N° 71
CT
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Copie exécutoire
délivrée à :
- Me Quinquis,
le 31.08.2022.
Copie authentique
délivrée à :
- Me Théodore Céran J,
- Curateur,
le 31.08.2022.
REPUBLIQUE FRANCAISE
COUR D'APPEL DE PAPEETE
Chambre des Terres
Audience du 25 août 2022
RG 19/00002 ;
Décision déférée à la Cour : jugement n° 70, rg n° 11/0176 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, Tribunal Foncier de la Polynésie française, du 21 février 2018 ;
Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 9 janvier 2019 ;
Appelant :
M. [AB] [CW] [PW] [OX], né le 12 novembre 1945 à Takapoto, de nationalité française, retraitée, demeurant à [Adresse 10] ;
Représenté par Me Théodore CERAN-JERUSALEMY, avocat au barreau de Papeete ;
Intimés :
1 - M. [A] [GY] [FG], né le 15 juin 1955 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant à [Adresse 12] ;
Ayant pour avocat la Selarl Jurispol, représentée par Me François QUINQUIS, avocat au barreau de Papeete ;
2 - Mme [O] [U] épouse [MA], née le 24 mars 1945 à Kauehi, de nationalité française, [Adresse 2] ;
Non comparante, assignée à personne le 14 février 2019 ;
3 - Mme [MM] [B] [D] épouse [M], née le 15 janvier 1930 à Takapoto, serait décédée ;
4 - M. [R] [PD] [FG], né le 18 décembre 1935 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant à [Adresse 12] ;
Non comparant, assigné à personne le 1er mars 2019 ;
5 - Mme [J] [EN] [FG] épouse [XJ], née le 18 décembre 1935 à [Localité 4], de nationalité française, demeuant à [Adresse 12] ;
Non comparante, assignée à personne le 1er mars 2019 ;
6 - Mme [GF] [EU] [FG], née le 15 août 1952 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant à [Adresse 14] ;
Non comparante, assignée à personne le 19 février 2020 ;
7 - M. [RV] [BL] [FG], né le 7 mai 1956 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant à [Adresse 16] ;
Non comparant, assigné à personne le 12 février 2019 ;
8 - M. [Y] [SH] [FG], né le 5 janvier 1966 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant à [Adresse 3] ;
Non comparant, assigné à personne le 14 février 2019 ;
9 - Mme [L] [FG] épouse [XP], née le 9 avril 1968 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant à [Adresse 15] ;
Non comparante, assignée à personne le 11 février 2019 ;
10 - Mme [E] [FG] épouse [AZ], née le 19 avril 1968 à [Localité 4], de nationalité française, demeuran [Adresse 18] ;
Ayant pour avocat la Selarl Jurispol, représentée par Me François QUINQUIS, avocat au barreau de Papeete ;
11 - M. [YI] [FG], né le 9 mars 1941 à Papeete, de nationalité française, demeurant à Papeete Chez [Adresse 7] ;
Non comparant, assigné à personne le 13 février 2019 ;
12 - Mme [TG] [FT] [FG] épouse [CZ], née le 11 février 1954 à Fakarava, de nationalité française, [Adresse 5] ;
Non comparante, assignée à personne le 24 avril 2019 ;
13 - Mme [WE] [NY] [FG], née le 27 juin 1964 à Fakarava, de nationalité française, demeurant à [Adresse 5] ;
Non comparante, assignée à personne le 15 novembre 2019 ;
14 - M. [I] [FG], né le 14 mai 1969 à [Localité 8], de nationalité française, demeurant à [Adresse 5] ;
Non comparant, assigné à personne le 24 avril 2019 ;
15 - M. [PD] [DO] [FG], né le 16 février 1963 à [Localité 4], de nationalité Française, demeurant à [Adresse 11] ;
Non comparant, assigné à personne le 23 septembre 2019 ;
16 - M. [CM] [F] [FG], né le 22 septembre 1974 à [Localité 8], de nationalité française, employée de ferme perlière, demeurant aux [Localité 17] Chez [EB] [WX], [Adresse 6] ;
Non comparant, assigné à personne le 1er mars 2019 ;
17 - M. [RC] [FG], né le 9 septembre 1975 à [Localité 8], de nationalité française, demeurant à [Adresse 13] ;
18 - M. Le Curateur aux Biens et Sucessions Vacants, [Adresse 9] ;
Non comparant, assigné à personne le 14 février 2019 ;
19 - Mme [V] [M], demeurant à Takapoto, représenant sa mère décédée [MM] [B] [D] épouse [M], intimée n° 3 ;
Non comparante, assignée à personne le 11 septembre 2020 ;
Ordonnance de clôture du 17 décembre 2021 ;
Composition de la Cour :
La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 24 mars 2022, devant Mme SZKLARZ, conseiller faisant fonction de président, M. SEKKAKI, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l'ordre judiciaire aux fins d'exercer à la cour d'appel de Papeete en qualité d'assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;
Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;
Arrêt contradictoire ;
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Signé par Mme SZKLARZ, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A R R E T,
Par jugement rendu le 14 juin 1974, le tribunal de première instance de Papeete a dit que [SU] [YC] [U] épouse [FG], née le 6 juin 1907 à Kauehi, est propriétaire exclusive de la terre [K], plan parcellaire n° 56 du premier secteur de Takapoto.
