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22/03/2007 | FRANCE | N°05/7517

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0139, 22 mars 2007, 05/7517


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 22 mars 2007

(no , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/07517

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 mars 2005 par le conseil de prud'hommes de Paris (3 Ch) - section commerce - RG no 04/1903

APPELANT

M. Laurent X...

...

75008 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Alexandre DE PLATER, avocat au barreau de PARIS, toque : E 395, substitué par Me Domitille HOFFNER

, avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE

S.A. ORANGE FRANCE

41/45 Boulevard Romain Rolland

92120 MONTROUGE

représentée par Me Jean-S...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre C

ARRET DU 22 mars 2007

(no , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/07517

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 mars 2005 par le conseil de prud'hommes de Paris (3 Ch) - section commerce - RG no 04/1903

APPELANT

M. Laurent X...

...

75008 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Alexandre DE PLATER, avocat au barreau de PARIS, toque : E 395, substitué par Me Domitille HOFFNER, avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE

S.A. ORANGE FRANCE

41/45 Boulevard Romain Rolland

92120 MONTROUGE

représentée par Me Jean-Sébastien CAPISANO, avocat au barreau de PARIS, toque : P.107

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 février 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Eric MAITREPIERRE, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Gérard PANCRAZI, président

Mme Françoise CHANDELON, conseiller

M. Eric MAITREPIERRE, conseiller

Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par M. Gérard PANCRAZI, président

- signé par M. Gérard PANCRAZI, président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.

Vu l'appel régulièrement formé par Laurent X... contre un jugement du Conseil de prud'hommes de Paris en date du 22 mars 2005 qui a statué sur le litige qui l'oppose à la société ORANGE FRANCE sur ses demandes en paiement et remise de pièces relatives à la rupture de son contrat de travail,

Vu le jugement déféré, qui a débouté Laurent X... de ses demandes,

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience, aux termes desquelles :

Laurent X..., appelant, poursuit l'infirmation du jugement déféré pour les chefs de demande dont il a été débouté. Il demande à la cour de dire nul et de nul effet son licenciement et de condamner la société ORANGE FRANCE à lui payer la somme de 28 538,46 € à titre de dommages et intérêts, subsidiairement de dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ou ne repose pas sur une faute grave et de lui allouer la même somme.

Il réclame en outre :

- 3 170,94 € au titre de l'indemnité de préavis et 317,09 € pour les congés payés afférents,

- 5 509,89 € au titre de l'indemnité de licenciement,

- 3 000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

La société ORANGE FRANCE, intimée, demande à la cour de constater l'absence de modification du contrat de travail de Laurent X..., de constater son refus de se soumettre aux nouvelles conditions de travail rendant impossible la poursuite du contrat, de dire que le licenciement repose sur une faute grave et en conséquence de confirmer le jugement critiqué.

Subsidiairement, elle sollicite de ramener à de plus justes proportions les demandes de dommages-intérêts, de fixer le montant de l'indemnité conventionnelle à la somme de 5 509,89 € et de débouter Laurent X... de sa réclamation au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à qui elle demande la somme de 1 000 € sur le même fondement.

CELA ETANT EXPOSE

Par contrat en date du 1er septembre 1995, Laurent X... a été engagé par la société France Telecom Mobile Radio Messagerie aux droits de laquelle vient la société ORANGE FRANCE en qualité de téléopérateur avec un salaire brut mensuel de 3637,20 F pour 86,60 heures,

Par avenant du 5 mars 1997, il est passé d'un horaire de jour à un horaire de nuit et a vu par un second avenant du 9 avril 2001 la durée de son travail portée à 122 heures par mois, de 23 heures à 7 heures du matin.

Par lettre en date du 13 juillet 2004 il a été licencié pour faute grave pour les motifs suivants :

« (...) Suite au transfert de l'activité SMS vous avez été affecté à des fonctions de même nature sur un poste du service assistance gestion sur votre cycle horaire de nuit actuel, de même qualification, conformément à votre contrat de travail, accompagné d'une formation spécifique.

Les modifications proposées ne consistant qu'en de simples modifications de vos conditions de travail, vous n'étiez pas en mesure de refuser le poste proposé ni la formation correspondante. De plus durant cette période, vous avez refusé d'exécuter des tâches qui vous ont été confiées au service assistance gestion.

Les explications entendues le recours de l'entretien du 17 juin 2004 et de la réunion de la commission de discipline et de recours et la délibération de celle-ci n'ont pas été de nature à modifier notre appréciation des faits.

Au vu de ce qui précède, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave, sans préavis ni indemnité de rupture, compte tenu de votre insubordination caractérisée illustrée, notamment, par votre refus réitéré d'exécuter les tâches inhérentes à vos fonctions et de suivre la formation proposée. (...) »

Laurent X... soutient que son licenciement est nul dans la mesure où il bénéficiait du statut de salarié protégé, subsidiairement que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse dans la mesure où il pouvait légitimement refuser une modification substantielle de son contrat de travail et qu'il y a violation tant de la législation applicable en matière de licenciement pour motif économique que de l'accord-cadre pour l'emploi conclu par le groupe France Telecom. Il conteste également la gravité des faits qui lui sont reprochés,

La société ORANGE FRANCE dénie à l'appelant le bénéfice du statut de salarié protégé et soutient l'absence de modification substantielle du contrat de travail. Elle considère fondé le licenciement eu égard aux multiples actes d'insubordination de Laurent X...,

SUR CE

Sur la nullité du licenciement

Considérant que l'article L. 425 – 1 du code du travail prévoit que tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, doit être obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement, qui ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que la durée de protection de six mois s'attache non seulement aux délégués mais aussi aux candidats au premier comme au second tour aux fonctions de délégué du personnel à partir de la publication des candidatures ; que la durée de six mois court à partir de l'envoi, par lettre recommandée à l'employeur, des listes de candidature,

