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11/04/2024 | FRANCE | N°23/00182

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet b, 11 avril 2024, 23/00182


N° 120



SE

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Copies exécutoires délivrées à :

- Me Genot,

- Me Jacquet,

le 17.04.2024.









REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 11 avril 2024





RG 23/00182 ;



Décision déférée à la Cour : ordonnance n° 2, rg n° 21/00018 du Juge des Référé du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, section détachée d'Uturoa Raiatea, du 20 janvier 2023 ;

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Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 8 juin 2023 ;



Appelante :



Mme [H], [B], [X] [N], née le 10 avril 1985 à [Localité 2], de nationalité française, demeurant à [Adresse...

N° 120

SE

------------

Copies exécutoires délivrées à :

- Me Genot,

- Me Jacquet,

le 17.04.2024.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 11 avril 2024

RG 23/00182 ;

Décision déférée à la Cour : ordonnance n° 2, rg n° 21/00018 du Juge des Référé du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, section détachée d'Uturoa Raiatea, du 20 janvier 2023 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 8 juin 2023 ;

Appelante :

Mme [H], [B], [X] [N], née le 10 avril 1985 à [Localité 2], de nationalité française, demeurant à [Adresse 5] Bora Bora ;

Représentée par Me Viviane GENOT, avocat au barreau de Papeete ;

Intimé :

M. [D] [L], née le 13 février 1954 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant à [Adresse 1] ;

Représenté par Me Thierry JACQUET, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 9 février 2024 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 14 mars 2024, devant M. SEKKAKI, conseiller faisant fonction de président, M. RIPOLL et Mme MARTINEZ, conseillers, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par M. SEKKAKI, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

EXPOSE DU LITIGE :

Faits :

Résumé des faits constantsPar acte sous seing privé en date du 04 décembre 2017, Mme [D] [L] a donné à bail à Mme [H] [N] une habitation meublée située à [Adresse 3], sur la commune de Bora Bora. Le bail, d'une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, prévoyait le paiement par Mme [H] [N] d'un loyer mensuel de 90 000 F CFP.

Mme [D] [L] a fait délivrer à Mme [H] [N] un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail en date du 03 mai 2021, portant sur un montant de 14 mois de loyers impayés (20 000 F CFP x 14 = 280 000 F CFP), avec une clause pénale de 10 % (28 000 F CFP).

Mme [D] [L] et Mme [H] [N] ont signé le 07 juillet 2021 un accord portant sur la résiliation du bail, la remise des clés et l'inventaire de sortie relatif à la vaisselle et au mobilier.

Procédure :

Par requête reçue au greffe le 30 août 2021, précédée d'un acte d'huissier en date du 02 août 2021, Mme [D] [L] a assigné Mme [H] [N] devant le juge des référés du tribunal de première instance de Papeete, section détachée de Raiatea.

La requérante a sollicité du juge des référés qu'il condamne Mme [H] [N] au paiement de provisions d'un montant de 240 000 F CFP au titre des arriérés de loyers impayés et de 74 528 F CFP à valoir sur la remise en état du mobilier de la maison et le paiement des charges (déduction ayant été faite du montant du dépôt de garantie de 90 000 F CFP), et au paiement d'une somme de 113 000 F CFP au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie françaises.

En réponse, Mme [H] [N] a demandé au juge des référés de condamner Mme [D] [L] au paiement de provisions d'un montant de 150 000 F CFP au titre des intérêts de retard de 10% du loyer par mois qui lui est due pour le dépôt de garantie non restitué dans le délai imparti, et d'un montant de 300 000 F CFP à valoir sur les dommages et intérêts pour troubles de jouissance et violation de domiciles.

Par jordonnance n° RG 21/00018 - N° Portalis DB36-W-B7F-DPC en date du 20 janvier 2023, le juge des référés du tribunal civil de première instance de Papeete - Section détachée de Raiatea a :

- Condamné Mme [H] [N] à payer à Mme [D] [L], à titre de provision, la somme de 420 000 F CFP au titre des loyers impayés ;

- Condamné Mme [H] [N] à payer à Mme [D] [L], à titre de provisions la somme de 26 400 F CFP au titre des charges locatives ;

- Condamné Mme [D] [L] à payer à Mme [H] [N], à titre de provisions la somme de 90 000 F CFP au titre de la restitution du dépôt de garantie ;

- Dit qu'il sera procédé à la compensation des créances provisionnelles, la somme totale à la charge de Mme [H] [N] étant de 356 400 F CFP ;

- Condamné Mme [H] [N] à payer à Mme [D] [L] la somme de 113 000 F CFP au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

- Condamné Mme [H] [N] aux dépens, qui comprendront le coût du commandement de payer du 03 mai 2021.

