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11/05/2023 | FRANCE | N°22/00111

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet d, 11 mai 2023, 22/00111


N° 184





ED

--------------



Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Michel,

le 11.05.2023.





Copie authentique

délivrée à :

- Me Antz,

le 11.05.2023.



REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 11 mai 2023





RG 22/00111 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 22/65, rg n° 21/00413 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 21 mars 2022

;



Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 13 avril 2022 ;



Appelant :



M. [G] [J], né le [Date naissance 4] 1968 à [Localité 8], de nationalité française, demeurant à [Adresse 7] élisant...

N° 184

ED

--------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Michel,

le 11.05.2023.

Copie authentique

délivrée à :

- Me Antz,

le 11.05.2023.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 11 mai 2023

RG 22/00111 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 22/65, rg n° 21/00413 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 21 mars 2022 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 13 avril 2022 ;

Appelant :

M. [G] [J], né le [Date naissance 4] 1968 à [Localité 8], de nationalité française, demeurant à [Adresse 7] élisant domicile au Cabinet de Me Anne-Laurence MICHEL, avocat au barreau de Papeete ;

Intimés :

M. [W] [H], né le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 5], de nationalité française, demeurant à [Adresse 6] ;

Représenté par Me Dominique ANTZ, avocat au barreau de Papeete ;

La Banque de Polynésie dont le siège social est sis [Adresse 3] ;

Non comparante assignée personne habilitée le 25 avril 2022 ;

Ordonnance de clôture du 24 février 2023 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 9 mars 2023, devant Mme BRENGARD, président de chambre, M. RIPOLL et Mme DEGORCE, conseillers, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par M. RIPOLL, conseiller et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

FAITS ET PROCEDURE :

Par jugement rendu le 18 août 2005, [O] [J] était adoptée par [F] [J] veuve de [K] [X].

Par requête du 10 avril 2014, [F] [J] engageait une procédure en révocation de cette adoption.

Par acte établi devant notaire, Maître [U] [M], le 11 août 2014, [F] [J] reconnaissait devoir une somme en principal de 40.000.000 FCP remboursable en une seule échéance, au plus tard le 31 août 2015, avec intérêts au taux annuel de 9,79'%.

Suivant jugement du 9 décembre 2014, [G] [J] était adopté par [F] [J], sa tante. Par testament du 16 décembre 2014 et codicille du 3 mars 2015, elle l'instituait légataire à titre universel.

[F] [J] décédait le [Date décès 1] 2015.

Par requête du 12 janvier 2016, [O] [J] demandait au tribunal de première instance de constater la nullité de la reconnaissance de dette. [G] [J] était appelé en cause.

Par jugement du 27 mars 2017, le tribunal considérait que [O] [J] avait, en tant qu'héritier réservataire, qualité et intérêt à agir et que son action en nullité de la reconnaissance de dette était recevable et que [W] [H] disposait d'un titre exécutoire. Il rejetait les demandes de [O] [J].

Sur appels formés contre ce jugement du 27 mars 2017, la cour de Papeete, par arrêt du 16 janvier 2020:

- Sur l'appel principal de [O] [J] considérant qu'elle avait perdu sa qualité d'héritière à compter de la demande en révocation introduite le 10 avril 2014, jugeait ses action et appel irrecevables,

- Sur l'appel incident de [G] [J], estimant qu'il avait fait un aveu judiciaire en première instance en ne contestant pas sa dette, le déboutait de sa demande en nullité de la reconnaissance de dette .

Par jugement du 10 mai 2016, le tribunal de première instance de Papeete rejetait la demande en révocation de l'adoption de [O] [J]..

Par arrêt infirmatif rendu le 20 septembre 2018, sur appel de [G] [J], la cour de Papeete prononçait la révocation de l'adoption de [O] [J].

Par requête du 22 septembre 2017, [O] [J] engageait une action en contestation de la saisie-attribution pratiquée, le 1er septembre 2017, par [G] [J], sur ses comptes bancaires et ceux de [G] [J], lequel intervenait volontairement à la procédure.

Par décision rendue le 19 mars 2018, le président du tribunal de première instance déclarait irrecevables cette action ainsi que l'ensemble des demandes subséquentes. L'intervention de [G] [J] était déclarée recevable.

Suivant acte de notoriété établi par Maître [M] le 21 juin 2018, [F] [J] laissait pour seul héritier réservataire [G] [J].

