Grosses délivrées
REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
4ème Chambre - Section A
X... DU 13 SEPTEMBRE 2006
(no , 8 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 05/11564 Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Avril 2005 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 05/4
APPELANTES CAISSE DE RETRAITE DU PERSONNEL DES BANQUES ayant son siège 15 rue de la Fontaine au Roi 75011 PARIS agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration représentée par la SCP GAULTIER - KISTNER, avoués à la Cour assistée de Me Anne BAILLEUX DE MARISY, avocat au barreau de PARIS, toque : E 129 plaidant pour Me REVAULT D'ALLONES, avocat au barreau de PARIS, toque 1043 CRC anciennement CRIC ayant son siège 15 Rue de la Fontaine au Roi 75011 PARIS agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration représentée par la SCP GAULTIER - KISTNER, avoués à la Cour assistée de Me Anne BAILLEUX DE MARISY, avocat au barreau de PARIS, toque : E 129 plaidant pour Me REVAULT D'ALLONES, avocat au barreau de PARIS, toque 1043 INTIMEE Madame Hélène Y... ... par Me Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour assistée de Me Florence LYON-CAEN, avocat au barreau de PARIS, toque : D 325 COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de
procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 juin 2006, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur CARRE-PIERRAT, Président, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Alain CARRE-PIERRAT, président
Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, conseiller
Madame Dominique ROSENTHAL-ROLLAND, conseiller
qui en ont délibéré GREFFIER, lors des débats : Madame Jacqueline VIGNAL X... : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par Monsieur Alain CARRE-PIERRAT, président - signé par Nous, Alain CARRE-PIERRAT, président et par Nous Jacqueline VIGNAL , greffier présent lors du prononcé.
Vu l'appel interjeté, le 25 mai 2005, par LA CAISSE DE RETRAITE DU PERSONNEL DES BANQUES et la CRC d'un jugement rendu le 12 avril 2005 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :
[* constaté que Hélène Y... ne soutient plus sa demande relative à la réduction de ses points de base,
*] dit que Hélène Y... a droit à la majoration familiale prévue par l'article 6 bis de l'annexe I de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947,
[* condamné la CRC à payer à Hélène Y... le rappel du montant de la majoration familiale à compter du 1er janvier 1995 date de sa suppression, avec les intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,
*] débouté Hélène Y... de sa demande de dommages et intérêts,
[* rejeté la demande reconventionnelle de la CRC,
*] condamné la CRC à payer à Hélène Y... la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
* ordonné l'exécution provisoire du jugement, nonobstant appel et sans constitution de garantie,
* condamné la CRC aux dépens ;
Vu les uniques conclusions signifiées le 26 septembre 2005, aux termes desquelles LA CAISSE DE RETRAITE DU PERSONNEL DES BANQUES, ci-après la CRPB, et la CRC, anciennement CRIC, poursuivant l'infirmation du jugement déféré, demandent à la Cour de :
* juger que Hélène Y... n'ayant pas droit aux majorations familiales, sera déboutée de l'ensemble des demandes formulées à ce titre,
* prononcer la mise hors de cause de la CRPB,
* reconventionnellement,
dire que pour la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 2001, Hélène Y... était créancière de la CRPB à hauteur de 6.549,65 euros,
dire que pour la période du 1er janvier 1994 au 31 mars 2003, Hélène Y... a été réglée au titre des majorations familiales d'une somme de 9.150,87 euros indûment perçue par elle,
ordonner la compensation judiciaire entre les sommes indûment perçues par Hélène Y... à hauteur de 9.150,87 euros et celle dont elle est créancière à hauteur de 6.549,65 euros,
dire que Hélène Y... devra en conséquence rembourser à la CRC la somme de 2.601,22 euros,
dire que Hélène Y... devra également rembourser la somme de
2.500,80 euros nette qui lui a été versée au titre de l'exécution provisoire du jugement dont appel pour la période du 1er avril 2003 au 30 septembre 2005 et qu'à cette somme devra s'ajouter les montants trimestriels des majorations familiales qui seront versées à compter du 1er octobre 2005, soit 250,08 euros pour ce nouveau trimestre,
