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06/12/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006952376

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0089, 06 décembre 2006, JURITEXT000006952376


Grosses délivrées

REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES DECISION DU 6 DECEMBRE 2006 No du répertoire général : 05/19480

Décision contradictoire en premier ressort Nous, Renaud BLANQUART, Conseiller à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Gilles DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante :Statuant sur la requête déposée le 30 septembre 2005 par Maître Raphaùl MOLENAT, avocat s

ubstituant Maître Yves LEBERQUIER, avocat de Monsieur Abdoul Wahab X..., ... ;Vu les pièces jointes à ...

Grosses délivrées

REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES DECISION DU 6 DECEMBRE 2006 No du répertoire général : 05/19480

Décision contradictoire en premier ressort Nous, Renaud BLANQUART, Conseiller à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Gilles DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante :Statuant sur la requête déposée le 30 septembre 2005 par Maître Raphaùl MOLENAT, avocat substituant Maître Yves LEBERQUIER, avocat de Monsieur Abdoul Wahab X..., ... ;Vu les pièces jointes à cette requête ;Vu les conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l'audience fixée au 8 novembre 2006 ;Vu la présence de Monsieur Abdul Wahab X... ;Ou', Monsieur Abdul Wahab X..., Maître Sarah INGAR avocat substituant Maître Yves LEBERQUIER, avocat de Monsieur Abdul Wahab X..., Maître Carole PASCAREL avocat plaidant pour la SCP UETTWILLER GRELON GOUT CANAT ET ASSOCIES, avocats associés représentant Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, ainsi que Madame Marthe CORONT DUCLUZEAU, avocat général, les débats ayant eu lieu en audience publique, le 8 novembre 2006, le requérant ayant eu la parole en

dernier ;Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R. 26 à R. 40-7 du code de procédure pénale ;*Le 8 avril 2004, Monsieur X..., né le 14 mars 1958, a été mis en examen des chefs de complicité d'importation, acquisition, détention, offre, cession de stupéfiants, absence de justification de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relation habituelle avec une ou plusieurs personnes se livrant au trafic de coca'ne, importation en contrebande de marchandises prohibées et a été placé en détention provisoire. Il a été libéré et placé sous contrôle judiciaire le 28 octobre 2004. Il a fait l'objet d'une décision de relaxe par jugement du Tribunal correctionnel du 31 mars 2005, après, donc, une incarcération de 6 mois et 21 jours, cette décision étant définitive.Par requête déposée le 30 septembre 2005, aux fins de réparation à raison d'une détention, Monsieur X... fait valoir :- S'agissant de son préjudice économique : qu'il a travaillé comme comptable depuis 1982 dans plusieurs entreprises et travaillait comme consultant lors de son interpellation ; qu'ayant conclu une convention de représentation, le 1er janvier 2004, en vertu de laquelle il devait garantir une opération de prêt, il devait percevoir une commission de 350.000 ç ; qu'ayant été interpellé, il n'a pu finaliser cette opération et a perdu la commission prévue ; que son incarcération a freiné considérablement le développement de la société "AGENCE QUALITE PLUS" qu'il avait créée avec son épouse en janvier 2004 et a perdu sa clientèle de vente d'espaces publicitaires ; qu'il rencontre les plus grandes difficultés pour redémarrer une activité ; que sa voiture, saisie lors de sa mise en examen, a été détruite sur ordre de la préfecture avant qu'il soit jugé.Il réclame : - la somme de 200.000 ç au titre de la perte de chance de percevoir une commission,- la somme de 15.000 ç au titre de la perte de chance de développer "sa" société "AGENCE QUALITE PLUS",- la somme de 10.000 ç au titre de la perte de