Le 29 mars 2020, [W] [H] adressait, à Maître [M], une lettre, accompagnée d'un décompte, dans laquelle il déclarait une créance sur la succession de [F] [J] pour un montant de 35.234.139 FCP.

Par procès-verbal du 31 août 2021, [W] [H] faisait procéder à une saisie-attribution sur les comptes bancaires de [G] [J] pour un montant de 34.435.428 FCP.

Par acte du 2 septembre 2021, il dénonçait cette saisie à [G] [J].

Par lettre recommandée du 29 septembre 2021 adressée à l'étude d'huissiers de justice ayant pratiqué et dénoncé la saisie-attribution, le conseil de [G] [J] dénonçait sa requête en contestation en application de l'article 812 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Par requête enregistrée le 29 septembre 2021, [G] [J] demandait au tribunal de première instance de Papeete de':

- Juger recevable son action en contestation de saisie-attribution,

- Juger qu'[W] [H] ne justifie pas d'un titre exécutoire à l'appui de sa créance,

- Par voie de conséquence, juger nulle la saisie-attribution pratiquée et ordonner la mainlevée des sommes saisies.

Par jugement du 21 mars 2022, le tribunal de première instance déboutait [G] [J] de ses demandes.

Par requête enregistrée le 13 avril 2022 et assignations délivrées le 25 avril 2022 et le 30 avril 2022 à [W] [H] et la banque de Polynésie, [G] [J] formait appel de ce dernier jugement.

[W] [H] et [G] [J] adressaient des conclusions récapitulatives, respectivement, le 7 février 2023 et le 22 février 2023.

Par décision du 24 février 2023, la clôture de l'instruction de l'affaire était ordonnée et l'audience des plaidoiries fixée au 9 mars 2023. A cette audience, l'affaire était mise en délibéré au 11 mai 2023.

DEMANDES ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Dans sa requête en appel, [G] [J] demandait à la cour de':

- Dire recevable son appel,

- Infirmer le jugement du 21 mars 2022,

Statuant à nouveau,

- Dire la créance de [W] [H] éteinte,

- Par voie de conséquence, dire nulle la saisie attribution et ordonner la mainlevée des sommes saisies.

Dans ses conclusions récapitulatives, outre le rejet des demandes d'[W] [H], [G] [J] confirme les demandes formulées dans sa requête d'appel, sur le fondement des articles 393, 394, 396, 784, 798, 799, 804 et suivants du code de procédure civile de la Polynésie française (ci-après désigné le CPCPF), 792 et 796 du code civil.

[G] [J] fait valoir que':

- La créance d'[W] [H] est éteinte en application de l'article 792 et 796 alinéa 3 du code civil,

- La déclaration de créance produite ne comporte pas de titre puisque le décompte, manuscrit, joint n'en est pas un,

- Le tribunal ne pouvait considérer que la déclaration était valable au motif que le notaire était déjà en possession de celui-ci,

- La notification de la créance est irrégulière au regard des articles 393 et 394 du CPCPF et de la circulaire du ministère de la justice du 29 mai 2007,

- En effet, les dispositions de l'article 792 du code civil prévoyant une notification par voie d'huissier ou par lettre recommandée n'ont pas été respectées et il est impossible de connaître la date de dépôt à l'étude notariale,

- Le tribunal ne pouvait estimer que la créance n'était pas éteinte pour défaut de notification au motif que l'article 792 ne définissait pas à peine de nullité les modalités de la notification qu'il prévoit,

- La preuve de son acceptation pure et simple de la succession, même tacite, n'est pas rapportée,

- Il a accepté la succession à concurrence de l'actif net comme le prévoit l'article 768 du code civil,

- La publication au BODACC de l'ACAN est datée des 15 et 25 avril 2019.

- Sa mauvaise foi ne peut être retenue.

