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22/06/2023 | FRANCE | N°20/00057

France | France, Cour d'appel de Papeete, Chambre des terres, 22 juin 2023, 20/00057


N° 59



KS

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Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Fritch et Marjou,

le 03.07.2023.





Copies authentiques

délivrées à :

- Me Lamourette,

- Me Marchand,

le 03.07.2023.



REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre des Terres





Audience du 22 juin 2023





RG 20/00057 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 129, rg n° 18/00241 du Tribunal Civil de Première

Instance de Papeete, Tribunal Foncier de la Polynésie française, du 3 juillet 2020 ;



Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 21 septembre 2020 ;



Appelants :



Mme [P] [JD] [K], née le 7 ...

N° 59

KS

---------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Fritch et Marjou,

le 03.07.2023.

Copies authentiques

délivrées à :

- Me Lamourette,

- Me Marchand,

le 03.07.2023.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre des Terres

Audience du 22 juin 2023

RG 20/00057 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 129, rg n° 18/00241 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, Tribunal Foncier de la Polynésie française, du 3 juillet 2020 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 21 septembre 2020 ;

Appelants :

Mme [P] [JD] [K], née le 7 septembre 1957 à [Localité 17], de nationalité française, demeurant à [Adresse 13] ;

M. [OH] [I] [K], né le 30 août 1965 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant à [Adresse 13] ;

M. [Z] [K], né le 4 octobre 1959 à [Localité 8], de nationalité française, demeurant à [Localité 15] ;

M. [S] [DX] [K], né le 9 mai 1971 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant à Mahaena ;

M. [Y] [UI] [K], né le 19 janvier 1973 à [Localité 16], de nationalité française, demeurant à [Adresse 11] ;

M. [N] [UM] [K], né le 20 avril 1957 à [Localité 19], de nationalité française, demeurant à [Localité 5] ;

Mme [R] [DW] [K], née le 17 octobre 1973 à [Localité 16], de nationalité française, demeurant à [Adresse 7] ;

Mme [X] [ZN] [K], née le 30 mars 1978 à [Localité 14], de nationalité française, demeurant à [Adresse 9] ;

M. [L] [T] [E] [H], né le 23 avril 1975 à [Localité 14], de nationalité française, demeurant à [Adresse 12] ;

Mme [O] [OF] [C] [H], née le 6 avril 1982 à [Localité 14], de nationalité française, demeurant à [Adresse 12] ;

Mme [F] [OG] veuve [K], née le 5 mai 1948 à [Localité 6], de nationalité française, demeurant à [Adresse 9] ;

Mme [M] [A] [K] épouse [JF], née le 22 juin 1956 à [Localité 8], de nationalité française, demeurant à [Adresse 4] ;

Représentés par Me Mathieu LAMOURETTE, avocat au barreau de Papeete ;

Intimés :

Mme [OE] [ZT] [G], née le 27 décembre 1965 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant à [Adresse 10], nantie de l'aide juridictionnelle n° 129 du 22 janvier 2021 ;

Représentée par Me Paméla FRITCH et Gwenaëlle MARJOU, avocats au barreau de Papeete ;

Mme [B] [G], née le 26 mai 1967 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant à [Adresse 9] ;

Non comparante, assignée à personne le 13 avril 2021 ;

M. [J] [DZ] [K], né le 6 mars 1968 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant à [Adresse 11], venant aux droits de son père [I] [K] ;

Représenté par Me Mathieu LAMOURETTE, avocat au barreau de Papeete ;

M. [S] [K] ;

Représenté par Me Johan MARCHAND, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 18 novembre 2022 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 23 mars 2023, devant Mme SZKLARZ, conseiller faisant fonction de président, Mme TISSOT, vice-présidente placée auprès du premier président, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l'ordre judiciaire aux fins d'exercer à la cour d'appel de Papeete en qualité d'assesseur dans une formation collégiale qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme SZKLARZ, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :

Par requête reçue au greffe le 17 octobre 2018, [M], [P], [Z], [OH], [J], [S], [Y], [N], [R], [X] [K], [L] et [O] [H] (les consorts [K]) ont saisi le Tribunal de Première Instance de Papeete aux fins de voir dire et juger les ayants droits de monsieur [I] [K] propriétaires par prescription trentenaire d'une parcelle détachée de la parcelle cadastrée AD n°[Cadastre 2] sise à [Localité 8] pour une contenance correspondant aux 2/3 de cette parcelle ; subsidiairement, voir ordonner une enquête et un transport sur les lieux à l'effet de déterminer qui, depuis quand, dans quelles conditions, et selon quelles modalités au regard des dispositions légales relatives à la prescription acquisitive a occupé ou occupe encore tout ou partie de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] cadastrée AD [Cadastre 2] d'une superficie de 6.564 m2.

Les consorts [K] ont exposé que monsieur [I] [K], leur père, était propriétaire à [Localité 8] de la parcelle aujourd'hui cadastrée AD n°[Cadastre 1] d'une contenance de 6.853 m2 aux termes d'un acte authentique du ministère de maître [D] [JA], notaire à [Localité 14] transcrit à la conservation des hypothèques de [Localité 14] le 7 décembre 1967 au volume 521-52 n°1 ; que son frère de lait, monsieur [ZR] [G] faisait quant à lui l'acquisition de la parcelle voisine cadastrée AD n°[Cadastre 2] par acte authentique du ministère de Maître [D] [JA] du 28 août 1967 ; que ces deux parcelles étaient issues de la terre [Localité 18] d'une contenance totale de 1 hectare 33 ares 08 centiares. Ils affirmaient que depuis 1967, leur auteur [I] [K] occupait la parcelle qu'il avait acquise mais aussi la parcelle voisine cadastrée AD n°[Cadastre 2] appartenant à monsieur [ZR] [G], la possession dont ils se prévalent aux droits de leur auteur [I] [K] revêtant tous les caractères d'une possession utile.

Par acte d'huissier du 6 novembre 2018, [ZR] [G] a été appelé en la cause puis, par acte d'huissier du 15 février 2019, les ayants droits de [ZR] [G], [OE] et [B] [G].

Madame [OE] [G] s'est vivement opposée à la demande de revendication de propriété par prescription acquisitive soulignant que les consorts [K] n'ont jamais ignoré la limite entre les deux parcelles et qu'ils versent seulement à l'appui de leurs prétentions un procès-verbal de constat et aucune attestation. Constatant la carence quant à la preuve de l'occupation des consorts [K], elle a soutenu que le Tribunal ne saurait pallier cette carence en ordonnant une mesure d'instruction.

Madame [OE] [G] affirmait que l'empiétement des consorts [K] est récent et sournois car ils s'étendent avec des constructions bancales tout en s'engageant à les retirer dès que les consorts [G] construiront. Elle a par ailleurs affirmé que le hangar qui empiète sur la parcelle AD n°[Cadastre 2] est à usage de paris illicites et de combats de coqs.

Reconventionnellement, dans la mesure où les conditions de la prescription trentenaire ne sont pas réunies, Madame [OE] [G] a demandé l'expulsion de Madame [F] [OG] veuve [K], des consorts [K] et tous occupants de leur chef de la terre ainsi que la démolition des constructions édifiées en toute illégalité sans permis de construire car ils sont occupants sans droit ni titre.

Par jugement n° RG 18/00241, numéro de minute 129, en date du 3 juillet 2020, auquel il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé de la procédure et des moyens et prétentions de première instance, le Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 2, a dit :

- Constate que [OE] [G] détient des droits indivis de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] et cadastrée section AD-[Cadastre 2] ;

- Déboute [M], [P], [Z], [OH], [J], [S], [Y], [N], [R], [X] [K], [L] et [O] [H] de leur demande tendant à voir le tribunal les recevoir en leur présente à fin de reconnaissance de propriété par prescription trentenaire d'une parcelle détachée de la parcelle cadastrée AD n°[Cadastre 2] sise à [Localité 8] pour une contenance correspond au 2/3 de cette parcelle ;

