République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
14ème Chambre - Section A
X... DU 13 AVRIL 2005
(no pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 04/22672 Décision déférée à la Cour : Ordonnance Ordonnance du 19 Décembre 2003 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no APPELANT Monsieur Jean Louis Y... 33 RUE MARX DORMOY 75018 PARIS représenté par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour comparaissant en personne INTIMES Maître Guy CHARLEY 46 RUE DAMRÉMONT 75018 PARIS représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour assisté de Me Bruno CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P 42 ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE PARIS prise en la personne de ses représentants légaux 11 PLACE DAUPHINE 75001 PARIS représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour assistée de Me Bruno CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque P42 S.C.P. A.BODIN GENTY DE LYLLE prise en la personne de M.GENTY Antoine 15 PLACE DE LA MADELEINE 75008 PARIS représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour assistée de Me Bruno CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque P42 Maître GUILLAUME MARCAIS 27 BLD RASPAIL 75207 PARIS représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour assisté de Me Bruno CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P 42 PARTIES INTERVENANTES : L'ASSOCIATION DROIT ET PROCEDURE DES ANCIENS AVOUES 11 PLACE DAUPHINE 75053 PARIS LOUVRES RP SP représentée par la SCP GAULTIER - KISTNER, avoués à la Cour assisté de Me Jean-Yves DUPEUX, avocat au barreau de Paris, toque P077 CONSEIL NATIONAL DES BARREAUX 23 RUE DE LA PAIX 75002 PARIS défaillante COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 16 Mars 2005, en audience publique, devant la Cour composée de :
M FOULON, Président
M BEAUFRÈRE, conseiller
Mme PERCHERON, conseiller
qui en ont délibéré Greffier, lors des débats : Mme JARRY X... :
- réputé contradictoire
- prononcé publiquement par M FOULON, Président
- signé par M FOULON , président et par Mme KLOCK , greffier présent lors du prononcé. Vu l'appel formé les 14 et 24 mai 2004 par M. Y... d'une ordonnance rendue le 19 décembre 2003 par le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Paris, qui, d'une part, a dit n'y avoir lieu à référé sur ses demandes de suspension de différents textes réglementant la profession d'avocat, sur celles dirigées contre Me MAROEAIS, Me CHARLEY et la SCP BODIN GENTY DE LYLLE, sur ses demandes relatives à une plainte du 31 octobre 2002 et à la désignation d'avocats commis d'office, d'autre part, a enjoint à l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS d'accuser réception, dans les huit jours de l'ordonnance, des différentes contestations d'honoraires élevées par M. Y... et de se prononcer, dans les quatre mois de l'ordonnance, sur les suites données aux plaintes contre des avocats déposées par l'appelant les 16 septembre 1997 et 14 juin 2000 et qui a, enfin, rejeté les demandes de communication de pièces par le greffe du Tribunal de Grande Instance de Paris et d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle, en laissant les dépens à la charge de l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS , Vu les conclusions du 22 février 2005, par lesquelles M. Y... demande en substance à la cour de saisir d'une question préjudicielle la cour de justice des communautés européennes, de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a enjoint à l'ORDRE DES AVOCATS
AU BARREAU DE PARIS d'accuser réception de ses contestations d'honoraires et de se prononcer sur ses plaintes, de l'infirmer pour le surplus, à l'exception de la disposition refusant l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle, de suspendre l'application des articles 11.4, 20.3.1.4 et 20.3.5 du règlement intérieur unifié du CONSEIL NATIONAL DES BARREAUX, d'ordonner à l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS de lui notifier sous 48 heures et sous astreinte de 1000 ç par jour de retard ses décisions de commission d'office, sa décision de classement ou de renvoi devant l'instance disciplinaire de sa plainte déposée le 31 octobre 2002, d'assortir les injonctions faites par l'ordonnance de référé sur ses plaintes des 16 septembre 1997 et 14 juin 2000 d'astreintes définitives de 1000 ç par jour de retard, d'ordonner à l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS , dans les mêmes délais et sous la même astreinte, d'accuser réception de sa contestation portant sur la restitution des pièces détenues par Me MAROEAIS, de suspendre l'application des articles 6.9.1.P, 11.4, 20.3.1.4 et 20.3.5 du règlement intérieur du barreau de Paris, d'ordonner à l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS de veiller à ce que la SCP BODIN GENTY DE LYLLE, Me MAROEAIS et Me CHARLEY s'acquittent de leurs obligations dans l'attente des décisions définitives de commission d'office et de leur ordonner de reprendre l'exécution de leurs mandats dans les affaires où ils sont actuellement constitués pour M. Y..., en assurant à celui-ci l'effectivité des normes juridiques internes et communautaires et en précisant qu'ils ne pourront se décharger de ces mandats que du jour où une décision exécutoire du bâtonnier aura pourvu à leur remplacement, de condamner la SCP BODIN GENTY DE LYLLE à lui payer une provision de 1524,50 ç, de condamner Me MAROEAIS à lui payer une provision de 3103,62 ç, d'annuler les statuts de l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE et d'ordonner la fermeture de son site Internet,
subsidiairement, de faire droit à ces mêmes demandes comme constituant des obligations non sérieusement contestables et représentant un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire définitivement cesser, d'ordonner la communication par le secrétaire greffe de la 20e chambre civile du Tribunal de Grande Instance de Paris d'une copie du procès-verbal de difficulté établi par le notaire désigné pour la liquidation de la communauté matrimoniale ayant existé entre lui et Mme Z... et de condamner, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, le CONSEIL NATIONAL DES BARREAUX à lui payer la somme de 10
000 ç, l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS à lui payer la somme de 30
000 ç, l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE à lui payer la somme de 10
000 ç, la SCP BODIN GENTY DE LYLLE à lui payer la somme de 10
000 ç, Me MAROEAIS à lui payer la somme de 10
000 ç et Me CHARLEY à lui payer la somme de 10
000 ç, Vu les conclusions du 29 octobre 2004, par lesquelles l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS, la SCP BODIN GENTY DE LYLLE, Me MAROEAIS et Me CHARLEY demandent à la cour de rejeter les prétentions d'appel de M. Y..., d'infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a enjoint à l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS de se prononcer sur ses plaintes formées les 16 septembre 1997 et 14 juin 2000, de la confirmer pour le surplus et de condamner M. Y... à payer à chacun d'eux la somme de 1500 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Vu les conclusions du 14 décembre 2004, par lesquelles l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE demande à la cour de déclarer irrecevables les demandes de M. Y... dirigées contre elle et de le condamner à lui payer les sommes de 5000 ç à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 10
000 ç au titre des frais irrépétibles d'appel, Vu l'assignation délivrée le 10 septembre 2004 à la personne du CONSEIL NATIONAL DES BARREAUX, qui n'a pas constitué avoué, * * * Considérant
que M. Y... est depuis plusieurs années engagé dans des procès civils où il a été représenté ou assisté par les avocats intimés dans la présente affaire ; que, mécontent des prestations fournies par ces auxiliaires de justice, il a saisi l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS de différentes plaintes et de contestations d'honoraires, ainsi que de demandes de remplacement des avocats commis d'office ; que n'ayant pu obtenir satisfaction à ces demandes, il a assigné l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS et les avocats concernés en référé afin de voir prononcer les mesures visées ci-dessus ; qu'il a relevé appel de la décision du premier juge en ce qu'elle a rejeté pour partie ses demandes ; Considérant, en premier lieu, que l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE, qui n'était pas partie au procès en première instance, a été attraite par M. Y... en intervention forcée d'appel ; que cependant, M. Y... n'est pas fondé à prétendre justifier cette intervention, qui prive l'association intimée du double degré de juridiction, par le fait qu'il aurait découvert seulement après le prononcé de l'ordonnance que les avocats commis d'office par l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS pour le défendre dans les différentes procédures appartiendraient presque tous à cette association et qu'ils auraient ainsi des intérêts communs ayant eu pour conséquence, sinon pour but, de lui faire perdre ses procès ou, à tout le moins, de ne pas défendre ses droits avec la compétence nécessaire, alors que l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE existe depuis de nombreuses années et qu'il résulte des propres indications de M. Y... que ses activités et ses membres sont connus ; que l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE en déduit, à juste titre, que son intervention en appel est irrecevable ; qu'elle est également, eu égard aux motifs de suspicion développés par M. Y..., qui mettent en cause, sans en apporter la preuve, sa probité et celle de ses membres, fondée à obtenir le paiement de dommages et intérêts
pour le préjudice moral causé par une procédure engagée de manière téméraire à son égard ; qu'il convient de lui allouer la somme de 3000 ç à titre de dommages et intérêts, outre celle de 2.000 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant, en deuxième lieu, que M. Y... soutient que la carence de ses avocats successifs et des instances ordinales du barreau de Paris, appuyées sur des dispositions du règlement unifié des barreaux édictées par le CONSEIL NATIONAL DES BARREAUX et figurant dans le règlement intérieur du barreau de Paris, l'ont empêché jusqu'à présent d'avoir accès aux juges chargés de statuer sur ses procès ; qu'il ajoute que l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS et l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE ont mis en oeuvre de concert, à son détriment, des