Dans ses conclusions récapitulatives, [W] [H] demande à la cour de':

- Confirmer le jugement déféré,

- Débouter [G] [J] de ses demandes,

- Le condamner au paiement de la somme de 1.000.000 FCP à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

[W] [H] fait valoir que :

- Son titre exécutoire, la reconnaissance de dette, a été validée à 3 reprises par les juridictions civiles (jugement du 19 mars 2018, jugement du 27 mars 2017 confirmé par l'arrêt du 16 janvier 2020 lequel a relevé un aveu judiciaire de [G] [J])

- L'acte joint à la saie-attribution fait expressément référence à ce titre,

- [G] [J] n'a contesté ni le principe de sa créance ni son montant,

- Celui-ci a accepté purement et simplement la succession, de manière tacite, comme le démontrent ses interventions, en qualité de légataire universel, dans les procédures civiles devant les juridictions de la cour d'appel de Papeete, en application de l'article 782 du code civil, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation et à l'arrêt du 16 janvier 2020,

- L'acceptation de la succession à concurrence de l'actif net, qui est tardive, ne lui est pas opposable,

- [G] [J], pour se défendre à l'action d'un créancier de la succession, n'a pas invoqué l'exercice d'une action conservatoire ne constituant pas une acceptation,

- [G] [J] a été appelé en cause par [O] [J] dans la procédure ayant abouti à l'arrêt du 16 janvier 2020 et a demandé la révocation de l'adoption de celle-ci,

- [G] [J] a accompagné la demande dirigée contre [O] [J] de demandes dirigées contre [W] [H] et a agi comme héritier exclusif ayant accepté la succession,

- Cette demande n'est pas un «acte destiné à éviter l'aggravation du passif successoral» mentionné à l'article 784 du code civil,

- Il n'avait donc pas à procéder à une déclaration de créance.

SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL :

L'appel de [G] [J], enregistré le 13 avril 2022, qui a été formé contre la décision rendue le 21 mars 2022 statuant sur la contestation d'une saisie-attribution, est recevable comme ayant été interjeté dans le délai particulier de 15 jours prévu à l'article 814 alinéa 1er du CPCPF.

MOTIFS :

Sur la qualité d'héritier de l'appelant et l'acceptation de la succession :

Sur la qualité d'héritier :

En application des articles 731, 734, 1003, 1004 et 1006 du code civil, le légataire universel, en l'absence de conjoint successible et d'héritier réservataire succède au défunt et est saisi de plein droit de tous les biens de la succession

En outre, l'article 873 dispose que les héritiers sont tenus des dettes et charges de la succession, personnellement pour leur part successorale.

Par jugement du 9 décembre 2014, [G] [J] a été adopté par sa tante, [F] [J] veuve de [K] [X], qui est décédée en 2015, avant de l'instituer légataire à titre universel suivant testament établi en 2014.

Par arrêt du 20 septembre 2018, l'adoption d'un autre successible, [F] [J] prononcée en 2005, a été révoquée.

En conséquence, [G] [J] est l'unique héritier de [F] [J].

Sur l'acceptation de la succession :

Aux termes de l'article 768 du code civil, l'acceptation de la succession par un héritier peut être pure et simple ou à concurrence de l'actif net lorsqu'il a une vocation universelle ou à titre universel.

Sur une acceptation pure et simple faite de manière tacite :

L'article 782 du code civil dispose que l'acceptation pure et simple est expresse lorsque le successible prend le titre ou la qualité d'héritier acceptant dans un acte authentique ou sous seing privé et tacite lorsque le successible fait un acte qui suppose nécessairement son intention d'accepter et qu'il n'aurait droit de faire qu'en qualité d'héritier acceptant.

En outre, il résulte des articles 785 et 786 que les héritiers acceptant purement et simplement la succession ne peuvent plus y renoncer ni l'accepter à concurrence de l'actif net et répondent indéfiniment des dettes et charges qui en dépendent

Par ailleurs, selon l'article 784, l'accomplissement, par le successible d'actes purement conservatoires et, plus particulièrement, d'actes destinés à éviter l'aggravation du passif et d'actes de surveillance et d'actes d'administration provisoire n'emportent pas acceptation de la succession.

[G] [J] estime avoir accepté la succession à concurrence d'actif net alors qu'[W] [H] considère que celui-ci l'a accepté purement et simplement, de manière tacite.

Il résulte des éléments de la procédure rappelés ci-dessus que [G] [J] est intervenu dans deux instances, initiées, en 2015 et 2016, par [O] [J], dont l'adoption a été prononcée en 2005 et révoquée en 2018, par des décisions passées en force de chose jugée.