[AB] [CW] [PW] [OX] a formé tierce opposition à l'encontre de cette décision.
Par jugement rendu le 21 février 2018, le tribunal foncier de la Polynésie française section 1 a déclaré recevable mais mal fondée la tierce opposition et dit que [AB] [OX] doit supporter les dépens.
Par requête enregistrée au greffe le 9 janvier 2019, [AB] [CW] [PW] [OX] a relevé appel de cette décision afin d'en obtenir l'infirmation.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives, il demande à la cour de :
«Infirmer le jugement n° 11/00176 du 21 février 2018 en toutes ses dispositions.
Déclarer recevable la tierce-opposition formée contre le jugement du 14 juin 1974 par M. [AB] [OX].
Constater qu'au décès de M. [X] [ZN] a [ZH] survenu le 25 février 1916 à Kauehi, sa s'ur [GS] a [ZH] épouse [PP] a recueilli toute sa succession.
Rétracter le jugement du 14 juin 1974.
Annuler l'acte de donation du 18 août 1977 et l'acte de vente du 11 mai 1979.
Condamner l'ensemble des défendeurs à l'exception du curateur aux biens et successions vacants à payer à M. [AB] [OX] la somme de 660 000 F FCP au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Les condamner aux entiers dépens.»
Il affirme que [X] [ZN] a [ZH] né en 1838 et décédé le 25 février 1916, est propriétaire de plusieurs terres situées à [Localité 1], FAITE, [H], [P], [T], [DV] et [NF] ; qu'il a laissé pour lui succéder sa veuve, [FA] [FM] et ses quatre frère et s'urs : [GS] a [ZH] décédée le 22 novembre 1921 sans postérité, [ZU] [G] alias [ZU] a [ZH] décédée le 9 mars 1875, sans postérité ; [RI] [G] décédé sans postérité et [XW] [G] décédée le 16 septembre 1896 sans postérité ; que, par testament olographe du 12 juillet 1921, [GS] a [ZH] a légué tous ses biens immobiliers à [SN] a [OK], [FZ] a [OR] et [XD] a [MG] ; que [SN] a [OK] est décédé le 2 février 1930 en laissant ses deux s'urs dont [AU] [C] a [OK] mariée le 15 juin 1893 avec [XD] a [OX] et décédée à [Adresse 5] le 15 septembre 1934 en laissant 5 enfants dont [ZB] [YV] [XD] a [OX] décédé le 17 juin 1946 en laissant pour lui succéder son fils unique [W] [MZ] [XD] a [OX] décédé le 30 janvier 1947 ; qu'étant le fils de [W] [MZ] [XD] a [OX], il est un ayant-droit de [X] [ZN] a [ZH] par voie testamentaire et par voie successorale et donc en droit de revendiquer les terres dépendant de la succession de celui-ci ; qu'à la suite d'un testament olographe rédigé à [OE] le 17 février 1916 par [X] [ZN] a [ZH], «par acte notarié du 25 octobre 1943, transcrit le 26 octobre 1943 Vol.324 n°104, Mme [SU] [YC] [U] épouse [FG], M. [EH] [SB] [NS] [U] et Mlle [HE] [U] ont procédé au partage des biens meubles et immeubles que leur a légués M. [CM] [NS] décédé le 16 septembre 1935 par testament du 19 décembre 1925'» et que «les terres partagées ne sont ni énumérées, ni identifiées et qu'aucun plan n'est versé» ; que, «par jugement du 14 juin 1974,
Mme [SU] [YC] [U] épouse [FG] née le 6 juin 1907 à [P] est déclarée propriétaire exclusive de la terre [K], plan parcellaire n° 56 du premier secteur de [DV]» et que «la terre [K], objet du litige, a été revendiquée pour moitié le 10 janvier 1889 par [X] [ZN] a [ZH]».
