Grosses délivrées
RÉPUBLIQUE FRANOEAISE
aux parties le :
AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
3ème Chambre - Section A
ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2006
(no , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 05/23065 Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge Commissaire du 15 Octobre 2004 -Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG no 03/01189 APPELANTE S.C.I. DE LA CRECHE, représentée par son mandataire ad hoc Maître Béatrice X..., administrateur judiciaire dont l'étude est sise ... 75007 PARIS, ayant son siège 27 rue de la Crèche 77100 MEAUX représentée par la SCP REGNIER - SEVESTRE-REGNIER - REGNIER-AUBERT LAMARCHE-BEQUET, avoués à la Cour assistée de Me Philippe THOMAS COURCEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C165 INTIMÉES S.A. FERRACIN FRERES prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège Lieudit La Waridon 08090 MONTCY NOTRE DAME représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour ayant pour avocat Me Thierry PELLETIER, du barreau de PARIS, S.C.P. PERNEY ANGEL, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SCI DE LA CRECHE, ayant son siège 49/51 avenue du Président Salvador Allende 77109 MEAUX CEDEX représentée par la SCP VARIN-PETIT, avoués à la Cour COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 20 juin 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Bernadette CHAGNY, Président
Monsieur Henri LE DAUPHIN, Conseiller
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Conseiller qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du nouveau code de procédure civile. Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claude HOUDIN MINISTÈRE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au ministère public, ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,
- signé par Madame CHAGNY, président et par Madame HOUDIN, greffier présent lors du prononcé.
Vu l'appel interjeté par la SCI de la Crèche (la SCI) d'une ordonnance rendue le 15/10/2004 par le juge commissaire à la liquidation judiciaire de la société civile immobilière de la Crèche qui a dit que la créance de la société Ferracin Frères ( la société) devait être admise à son passif pour un montant de 140.245,17 ç à titre chirographaire ;
Vu les conclusions signifiées le 29/5/2006 par l'appelante, représentée par son mandataire ad hoc Maître Béatrice X..., qui demande à la cour de la dire recevable en son appel, au fond de
dire et juger nulles les déclarations de créances régularisées par la société et la SCP Vallanet Lay et Sistac, subsidiairement de surseoir à statuer sur les demandes de la société dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise de M. Y..., en tout état de cause de dire et juger que la créance de la société ne saurait être supérieure à la somme de 113.445,90 ç, de condamner la société au paiement de la somme de 1 500 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Vu les conclusions signifiées le 26/5/2006 par la société Ferracin Frères qui conclut à la confirmation de l'ordonnance entreprise et à la condamnation de la SCP Perney Angel ès qualités au paiement de la somme de 1.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Vu les écritures signifiées le 30/9/2005 par la SCP Perney Angel, mandataire judiciaire à la liquidation de la SCI, qui conclut à l'irrecevabilité de l'appel, subsidiairement s'en rapporte à justice sur les demandes de l'appelante et demande à la cour de débouter la société de sa demande formée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
SUR CE
Considérant que par jugement rendu le 24/4/2003, le tribunal de grande instance de Meaux a ouvert une procédure simplifiée de redressement judiciaire à l'égard de la SCI et nommé la SCP Perney Angel en qualité de représentant des créanciers ; que la même juridiction a, par jugement du 2/10/2003, prononcé la liquidation judiciaire de la SCI et nommé la SCP Perney Angel en qualité de
liquidateur ; que le 16/6/2003, la société a déclaré une créance au passif de la liquidation judiciaire de la SCI à hauteur de la somme de 113.445,90 ç à titre chirographaire correspondant au montant de travaux ; que le 17/6/2003, la société, par l'intermédiaire d'un huissier de justice, a déclaré une créance à hauteur de 140.245,17 ç en vertu d'une ordonnance de référé rendue le 12/2/2003 par le Président du tribunal de grande instance de Meaux ; que par la décision déférée, le juge commissaire a fait droit à cette dernière demande ; que l'ordonnance a été notifiée à Madame Z..., ancienne gérante de la société, par LRAR reçue le 25/11/2004 ;