revenus subie entre son élargissement et le redémarrage de son activité professionnelle. - S'agissant de son préjudice moral, il fait valoir qu'il a été interpellé et menotté devant ses proches, a été détenu pendant 6 mois et 20 jours, qu'il s'agissait de sa première incarcération et qu'il lui a été reproché d'être impliqué dans un trafic de drogue, ce qui lui a rendu encore plus difficile sa détention, étant considéré par beaucoup de gens qu'il côtoyait comme un "paria vendeur de drogue", cette réputation le poursuivant encore aujourd'hui sur le plan professionnel ou personnel. Il ajoute que sa détention a eu des conséquences directes pour son épouse et ses trois enfants, traumatisés par cette situation et les propos avilissants tenus par leurs proches. Il sollicite, de ce chef, la somme de 20.000 ç en réparation de ce préjudice.Il sollicite également la somme de 2.000 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPCDans ses conclusions du 27 janvier 2006, Monsieur l'Agent judiciaire du Trésor, estimant la requête recevable, fait valoir : - S'agissant du préjudice économique invoqué : que la perception d'une commission, par Monsieur X..., était purement hypothétique à la lecture de la convention de représentation produite par le requérant ; que ce dernier ne peut pas réclamer indemnisation de la perte de chance de percevoir cette commission, la réalisation de l'événement pouvant donner lieu à son versement étant hypothétique et incertaine. Il ajoute que le préjudice subi par la société de Monsieur X... ne peut se confondre avec celui de ce dernier ; que le requérant ne démontre pas, en outre, que la société AGENCE QUALITE PLUS était en plein essor ; que la gérante de cette société apparaît être Madame Y... X..., les parts de cette société apparaissant appartenir à cette dernière et à une demoiselle Y... ; que le requérant ne démontre pas qu'il est impliqué à titre personnel dans cette société. Il fait encore valoir que la perte de clientèle invoquée par Monsieur X... et les sommes

qu'aurait pu percevoir ce dernier à ce titre ne sont justifiées par rien ; que le requérant a, en outre, indiqué le 3 août 2004, qu'il avait mis la société "SOLEIL COMMUNICATION" en veille depuis 2 ans avant son incarcération. Il ajoute que, s'agissant du véhicule de Monsieur X..., la présente procédure n'a pas pour objet de réparer les éventuelles erreurs de l'administration des Domaines ; que le requérant ne travaillait pas et de percevait pas de revenus au moment de son placement en détention, déclarait que sa femme travaillait et l'aidait ; qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter la demande de réparation d'un préjudice matériel. - S'agissant du préjudice moral dont Monsieur X... demande réparation, il fait valoir que les conditions d'interpellation du requérant, l'atteinte à sa réputation ne peuvent être indemnisées dans le cadre de la présente procédure et qu'il peut être alloué à Monsieur X... la somme de 8.000 ç en réparation de ce préjudice. Monsieur le Procureur Général fait valoir, estimant la requête recevable,- S'agissant du préjudice matériel, que Monsieur X... a déclaré lors de son incarcération que depuis 2002, il ne percevait aucun revenu de sa société "SOLEIL COMMUNICATION", faisait des "petits boulots à droite et à gauche", faisait du "western", transfert d'argent en bons alimentaires non déclaré, "qu'on lui demandait de faire de la pub", qu'il avait créé une entreprise en janvier 2004 avec son épouse au sein de laquelle il faisait de la comptabilité, mais ne percevait aucun salaire personnel et qu'il vivait de l'indemnité de licenciement de son épouse. Il ajoute que le requérant ne rapporte pas la preuve de salaires légalement perçus, qu'il y a lieu de retenir au titre de la perte de chance, le principe d'une réparation. Il fait valoir enfin que ne peuvent être indemnisés les préjudices subis par la famille ceux liés à la perte d'un véhicule.- S'agissant du préjudice moral, il fait valoir que la réparation de ce préjudice doit s'apprécier en fonction