Mme [H] [N] a relevé appel de ce jugement par requête enregistrée au greffe le 8 juin 2023.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 février 2024, et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 14 mars 2024.

A l'issue de celle-ci, les parties ont été informées que la décision, mise en délibéré, serait rendue le 11 avril 2024 par mise à disposition au greffe.

Prétentions et moyens des parties :

Mme [H] [N], appelante, demande à la Cour au terme de sa requête d'appel, de :

- Dire et juger le présent appel recevable et bien fondé.

- Infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé, minute n° 02, RG n° 21/00018, rendue par le tribunal civil de première instance de Papeete, Section détachée d'Uturoa - Raiatea, le 20 janvier 2023, hormis sur la condamnation de Mme [D] [L] à payer à Mme [H] [N], à titre de provision, la restitution du dépôt de garantie.

Statuant à nouveau,

- Dire et juger irrecevable la requête en constatation de résiliation du bail conclu le 04 décembre 2017 entre Mme [H] [N] et Mme [D] [L],

- Dire et juger que la réduction de loyer consentie dès juin 2020, suite à la crise sanitaire ayant particulièrement impacté l'île de Bora-Bora, jusqu'au 07 juillet 2021, date de la remise des clefs, ne peut être contestée par la bailleresse et vaut pour un loyer systématiquement payé par la locataire à hauteur de 70 000 F CFP mensuels,

- Dire et juger que les loyers doivent être financés hors tout enrichissement sans cause de la bailleresse, ainsi seuls les six premiers jours de juillet 2021 avant la remise des clefs par Mme [N] le 07 juillet 2021 doivent être considérés pour ledit mois,

En conséquence,

- Infirmer l'ordonnance de référé en tant qu'elle a condamné Mme [N] au paiement d'un arriéré de loyers de 420 000 F CFP,

- Confirmer en tant que de besoin le rejet des frais de remise en état non justifiés par la bailleresse,

- Confirmer la condamnation de Mme [D] [L] à payer à Mme [H] [N], à titre de provision, la somme de 90 000 F CFP au titre de la restitution du dépôt de garantie,

- Condamner Mme [D] [L] à payer à Mme [H] [N] la somme de 300 000 F CFP au titre de son préjudice moral, pour abus de droit,

- Condamner Mme [D] [L] à payer à Mme [H] [N] la somme de 250 000 F CFP au titre des frais irrépétibles conformément aux dispositions de l'article 407 du code de procédure civile,

- Condamner Mme [D] [L] aux entiers dépens dont distraction d'usage au profit de l'avocat de l'appelant.

Mme [D] [L], intimée, par dernières conclusions régulièrement transmises le 27 septembre 2023, demande à la Cour de:

- Confirmer l'ordonnance sur la condamnation de Mme [H] [N] au paiement d'une provision à valoir sur les arriérés de loyers de 420 000 F CFP,

- Infirmer sur la condamnation de Mme [D] [L] au paiement d'une somme de 90 000 F CFP à Mme [N] au titre de la caution,

Statuant à nouveau de ce chef,

- Débouter Mme [H] [N] de sa demande de restitution de caution,

- La condamner au paiement d'une somme de 300 000 F CFP au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- La condamner aux entiers dépens dont distraction d'usage au profit de Maître Thierry Jacquet, avocat sur ses offres de droit.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions et moyens dont la Cour est saisie, il est renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties. L'exposé des moyens des parties, tel que requis par les dispositions de l'article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française, sera renvoyé à la motivation ci-après à l'effet d'y répondre.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de la requête en constatation de résiliation du bail et la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :

Le premier juge a constaté, au vu des pièces produites que :

" Le 04 décembre 2017, Mme [D] [L] a donné à bail à Mme [H] [N] une habitation meublée située à [Adresse 3], sur la commune de Bora Bora. Le bail, d'une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, prévoyait le paiement par Mme [H] [N] d'un loyer mensuel de 90 000 F CFP.