Dans les deux instances, [O] [J] contestait la créance d'[W] [H] en exécution de la reconnaissance de dette signée en 2014 et les demandes reconventionnelles formées à son encontre. Lors de l'introduction de ces procédures, elle avait la qualité d'adopté faute de décision de révocation et donc d'héritière de [F] [J],

[G] [J], également héritier de la débitrice en qualité de légataire, intervenait soit de manière volontaire soit de manière forcée, dans les procédures en cause. Il contestait la recevabilité des actions de [O] [J], compte tenu de la procédure en révocation de l'adoption, ainsi que le principe de sa dette (au moins devant la juridiction de première instance) fondées sur le même acte notarié.

Dans la première instance, la requête en nullité de la reconnaissance formée par [O] [J] et enregistrée du 12 janvier 2016 puis sa déclaration d'appel du 12 juillet 2017, ont donné lieu au jugement du 27 mars 2017 et à l'arrêt, partiellement infirmatif du 16 janvier 2020.

[G] [J], qui a été appelé en cause, le 13 mai 2016 et formé appel incident :

- a invoqué l'irrecevabilité de l'action de [O] [J] pour perte de sa qualité d'héritier en cours de procédure, en 2018, en raison de la révocation de son adoption,

- contestant le rejet de cette demande par le tribunal, a également soulevé la nullité de la reconnaissance de dette,

- a demandé le rejet de la demande reconventionnelle en condamnation solidaire, formée par [W] [H].

Dans la seconde instance, il est intervenu volontairement à l'action en contestation, introduite par [O] [J] en 2017, de la saisie-attribution pratiquée, par [W] [H], sur ses comptes bancaires et ceux de [O] [J].

[G] [J], en qualité d'héritier et co-débiteur saisi, a soulevé l'irrecevabilité de la requête.

Cette procédure a donné lieu à une décision rendue en 2018, non frappée d'appel, par laquelle le président du tribunal, après avoir déclaré recevable son intervention, a, comme [G] [J] l'avait sollicité, déclaré irrecevable l'action en contestation formée par [O] [J], faute de dénonciation de sa requête.

La Cour de cassation interprète, de manière stricte, la notion d'acceptation, tacite, pure et simple par un héritier et, plus particulièrement, quant à l'intention d'accepter la succession.

Si la première chambre de la Cour de cassation a considéré que caractérisent une acceptation tacite de la succession':

- Une défense au fond accompagnée d'une demande reconventionnelle ayant la même nature qu'une demande principale (3 décembre 2002, Bull 298).

- Une demande reconventionnelle à l'action intentée par un créancier de la succession (19 avril 2005, Bull 199).

- Une défense à une action en partage par un héritier qui a pris parti sur les modes d'évaluation des donations, s'est opposé à une demande d'attribution préférentielle d'un immeuble successoral et a plaidé pour le rapport dans la succession de donations faites par sa mère à certain de ses enfants (31 janvier 2006, Bull 49).

- Une délivrance de legs par un légataire à titre particulier (26 septembre 2007, Bull 309).

Elle a, toutefois, décidé que ne caractérisent pas une telle acceptation':

- Une défense à une action en justice exercée par un créancier de la succession laquelle, par elle-même, n'a qu'un caractère accessoire (3 décembre 2002 précité).

- Une demande de garantie qui ne présente par elle-même qu'un caractère conservatoire au sens de l'article 779 du code civil (19 avril 2005, Bull 199).

- Une action aux fins d'annulation d'un testament instituant un légataire universel (20 septembre 2006, Bull 412).

En l'espèce, [G] [J] n'a pas introduit les procédures en cause, en 2015 et 2016, et avait la qualité d'intervenant, de manière volontaire ou forcée devant les premiers juges. Il a présenté des demandes incidentes ou des défenses au fond, en invoquant des moyens procéduraux ou de fond, afin de ne pas être tenu au paiement d'une dette successorale.

Ces interventions ne sont pas réservées à un héritier acceptant et n'impliquent pas l'intention d'accepter la succession purement et simplement. Un héritier, par ailleurs unique, acceptant à concurrence de l'actif net a intérêt, en raison de cette qualité, à ne pas être tenu au paiement d'une dette successorale.

Elles ne caractérisent donc pas une acceptation pure et simple, tacite, au sens de l'article 782 précité et ce, même si l'héritier en cause a formé un appel incident dans l'une des instances.

Sur une acceptation à concurrence de l'actif net :

Selon les dispositions des articles 787 et 788 du code civil et 671-1 et 671-2 du CPCPF, la déclaration d'acceptation à concurrence de l'actif net est faite au greffe du tribunal de première instance ou devant notaire par l'héritier, est enregistrée dans un registre et publiée au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ainsi qu'au Journal officiel de la Polynésie française avant d'être publié dans un délai de 15 jours, sous forme d'avis, dans un journal d'annonces légales.