Il soutient qu'estimant inexacte la traduction du testament daté du 17 février 1916, il a demandé au service de la traduction et l'interprétariat de la Polynésie française de le traduire à nouveau ; que, «de la traduction faite le 18 octobre 2018, il ressort que le testament olographe du 17 février 1916 de [X] [ZN] a [ZH] n'est en définitive qu'un mandat de représentation après décès» qui «n'a cours en principe que du vivant du mandant» ; que «[YO] a [NS] a TU a été désigné par [X] [ZN] a [ZH] uniquement comme exécutant testamentaire et nullement comme légataire» ; que deux missions lui ont été confiées, celle de procéder au partage de la terre PIRIGA en 2 lots et celle « d'assurer la défense des droits de propriété du testateur devant les tribunaux» ; que « «[YO] a [NS] assume gratuitement ses missions comme un ami qui est censé rendre service» et qu'il «ne reçoit aucun bien immobilier à titre de rémunération de la part de [X] [ZN] a [ZH]» ; qu'il n'a pu «dans ces conditions léguer à ses petits-enfants [RO] [NS] [U], [HE] [U] et [CJ] [U] des biens dépendant de la succession de [X] [ZN] a [ZH]» qui ont été recueillis par [GS] a [ZH] épouse [PP] et qu'en sa qualité d'ayant-droit de [X] [ZN] a [ZH], il a qualité et intérêt à agir en tierce-opposition contre le jugement du 14 juin 1974 ainsi que pour demander l'annulation de l'acte de donation fait le 18 août 1977 au profit d'[A] [GY] [FG] et de l'acte de vente du 11 mai 1979 conclu avec [MM] [Z] [D] épouse [M] ; que [X] [ZN] a [ZH] est décédé sans postérité en laissant pour lui succéder ses 4 frères et s'urs qui sont décédés sans postérité ; que «[GS] a [ZH] épouse [WR] est décédée en dernier en 1921 et qu'elle a recueilli à cette date dans sa succession tous les biens immobiliers laissés par son frère [X] [ZN] a [ZH], et notamment toutes les terres qu'il a revendiquées dans l'archipel des Tuamotu» ; que, «par testament olographe du 12 juillet 1921, elle a légué tous ses biens immobiliers à [SN] a [OK], [FZ] a [OR] et [XD] a [MG] et que «[SN] a [OK] a'la qualité de légataire universel au regard des dispositions de l'article 1003 du Code Civil'».
Il ajoute que, le 1er août 1916, [CM] a [NS] a déposé «en «catimini» le testament olographe du 17 février 1916 auprès de Maître [S] [CA], notaire à [Localité 8] ; que ce testament a été «ouvert hors la présence de la famille de [X] [ZN] a [ZH] par le greffier des Tribunaux de [Localité 8], [Y] [GL]» ; qu' «il sera ensuite simplement enregistré le 4 août 1916 F°. 20 Case 9» ; qu' «aucune notoriété après décès de M. [X] [ZN] a [ZH] n'est dressé dans les six mois de son décès» et que sa déclaration de succession n'est pas non plus établie ; que, par ailleurs, les héritiers de [CM] a [NS] disposaient d'un délai de trente ans, selon l'article 789 du code civil à compter du 16 septembre 1935 pour accepter la succession de leur auteur ; qu'aucune des terres revendiquées et attribuées à [X] [ZN] a [ZH] n'a été appréhendée ni par [CM] a [NS] ni par ses ayants-droit qui sont allés «à tour de rôle retirer chez le notaire dépositaire de l'acte litigieux,
une expédition dudit acte les 29 septembre 1960, 8 octobre 1965 et 21 octobre 1976» ; que [YO] a [NS] ne possède pas la qualité de légataire universel dans la mesure où il «n'avait en charge que les biens immobiliers de [OE] et ceux de [P]'» ; que [X] [ZN] a [ZH] a revendiqué des terres dans plusieurs atolls des Tuamotu (FAITE, [H], [N], [NL], [PJ], [T] et [OE]) ; que, dans son testament du 17 février 1916, seules les terres de [OE] sont citées ; que [YO] a [NS] a la qualité d'un légataire particulier et qu'en cette qualité, il était «tenu en application des dispositions de l'article 1014 du Code Civil de solliciter la délivrance de son legs auprès des héritiers de [X] [ZN] a [ZH] dont sa s'ur [GS] a [ZH]» ; qu'il «a disposé d'un délai de trente ans partant à compter du 25 février 1916, date du décès de [X] [ZN] a [ZH], pour solliciter des héritiers définis par l'article 1011 du Code Civil en vigueur à l'époque et notamment aux héritiers appelés dans l'ordre établi au titre des successions, la délivrance de son legs » et que, ni lui, ni «ses héritiers ne justifient's'être envoyés en possession des biens immobiliers à eux légués par [X] [ZN] a [ZH]»; qu'en tout état de cause, le légataire universel institué par testament olographe en l'absence d'héritier réservataire est tenu de se faire envoyer en possession, en application des dispositions de l'article 1008 du code civil ; qu' «aucune demande d'envoi en possession n'a été présentée au président du tribunal civil de première instance de Papeete» ; que «l'action en délivrance du légataire à titre universel est soumise à la prescription trentenaire de l'article 2262 du code civil» et qu' «entre le 25 février 1916, date du décès de [X] [ZN] a [ZH], et aujourd'hui, il s'est écoulé plus de trente ans (105 ans)».