- Déboute [M], [P], [Z], [OH], [J], [S], [Y], [N], [R], [X] [K], [L] et [O] [H] de leur demande subsidiaire tendant à voir le tribunal ordonner une enquête et un transport sur les lieux à l'effet de déterminer qui, depuis quand, dans quelles conditions, et selon quelles modalités au regard des dispositions légales relatives à la prescription acquisitive a occupé ou occupe encore tout ou partie de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] cadastrée AD [Cadastre 2] d'une superficie de 6.564 m2 ;

- Ordonne l'expulsion de [M], [P], [Z], [OH], [J], [S], [Y], [N], [R], [X] [K], [L] et [O] [H] et tous occupants de leur chef de la terre [Localité 18] cadastrée section AD-[Cadastre 2] avec le concours si besoin est de la force publique ;

- Fait injonction à [M], [P], [Z], [OH], [J], [S], [Y], [N], [R], [X] [K], [L] et [O] [H] et tous les occupants de leur chef d'avoir à enlever les constructions édifiées par ces derniers sur la terre [Localité 18] cadastrée section AD-[Cadastre 2] dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement, et leur fait interdiction de pénétrer sur la terre [Localité 18] cadastrée section AD-[Cadastre 2] passé ce délai ;

- Autorise les consort [G] si l'enlèvement des constructions n'est pas effectué passé le délai de six mois à compter de la signification du jugement à intervenir, à procéder à la démolition des constructions ;

- Dit n'y avoir lieu à prononcer une astreinte ;

- Condamne solidairement [M], [P], [Z], [OH], [J], [S], [Y], [N], [R], [X] [K], [L] et [O] [H] à verser à [OE] [G] la somme de 200.000 FCP en application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile ;

- Condamne [M], [P], [Z], [OH], [J], [S], [Y], [N], [R], [X] [K], [L] et [O] [H] aux dépens.

Par requête d'appel enregistrée au greffe de la Cour le 21 septembre 2020, Madame [M] [A] [K] épouse [JF], Madame [P] [JD] [K], Monsieur [Z] [K], Monsieur [OH] [I] [K], Monsieur [Y] [UI] [K], Monsieur [N] [UM] [K], Madame [R] [DW] [K], Madame [X] [ZN] [K], Monsieur [L] [T] [E] [H], Madame [O] [OF] [C] [H] et Madame [F] [OG] veuve [I] [K], aux droits de [I], [OH] [K] né à [Localité 14] le 22 avril 1933 et décédé à [Localité 8] le 25 novembre 2017 (les consorts [K]), ayant tous pour avocat Maître Mathieu LAMOURETTE, ont interjeté appel de cette décision qui a été signifiée par acte d'huissier le 23 juillet 2020.

Aux termes de leur requête et de leurs conclusions récapitulatives déposées par voie électronique au greffe de la Cour le 18 août 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, les consorts [K], demandent à la Cour de :

- Recevoir les consorts [K] en leur appel de l'ensemble des dispositions du jugement n° 18/00241 du tribunal foncier du 03/07/2020 signifié par exploit du 23/07/2020 ;

- Dire et juger recevable le présent appel au regard des prévisions de l'article 336 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

- Recevoir les ayants droits de monsieur [I] [K] en leur présente à fin de reconnaissance de propriété par prescription trentenaire d'une parcelle détachée de la parcelle cadastrée AD n°[Cadastre 2] sise à [Localité 8] pour une contenance correspond au 2/3 de cette parcelle ;

Vu ensemble les articles 2258, 2261, 2262, 2265 et 2272 du Code civil,

- Dire et juger les ayants droits de monsieur [I] [K] propriétaires par prescription trentenaire d'une parcelle détachée de la parcelle cadastrée AD n°[Cadastre 2] sise à [Localité 8] pour une contenance correspondant aux 2/3 de cette parcelle ;

- Ordonner la transcription du jugement à intervenir à la conservation des hypothèques de [Localité 14] ;

Subsidiairement,

- Ordonner une enquête et un transport sur les lieux à l'effet de déterminer qui, depuis quand, dans quelles conditions, et selon quelles modalités au regard des dispositions légales relatives à la prescription acquisitive a occupé ou occupe encore tout ou partie de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] cadastrée AD[Cadastre 2] d'une superficie de 6.864 m2 ;

- Condamner les consorts [G] au paiement aux consorts [K] de la somme de 565.000 FCFP sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

- Les condamner également aux entiers dépens dont distraction d'usage au profit de maître Lamourette, avocat au barreau de Papeete, sur ses offres de droit.