Considérant que le 6/12/2004, Madame Z... a formalisé une déclaration d'appel au greffe de la Cour ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1844-7 7o du Code civil, la société prend fin par l'effet du prononcé de la liquidation judiciaire ; que la liquidation judiciaire de la SCI a été prononcée le 2/10/2003 ; qu'à compter de cette date, les fonctions de Madame Z... ont pris fin ; qu'elle ne pouvait valablement représenter la société le 6/12/2004 ; que son appel est donc irrecevable ;
Considérant que par ordonnance du 25/4/2005, Maître Béatrice X... a été désignée comme mandataire ad hoc de la SCI ; qu'elle est intervenue à l'instance par voie de conclusions signifiées le 4/7/2005 ; que les intimées font valoir que l'intervention volontaire du mandataire ad hoc effectuée postérieurement à l'expiration du délai d'appel de dix jours ne peut régulariser la procédure et qu'en l'espèce, le délai d'appel expirait le 5/12/2004 compte tenu de la date de réception de la LRAR ;
Mais considérant que la lettre de notification invoquée par les intimées n'a pu faire courir le délai d'appel ; qu'en effet, lorsque plusieurs décisions sont notifiées par voie postale par un même envoi, l'enveloppe doit contenir, outre chacune des notifications, un document récapitulatif permettant l'identification de chacune des décisions ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que 24 ordonnances ont été notifiées dans un même envoi (la lettre elle-même étant au surplus non datée et ayant été adressée au domicile personnel de l'ancienne gérante qui l'a réceptionnée) sans qu'aucun document récapitulatif n'ait été émis de sorte qu'il est impossible de savoir avec certitude si l'ordonnance litigieuse a été notifiée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ordonnance déférée n'a pas été valablement notifiée ; que l'appel de la SCI régularisé par le mandataire ad hoc est donc recevable ;
Considérant que la société a procédé à la déclaration de sa créance à hauteur de 113.445 ,90 ç par lettre à en-tête du 16/6/2003 ; que la société Ferracin Frères est une société anonyme ; que si le créancier peut lui-même déclarer sa créance, il doit, lorsqu'il est une personne morale, justifier que la déclaration émane soit des organes habilités par la loi à la représenter soit d'un préposé titulaire d'une déclaration de pouvoir lui permettant d'accomplir un tel acte ou d'agir en justice ; qu'en l'espèce, le signataire de la déclaration de créance n'est ni nommé ni identifié dans l'acte ; que la lettre est revêtue d'un simple paraphe illisible ; que par attestation établie le 29/3/2006, Madame Nathalie Ferracin A..., directeur général de la société, a certifié avoir à l'égard des tiers les mêmes pouvoirs que le président et affirmé qu'elle avait signé la
déclaration de créance ; que cependant, comme le relève utilement l'appelante, le paraphe qui figure sur son attestation de même que la signature existant sur sa carte d'identité sont totalement différents du paraphe du signataire de la déclaration de créance ; que dès lors, la société, sur laquelle pèse la charge de la preuve en l'état de la contestation formulée par la SCI, n'établit pas que le signataire de la déclaration de créance était bien investi d'une délégation de pouvoirs à cette fin, ses seules affirmations étant insuffisantes ;
Considérant que la société a procédé à une seconde déclaration de créance à hauteur de 140.245 ,17 ç par lettre du 17/6/2003 émanant de la SCP Vallanet Lay et Sistac, huissiers de justice à Meaux ; que l'huissier de justice doit être muni d'un pouvoir spécial pour déclarer les créances et produire ce pouvoir lors de la déclaration ou dans le délai de celle-ci ; que dans le cas d'espèce, ce mandat spécial n'a pas été communiqué ; que la déclaration de créance du 17/6/2003 est donc irrégulière ;
Considérant en conséquence qu'en l'absence d'une déclaration de créance valable, la société doit être déboutée de ses demandes ; que la décision déférée sera infirmée dans toutes ses dispositions ;
Considérant qu'aucune considération d'équité ne commande la condamnation de la société au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Déclare l'appel de la SCI de La Crèche recevable,
Infirme l'ordonnance déférée,
Statuant du chef infirmé et y ajoutant,
Dit que les déclarations de créances faites par la société Ferracin Frères les 16 et 17 juin 2003 sont irrégulières,
Rejette toutes autres demandes des parties,
Condamne la société Ferracin Frères aux dépens de première instance et d'appel, lesquels comprendront notamment un tiers des frais et honoraires de Maître X..., et admet pour ces derniers les avoués concernés au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT