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11/04/2024 | FRANCE | N°23/00211

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet b, 11 avril 2024, 23/00211


N° 123



SE

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Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Guédikian,

le 17.04.2024.





Copie authentique délivrée à :

- Me Bouyssie,

le 17.04.2024.

REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 11 avril 2024



RG 23/00211 ;



Décision déférée à la Cour : ordonnance n° 125, rg n° 22/00310 du Juge des Référés du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 5 juin 2023 ;





Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 4 juillet 2023 ;



Appelante :



La Sarl Bio Tiful Factory, sarl au capital de 200 000 FP, inscrite au Rcs de Papeete sous le n°...

N° 123

SE

------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Guédikian,

le 17.04.2024.

Copie authentique délivrée à :

- Me Bouyssie,

le 17.04.2024.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 11 avril 2024

RG 23/00211 ;

Décision déférée à la Cour : ordonnance n° 125, rg n° 22/00310 du Juge des Référés du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 5 juin 2023 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 4 juillet 2023 ;

Appelante :

La Sarl Bio Tiful Factory, sarl au capital de 200 000 FP, inscrite au Rcs de Papeete sous le n° 2136 - B, n° Tahiti E 09512 dont le siège social est sis à [Adresse 2], prise en la personne de son gérant : M. [R] [D] ;

Représentée par Me Benoît BOUYSSIÉ, avocat au barreau de Papeete ;

Intimée :

La Sci [F], immatriculée au Rcs de Papeete sous le n° 13152 C dont le siège social est sis à [Adresse 1], prise en la personne de son gérant Monsieur [H] [F] ;

Représentée par Me Gilles GUEDIKIAN, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 9 février 2024 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 14 mars 2024, devant M. SEKKAKI, conseiller faisant fonction de président, M. RIPOLL et Mme MARTINEZ, conseillers, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par M. SEKKAKI, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

EXPOSE DU LITIGE :

Faits :

Selon ordonnance rendue le 27 juin 2022, le juge des référés a constaté que la SARL Bio Tiful Factory est occupante sans droit ni titre du local appartenant à la SCI [F] située [Adresse 3], centre artisanal au rez-de-chaussée de l'immeuble, et ordonné son expulsion sous astreinte de 100 000 F CFP par jour de retard à compter de la signification de la décision.

Cette ordonnance a été signifiée à M. [D] [R], gérant de la SARL Bio Tiful Factory le 1er juillet 2022, et que celle-ci s'est maintenue dans les lieux, jusqu'au 1er août 2022, comme établi par constat du 2 août 2022.

Par requête déposée au greffe le 7 décembre 2022 et par assignation délivrée le 30 novembre 2022, la SCI [F] demande au juge des référés de bien vouloir :

- Liquider l'astreinte ordonnée par le juge des référés le 27 juin 2022 à la somme de 3 100 000 F CFP,

- Condamner la SARL Bio Tiful Factory à lui verser la somme provisionnelle de 3 100 000 F CFP au titre de la liquidation d'astreinte,

- Condamner la SARL Bio Tiful Factory à lui payer la somme de 103 760 F CFP en remboursement des frais d'huissier réglés pour obtenir son expulsion et la constatation de son départ des lieux et de leur état,

- Condamner la SARL Bio Tiful Factory à lui payer la somme de 661 200 F CFP au titre des frais de remise en état,

- Condamner la SARL Bio Tiful Factory à lui payer la somme de 1 500 000 F CFP à titre d'indemnité d'occupation pour les mois de mars à juillet 2022,

- Condamner la SARL Bio Tiful Factory à lui payer la somme de 150 000 F CFP en application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Au soutien de ses demandes, la SCI [F] avance que selon l'ordonnance du 27 juin 2022, le juge des référés constatait que la SARL Bio Tiful Factory était occupante sans droit ni titre du local appartement à la SCI [F] et ordonnait son expulsion sous astreinte de 100 000 F CFP par jour de retard à compter de la signification, que cette ordonnance a été signifiée le 1er juillet 2022, que la SARL Bio Tiful Factory s'est maintenue dans les lieux, jusqu'au 1er août 2022, qu'en application de l'article 76 du code de procédure civile, il appartient au juge des référés de liquider l'astreinte qu'il a prononcée du 1er juillet au 1er août 2022, que par ailleurs elle a dû subir des frais d'huissier du fait de la résistance de la défenderesse, soit un commandement tendant à expulsion, un procès verbal de tentative d'expulsion et un constat destiné à matérialiser le départ des lieux, qu'en outre les locaux ont subi des dégradations qu'elle a dû réparer, et qu'enfin la SARL Bio Tiful Factory est redevable d'un indemnité d'occupation de mars à juillet 2022.

Au soutien de ses demandes, la SARL Bio Tiful Factory avance les éléments suivants :

Le juge doit procéder au contrôle de proportionnalité entre le montant de l'astreinte et l'enjeu du litige, or la requérante personnalise sur M. [R] [D] qui a rencontré d'infinies difficultés et n'a cessé de rechercher à tenir ses engagements sur ses deniers personnels pour sauver ses sociétés, et alors même que la SARL Océanie confection a subi les conséquences de la crise covid, que M. [R] [D] a soldé les arriérés de loyer au 31 décembre 2021 sur ses fonds propres, que celui-ci a racheté les parts de la SARL Bio Tiful Factory à M. [O] le 21 juillet 2021, puis la SARL Océanie confection a été liquidée, et la SARL Bio Tiful Factory a été laissée dans les lieux et à compter de mars 2022 elle a honoré le paiement des loyers à hauteur de 600 000 F CFP ne pouvant intégrer son nouveau local avant août 2022, que ces règlements ont été imputés sur les périodes de janvier à février 2022, alors qu'elle n'était pas débitrice de cette période, que l'indemnité d'occupation est demandée en référence à un bail qui n'existe pas, qu'enfin la demande sur les travaux de remise en état ne peut aboutir compte tenu de l'usure normale et de l'ancienneté de la créance avancée.

Procédure :

Par requête enregistrée au greffe le 07 décembre 2022 et suivant acte d'huissier du 30 novembre 2022, puis conclusions ultérieures, la SCI [F] a fait assigner la SARL Bio Tiful Factory devant le tribunal civil de première instance de Papeete afin de :

Par ordonnance n° RG 22/00310 en date du 05 Juin 2023, le tribunal civil de première instance de Papeete a :

- Liquidé l'astreinte ordonnée par le juge des référés le 27 juin 2022 à la somme provisionnelle de 3 100 000 F CFP au titre de la liquidation d'astreinte fixée selon ordonnance du 27 juin 2022 ;

- Condamné la SARL Bio Tiful Factory à verser à la SCI [F] la somme de 103 760 F CFP en remboursement des frais d'huissier réglés ;

- Débouté la SCI [F] de sa demande tendant à voir condamner la SARL Bio Tiful Factory à lui payer la somme de 661 200 F CFP au titre des frais de remise en état du local ;

- Condamné la SARL Bio Tiful Factory à verser à la SCI [F] la somme de 1 500 000 F CFP à titre d'indemnité d'occupation pour les mois de mars à juillet 2022 ;

- Condamné la SARL Bio Tiful Factory à verser à la SCI [F] la somme de 150 000 F CFP en application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile ;

- Condamné la SARL Bio Tiful Factory aux dépens.

La SARL Bio Tiful Factory a relevé appel de cette ordonnance par requête enregistrée au greffe le04 juillet 2023.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 09 février 2024, et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 14 mars 2024.

A l'issue de celle-ci, les parties ont été informées que la décision, mise en délibéré, serait rendue le 11 avril 2024 par mise à disposition au greffe.

Prétentions et moyens des parties :

La SARL Bio Tiful Factory, appelant, demande à la Cour par dernières conclusions régulièrement transmises le 05 juillet 2023, de :

- Déclarer l'appel de la SARL Bio Tiful Factory recevable et bien-fondé.

- Débouter la SCI [F] de sa demande de liquidation d'astreinte, d'indemnité d'occupation, et de ses prétentions au titre des frais de remise en état ;

- Subsidiairement, réduire l'astreinte ;

- Très subsidiairement, ordonner une compensation à hauteur de 600 000 F CFP avec l'indemnité d'occupation ;

- A titre infiniment subsidiaire, condamner la SCI [F] au remboursement de la somme de 600 000 F CFP avec intérêts de droit au taux légal à compter du 1er mars 2022 ;

- Condamner la SCI [F] au paiement de la somme de 250 000 F CFP au titre de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française.La SCI [F], intimé, par dernières conclusions régulièrement transmises le 14 septembre 2023 demande à la cour de :

- Débouter la SARL Bio Tiful Factory de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- Confirmer l'ordonnance entreprise sauf en ce qu'elle a rejeté les demandes de condamnations provisionnelles de la SARL Bio Tiful Factory au paiement d'une somme de 661 200 F CFP au titre des frais de remise en état du local.

Statuant à nouveau,

- Condamner la SARL Bio Tiful Factory à payer à la SCI [F], la somme 661 200 F CFP au titre de la remise en état du local.

- Condamner la SARL Bio Tiful Factory à payer à la SCI [F], la somme de 200 000 F CFP au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions et moyens dont la Cour est saisie, il est renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties. L'exposé des moyens des parties, tel que requis par les dispositions de l'article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française, sera renvoyé à la motivation ci-après à l'effet d'y répondre.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la liquidation d'astreinte :

Par ordonnance du 28 mars 2022, le juge des référés a constaté la résiliation du bail conclu entre la SARL Océanie Confection et la SCI [F].

Par constat d'huissier du 29 mars 2022, il a été constaté que le local est toujours occupé par M. [R] [D] sous couvert d'une nouvelle société dont la dénomination sociale est Bio Tiful Factory. La même activité de sérigraphie exercée par la SARL Océanie Confection mise en liquidation le 31 mai 2021 a été reprise par cette nouvelle société la SARL Bio Tiful Factory.

Selon ordonnance rendue le 27 juin 2022, le juge des référés a constaté que la SARL Bio Tiful Factory est occupante sans droit ni titre du local appartenant à la SCI [F] situé [Adresse 3], centre artisanal au rez-de-chaussée de l'immeuble, et ordonné son expulsion sous astreinte de 100 000 F CFP par jour de retard à compter de la signification de la décision.

Cette ordonnance a été signifiée à M. [D] [R], gérant de la SARL Bio Tiful Factory le 1er juillet 2022, et que celle-ci s'est maintenue dans les lieux, jusqu'au 1er août 2022, comme établi par constat du 2 août 2022.

La SARL Bio Tiful Factory souhaite que la SCI [F] soit déboutée de sa demande de liquidation d'astreinte, subsidiairement que l'astreinte soit réduite. Elle soutient que le juge qui statue sur la liquidation de l'astreinte provisoire doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte qu'elle porte au droit de propriété du débiteur au regard du but légitime qu'elle poursuit. La SARL Bio Tiful Factory souhaite que le juge tienne compte des difficultés financières rencontrées par la SARL Oceanie Confection et la SARL Bio Tiful Factory. Elle soutient qu'elle n'a cessé de rechercher à tenir ses engagements sur les deniers personnels de son gérant pour sauver ses sociétés, et alors même que la SARL Océanie confection a subi les conséquences de la crise covid, la SARL Bio Tiful Factory a été laissée dans les lieux et à compter de mars 2022 elle a honoré le paiement des loyers à hauteur de 600 000 F CFP ne pouvant intégrer son nouveau local avant août 2022, que ces règlements ont été imputés sur les périodes de janvier à février 2022.

Elle expose également que la SCI [F] lui avait promis la signature d'un bail à condition qu'elle règle les arriérés de loyer dus par le précédent locataire.

La SCI [F] soutient qu'elle n'a jamais reconnu comme preneur la SARL Bio Tiful Factory, ce qui apparaît clairement sur l'ordonnance du 27 juin 2022, de sorte que cette dernière occupait les lieux sans droit ni titre du local et que le juge des référés a ordonné à juste titre la liquidation de l'astreinte à la somme de 3 100 000 F CFP.

Sur ce :

Aux termes de l'article 716 du code de procédure civile de Polynésie française, tout juge peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision.

L'article 717 du code de procédure civile de Polynésie française précise que l'astreinte est indépendante des dommages-intérêts. L'astreinte est provisoire ou définitive. L'astreinte doit être considérée comme provisoire, à moins que le juge n'ait précisé son caractère définitif. Une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu'après le prononcé d'une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine. Si l'une de ces conditions n'a pas été respectée, l'astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire.

Aux termes de l'article 718 du code de procédure civile de Polynésie française prévoit que l'astreinte, même définitive, est liquidée par le juge qui l'a ordonnée.

La SARL Bio Tiful Factory souhaite que la SCI [F] soit déboutée de sa demande de liquidation d'astreinte et à titre subsidiaire que son montant soit diminué. Elle invoque au soutient de sa demande que le juge doit procéder à un contrôle de proportionnalité entre le montant de l'astreinte et l'enjeu du litige.

Or, en matière de droit de propriété, il s'agit d'un contrôle de la proportionnalité restreint, laquelle est appréciée in concreto, qui revient à vérifier que la mesure considérée n'impose pas à la personne concernée des charges démesurées par rapport au résultat.

En l'espèce, selon une ordonnance du 27 juin 2022, le juge des référés a constaté que la SARL Bio Tiful Factory est occupante sans droit ni titre du local appartenant à la SCI [F], et ordonné son expulsion sous astreinte de 100 000 F CFP par jour de retard à compter de la signification de la décision. L'ordonnance a été signifiée le 1er juillet 2022, et la SARL Bio Tiful Factory s'est maintenue dans les lieux jusqu'au 1er août 2022. Le juge des référés a donc prononcé la liquidation de l'astreinte pour la période du 1er juillet au 1er août 2022 à la somme de 3 100 000 F CFP. Le juge des référés a condamné la SARL Bio Tiful Factory à verser à la SCI [F] la somme de 3 100 000 F CFP au titre de la liquidation de l'astreinte.

La mesure considérée, à savoir l'astreinte de 100 000 F CFP par jour, n'impose pas à la SARL Bio Tiful Factory une charge démesurée au regard de l'atteinte au droit de propriété. En effet, même si la SARL Bio Tiful Factory invoque ses difficultés financières et ses difficultés à retrouver un local, au vu de la durée de son occupation illégale des lieux sur la période de mars à août 2022, le montant de l'astreinte est bien proportionné au regard de l'atteinte au droit de propriété.

En l'espèce la mesure considérée n'impose pas à la SARL Bio Tiful Factory des charges démesurées par rapport au résultat dans la mesure où la SARL Bio Tiful Factory occupe des locaux sans droit ni titre et qu'elle n'a quitté les lieux que 30 jours après l'expulsion ordonnée par le juge des référés le 27 juin 2022.

De plus, le fait d'invoquer pour la SARL Bio Tiful Factory ses difficultés financières, la pandémie du covid, ses difficultés pour retrouver un local et le fait que son gérant ait souhaité régler les arriérés de loyer dus par l'ancien locataire, ces éléments sont sans rapport direct avec le fait que la SARL Bio Tiful Factory occupait le local pour lequel elle n'avait signé aucun bail commercial avec la SCI [F].

La cour constate que la SARL Bio Tiful Factory s'est maintenue dans les locaux pendant 30 jours après la signification de l'ordonnance ordonnant son expulsion sous astreinte de 100 000 F CFP par jour de retard. La SARL Bio Tiful Factory doit donc être condamnée à verser à titre de provision la somme de 3 100 000 F CFP au titre de la liquidation de l'astreinte.

En conséquence de tout ce qui précède, il convient de confirmer l'ordonnance attaquée sur le montant accordé au titre de la liquidation d'astreinte qui été fixée à la somme de 3 100 000 F CFP pour l'occupation du 1er juillet au 1er août 2022.

La SARL Bio Tiful Factory sera donc condamnée à verser à la SCI [F] la somme de 3 100 000 F CFP au titre de la liquidation d'astreinte fixée selon l'ordonnance du 27 juin 2022.

Sur l'indemnité d'occupation :

Un contrat de bail commercial a été conclu entre la SCI [F] et la SARL Océanie Confection le 19 juillet 2019 moyennant un loyer de 300 000 F CFP par mois.

L'ordonnance du 28 mars 2022 a constaté la résiliation du bail à la date du 19 novembre 2021 suite au commandement de payer du 19 octobre 2021.

Par constat d'huissier du 29 mars 2022, il a été constaté que le local était toujours occupé par M. [R] [D], l'ancien gérant de la SARL Océanie Confection, sous couvert d'une nouvelle société dont la dénomination sociale est la SARL Bio Tiful Factory.

La SARL Bio Tiful Factory occupe les locaux depuis le mois de mars jusqu'au 31 juillet 2022, sans verser de loyer à la SCI [F].

La SCI [F] sollicitait la condamnation de la SARL Bio Tiful Factory au paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant de 300 000 F CFP par mois pour son occupation des mois de mars à juillet 2022, soit au total la somme de 1 500 000 F CFP.

La SARL Bio Tiful Factory soutient que l'indemnité d'occupation a un fondement contractuel et ne peut être fixée par le juge des référés par référence à un contrat de bail qui est inexistant en l'espèce.

Elle soutient également que la SCI [F] aurait perçu des loyers à hauteur de 600 000 F CFP versée par l'ancien locataire la SARL Océanie Confection, que ces loyers auraient dû être affectés à la période d'occupation effective de la SARL Bio Tiful Factory pour son occupation au titre des mois de mars et avril 2022. La SARL Bio Tiful Factory souhaite donc voir infirmer l'ordonnance sur ce point, et à titre subsidiaire elle demande la compensation de sa dette avec les loyers versées par la SARL Océanie Confection à hauteur de 600 000 F CFP.

Sur ce :

En vertu de l'article 433 du code de procédure civile de la Polynésie française, dans le cas où l'existence d'une obligation n'est pas contestable, le président peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Aux termes de l'article 1382 du code civil tel qu'applicable en Polynésie française, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En vertu de cet article, l'occupant d'un local commercial peut être tenu du versement d'une indemnité en cas d'occupation indue des lieux.

L'indemnité d'occupation se définit comme une somme d'argent versée au propriétaire en contrepartie de l'occupation d'un bien par une personne. Le montant de l'indemnité d'occupation représente la contrepartie de la jouissance des lieux.

La SARL Bio Tiful Factory fait valoir que l'indemnité d'occupation est due seulement sur le fondement d'un bail commercial dont elle n'est en l'espèce pas titulaire.

Or, l'indemnité d'occupation se fonde sur l'article 1382 du code civil et donc sur la responsabilité délictuelle, elle ne tire pas son fondement d'un contrat mais de l'occupation sans contrepartie financière d'un local.

En l'absence de bail commercial, l'indemnité d'occupation est due par l'occupant d'un local commercial en contrepartie de la jouissance des lieux.

Il n'est pas contesté que la SARL Bio Tiful Factory a occupé les locaux commerciaux de mars à juillet 2022. Il n'est pas non plus contesté que la SARL Bio Tiful Factory n'a pas versé de loyer en échange de l'occupation des locaux.

La SARL Bio Tiful Factory se contente d'avancer que la SCI [F] aurait perçu 600 000 F CFP au titre des loyers de décembre 2021 et janvier 2022 par la SARL Océanie Confection, ancien locataire des locaux commerciaux dont le bail a été résilié au 19 novembre 2021.

La cour constate que la SARL Bio Tiful Factory n'a effectué aucun versement en son nom au titre de son occupation pour la période de mars à juillet 2022. Le paiement effectué par une autre société, en vertu d'un contrat de bail auquel la SARL Bio Tiful Factory doit être considéré comme un tiers, et pour une période différente, ne peut en aucun cas être assimilé au paiement d'une somme d'argent en vertu de l'occupation des locaux commerciaux qu'elle occupait sur la période de mars à juillet 2022.

L'obligation de verser une indemnité d'occupation, pour la période de mars à juillet 2022 sur laquelle la SARL Bio Tiful Factory a occupé des locaux commerciaux sans régler de loyer, est non sérieusement contestable.

En conséquence, il convient de confirmer l'ordonnance attaquée qui a condamné la SARL Bio Tiful Factory à verser la somme provisionnelle de 1 500 000 F CFP à titre d'indemnité d'occupation pour les mois de mars à juillet 2022, obligation non sérieusement contestable.

Sur les frais de remise en état :

Un constat d'huissier a été établi le 2 août 2022, il ressort de ce procès verbal que 'des modules de climatisation ont été installés sur les différents murs. Les traces de ces modules ainsi que les trous de chevilles et tuyau d'évacuation sont apparent dégradant considérablement l'esthétiques des façades intérieures.' De plus, 'les murs est et sud sont considérablement dégradés.' Le mur est gondolé par des infiltrations d'eau, le mur sud est également marqué de différentes traces de couleur blanche et trous de fixation.

La SCI [F] souhaite voir condamner la SARL Bio Tiful Factory à lui payer la somme provisionnelle de 661 200 F CFP au titre des frais de remise en état du local. Elle fait valoir notamment que deux climatiseurs qui lui appartenaient ont été volés et que les locaux ont été dégradés par la SARL Bio Tiful Factory.

Elle fournit un devis au soutient de sa demande d'un montant de 661 200 F CFP pour la pose de deux nouveaux climatiseurs et divers travaux de peinture et rebouchage.

Sur ce :

En vertu de l'article 433 du code de procédure civile de la Polynésie française, dans le cas où l'existence d'une obligation n'est pas contestable, le président peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

La cour procède à une comparaison du procès verbal du 29 mars 2022 sur lequel figure des photographies du local lorsqu'il était occupé par la SARL Bio Tiful Factory et le procès verbal du 2 août 2022 dressé suite au départ de l'occupant.

Il ressort effectivement qu'il manque un climatiseur. En revanche, la cour constate que la SCI [F] ne fournit aucune facture d'achat de ce climatiseur afin de prouver que ce dernier lui appartenait effectivement.

De plus, il ressort du procès verbal du 2 août 2022 une certaine vétusté des lieux, cependant la SCI [F] n'apporte pas la preuve que la SARL Bio Tiful Factory a dégradé les lieux. Elle ne fournit aucun élément de preuve qui aurait pu permettre un comparatif avec le constat d'huissier du 2 août 2022.

En conséquence, l'attribution de frais de remise en état constitue une contestation sérieuse qui ne permet pas au juge des référés de constater les dégâts matériels et le vol des climatiseurs.

La demande de la SCI [F] à voir condamner la SARL Bio Tiful Factory à la somme de 661 200 F CFP au titre des frais de remise en état du local doit être rejetée.

L'ordonnance attaquée sera confirmée sur ce point.

Sur les frais et dépens :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI [F] les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, il convient par conséquent de confirmer la décision du juge des référés qui a condamné la SARL Bio Tiful Factory à lui payer la somme de 150 000 F CFP, de condamner la SARL Bio Tiful Factory à lui payer 150 000 F CFP au titre des frais d'appel non compris dans les dépens et de débouter SARL Bio Tiful Factory de ses demandes au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Les dépens de première instance ont été justement mis à la charge de la SARL Bio Tiful Factory et la décision en ce sens sera confirmée et les dépens d'appel seront supportés par la SARL Bio Tiful Factory qui succombe conformément aux dispositions de l'article 406 du code de procédure civile de la Polynésie française et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 409 du code de procédure civile de la Polynésie française.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

CONFIRME l'ordonnance de référé n° RG 22/00310 - N° Portalis DB36-w-B7G-C3RQ en date du 05 juin 2023 du juge des référés du tribunal civil de première instance de Papeete en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la SARL Bio Tiful Factory à payer à la SCI [F] la somme de 150 000 F CFP (cent cinquante mille francs pacifique) au titre des frais d'appel non compris dans les dépens par application de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française,

DEBOUTE la SARL Bio Tiful Factory de sa demande au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

CONDAMNE la SARL Bio Tiful Factory aux dépens d'appel.

Prononcé à Papeete, le 11 avril 2024.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : K. SEKKAKI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet b
Numéro d'arrêt : 23/00211
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;23.00211 ?
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