L'appelant verse aux débats le récépissé de réception de la déclaration d'acceptation de la succession à concurrence de l'actif net établi par le tribunal de première instance en date du 14 novembre 2018 qui mentionne un acte de déclaration notarié en date du 5 novembre 2018, et l'avis de publication en date du 15 avril 2019 (rectifié le 25 avril) à la direction de l'information légale et administrative.

La déclaration, qui a été enregistrée au plan local et publiée, sous forme d'avis, au plan national, est opposable aux tiers et, plus particulièrement aux créanciers de la succession, sous réserve de sa validité.

Sur l'existence d'une créance certaine, liquide et exigible constatée par un titre exécutoire :

Il résulte des articles 798 et 799 du CPCPF qu'un créancier muni d'un acte notarié revêtu de la formule exécutoire constatant une créance, certaine, liquide et exigible a le droit, pour en obtenir le paiement, de saisir entre les mains d'un tiers la créance de son débiteur portant sur une somme d'argent.

En l'espèce, l'acte servant de fondement à la saisie-attribution litigieuse est un acte établi devant notaire le 11 août 2014, qui est revêtu de la formule exécutoire et par lequel, [F] [J] reconnaissait devoir à [W] [H] une somme en principal de 40.000.000 FCP.

Cette somme venue à échéance en 2015 n'a été remboursée que partiellement au regard du décompte établi de manière manuscrite par [W] [H], le 29 mars 2020, adressé à Maître [M] et mentionnant une somme restant due de 30.750.055 FCP.

La cour d'appel, par arrêt du 16 janvier 2020 a rejeté sa demande en nullité de cette reconnaissance de dette. En outre, dans la présente procédure d'appel, l'existence de cette créance n'est contestée ni dans son principe ni dans son montant par [G] [J].

La créance d'[W] [H] à l'encontre de [G] [J] est donc une créance certaine, liquide et exigible fondée sur l'acte de reconnaissance de dette constitutif d'un titre exécutoire.

Sur la notification de la déclaration de créance :

Aux termes de l'article 792 du code civil, lorsque les créanciers ne déclarent pas leurs créances sur les biens de la succession en notifiant leur titre au domicile élu de la succession, dans un délai de 15 mois à compter de la publicité prévue à l'article 788, leurs créances non assorties de sûreté sont prescrites.

Pour démontrer que la déclaration de créance a été notifiée conformément aux dispositions légales, la partie intimée produit':

- Une lettre datée du 29 mars 2020 et un décompte joint manuscrits, qui a été adressée au domicile élu du notaire, dans laquelle il déclare une créance de 35.234.139 FCP après déduction d'une somme déjà remboursée de 25.007.542 FCP,

- Une lettre du 28 septembre 2020 dans laquelle le conseil d'[W] [H] indique au notaire qu''[W] [H] a déclaré la créance entre ses mains, le 29 mars 2020, que le titre a été validé par l'arrêt du 16 janvier 2020, également, annexé, et lui demande le délai de règlement de la créance,

- Une lettre en réponse du notaire datée du 30 septembre 2020 faisant état d'une vente prochaine d'un bien immobilier permettant à [G] [J] de régler une partie des dettes de la succession,

- Un courriel adressé, le 2 février 2021, par le notaire, au conseil de [G] [J] lui transmettant la lettre du 29 mars 2020 qu'il qualifie de «déclaration de créances».

Sur la nullité de la notification :

Les articles 393 à 405 imposent des conditions et modalités particulières pour les notifications d'une déclaration de créance successorale. Il prévoit,

dans les articles 393 et 394, qu'un acte informant une personne, est opérée par une notification qui doit être faite, soit par un huissier (ou une personne qu'il désigne) soit par une lettre recommandée avec accusé de réception (ou un agent administratif).

Ces articles sont, toutefois, applicables aux seuls actes délivrés devant les juridictions civiles. Elles ne le sont pas à de simples notifications de lettres ou documents délivrées à une personne pour l'informer de ses obligations et, s'il y a lieu, afin de lui en demander l'exécution. Elles ne sont pas soumises aux exigences de forme particulière prévues par les dispositions précitées.

Dans la présente procédure, la créance a été porté à la connaissance de [G] [J] par une lettre datée du 29 mars 2020 et un décompte, manuscrits, adressés au notaire chargé de la succession.