ordonner à Hélène Y... de rembourser les 4.000 euros versés en première instance au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ,
condamner Hélène Y... en tous les dépens de première instance et d'appel ;
Vu les uniques conclusions, en date du 13 janvier 2006, par lesquelles Hélène Y... , poursuivant la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a jugé qu'elle avait droit à la majoration familiale et au rappel du montant de cette majoration ainsi que de la condamnation prononcée au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, demande à la Cour de ;
[* rejeter l'ensemble des demandes reconventionnelles formées par la CRC,
*] par voie d'appel incident, condamner in solidum la CRPB et la CRC à lui payer la somme de 20.000 euros en réparation de son préjudice moral et les condamner in solidum, ou à défaut condamner la seule CRC, à lui payer la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour la procédure d'appel ainsi qu'aux entiers dépens ;
SUR CE, LA COUR ,
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des
parties; qu'il suffit de rappeler que :
[* après avoir travaillé dans le secteur bancaire en qualité d'employée puis de cadre pendant 38 ans, Hélène Y... a fait liquider sa retraite à l'âge de 60 ans, à compter du 1er juillet 1992, auprès de la CRPB,
*] à la suite de l'accord d'étape du 10 septembre 1993, les caisses de retraite du personnel des banques A.F.B. ont intégré les régimes interprofessionnels,
[* les pensions complémentaires ont été servies, à partir du 1er janvier 1995, par la CRIS (régime ARRCO) et par la CRIC (régime ARGIC), la CRPB étant appelée à verser le complément bancaire pour garantir le niveau des droits servis aux 31 décembre 1993,
*] à partir du 1er janvier 1995, le règlement de la partie cadre de la retraite de Hélène Y... a été repris par la CRIC,
Hélène Y... ayant contesté le bien-fondé de cette réclamation, c'est dans ces conditions qu'elle a introduit la présente instance ; Considérant qu'il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la CRPB dès lors que l'intimée forme à l'encontre de cette caisse une demande de dommages et intérêts ;
Considérant qu'il est acquis aux débats que de son union avec Jacques Y..., Hélène Y... a donné naissance à trois enfants dont un "sans vie" qui a été déclaré décédé le 27 mars 1958 ;
* sur la majoration familiale :
Considérant que, selon les dispositions de l'article 6 bis de l'annexe I de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, Si le participant a eu au moins trois enfants, le total des points de retraite est majoré comme suit :
10 % pour 3 enfants ;
Considérant que, pour s'opposer à la demande de Hélène Y... , la CRC fait valoir que, d'une part, le guide du régime de retraite des cadres AGIRC prévoit que les enfants pris en considération pour bénéficier de la bonification instituée par le texte précité, doivent être nés vivants et viables et figuraient à l'état civil de sorte qu'un enfant mort-né ou un enfant qui figure sur les registres de l'état-civil avec la mention enfant sans vie ou acte d'enfant présentement sans vie ne pourrait être pris en considération pour ouvrir droit à une majoration familiale et que, d'autre part, il résulte d'une délibération, en date du 7 avril 1987, de la commission paritaire que l'article 6 bis s'applique si trois enfants au moins ont vécu, aucune condition de durée de vie n'étant toutefois posée. Est donc pris en considération tout enfant pour lequel un certificat de naissance a été établi ;
Mais considérant, en premier lieu, qu'en l'absence de dispositions de la convention collectif prévoyant que l'avis de la commission paritaire aura la valeur d'un avenant à la convention, le juge n'est pas tenu de suivre l'interprétation d'une clause conventionnelle donnée par cette commission ;
Considérant, en second lieu, que l'article 6 bis de l'annexe I de la convention collective, dans sa rédaction applicable en l'espèce, opère une harmonisation avec les conditions d'application relative à la bonification en cause dans le régime général de la sécurité
