit des sociétés, de l'immobilier, de la propriété industrielle (partiellement) et du comité de groupe,

Que le secrétariat général dont Hélène X... était responsable avait lui en charge la gestion du personnel, le secrétariat des sociétés (partiellement) la propriété industrielle (partiellement) les procurations bancaires et l'enregistrement des contrats,

Considérant que la note précitée a rappelé que les différentes fonctions juridiques de la société TRIGANO étaient réparties entre deux services, que cette répartition entre service était" peu claire, sujette à erreurs, retards et absence de fluidité" ; que la fonction secrétariat des sociétés présentait des retards importants dans la retranscription des procès-verbaux sur les différents registres sociaux,

Qu'il a été décidé en conséquence qu‘Hélène X... devrait se concentrer sur les fonctions de gestion du personnel ( Trigano et ses filiales, gestion de la paie, gestion des cadres dirigeants du groupe, gestion des régimes de prévoyance santé, audit social des filiales etc.), au suivi et à la mise à jour des procurations bancaires, ainsi qu'à des missions spécifiques dans le cadre de la politique pilotée par la direction générale de croissance externe ; qu'elle continuera à dépendre hiérarchiquement du directeur général adjoint et bénéficiera d'un secrétariat adapté aux besoins,

Considérant que cette réorganisation a été préparée et voulue par Hélène X... comme le démontre sa lettre du 9 mars 2001 en réponse à son évaluation ; que dans cette lettre elle dit aspirer à ce que la charge de travail induite par ses trois fonctions – propriété industrielle, secrétariat des sociétés, secrétariat général du personnel – qui n'a jamais cessé de croître, puisse s'accomplir dans des conditions telles qu'elles préservent ses capacités de travail et tiennent compte de ses antécédents de santé ; qu'elle a en outre transmis à sa direction le 16 mars 2001 une note comportant des propositions de réorganisation,

Considérant que, faisant suite à la note du 22 février 2002, une lettre du même jour a précisé à Hélène X... son nouveau périmètre d'intervention comportant la fonction de gestion du personnel pour la société TRIGANO et ses filiales, le suivi et la mise à jour des procurations bancaires, des fonctions d'audit social pour les opérations de croissance externe ; que son salaire a été augmenté à partir du 1er janvier 2002 et qu'il lui a été confirmé le bénéfice d'une prime annuelle de 4600 € ; que la direction précise avoir pris en compte son ancienneté, sa loyauté et son sens de l'entreprise ainsi que sa santé précaire pour ne pas modifier sa dépendance hiérarchique,

Considérant en conséquence que, contrairement à ce que soutient Hélène X..., la réorganisation du secrétariat général s'est faite en tenant compte de ses propositions, de son souhait d'être déchargée de plusieurs dossiers et des problèmes de santé qu'elle a invoquée ; que les tâches restant dévolues au secrétariat général après la réorganisation n'étaient pas manifestement réduites, pour un groupe qui comporte des dizaines de filiales et emploie plusieurs milliers de salariés ; qu'il n'y avait ni rétrogradation fonctionnelle ni perte de salaire,

Considérant par suite que la prise d'acte du 31 mai 2002 doit s'analyser comme une démission de la salariée ; que le jugement sera infirmé de ce chef,

Considérant que le contrat est ainsi rompu à la date de la lettre de la prise d'acte et que tout licenciement postérieur doit être considéré comme non avenu sans qu'il y ait lieu d'examiner le ou les griefs allégués,

Sur le complément de salaire, le rappel de prime et le 13e mois

Considérant qu'Hélène X... réclame la somme de 1952,94 € représentant la différence entre ce qu'elle a perçu pour les mois d'octobre et novembre 2002 et ce qu'elle aurait dû percevoir en considération des indemnités journalières versées ; 2031,53 € au titre de rappel de prime, celle promise au titre de l'année 2002 étant sensiblement inférieure à la moyenne de celles obtenues en 2000 et 2001 ; 1712 € au titre du 13e mois,

Considérant que ces demandes sont étayées par les pièces produites aux débats et que la société TRIGANO n'y oppose aucune contestation ; que le jugement sera confirmé de ces chefs,

Sur les heures supplémentaires

Considérant que, si selon l'article L.212-1-1 du Code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il

appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande,

Considérant qu'Hélène X... soutient avoir effectué 15 heures supplémentaires en 1997 mais que cette affirmation n'est étayée par aucune pièce,

Considérant en conséquence qu'elle sera déboutée à ce titre,

Sur la perte du droit d'exercer des options

Considérant que le 31 décembre 2001, le conseil d'administration de la société TRIGANO a attribué à Hélène X... 250 actions avec option d'achat, la période d'exercice des options commençant à courir le 14 novembre 2006,

Considérant cependant qu'en vertu de l'article quatre du Plan d'options de souscription d'actions, le bénéficiaire perd son droit d'option en cas de démission, de licenciement, de départ en retraite et préretraite, ou révocation, la possibilité de lever l'option prenant fin, en particulier, dès réception de la lettre de démission,

Considérant ainsi que sa lettre de prise d'acte a privé Hélène X... du droit d'exercer ses options ; qu'elle ne saurait en conséquence réclamer une indemnisation,

Sur la procédure abusive

Considérant que la preuve n'est pas établie d'une procédure abusive diligentée par la société TRIGANO,

Sur la capitalisation des intérêts

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 1154 du Code civil les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; qu'il convient en l'espèce d'ordonner la capitalisation des intérêts de droit échus,

Sur la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Considérant que la société TRIGANO et Hélène X... demandent à être indemnisés pour les frais exposés dans la présente instance et qui ne sont pas compris dans les dépens,

Considérant que l'équité commande de les débouter de leurs demandes.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré du chef du complément de salaire, du rappel de prime et du 13e mois.

L'infirme pour le surplus.

Ordonne la capitalisation des intérêts de droit échus sur les sommes portant condamnation,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Condamne Hélène X... aux dépens.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0139
Numéro d'arrêt : 06/01481
Date de la décision : 06/09/2007

Références :

ARRET du 25 mars 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 mars 2010, 07-44.656, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 31 mai 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-09-06;06.01481 ?
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