Par conclusions reçues par voie électronique au greffe de la Cour le 27 août 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Monsieur [S] [K], ayant pour avocat Maître Johan MARCHAND, demande à la cour de :

- Prendre acte de ce que Monsieur [S] [K], qui ne s'oppose pas aux demandes des autres indivisaires successoraux [K], ne revendique pas la parcelle AD-[Cadastre 2] ;

- Infirmer le jugement rendu le 3 juillet 2020 par le Tribunal en ce qu'il a ordonné son expulsion, et lui a fait injonction d'avoir à enlever des constructions, outre la condamnation à des frais irrépétibles et en ce qu'il a reconnu des droits de propriété indivis à Madame [OE] [G] sur la parcelle AD n°[Cadastre 2] ;

- Rejeter toute demande formulée à l'encontre de Monsieur [S] [K].

Par conclusions récapitulatives reçues par voie électronique au greffe de la Cour le 29 septembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Madame [OE] [G], ayant droit de [ZR] [G] né le 6/6/1945 à [Localité 8] et décédé le 29/6/2000 à [Localité 14], nantie de l'aide juridictionnelle suivant décision n°129 du 22.1.2021 et ayant pour avocats Maîtres Paméla FRITCH et Gwenaëlle MARJOU, demande à la cour de :

- Débouter les consorts [K] de leurs demandes, fins et prétentions ;

- Constater que M. [S] [K] ne s'associe plus aux demandes des consorts [K] et que Mme [OE] [G] s'en rapporte à justice concernant l'infirmation partielle du jugement du 3 juillet 2020 quant à l'expulsion de M. [S] [K] ;

Pour le surplus,

- Confirmer le jugement du 3 juillet 2020 ;

Vu l'article 351 du CPCPF,

- Condamner les requérants à verser à Mme [OE] [G] la somme de 200.000 F pour appel abusif ;

- Condamner les requérants aux entiers dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance en date du 18 novembre 2022 pour l'affaire être fixée à l'audience de la Cour du 23 mars 2023. En l'état l'affaire a été mise en délibéré au 22 juin 2023.

MOTIFS :

Sur la recevabilité de l'appel :

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée et aucun élément de la procédure ne permet à la Cour d'en relever d'office l'irrégularité.

Sur la propriété par titre de la parcelle de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] cadastrée AD n°[Cadastre 2] d'une superficie de 6.564 m2 :

Aux termes de l'article 1er du code de procédure civile de la Polynésie française, l'action est le droit pour l'auteur d'une prétention de la soumettre au juge afin qu'il la dise bien ou mal fondée et pour son adversaire le droit de discuter de ce bien-fondé. L'action n'est ouverte qu'à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention et sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé.

Pour avoir qualité et intérêt à agir en expulsion d'un occupant sans droit ni titre d'une parcelle de terre, il faut détenir des droits de propriété sur cette terre.

L'action en contestation d'un titre de propriété n'appartient qu'à celui qui se prétend propriétaire par titre, qu'il agisse au principal ou en défense. Celui qui échoue à démontrer qu'il détient des droits de propriété n'est pas légitime à rechercher l'anéantissement des titres d'autrui.

Le défendeur à l'action en revendication de propriété par prescription acquisitive ne peut être que le propriétaire par titre, sauf à de rares exceptions, l'action en revendication de propriété par prescription acquisitive qui n'est pas dirigée contre le propriétaire ne pouvant qu'être déclarée irrecevable pour ne pas respecter le contradictoire.

Il est constant que Monsieur [ZR] [G] a acquis de [DX] [DY] la parcelle de terre [Localité 18] sise à [Localité 8] aujourd'hui cadastrée AD n°[Cadastre 2] par acte authentique en date du 28 août 1967 comme Monsieur [I] [K] a acquis de [DX] [DY] la parcelle de terre [Localité 18] sise à [Localité 8] aujourd'hui cadastrée AD n°[Cadastre 1] par acte authentique en date du 28 août 1967.

Ainsi, outre que Monsieur [S] [K] n'a pas qualité à agir en contestation du titre de l'auteur de Madame [OE] [G], contester ce titre en affirmant que les droits du vendeur ne seraient pas rattachables par une chaîne ininterrompue d'actes translatifs de propriété entre le titre et le tomite, revient à contester également les droits de son auteur sur la parcelle AD n°[Cadastre 1].

De plus, Madame [OE] [G] a été appelé en la cause par les consorts [K] pour défendre à l'action en revendication de propriété par prescription acquisitive, si elle devait être dite sans droit par titre, l'action des consorts [K] serait nécessairement irrecevable.

Par ailleurs, La cour constate que Madame [OE] [G] produit devant elle le titre de propriété de son auteur [ZR] [G] sur la parcelle de terre [Localité 18] sise à [Localité 8] aujourd'hui cadastrée AD n°[Cadastre 2], à savoir l'acte authentique en date du 28 août 1967, tout comme elle justifie de sa filiation à son égard.

La force probante d'un acte authentique n'est pas sérieusement contestable et sa transcription le rend opposable aux tiers, ce qui est le cas en l'espèce. En Polynésie française, comme dans le reste du territoire national, les actes authentiques font foi de leur contenu et de leurs mentions. La production de tels actes suffit à prouver les droits de propriété de l'acquéreur à l'acte.

Sauf à porter gravement atteinte à la sécurité juridique, il n'y a pas lieu d'exiger des demandeurs à l'action en expulsion, qui justifient d'un titre de propriété transcrit, qu'ils établissent une chaîne ininterrompue d'actes translatifs de propriété entre eux-mêmes, ou leurs ayants causes, et les propriétaires originels ou leurs ayants droits pour être recevables en leur demande.

Ainsi, l'action des consorts [K] en revendication de propriété par prescription acquisitive trentenaire de la parcelle de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] aujourd'hui cadastrée AD n°[Cadastre 2] est recevable pour avoir appelé en la cause l'un au moins des propriétaires indivis par titre, tout comme est recevable l'action de Madame [OE] [G] en expulsion de la parcelle AD n°[Cadastre 2] des consorts [K], celle-ci visant par ailleurs à conserver l'indivision à laquelle elle a démontré appartenir.

Sur la revendication de propriété des consorts [K], par prescription acquisitive trentenaire, des 2/3 de la parcelle de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] cadastrée AD n°[Cadastre 2] :

Aux termes des articles 711 et 712 du code civil, la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, et par l'effet des obligations. La propriété s'acquiert aussi par accession ou incorporation, et par prescription.

Il résulte de l'articulation des articles 2229, 2234, 2235 et 2262 du Code civil, dans leur rédaction applicable en Polynésie française, qu'il faut, pour pouvoir prescrire, une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire durant 30 ans, en joignant le cas échéant sa possession à celle de son auteur, de quelque manière qu'on lui ait succédé, le possesseur actuel qui prouve avoir possédé antérieurement, étant présumé avoir possédé dans le temps intermédiaire, sauf preuve contraire.

Et aux termes des articles 2230, 2231 et 2232 du code civil, dans leur rédaction applicable en Polynésie française, on est toujours présumé posséder pour soi, et à titre de propriétaire, s'il n'est prouvé qu'on a commencé à posséder pour un autre. Quand on a commencé à posséder pour autrui, on est toujours présumé posséder au même titre, s'il n'y a preuve contraire. Les actes de pure faculté et ceux de simple tolérance ne peuvent fonder ni possession ni prescription.

Ainsi, la possession légale utile pour prescrire un bien immobilier ne peut s'établir à l'origine que par des actes matériels continus d'occupation réelle. Elle se conserve tant que le cours n'en est pas interrompu ou suspendu, la possession pouvant se poursuivre par la seule intention du possesseur si elle n'est pas interrompue avant l'expiration du délai de prescription par un acte ou un fait contraire, tel que l'abandon volontaire ou la prise de possession de l'immeuble par un tiers.

En l'espèce, pour démontrer leur occupation pendant plus de trente ans et à titre de propriétaire les consorts [K] produisent :

- Un extrait cadastral en date du 17 novembre 2015 qui fait apparaître une construction implantée sur la parcelle AD n°[Cadastre 1] et sur la parcelle AD n°[Cadastre 2] dont ils revendiquent la propriété.

- Un plan de partage de la parcelle AD n°[Cadastre 1], qui est leur propriété. Ce plan a été établi en juin 2008 par le géomètre [UL] [W]. Il appert de ce plan que les consorts [K] ont partagé la parcelle AD n°[Cadastre 1] en créant un lot n°2 sur la parcelle AD n°[Cadastre 2] d'une superficie de 631 m2. La limite entre les deux parcelles est tracée sur ce plan de partage.

- Un procès-verbal de constat établi par Maître [U] [JC], huissier de justice le 6 novembre 2018. Il résulte de ce constat établi à la demande des consorts [K] que se trouvent en amont de la parcelle deux maison d'habitation appartenant à la famille [G], dont un fare MTR, propriété de Madame [OE] [G]. L'huissier a ensuite photographié l'arrière de la parcelle qui apparaît entretenue, en indiquant que cette partie est entretenue par les ayants droit de Monsieur [I] [K], sans dire ce qui lui permet d'affirmer qu'ils sont les auteurs de l'entretien. De même, l'huissier indique que la terre est exploitée, sans préciser qui l'exploite, plusieurs espèces végétales y poussant. La cour constate qu'il ne ressort des photos de l'huissier qu'une vaste étendue d'herbe. Aucune exploitation agricole d'ampleur n'est visible. Il est également mentionné un parc à cochon qui est photographié avec la présence d'un cochon. Les photos montrent par ailleurs deux constructions très précaires dont l'usage n'est pas identifiable par la cour.

- Un permis de construire accordé à [X] [K] le 17 juin 2008. Il est mentionné une parcelle de la terre [Localité 18], sans qu'il soit précisé s'il s'agit de la parcelle AD n°[Cadastre 2], cette pièce ne permet donc pas de justifier d'une occupation sur la parcelle revendiquée.

- Un permis de construire accordé à [M] [K] le 25 novembre 2008. Il est mentionné une parcelle de la terre [Localité 18], sans qu'il soit précisé s'il s'agit de la parcelle AD n°[Cadastre 2], cette pièce ne permet donc pas de justifier d'une occupation sur la parcelle revendiquée, d'autant plus que Madame [OE] [G] démontre que l'implantation accordée est sur la parcelle AD n°[Cadastre 1].

Comme devant le premier juge, il n'est produit devant la cour aucune attestation ou autre document attestant d'une occupation plus ancienne que 2008.

Ainsi, les consorts [K], sur qui reposent la charge de la preuve de la mise en 'uvre d'actes matériels d'occupation pendant plus de trente ans avant 2018, année du dépôt de leur requête en revendication, ne démontrent qu'une occupation très partielle de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] aujourd'hui cadastrée AD n°[Cadastre 2] et ce seulement à compter de 2008, aucune pièce ne venant démontrer une occupation par des actes matériels qui pourrait remonter à au moins 1988. Il ne peut qu'être constaté que les consorts [K] échouent à faire la preuve d'une occupation paisible, publique, non équivoque à titre de propriétaire et trentenaire de la terre [Localité 18] cadastrée section AD-[Cadastre 2] sise à [Localité 8].

De plus, Madame [OE] [G] produit l'attestation en date du 29 août 2019 de Monsieur [ZS] [K], né le 28 décembre 1949, frère de [I] [K], qui indique que [OE] [G] a toujours vécu dans la maison de son père, que ce dernier a été enterré sur sa parcelle de terre avec le grand-père [V] [DY] et que [F] [OG] vve [K] vit sur la parcelle de [I] [K], et non sur la terre des consorts [G]. Cette attestation contredit les affirmations des consorts [K] quant à une occupation trentenaire. De plus, la présence de la maison de Madame [OE] [G] qu'elle occupe aux dires de [ZS] [K], reconnue comme étant la fille de [ZR] [G], propriétaire par titre, démontre amplement que les consorts [K], aux droits de [I] [K] n'ont pas pu occuper à titre de propriétaire la parcelle AD n°[Cadastre 2].

Aux termes des articles 82, 83 et 85 du code de procédure civile de la Polynésie française, les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d'office, être l'objet de toute mesure d'instruction légalement admissible, ces mesures d'instruction peuvent être ordonnées dès lors que le juge ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer. Une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.

En l'espèce, outre que la carence des consorts [K] dans l'administration de la preuve est démontrée par les développements ci-dessus, la Cour dispose des éléments suffisants pour statuer. En effet, il est établi que Monsieur [ZR] [G], propriétaire par titre, a résidé sur la terre et y est enterré, que sa fille y habite et que cette qualité de propriétaire leur était reconnue, ce qui rend nécessairement équivoque tout acte d'occupation de [I] [K] et de ses descendants après lui.

En conséquence, c'est à juste titre que le premier Juge a débouté le requérant de sa demande d'enquête.

Ainsi, c'est à raison que le premier juge a débouté les consorts [K] de leur revendication de propriété par prescription acquisitive trentenaire de la parcelle de la terre [Localité 18] sise à [Localité 8] cadastrée AD n°[Cadastre 2].

De même, c'est à raison qu'il a ordonné l'expulsion des consorts [K] et la démolition de leurs constructions pour être sans droit ni titre sur cette parcelle.

Le fait que Monsieur [S] [K] affirme devant la cour n'avoir implanté aucune construction sur la parcelle AD n°[Cadastre 2] ne doit pas conduire à modifier les termes du jugement, celui-ci étant requérant en première instance et affirmant donc alors occuper la parcelle AD n°[Cadastre 2].

En conséquence, la Cour confirme le jugement du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 2, n° RG 18/00241, numéro de minute 129, en date du 3 juillet 2020 en toutes ses dispositions.

Sur les autres chefs de demande :

Si certains signes de volonté dilatoire dans cet appel sont constatés par la cour, le droit reconnu à un procès équitable ne permet pas de retenir que l'appel des consorts [K] est abusif.

Madame [M] [A] [K] épouse [JF], Madame [P] [JD] [K], Monsieur [Z] [K], Monsieur [OH] [I] [K], Monsieur [Y] [UI] [K], Monsieur [N] [UM] [K], Madame [R] [DW] [K], Madame [X] [ZN] [K], Monsieur [L] [T] [E] [H], Madame [O] [OF] [C] [H] et Madame [F] [OG] veuve [I] [K] ainsi que Monsieur [S] [K] qui succombent pour le tout doivent être condamnés aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME le jugement du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 2, n° RG 18/00241, numéro de minute 129, en date du 3 juillet 2020 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

REJETTE tout autre chef de demande des parties, plus ample ou contraire au présent arrêt ;

CONDAMNE Madame [M] [A] [K] épouse [JF], Madame [P] [JD] [K], Monsieur [Z] [K], Monsieur [OH] [I] [K], Monsieur [Y] [UI] [K], Monsieur [N] [UM] [K], Madame [R] [DW] [K], Madame [X] [ZN] [K], Monsieur [L] [T] [E] [H], Madame [O] [OF] [C] [H] et Madame [F] [OG] veuve [I] [K] ainsi que Monsieur [S] [K] aux dépens d'appel.

Prononcé à Papeete, le 22 juin 2023.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : K. SZKLARZ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Chambre des terres
Numéro d'arrêt : 20/00057
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;20.00057 ?
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