[A] [MT] [FG] et [E] [FG] épouse [AZ] demandent à la cour de :
- infirmer le jugement attaqué ;
- déclarer irrecevables les demandes formées par [AB] [CW] [PW] [OX] pour défaut de droit d'agir en raison de la prescription ;
- «en toutes hypothèses et au fond, confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 21 février 2018» ;
- leur allouer la somme de 300 000 FCP, sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;
- mettre les dépens à la charge de [AB] [CW] [PW] [OX].
Ils font valoir que [AB] [OX] prétend descendre de la seule lignée ayant connu une postérité alors qu'il serait surprenant que les 4 frères et s'urs de [X] [ZN] a [ZH] soient décédés sans avoir de descendance ; que, dans le jugement du 14 juin 1974, le tribunal a retenu
-«que [X] [ZN] a [ZH] avait institué par testament enregistré le 4 août 1916 (F°20 Case 9) le sieur [CM] (Tu) [NS], en qualité de légataire universel'
-Que [CM] [NS] est décédé le 14 septembre 1935 en laissant également un testament enregistré le 23 décembre 1935 (F°60 Case 486), instituant pour légataires universels ses trois petits-enfants'
-que ces derniers ont procédé au partage de la succession [CM] [NS] par acte transcrit le 26 octobre 1943 (volume 324 11° 104)'C'est ainsi que la Dame [SU] [U] épouse [FG] recevait un lot composé de diverses Terres dont celles situées dans l'île de Takapoto,
-que la Dame [SU] [U] épouse [FG] a ensuite donné les Terres [K] et OTAPAHI à son petit-fils [A] [FG] par acte notarié du 18 août 1977 transcrit le 13 septembre 1977 (volume 878 n° 40).. » ; que [AB] [OX] expose «avoir formé sa tierce-opposition à l'encontre du jugement du 14 juin 1974 par requête en date du 27 décembre 2011, soit 37 ans plus tard» et que «son action ne peut qu'être irrecevable par l'effet de la prescription trentenaire prévu à l'article 2262 (ancien) du Code Civil» ; que «son action tendant à l'annulation de l'acte de donation du 18 août 1977 est, pour les mêmes motifs, irrecevable en raison de la prescription, puisqu'introduite 34 ans après la publication de l'acte» ; qu'il «ne justifie pas que ses auteurs avant lui avaient accepté la succession de [X] [ZH] dans le délai de 30 ans conformément aux exigences de l'article 789 du Code Civil» et qu'aucun de ses aïeuls «ne s'était manifesté en qualité d'ayant droit de [X] [ZN] A [ZH] avant que lui-même ne le fasse en 2011, soit 95 ans après le décès du De Cujus» ; qu'en outre, [AB] [OX] énonce «qu'en application du testament olographe du 17 février 1916 de M. [X] [ZN] a [ZH] gratifiant M. [CM] (Tu) [NS], le partage du patrimoine de ce dernier a été effectué par acte notarié du 25 octobre 1943» ; que «ce partage a été exécuté, au point d'ailleurs que Mme [SU] [U] épouse [FG] a procédé à une donation' » et qu' «en application de l'article 363 alinéa 2 du Code de Procédure Civile de la Polynésie française, une tierce- opposition n'est pas recevable lorsque le partage est exécuté» ; que «rien n'est dit sur l'acceptation de la succession de la s'ur [GS] a [ZH] par ses héritiers» ; que «[CM] [NS] est légataire universel, en l'absence d'héritiers réservataires» ; que, dans cette hypothèse, «le légataire universel est saisi de plein droit par la mort du testateur, sans être tenu de demander la délivrance» ; que, selon «une jurisprudence constante, la délivrance ne revêt aucune forme particulière» et qu' «ainsi, lorsqu'un légataire prend possession du bien et se comporte en propriétaire de celui-ci sans recevoir aucune forme d'opposition de la part des autres héritiers, l'on considère alors qu'il y a eu délivrance» ; qu'il appartient à [AB] [OX] «de justifier de la recevabilité de ses demandes avant de venir tenter de contester les droits de ceux qu'il a attrait aux procédures qu'il a initiées» et que «les légataires successifs ont pris possession des biens, et en ont disposé, par actes enregistrés ou transcrits', durant 95 ans, sans aucune opposition».