sociale qui imposent seulement que l'assuré ait eu au moins trois enfants sans exiger qu'ils aient vécus et aient été élevés par ce dernier; que l'argument selon lequel la rubrique, sous laquelle figure l'article précité, s'intitule charges de famille, ne saurait prospérer dès lors qu'il aurait pour conséquence d'ajouter à un texte conventionnel, exempt de toute ambigu'té, une condition non expressément prévue par celui-ci ;
Qu'il s'ensuit que le jugement déféré mérite confirmation en ce que les premiers juges ont, à bon droit, retenu que Hélène Y... avait droit à la majoration familiale prévue par l'article 6 bis de l'annexe I de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 et condamné la CRC à payer le rappel du montant de la majoration familiale à compter du 1er janvier 1995 avec les intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement ;
* sur l'action en responsabilité :
Considérant que Hélène Y... critique le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral par elle subi du fait du comportement, selon elle, fautif de la CRPB dans la gestion de son dossier ;
Considérant que dans leurs dernières écritures, les caisses appelantes se bornent à solliciter de la Cour la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté Hélène Y... de sa demande de dommages et intérêts ;
Or, considérant qu'il résulte des pièces régulièrement versées aux débats que la CRPB a, le 7 avril 1995, écrit à Hélène Y... :
J'accuse réception de votre correspondance du 28 mars 1995 qui a retenu toute mon attention et tiens à vous préciser que les droits qui vous sont attribués par la CRIC au titre de l'AGIRC le sont,
conformément à la réglementation applicable par ce régime.
En effet, il s'avère que l'AGIRC attribue une majoration de 10 % pour 3 enfants nés, sans autre condition .
Vous bénéficiez donc de ladite majoration auprès de la CRIC et il appartient pas à la CRPB de modifier les règles d'application de l'AGIRC; que cette position a, par lettre du 7 juin 1996, été confirmé à l'intimée puisqu'il y est mentionnée à cela s'ajoute 10% de majoration familiale ;
Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que cette caisse a donné à Hélène Y... une information exacte quant à l'étendue de ses droits de sorte que sa responsabilité ne saurait être engagée ;
Considérant que le litige trouve son fondement dans l'interprétation des dispositions conventionnelles données par la CRIC, devenue la CRC, qui a donné lieu à de très nombreux échanges épistolaires entre Hélène Y... et cette caisse ; qu'il convient de relever que la CRIC, dont la carence est avérée, a été relancée à de multiples reprises tant pas Hélène Y... que par l'AGIRC ;
Que, s'agissant de la CRC, il est donc manifeste que celle-ci a eu un comportement fautif à l'égard de Hélène Y... en raison tant de ses négligences que de ses erreurs dans la gestion de son dossier qui lui ont causé un préjudice moral certain du fait des tracas qui s'en sont suivis et qui ont perturbé sa vie quotidienne ;
Qu'il convient, en conséquence, d'allouer à Hélène Y... une indemnité de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
* sur les autres demandes :
Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que les demandes reconventionnelles formées, dans le cadre de leur appel incident, par
les caisses appelantes seront rejetées et qu'elles ne sauraient se prévaloir des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; que, en revanche, l'équité commande de condamner, sur ce même fondement, la CRC à verser à Hélène Y... une indemnité complémentaire de 4.000 euros ;
PAR CES MOTIFS :
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la CRPB,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne la demande de dommages et intérêts formée par Hélène Y...,
Et, statuant à nouveau,
Dit que la CRC a eu un comportement fautif à l'égard de Hélène Y... et la condamne, en conséquence, à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, Et, y ajoutant,
Ordonne la capitalisation, dans les conditions prévues à l'article 1154 du Code civil, des intérêts attachés aux condamnations pécuniaires prononcées au bénéfice de Hélène Y...,
Condamne la CRC à verser à Hélène Y... une indemnité complémentaire de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne la CRC aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER LE PRESIDENT