L'article 792, s'il impose, expressément et à peine d'extinction de la créance, un lieu de notification (à domicile élu) et un délai (15 jours à compter de la publicité nationale), n'exige aucune forme particulière de la notification.

Par ailleurs, la circulaire du 29 mai 2007 relative à la loi n°2006-723 du 3 juin 2006 portant réforme des successions précise que la déclaration peut être faite soit par acte d'huissier soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

L'accusé de réception a pour objectif de démontrer que le débiteur a été avisé de l'existence de sa dette et de son montant et du titre la fondant. L'envoi d'une lettre simple ne saurait donc entacher la procédure de nullité dès lors que sa réception n'est pas contestée et qu'elle résulte d'un courriel du notaire, le même jour, à l'avocat de [G] [J] et d'une lettre confortée par la lettre en réponse du notaire datée du 30 septembre 2020.

La Cour de cassation, sur cette question de la forme la déclaration, ne semble pas s'être prononcée.

En conséquence, faute de disposition légale imposant des modes de notification spécifique (lettre recommandée ou acte d'huissier), la notification, par simple lettre, apparaît régulière.

Sur l'extinction de la créance :

L'article 792 du code civil prévoit, à peine d'extinction de la créance, que le créancier chirographaire notifie le titre exécutoire au domicile élu de la succession, dans un délai de 15 mois à compter de la publicité prévue à l'article 788.

L'article 788 prévoit, en outre, que la déclaration selon laquelle l'héritier déclare qu'il n'accepte la succession à concurrence de l'actif net, qui comporte élection de domicile et est enregistrée par le greffe du tribunal de première instance, dans le ressort duquel la succession a été ouverte ou par le notaire, fait l'objet d'une publicité nationale.

Les pièces produites établissent que la déclaration de créance a été notifiée par une lettre du 29 mars 2020, à domicile élu, l'étude du notaire, dans le délai légal de 15 mois courant à compter de la date de la publication nationale.

L'arrêt du 20 mars 2020 qui a été joint à la lettre du 29 mars 2020, ne constitue pas le titre exécutoire comme indiqué ci-dessus. Par ailleurs, sa motivation sur un aveu judiciaire quant à l'acceptation, devant les premiers juges, de l'existence et du montant de la créance, si l'on considérait que l'absence de contestation caractérise la déclaration au sens de l'article 1356 du code civil, n'a pas autorité de la chose jugée et ne fait pas obstacle à une action en contestation de cette créance.

A cet égard, il importe peu que le notaire ait été en possession de la reconnaissance de dette pour l'avoir établi le 11 août 2014 dès lors qu'un texte exige expressément une formalité particulière pour l'information du successible, à peine d'extinction, à savoir la notification du titre lui-même dans la déclaration de créance.

Cette formalité de notification du titre exécutoire prescrite à l'article 792 du CPCPF n'a donc pas été respectée et la créance d'[W] [H] est prescrite.

Il convient, en conséquence, d'ordonner la mainlevée de la saisie- attribution, pratiquée 31 août 2021 par [W] [H], sur le compte dont [G] [J] était titulaire à la banque de Polynésie.

Sur les dommages-intérêts pour procédure abusive :

Il ne résulte pas de la procédure que [G] [J] dont la demande est satisfaite en appel, a abusé de son droit d'ester en justice. [W] [H] sera donc débouté de sa demande à titre de dommages-intérêts.

Sur les frais de procédure :

Compte tenu de l'existence de circonstance particulière et de la nature de l'affaire en cause, les dépens d'appel et de première instance seront laissés à la charge des parties qui les ont exposés sur le fondement de l'article 406 du CPCPF.

Il n'apparaît pas inéquitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 407.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Infirme la décision entreprise,

Et statuant à nouveau,

Ordonne la mainlevée de la saisie-attribution, pratiquée le 31 août 2021 par [W] [H] sur le compte dont [G] [J] est titulaire à la banque de Polynésie et dénoncée le 2 septembre 2021,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge des parties qui les ont exposés.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 407 du code de procédure de la Polynésie française en première instance et en appel.

Prononcé à Papeete, le 11 mai 2023.

Le Greffier, P/Le Président empêché,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : G. RIPOLL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet d
Numéro d'arrêt : 22/00111
Date de la décision : 11/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-11;22.00111 ?
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