Mme [D] [L] a fait délivrer à Mme [H] [N] un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail en date du 03 mai 2021, portant sur un montant de 14 mois de loyers impayés (20 000 F CFP x 14 = 280 000 F CFP), avec une clause pénale de 10 % (28 000 F CFP).

Mme [D] [L] et Mme [H] [N] ont signé le 07 juillet 2021 un accord portant sur la résiliation du bail, la remise des clés et l'inventaire de sortie relatif à la vaisselle et au mobilier. "

Mme [H] [N] dans sa requête d'appel du 08 juin 2023 soutient que la requête de Mme [D] [L] en constatation de résiliation du bail est irrecevable en ce qu'elle n'a pas respectée le formalisme de l'article LP 28 de la loi n° 2012-26 du 10 décembre 2012 qui impose une notification par voie d'huissier au président de la Polynésie française. A ce titre, elle sollicite du juge des référés une indemnité réparatrice à hauteur de 300 000 F CFP au titre de son préjudice moral pour abus de droit.

Mme [D] [L] soutient que le juge des référés a été saisi seulement en paiement d'une provision et non pas en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire.

Sur ce :

L'ordonnance de référé du 20 janvier 2023 ne portait sur aucune demande de résiliation du contrat de bail, le premier juge a seulement constaté l'acquisition de la clause résolutoire pour 14 mois de loyers impayés et l'accord des parties sur la résiliation du bail suite au départ de Mme [H] [N]. La demande initiale portait uniquement sur une demande de provision au titre des loyers impayés, des charges locatives et de la restitution du dépôt de garantie.

En l'espèce, la prétention soulevée dans la requête d'appel porte sur la recevabilité de la requête en constatation de résiliation du bail. Mme [H] [N] soutient que l'assignation aux fins de constat de la résiliation du bail n'a pas été signifiée par voie d'huissier au Président de la Polynésie française.

La cour constate qu'aucune demande tendant à la résiliation du bail n'a été présentée devant le premier juge et en appel, de sorte qu'aucune irrecevabilité ne peut être constatée.

De plus, Mme [H] [N] souhaite voir condamner Mme [D] [L] au paiement d'une indemnité réparatrice de 300 000 F CFP au titre de son préjudice moral pour procédure abusive.

Sur ce point, il résulte de l'article 1382 du code civil tel qu'applicable en Polynésie française que celui qui a agi en justice de manière abusive peut être condamné à des dommages et intérêts au profit de celui qui en a subi un préjudice.

En l'espèce, la cour n'a pas décelé dans la procédure engagée par Mme [D] [L] à la fois la mauvaise foi, une volonté dilatoire, une absence manifeste de fondement, le caractère malveillant de l'action, l'intention de nuire, tous comportements permettant de considérer que son droit d'agir en justice a dégénéré en abus.

La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive de Mme [H] [N] sera donc rejetée sur ce point.

Sur la demande formée au titre des arriérés de loyers :

Le 04 décembre 2017, Mme [D] [L] a donné à bail à Mme [H] [N] une habitation meublée d'une durée d'un an prévoyant le paiement par Mme [H] [N] d'un loyer mensuel de 90 000 F CFP.

Mme [H] [N] soutient que Mme [D] [L], par un accord non formalisé, lui a accordé à compter de juin 2020, en raison de la crise sanitaire, une réduction de loyer de 20 000 F CFP par mois. Le loyer qui devait être réglé à Mme [D] [L] s'élevait donc à la somme de 70 000 F CFP par mois jusqu'à la fin du bail.

Mme [H] [N] relève que cette somme a été payée pendant plus d'un an à la propriétaire qui n'a pas contesté ce montant sur cette période.

Elle fait valoir que Mme [D] [L] a fait preuve de malhonnêteté en ne reconnaissant pas l'accord concernant la réduction du loyer. Cette dernière a porté atteinte au principe de bonne foi fondant toute relation contractuelle.

Elle soutient également que le premier juge a retenu à tort un paiement du loyer sur l'intégralité du mois de juillet alors qu'elle a quitté les lieux le 7 juillet 2021, date à laquelle elle a restitué les clés du logement loué. En conséquence, le paiement du loyer sur la période du 7 au 31 juillet constitue un enrichissement sans cause au profit de Mme [D] [L].

