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09/02/2023 | FRANCE | N°21/00088

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet b, 09 février 2023, 21/00088


N° 32





MF B

--------------



Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Guédikian,

le 10.02.2023.





Copie authentique

délivrée à :

- Me Peytavit,

le 10.02.2023.



REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 9 février 2023





RG 21/00088 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 508, rg n° 19/00069 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 9

novembre 2020 ;



Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 25 mars 2021 ;



Appelant :



M. [O] [E], né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant [Adresse 4...

N° 32

MF B

--------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Guédikian,

le 10.02.2023.

Copie authentique

délivrée à :

- Me Peytavit,

le 10.02.2023.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 9 février 2023

RG 21/00088 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 508, rg n° 19/00069 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 9 novembre 2020 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 25 mars 2021 ;

Appelant :

M. [O] [E], né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant [Adresse 4] ;

Représenté par Me Loris PEYTAVIT, avocat au barreau de Papeete ;

Intimée :

La Société Nacc, au capital de 4 950 220 Euros, n° Siren 407 917 111, immatriculée au Rcs de Paris dont le siège social est sis [Adresse 2] ;

Représentée par Me Gilles GUEDIKIAN, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 14 octobre 2022 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 10 novembre 2022, devant Mme BRENGARD, président de chambre, M. RIPOLL, conseiller, Mme TISSOT, vice-présidente placée auprès du premier président, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme BRENGARD, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

Le 5 février 2019, la Société Nacc a engagé une action à l'égard de M. [O] [E] au titre d'une cession de créances que lui a consentie la Banque de Tahiti par acte sous seing privé du 1er juillet 2015, portant notamment sur trois prêts contractés par la société 'Le Traiteur du Pacifique' sous la garantie du cautionnement personnel et solidaire du défendeur, dans les conditions suivantes :

' le 23 mars 2006, un prêt d'un montant initial de 1'170'196 Fcfp pour le financement de divers matériels professionnels,

' le 23 mars 2006, un prêt d'un montant de 2'270'000 Fcfp pour le financement partiel d'un crédit vendeur,

' le 20 mars 2006, un prêt d'un montant initial de 4'059'804 Fcfp pour le financement du rachat d'un véhicule.

La requérante faisait valoir qu'à la suite de la défaillance de l'emprunteur principal, la société 'le Traiteur du Pacifique' placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire par jugement du 23 janvier 2012, elle a tenté de recouvrer sa créance dans le cadre de la procédure commerciale collective et parallèlement, à l'égard de la caution M. [O] [E].

Ce dernier a, en réplique, déclaré par conclusions déposées le 14 janvier 2020, qu'il ne contestait ni le principe ni le quantum de sa dette, mais qu'il sollicitait des délais de paiement en raison de ses faibles revenus.

***

Suivant jugement n° 508 rendu contradictoirement le 9 novembre 2020 (RG 19/69), le tribunal civil de première instance de Papeete, statuant au vu de l'article 1690 du Code civil notamment,

' a déclaré la cession de créances intervenue le 1er juillet 2015 entre la Banque de Tahiti et la société Nacc opposable à M. [E],

' a condamné M. [E] à payer à la société Nacc la somme de 3'655'762 Fcfp arrêtée au 31 décembre 2018 outre intérêts légaux courant à compter du 31 décembre 2018 jusqu'à parfait paiement,

' a autorisé M. [E] à se libérer de sa dette à raison de 23 versements mensuels d'un montant de 201'432 Fcfp outre un 24e versement destiné à apurer le solde dû et des intérêts, la première échéance courant à compter du 5 du mois suivant la signification du jugement,

' a dit qu'en cas de non-respect d'une seule échéance, l'intégralité de la somme deviendra immédiatement exigible,

' a condamné M. [E] aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 60'000 Fcfp à la société Nacc.

***

Par requête reçue au greffe le 25 mars 2021, M. [O] [E] a relevé appel de la décision entreprise dont il sollicite l'affirmation, et en ses conclusions récapitulatives du 12 mai 2022, il demande à la cour, statuant par infirmation du jugement entrepris, de :

' dire et juger que la Banque de Tahiti aux droits de laquelle vient la Nacc a engagé sa responsabilité du fait de la violation de son devoir de mise en garde,

' condamner la Banque de Tahiti aux droits de laquelle vient la Nacc, à payer à M. [E] la somme de 3'523'486 Fcfp,

' dire et juger qu'en l'absence d'une sommation de payer, la société Nacc n'est pas fondée à solliciter la condamnation de M. [E] aux intérêts légaux depuis le 25 octobre 2011, et qu'ainsi les demandes de la société Nacc ne sauraient excéder la somme de 3'523'486 Fcfp qui correspond au principal,

' ordonner la compensation,

' débouter la société Nacc de ses demandes puis la condamner à payer à M. [E] la somme de 250'000 Fcfp au titre des frais irrépétibles outre les dépens.

À l'appui de son appel, il expose que,

' en 2006, la Banque de Tahiti a octroyé trois concours bancaires à la société le Traiteur du Pacifique dont son fils [Y] [E] est l'associé unique, et a exigé qu'il se porte lui-même caution solidaire ;

' La crise économique de 2008 a fragilisé les finances de la société qui a été finalement placée en liquidation judiciaire en 2012 et pendant ce temps, il n'a pas pas été informé de la situation et n'a appris qu'en recevant la requête introductive d'instance que la Banque de Tahiti avait cédé la créance détenue à son égard à la Société Nacc ;

' le tribunal civil était manifestement incompétent pour trancher le litige ;

' ses prétentions sont recevables contrairement à ce que conclut la Nacc qui affirme qu'il a acquiescé à ses réclamations alors qu' il n'a jamais renoncé à ses moyens ;

' la demande de compensation est toujours recevable en appel ;

' il est recevable à invoquer la responsabilité de la société Nacc venant aux droits de la Banque de Tahiti qui lui a octroyé des concours disproportionnés par rapport à ses revenus, et qui lui a fait perdre une chance de ne pas contracter lesdits engagements ;

' la demande de condamnation au titre des intérêts légaux est infondée puisque la Banque n'a pas rempli son obligation d'information à son égard.

En ses conclusions récapitulatives du 18 juillet 2022, la société Nacc entend voir la cour,

' déclarer l'appel, ou subsidiairement, les demandes nouvelles présentées par M. [E] en appel, irrecevables,

' à titre infiniment subsidiaire, confirmer le jugement entrepris excepté sur l'octroi des délais de paiement à M. [E] et sur ce point, dire n'y avoir lieu de lui accorder de tels délais ,

' condamner M.[E] au paiement d'une somme de 200'000 Fcfp au titre des frais irrépétibles outre les dépens.

La société Nacc soutient que,

' les demandes de M. [E] sont irrecevables au regard de son acquiescement explicite aux réclamations de la Société Nacc dans ses conclusions du 14 janvier 2020, ce qui constitue, d'après la jurisprudence de la Cour de Cassation, un contrat judiciaire qui a été homologué par le premier juge ; en outre, il a clairement renoncé à ses moyens en première instance et se trouve donc irrecevable à les présenter en appel;

' les demandes nouvelles présentées sous couvert de la compensation sont irrecevables ; au surplus, n'ayant pas mis en cause la Banque de Tahiti en première instance, M. [E] peut pas rechercher sa responsabilité en appel ;

' à titre infiniment subsidiaire, M. [E] a bien signé les actes de caution qui sont versés aux débats et sa situation financière à l'époque des prêts était suffisamment confortable pour permettre le remboursement des som-mes prêtées à la société emprunteur, en cas de défaillance de celle-ci ;

' la demande au titre des intérêts légaux est justifiée même sans sommation, car il est constant que la déclaration de créance présente les mêmes effets qu'une demande en justice, et en l'espèce, elle a été transmise le 27 octobre 2011 au juge-commissaire ;

' M. [E] a relevé appel pour s'octroyer des délais supplémentaires, si bien que sa demande à ce titre doit être rejetée.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions et moyens dont la Cour est saisie, il est renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties. Pour l'exposé des moyens des parties, tel que requis par les dispositions de l'article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française, il sera renvoyé à la motivation ci-après à l'effet d'y répondre.

MOTIFS DE LA DECISION :

L'article 349 du code de procédure civile de Polynésie française dispose que la cour d'appel ne peut se prononcer que sur les demandes qui ont été soumises aux juges de première instance et il ne peut être formé en appel, aucune demande nouvelle à moins qu'elle ne soit défense ou connexe à la demande principale ou qu'il s'agisse de compensation.

L'article 349- 1 précise que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

L'article 349-2 ajoute que les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.

Cependant, M. [E] est appelant et non intimé et il saisit la cour, de demandes principales de sorte que ni l'exception de la compensation ni celle des demandes reconventionnelles ne le concerne.