Considérant qu'il est constant en l'espèce que Laurent X... a fait acte de candidature aux élections des délégués du personnel aux termes de la liste de candidatures du syndicat CFTC envoyée à l'employeur le 16 septembre 2003 ; que la période de protection s'est donc terminée le 16 mars 2004, soit plus de trois mois avant son licenciement,

Qu'il ne peut donc prétendre au bénéfice de la protection attachée au statut de délégué du personnel ou de candidat à cette fonction,

Sur le motif économique

Considérant que selon l'article L.321-1 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou d'une transformation d'emplois ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques,

Considérant que le licenciement de Laurent X... est inhérent à sa personne et sans rapport avec des difficultés économiques de son employeur,

Considérant ainsi que Laurent X... est mal fondé à se prévaloir de la violation des règles encadrant le licenciement pour motif économique,

Sur la faute grave

Considérant que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur,

Considérant que la preuve de la faute grave incombe à l'employeur qui l'a invoquée,

Considérant par ailleurs que l'employeur, dans le cadre de l'exercice de son pouvoir général de direction de l'entreprise et sous réserve que cela n'entraîne pas une modification du contrat de travail, peut apporter des changements à la fonction du salarié et à ses conditions de travail, dès lors que la tâche demandée, bien que différente de celle exercée antérieurement, répond à la qualification de l'intéressé ; qu'en cas de refus du salarié, il appartient à l'employeur d'en tirer les conséquences en prenant l'initiative d'un licenciement,

Considérant en l'espèce qu'en qualité de téléopérateur Laurent X... était affecté, de nuit, dans des locaux situés dans le 13e arrondissement de Paris, au service "SMS 766" chargés de transmettre des messages numériques et alphanumériques par l'intermédiaire d'une console informatique ; qu'il s'agissait donc d'une tâche essentiellement centrée sur la saisie de données,

Considérant que par lettre du 7 janvier 2004 remise en mains propres, suite à la décision présentée au comité d'entreprise de la société ORANGE FRANCE en septembre 2003, dans le respect des dispositions de l'Accord Cadre pour l'Emploi, et à l'annonce faite dans le magazine interne du repositionnement des salariés affectés à l'activité SMS en décembre 2003, Laurent X... s'est vu proposer une affectation etlt;etlt;sur une activité administrative telle que l'enregistrement des cessions de lignes sur l'applicatif, l'archivage des dossiers clients et de traitement des boites aux lettres résiliation sur CMOetgt;etgt;.

Considérant qu'il n'est pas démontré en quoi ces nouvelles fonctions différaient substantiellement de celles exercées précédemment,

Qu'aucune modification n'était apportée au cycle de travail, à la classification et à la rémunération,

Que Laurent X..., comme tous les autres salariés, se voyait contraint d'exercer ses fonctions sur le nouveau site de l'entreprise à Ivry-sur-Seine, dont l'annonce avait été faite dans le bulletin interne de septembre 2003 ; que cependant son contrat de travail prévoyait une mobilité en région parisienne,

Considérant qu'il lui a été proposé une courte formation d'adaptation le 8 janvier, puis le 4 mars et le 10 mars 2004, à laquelle il n'a pas assisté, arguant soit de ce qu'il était en congé soit de ce que ces formations en journée l'empêchaient d'être présent aux cours universitaires qu'il suivait par ailleurs,

Considérant que par courrier des 1er, 13 et 26 janvier 2004 Laurent X... a manifesté son opposition au changement de fonction,

Considérant que par courrier du 27 février 2004 la société ORANGE FRANCE lui a rappelé qu'il ne s'agissait en aucun cas d'une modification de son contrat de travail mais d'une simple adaptation et s'est déclarée prête à envisager avec lui l'évolution possible de sa carrière sur un poste de conseiller ; que par une lettre du 11 mars 2004, à laquelle il n'a pas répondu, elle l'a invité à lui communiquer toute date compatible avec ses obligations afin de suivre une formation,

Considérant que, convoqué à deux "entretiens managériaux" les 4 et 22 avril 2004, Laurent X... a refusé de répondre aux questions qui lui étaient posées sur son refus de suivre une formation et celui de traiter les sessions COEUR, ALL ACCES et GOLD,

Considérant que Laurent X... reconnaît qu'il se rendait normalement sur son lieu de travail, qu'il respectait les horaires fixés dans son contrat mais qu'il a refusé d'effectuer des tâches qu'il considérait ne plus correspondre à sa qualification à partir de janvier 2004 ; que par son refus réitéré d'accepter ce qui constitue une simple adaptation de son emploi et non une modification substantielle de son contrat de travail, de suivre la formation adéquate alors même qu'elle pouvait être adaptée à son propre contingence, de participer loyalement aux entretiens managériaux où il était pourtant en mesure de faire valoir son point de vue et d'envisager son évolution de carrière, Laurent X... a manifesté son intention de ne pas exécuter le travail relevant de ses obligations et s'est placée en situation d'insubordination,

Considérant que ces faits, d'une importance telle qu'ils rendaient impossible le maintien de Laurent X... dans l'entreprise pendant la durée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur, sont constitutifs d'une faute grave,

Considérant qu'il convient par suite de confirmer le jugement,

Sur la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Considérant que Laurent X... et la société la société ORANGE FRANCE demandent à être indemnisés pour les frais exposés dans la présente instance et qui ne sont pas compris dans les dépens,

Considérant que l'équité commande de les débouter de leurs demandes.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires

Condamne Laurent X... aux dépens.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0139
Numéro d'arrêt : 05/7517
Date de la décision : 22/03/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 22 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-03-22;05.7517 ?
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