pratiques anticoncurrentielles ; qu'il fait également valoir que le bâtonnier de l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS a l'obligation de statuer dans un délai raisonnable, et en tout cas compatible avec les procédures en cours, sur ses demandes de commission d'office d'avocats, sur les plaintes qu'il a déposées contre les avocats précédemment choisis ou désignés, sur sa demande de restitution de pièces du 31 octobre 2002 afférentes au dossier BANQUE POPULAIRE DE LORRAINE-CHAMPAGNE et sur ses contestations d'honoraires, dont il demande par provision la restitution en raison de la carence de ses conseils pour la défense de ses intérêts ; qu'il demande aussi que les intimés respectent leur obligation d'informer loyalement les consommateurs, dont lui-même, en matière de publicité et d'exercice de la profession d'avocat, notamment sur la participation de la SCP BODIN GENTY DE LYLLE et de Me MAROEAIS au réseau d'avocats que constitue, selon lui, l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE, et qu'ils assurent l'effectivité des normes juridiques internes et communautaires en matière de droits de la défense, en écartant au besoin les dispositions des règlements
intérieurs des barreaux qui y contreviennent ; qu'il en déduit que les nombreux manquements relevés contre les intimés à l'exécution d'obligations non sérieusement contestables lui causent un trouble manifestement illicite justifiant, à ce double titre, l'intervention du juge des référés ; Considérant que, par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge, se fondant sur l'article 189 du décret du 27 novembre 1991 qui dispose que le bâtonnier de l'ordre des avocats avise le plaignant et le procureur général des décisions prises sur les plaintes qu'il reçoit, a justement enjoint au bâtonnier de l'ORDRE DES AVOCATS DE PARIS de se prononcer sur les plaintes déposées les 16 septembre 1997 et 14 juin 2000 par M. Y... ; que, d'autre part, les intimés ne remettent pas en cause en appel la disposition, dont l'appelant demande la confirmation, de l'ordonnance de référé qui a enjoint au bâtonnier d'accuser réception des contestations d'honoraires soulevées par M. Y..., l'Ordre des avocats indiquant qu'il a été satisfait à cette obligation ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir ces dispositions de l'astreinte sollicitée par M. Y... ; que l'ordonnance critiquée relève également à bon droit que l'appelant, comme il l'indique d'ailleurs lui-même dans ses conclusions d'appel, est toujours représenté par des avocats dans les procès en cours où leur ministère est obligatoire et qu'il ne peut, par ailleurs, être enjoint au secrétariat-greffe du Tribunal de Grande Instance de Paris, dont aucun représentant légal n'a été appelé à la procédure, de communiquer la copie du procès-verbal de difficulté établi par le notaire désigné pour la liquidation de la communauté matrimoniale de M. Y... ; Considérant que les autres demandes de M. Y... mettent en cause la responsabilité professionnelle des avocats concernés et la régularité des procédures appliquées par les instances représentatives des barreaux ; qu'il s'évince des
volumineuses conclusions déposées en appel par M. Y... sous la signature de son avoué que ces demandes excèdent, à l'évidence, les pouvoirs du juge des référés et relèvent seulement de l'appréciation du juge du fond, y compris sur la demande de question préjudicielle communautaire ; qu'il convient, en conséquence, de confirmer l'ordonnance entreprise ; Considérant que l'action de référé engagée par M. Y..., qui présente l'avantage calculé de le dispenser en première instance de la représentation d'avocat, obligatoire au fond devant le Tribunal de Grande Instance, et de lui permettre ainsi d'assurer lui-même la conduite du procès en s'affranchissant du filtre juridique inhérent à la représentation obligatoire d'avocat, se substitue aux procédures de fond que l'appelant n'ignore pas devoir normalement intenter ; qu'elle a pour objet essentiel de lui permettre, contrairement aux dispositions légales en vigueur, d'obtenir le concours d'avocats nécessaires à la défense de ses droits, tout en se passant de l'indispensable compétence de ces mêmes auxiliaires de justice, comme le montre la teneur de ses écritures d'appel ; que dans ces circonstances, il est équitable d'allouer à l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS, à la SCP BODIN GENTY DE LYLLE, à Me MAROEAIS et à Me CHARLEY la somme qu'ils réclament chacun au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS LA COUR, A... recevable l'appel de M. Y... A... irrecevables les demandes dirigées contre l'ASSOCIATION DROIT ET PROCÉDURE. Condamne M. Y... à lui payer les sommes de 3.000 ç à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 2.000 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile Confirme l'ordonnance rendue le 19 décembre 2003 par le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Paris. Condamne M. Y... à payer à l'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE PARIS, à la SCP BODIN GENTY DE LYLLE, à Me MAROEAIS et à Me CHARLEY, chacun, la somme
de 1.500 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile . Condamne M. Y... aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le Greffier,
Le Président,