Or, en première instance, M. [E] n'a formé aucune demande reconventionnelle à l'exception de la demande de délais de paiement .

Dans ses dernières conclusions du 14 janvier 2020, il a admis qu'il ne contestait ni le principe ni le montant de sa dette en qualité de caution.

Le tribunal, statuant donc au vu des seules prétentions qui lui ont été soumises, a fait droit à l'action de la Société Nacc, cessionnaire de la créance précédemment détenue par la Banque de Tahiti à l'égard de M. [E] mais a consenti un délai de grâce de 2 ans au débiteur, sans toutefois assortir sa décision de l'exécution provisoire.

M. [E] a donc interjeté appel.

Dans ses dernières conclusions, il développe des considérations sur l'incompétence éventuelle du tribunal, qui sont sans intérêt puisqu'il n'a pas soulevé l'exception d'incompétence en première instance et qu'il ne formalise pas davantage en appel, une telle prétention.

Il présente en appel, une argumentation qui correspondrait à une action en responsabilité de la Société Nacc en ce qu'elle vient aux droits de la Banque de Tahiti qui aurait enfreint son devoir de mise en garde.

Ceci étant, sa demande nouvelle en appel est irrecevable à double titre,

- d'une part, il ne s'agit pas seulement de moyens nouveaux mais bien d'une action en responsabilité du banquier distincte et sans lien manifeste avec l'action en paiement de sommes engagée par la partie adverse,

- d'autre part, elle vise des manquements commis lors de l'octroi des emprunts à la société le Traiteur de Tahiti, par la Banque de Tahiti mais celle-ci n'est pas partie au procès et n'est donc pas en mesure de se défendre ; en effet, si la société Nacc est cessionnaire de créances de la Banque de Tahiti, elle n'est pas pour autant, tenue des fautes éventuellement commises par l'établissement cédant dans le cadre de ses relations contractuelles avec l'emprunteur. Et M. [E] ne soutient pas la Société Nacc a commis un quelconque manquement à son égard.

Dès lors, M. [E] doit être déclaré recevable en son appel mais irrecevable en ses demandes présentées au titre de la responsabilité de la Banque de Tahiti.

S'agissant de sa demande de déchéance partielle aux intérêts légaux, pour défaut d'information, elle est nouvelle en appel et donc irrecevable, et du reste, elle s'applique à la responsabilité de la Banque de Tahiti et non de la Nacc cessionnaire des créances.

Au regard des pièces produites aux débats et des explications des parties, il apparait que c'est en se déterminant par des motifs pertinents et sérieux que la cour adopte, que le tribunal a fait droit à la demande de la société Nacc et a condamné M. [E] au paiement d'une somme de 3 655 762 Fcfp outre intérêts légaux courant à compter du 31 décembre 2018, au titre des sommes arriérées dont il est redevable en sa qualité de caution de la société le Traiteur de Tahiti.

L'octroi de délais de grâce relève du pouvoir souverain du juge. En l'espèce, le tribunal a accordé des délais sans assortir sa décision de l'exécution provisoire et l'appel particulièrement mal fondé de M. [E] tendait manifestement à obtenir un laps de temps supplémentaire : force est de constater qu'il a obtenu satisfaction puisque le présent arrêt est rendu 2 ans après le jugement querellé qui doit ainsi être infirmé sur l'octroi de délais de paiement.

M. [E] succombant sur l'ensemble de ses prétentions, sera condamné aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure d'appel à la Société Nacc.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Vu l'appel de M. [O] [E],

Déclare son appel recevable en la forme,

Déclare irrecevables comme étant nouvelles en appel, son action en responsabilité à l'égard de la Banque de Tahiti aux droits de laquelle vient la Nacc et sa demande de déchéance partielle des intérêts légaux,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a accordé à M. [E], un délai de 24 mois pour apurer sa dette contractée à l'égard de la Société Nacc,

Statuant à nouveau sur ce seul point,

Rejette la demande de délais de paiement présentée par M. [E],

Confirme l'ensemble des autres dispositions du jugement entrepris,

Vu les articles 406 et 407 du code de procédure civile de Polynésie française,

Condamne M. [O] [E] aux dépens et à payer à la Société Nacc, une somme de 200 000 Fcfp au titre des frais irrépétibles d'appel.

Prononcé à Papeete, le 9 février 2023.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : MF BRENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet b
Numéro d'arrêt : 21/00088
Date de la décision : 09/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-09;21.00088 ?
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