de la durée de la détention subie et du fait que le requérant était âgé de 45 ans, marié, père de 3 enfants de 16, 12 et 6 ans au moment de son placement en détention et qu'aucune incarcération ne figurait à son casier judiciaire.SUR QUOI,Sur la requête :Attendu que la présente requête est recevable au regard des dispositions des articles 149 à 149-2 du Code de procédure pénale ;Sur le préjudice matériel :Attendu qu'il résulte de l'examen des pièces versées aux débats que Monsieur X... a exercé, par le passé, l'activité de comptable ; qu'il était gérant depuis le 15 juillet 1997 d'une société "SOLEIL COMMUNICATION" dont il a déclaré après qu'il ait été interpellé, qu'il l'avait mise "en veille" 2 ans avant son incarcération ; qu'il n'apparaît pas être le gérant de la société "AGENCE QUALITE PLUS", ce gérant étant Madame Aissetou Y... ; qu'il produit la convention de représentation en vertu de laquelle il devait rechercher un financement au nom d'une société GAMPALM dans le cadre d'une convention de crédit avec des partenaires suisses ; que, selon cette convention, une commission, de 350.000 ç devait lui être versée pour "après le bouclage final des crédits" et "la mise en route effective des investissements" et sous réserve d'un "résultat probant"; que le versement de cette commission était, donc, hypothétique ; que le requérant produit également une déclaration sur l'honneur du directeur général de la société GAMPALM selon laquelle c'est "surtout" la défaillance de Monsieur X... pendant des "rencontres programmées du 22 au 27 novembre 2004", après donc la date de sa libération, qui a "porté un coup dur" au processus de financement et a, donc, privé le requérant de la possibilité de percevoir une commission; Qu'il résulte de ce qui précède que Monsieur X... ne justifie pas d'une perte de chance de percevoir une commission qui serait directement imputable à sa détention ; qu'il ne justifie pas plus de la perte de chance de développer la société

"AGENCE QUALITE PLUS", ni de la perte de revenus subie par lui, entre son élargissement et le redémarrage de son activité professionnelle ; qu'il ne justifie pas de façon probante de l'activité publicitaire qui aurait été la sienne ; que la destruction de la voiture de Monsieur X... a pour origine l'enquête et l'information dont a fait l'objet ce dernier et non son placement en détention ;qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter la demande d'indemnisation d'un préjudice matériel formée par le requérant, ce préjudice n'étant pas établi ;Sur le préjudice moral :

Attendu que les moyens tirés des conditions d'interpellation de Monsieur X... et de l'atteinte portée à sa considération à raison des accusations portées contre lui ne peuvent être pris en considération dans le cadre de la présente procédure qui prévoit un principe d'indemnisation automatique des préjudices résultant directement et exclusivement de la détention provisoire subie ;Que Monsieur X... était âgé de 45 ans lorsqu'il a été placé en détention pour une durée de 6 mois et 21 jours ; que le choc carcéral incontestable qu'il a subi, du fait de sa détention, doit donner lieu à réparation ; qu'il doit être tenu compte, pour fixer le montant de cette réparation, des circonstances d'aggravation du préjudice considéré et, plus particulièrement, du fait qu'il était marié, père de 3 enfants de 16, 12 et 6 ans au moment de son placement en détention et qu'il n'avait jamais été incarcéré ;Qu'il sera, donc, alloué à Monsieur X..., en réparation du préjudice moral qu'il a subi du fait de son incarcération, la somme de 10.000 ç ; Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X... les frais irrépétibles qu'il a exposés pour la présente instance ; qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 2.000 ç de ce chef ;PAR CES MOTIFSVu les articles 149 à 150 et R. 26 à R. 40-7 du Code de procédure pénale,Disons la requête recevable,Allouons à Monsieur X... :- une

indemnité de 10.000 ç, en réparation de son préjudice moral,- la somme de 2.000 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC,Rejetons sa demande d'indemnisation d'un préjudice matériel.Ainsi fait, jugé et prononcé par le magistrat délégué soussigné, le 6 décembre 2006, où étaient présents : Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller, Madame Lydia GORGEN, Avocat Général et Monsieur Gilles DUPONT, Greffier.LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0089
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006952376
Date de la décision : 06/12/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. BLANQUART, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2006-12-06;juritext000006952376 ?
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