Mme [D] [L] soutient qu'elle n'a jamais accordé une réduction de loyer de 20 000 F CFP et qu'elle n'a jamais perçu le loyer du mois de juillet réglable d'avance. Elle sollicite la condamnation de Mme [H] [N] à lui payer la somme de 420 000 F CFP au titre des arriérés de loyers sur la période du 1er juin 2020 au 31 juillet 2021.

Sur ce :

En vertu de l'article 433 du code de procédure civile de la Polynésie française, dans le cas où l'existence d'une obligation n'est pas contestable, le président peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

La demande de Mme [D] [L] doit s'analyser en une demande de provision.

La cour constate que les parties ne produisent ni quittance de loyer, ni décompte précis des sommes dues au titre des loyers depuis la signature du bail.

- Sur les arriérés de loyers du 1er juin 2020 au 31 mai 2021 :

Aux termes des dispositions de l'article LP 3 14 de la loi de pays n° 2012-26 du 10 décembre 2012 le contrat de location est établi par écrit et prévoit notamment le montant du loyer, ses modalités de paiement ainsi que ses règles de révision éventuelle.

En l'espèce, le contrat de bail écrit prévoit un loyer mensuel de 90 000 F CFP. La locataire, Mme [H] [N], a versé un loyer de 70 000 F CFP à compter du mois de juin 2020 jusqu'en mai 2021. La réalité de ces versements ne fait pas l'objet d'une contestation.

Mme [H] [N] affirme qu'elle a conclu un accord non formalisé avec Mme [D] [L] portant sur une réduction du loyer à la somme de 70 000 F CFP par mois en raison de la crise sanitaire. Cependant, Mme [H] [N] n'apporte aucun élément de preuve permettant au juge des référés d'établir l'existence de cet accord.

Le juge des référés, juge de l'évidence, constate que le loyer contractuel prévu est de 90 000 F CFP et que la nature contractuelle de la réduction alléguée n'est pas établie. L'obligation de payer le loyer d'un montant de 90 000 F CFP n'est pas sérieusement contestable, pour les motifs précédemment développés sur le montant du loyer.

De plus, Mme [H] [N] invoque au soutient de sa demande la mauvaise foi de Mme [D] [L] dans l'exécution du contrat. Cependant, cet argument ne saurait prospérer puisque la réduction de loyer n'a pas une nature contractuelle n'ayant fait l'objet d'aucun avenant au contrat de bail ni d'aucun accord écrit, signé par les parties.

Mme [H] [N] a payé la somme de 70 000 F CFP pendant 12 mois alors que le loyer contractuellement prévu était de 90 000 F CFP. La dette locative à la charge de la locataire est donc de 20 000 F CFP sur 12 mois ce qui correspond à la somme de 240 000 F CFP, obligation non sérieusement contestable.

Cette dette locative entraîne l'obligation de verser la somme de 240 000 F CFP au titre des loyers impayés pour la période du 1er juin 2020 au 31 mai 2021.

En conséquence, il convient de condamner Mme [H] [N] à verser à Mme [D] [L] la somme de 240 000 F CFP à titre de provision.

Le juge des référés a donc correctement évalué le montant sur cette période.

- Sur les arriérés de loyers du mois de juin 2021 :

Le premier juge a relevé que Mme [H] [N] n'a pas rapporté la preuve du paiement à Mme [D] [L] de la somme de 90 000 F CFP au titre du loyer du mois de juin 2021.

Mme [H] [N] ne justifie pas avoir réglé le loyer en question et ne remet pas en cause ce chef de jugement au sein de sa requête d'appel. De sorte que le non-paiement du loyer dû au titre du mois de juin 2021 ne fait l'objet d'aucune contestation sérieuse.

En l'espèce, la cour constate l'existence d'une dette locative qui entraîne l'obligation de verser la somme de 90 000 F CFP, qui était contractuellement prévue au titre du loyer du mois de juin 2021, obligation non sérieusement contestable.

En conséquence, il convient de condamner Mme [H] [N] à verser à Mme [D] [L] la somme de 90 000 F CFP à titre de provision.

Le juge des référés a donc correctement évalué le montant sur cette période.

- Sur les arriérés de loyers du 1er juillet au 9 juillet 2021 :

Le premier juge a considéré que le loyer total pour le mois de juillet était dû et a condamné Mme [H] [N] à verser à Mme [D] [L] la somme de 90 000 F CFP à titre de provision.

Le contrat de bail du 4 décembre 2017 stipule que " le présent bail est consenti et accepté moyennant un loyer mensuel de 90 000 F CFP, que le preneur s'oblige à payer d'avance le premier de chaque mois. "

Or, le locataire n'est redevable du loyer et des charges que pour le temps où il a occupé réellement les lieux. Le paiement de la totalité du mois du juillet alors que le bail a pris fin le 9 juillet 2021 constituerait un enrichissement sans cause au profit du propriétaire.

La cour précise qu'au vu des pièces fournies elle retient le 9 juillet 2021 comme étant la date de fin du bail. Il s'agit de la date de l'attestation de sortie signée par les deux parties et fournie par Mme [D] [L]. Le premier juge et Mme [H] [N] avaient retenu le 7 juillet 2021 sans justification.

En l'espèce, la cour constate que le loyer du mois de juillet 2021 n'a pas été réglé par Mme [H] [N] alors qu'elle était tenue de régler le loyer du 1er au 9 juillet 2021, période pendant laquelle elle occupait les lieux loués.

La cour procède donc à un calcul au prorata de la présence du locataire dans les lieux loués, soit 9 jours de présence rapportés à un loyer mensuel de 90 000 F CFP ce qui correspond donc à la somme de 26 129 F CFP.

La dette locative devra être évaluée à la somme de 26 129 F CFP pour les loyers impayés de la période du 1er au 9 juillet 2021, obligation non sérieusement contestable.

Mme [H] [N] sera condamnée à verser la somme de 26 129 F CFP à titre de provision, par information de l'ordonnance attaquée.

En conséquence de tout ce qui précède, il convient d'infirmer l'ordonnance attaquée sur le montant de la provision qu'elle a évalué à la somme totale de 420 000 F CFP au titre des loyers du 1er juin 2020 au 9 juillet 2021.

Il convient de condamner Mme [H] [N] à verser à Mme [D] [L], à titre de provision, la somme de 356 129 F CFP au titre des loyers impayés.

Sur les charges locatives :

Le bail du 4 décembre 2017 stipule en son article 5 que le preneur satisfera à toutes les charges communales portant sur les eaux et les ordures, ces charges sont payables mensuellement par le versement d'une provision en sus du loyer. Le différentiel éventuel sera réclamé dès réception de la redevance annuelle.

Mme [D] [L] demande au juge des référés le paiement d'une provision à hauteur de 26 400 F CFP au titre du non-paiement des charges locatives par sa locataire. A ce titre, elle produit la facture de la taxe sur les ordures ménagères pour l'année 2020 d'un montant de 13 200 F CFP.

Mme [H] [N] soutient que ces charges sont au nom du propriétaire qui ne lui a pas communiquées. Elle invoque le principe selon lequel " nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude " pour s'exonérer du paiement des charges communales que la propriétaire lui réclame à hauteur de 26 400 F CFP.

Sur ce :

En vertu de l'article 433 du code de procédure civile de la Polynésie française, dans le cas où l'existence d'une obligation n'est pas contestable, le président peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En vertu du bail, les charges locatives sont à la charge du locataire qui doit verser une provision mensuelle en sus du loyer. La locataire, Mme [H] [N], n'apporte pas la preuve du règlement mensuel de ses charges. De plus, le montant de la taxe d'ordure ménagère n'est pas contesté c'est bien la somme de 26 400 F CFP au titre des années 2019 et 2020 qui sera retenue.

En l'état, la cour constate que cette obligation n'est pas sérieusement contestable au vu des dispositions contractuelle et de l'absence de preuve contraire du paiement des charges par la locataire.

Il convient dès lors de confirmer l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a condamné Mme [H] [N] à payer à Mme [D] [L], à titre de provision, la somme de 26 400 F CFP au titre des charges locatives.

Sur le dépôt de garantie et les frais de remise en état du logement:

Le contrat de bail du 4 décembre 2017 avait été conclu pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, il pourra être résilié à tout moment avec un préavis de deux mois.

Le bail prévoit un dépôt de garantie de 90 000 F CFP qui sera restitué dans un délai maximum d'un mois à compter de la restitution des clés par le locataire et après le paiement de tous les loyers dus par lui, l'exécution de toutes réparations lui incombant.

Un commandement de payer a été délivré par voie d'huissier le 3 mai 2021 visant la clause résolutoire dans lequel il était précisé que si le règlement n'intervient pas dans un délai de deux mois à partir de la date du présent acte, le bailleur se prévaudra de la clause résolutoire insérée au bail.

La fin du bail a été constatée au 9 juillet 2021 date de l'attestation de sortie fournie par le propriétaire qui constate l'état des lieux de sortie et la remise des clés.

Le dépôt de garantie n'a pas été restitué à Mme [H] [N].

La locataire, Mme [H] [N], sollicite du juge des référés qu'il condamne Mme [D] [L] à lui payer, à titre de provision, la somme de 90 000 F CFP au titre de la restitution du dépôt de garantie.

Mme [D] [L] soutient que le dépôt de garantie ne doit pas être rendu au locataire en vertu de l'article LP 14 de la loi de pays n° 2012-26 du 10 décembre 2012. Elle soutient que le bail était conclu pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, qu'il devait donc prendre fin au 4 décembre 2021. La résiliation du contrat par le locataire le 9 juillet 2021 a donc eu lieu avant son échéance, ce qui entraîne une indemnité compensatrice au profit du bailleur égale au montant du dépôt de garantie.

Mme [D] [L] soutient également que les lieux loués ont subis des dégradations avec des charges impayés de sorte qu'elle a dû engager des frais s'élevant à la somme de 164 528 F CFP, ce qui excède le montant de la caution. Elle fournit à l'appui de sa demande un état des frais engagés et les factures correspondantes.

Sur ce :

En vertu de l'article 433 du code de procédure civile de la Polynésie française, dans le cas où l'existence d'une obligation n'est pas contes-table, le président peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le juge des référés vérifie, en analysant les éléments de preuve produits, si l'obligation mise à la charge de l'une des parties n'est pas sérieusement contestable.

- Concernant le dépôt de garantie :

Mme [D] [L] invoque au soutient de sa demande l'article LP 14 de la loi de pays n° 2012-26 du 10 décembre 2012 qui prévoit que lorsque la durée du contrat de location est d'un an, la résiliation par le locataire du contrat avant l'échéance entraîne une indemnité compensatrice au profit du bailleur égale au montant du dépôt de garantie.

Cet article prévoit à son alinéa 1er que "le locataire peut résilier le contrat de location à tout moment" et il prévoit à son alinéa 2 une exception lorsque le contrat est conclu pour une durée d'1 an que la résiliation par le locataire du contrat avant l'échéance entraîne une indemnité compensatrice au profit du bailleur égale au montant du dépôt de garantie. Or, ce deuxième alinéa n'a pas vocation à s'appliquer lorsque le contrat a été renouvelé par tacite reconduction. Dans ce cas précis, le contrat de bail est conclu pour une période supérieure à un an, le locataire peut donc rompre le contrat de bail à tout moment en respectant un préavis. De plus, en l'espèce, le contrat prévoit expressément que "le bail sera renouvelable par tacite reconduction. Il (le preneur) pourra alors le résilier à tout moment avec un préavis de deux mois."

En l'espèce, le contrat de bail a été conclu le 4 décembre 2017 pour une durée d'un an, il a été renouvelé par tacite reconduction et a pris fin le 9 juillet 2021. Le locataire a souhaité quitter le logement suite à la mise en 'uvre de la clause résolutoire par le bailleur. Le dépôt de garantie reste dû au locataire et le propriétaire ne peut se prévaloir de l'alinéa 2 de l'article LP 14 de la loi de pays n° 2012-26 du 10 décembre 2012.

La cour constate que l'obligation de restituer le dépôt de garantie égale à la somme de 90 000 F CFP n'est pas sérieusement contestable et l'ordonnance qui a accordé la provision de ce chef doit être confirmée.

- Concernant les frais de remise en état :

En cas de résiliation du bail, le dépôt de garantie peut être restitué au locataire déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenues, en lieu et place du locataire, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées.

Mme [D] [L] produit une feuille manuscrite qui liste les frais engagés pour la remise en état de la maison et les factures correspondantes à la somme de 164 528 F CFP.

Cependant, elle ne fournit ni d'état des lieux, ni inventaire d'entrée dans les lieux, ni de photos permettant de vérifier que la locataire a endommagé les lieux loués justifiant de lui accorder une provision de l'ordre de 164 528 F CFP à déduire du dépôt de garantie. De plus, les factures produites dates du 07 juillet 2021, du 05 juillet 2021 et du 08 juillet 2021 alors que l'état des lieux a été réalisé le 9 juillet 2021.

L'attestation de sortie produite par la propriétaire mentionne bien que " l'état des lieux a été fait ce jour, 09 juillet 2021, en présence de Mme [H] [N] ". Les achats pour la remise en état des lieux loués ne peuvent avoir été faits avant l'état des lieux de sortie.

Le juge des référés n'est pas en mesure de constater que les dégradations alléguées ont été commises par Mme [H] [N].

En vertu de tout ce qui précède, la demande de provision de Mme [D] [L] sera donc rejetée et elle sera condamnée à verser à titre de provision à Mme [H] [N] la somme de 90 000 F CFP au titre de la restitution du dépôt de garantie.

L'ordonnance sera donc confirmée de ces chefs.

La cour constate qu'il y a lieu d'ordonner la compensation entre les créances provisionnelles réciproques des parties.

En conséquence après compensation, Mme [H] [N] reste redevable envers Mme [D] [L] de la somme de 266 129 F CFP.

L'ordonnance attaquée sera infirmée en ce sens, puisque les montants compensés ne sont pas les mêmes en raison de l'infirmation partielle de la décision sur les loyers impayés.

Sur l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française :

Compte tenu de ce qui précède, il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [D] [L] les sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens, il convient par conséquent confirmer la décision du tribunal qui a condamné Mme [H] [N] à lui payer la somme de 113 000 F CFP, de condamner Mme [H] [N] à lui payer 115 000 F CFP au titre des frais d'appel non compris dans les dépens et de débouter Mme [H] [N] de ses demandes au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Sur les dépens :

Les dépens de première instance ont été justement mis à la charge de Mme [H] [N] et la décision en ce sens sera confirmée et les dépens d'appel seront supportés par Mme [H] [N] qui succombe conformément aux dispositions de l'article 406 du code de procédure civile de la Polynésie française et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 409 du code de procédure civile de la Polynésie française.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

DECLARE l'appel recevable ;

REJETTE la demande d'irrecevabilité de la requête en constatation de résiliation du bail conclu le 04 décembre 2017 entre Mme [H] [N] et Mme [D] [L] ;

DEBOUTE Mme [H] [N] de sa demande de condamnation de Mme [D] [L] à lui verser la somme de 300 000 F CFP au titre de son préjudice moral pour abus de droit ;

CONFIRME l'ordonnance attaquée en ses dispositions soumises à la cour, SAUF en ce qu'elle a :

- Condamné Mme [H] [N] à payer à Mme [D] [L], à titre de provision, la somme de 420 000 F CFP au titre des loyers impayés ;

- Dit qu'il sera procédé à la compensation des créances provisionnelle, la somme totale à la charge de Mme [H] [N] étant de 356 400 F CFP ;

Statuant à nouveau de ces chefs infirmés,

CONDAMNE Mme [H] [N] à payer à Mme [D] [L], à titre de provision, la somme de 356 129 F CFP au titre des loyers impayés ;

ORDONNE la compensation des créances réciproques provisionnelles;

DIT qu'après compensation, Mme [H] [N] reste redevable envers Mme [D] [L] de la somme de 266 129 F CFP ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [H] [N] à payer à Mme [D] [L] la somme de 115 000 F CFP au titre de se frais d'appel non compris dans les dépens par application de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française ;

DEBOUTE Mme [H] [N] de ses demandes au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

CONDAMNE Mme [H] [N] aux dépens d'appel.

Prononcé à Papeete, le 11 avril 2024.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : K. SEKKAKI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet b
Numéro d'arrêt : 23/00182
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;23.00182 ?
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