Ils soulignent également que «le droit français impose de rechercher et de faire respecter la volonté du défunt» ; que, pour interpréter cette volonté, «le juge s'appuie sur les éléments intrinsèques (tirés du testament lui-même), et sur des éléments extrinsèques, tels que les usages» ; que «les décisions jurisprudentielles se placent classiquement en faveur de l'efficacité du testament» et que le tribunal foncier «a fait très exactement application de ces principes, et a correctement interprété le testament de [X] [ZN] a [ZH] au profit de [CM] (Tu) [NS]» ; que «les légataires universels étaient, à l'époque, dans ces lointaines contrées, appelés «représentants» et que [AB] [OX] ne craint pas de se contredire en donnant un sens différent à ce mot selon qu'il s'agit du testament olographe du 17 février 1916 ou du testament olographe du 12 juillet 1921 dont il se prévaut ; que l'ancienne et la nouvelle traduction du testament de [X] [ZN] a [ZH] sont quasi-identiques et que l'analyse de ce testament faite par le tribunal foncier «correspond aux dernières volontés du De Cujus».
[O] [U] épouse [MA], [V] [M], fille de [MM] [B] [D] épouse [M] décédée, [R] [PD] [FG], [J] [EN] [FG] épouse [XJ], [GF] [FG], [RV] [BL] [FG], [Y] [SH] [FG], [L] [FG] épouse [XP], [YI] [FG], [TG] [FT] [FG] épouse [CZ], [WE] [NY] [FG], [I] (2ème jumeau) [FG], [PD] [DO] [FG], [CM] [F] [FG], [RC] [FG] et le Curateur aux Successions et Biens Vacants bien qu'assignés à personne, n'ont pas comparu.
La présente décision sera rendue contradictoirement, en application des dispositions de l'article 440-2 du code de procédure civile de la Polynésie française.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 décembre 2021.
Motifs de la décision :
Sur la recevabilité de l'appel :
La recevabilité de l'appel n'est pas discutée et aucun élément de la procédure ne permet à la cour d'en relever d'office l'irrégularité.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en tierce opposition formée par [AB] [CW] [PW] [OX] :
L'article 45 du code de procédure civile de la Polynésie française dispose que :
«Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfixé, la chose jugée.»
Et l'article 46 du même code ajoute que :
«Les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.»
En appel, les intimés soulèvent l'irrecevabilité de l'action en tierce opposition formée par [AB] [CW] [PW] [OX] en se prévalant de la prescription.
La présente instance a été introduite après l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile dont l'article 2 a complété le livre III du code civil par un titre XXI intitulé : «De la possession et de la prescription acquisitive».
Toutefois, l'article 25 IV de ladite loi n'a pas rendu l'article 2 susvisé applicable en Polynésie française.
En vertu du principe de spécialité législative, la cour se référera donc en l'espèce à l'article 2262 ancien du code civil selon lequel :
«Toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d'en rapporter un titre, ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.»
Il résulte de ce texte que l'action en tierce opposition formée par [AB] [CW] [PW] [OX] est soumise à la prescription trentenaire.
Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que cette prescription commence à courir à compter du jour où l'acte attaqué est intervenu.
En l'espèce, la décision judiciaire statuant sur la propriété de la terre [K] située à Takapoto dont l'appelant conteste la validité a été rendue le 14 juin 1974.
Or, [AB] [CW] [PW] [OX] a saisi le tribunal de première instance de Papeete par requête en tierce opposition ainsi qu'en annulation de la donation du 18 août 1977 et de l'acte de vente du 11 mai 1979 enregistrée au greffe le 29 décembre 2011 alors qu'il aurait dû agir avant le 15 juin 2004.
Et son action est d'autant plus tardive que le jugement du 14 juin 1974 déclarant [SU] [YC] [U] épouse [FG] propriétaire de la terre Hipoti a été transcrit à la conservation des hypothèques de [Localité 8] le 5 septembre 1974, date à partir de laquelle la publicité foncière permettait à toute personne d'être informée de la situation du bien immobilier litigieux.
Dans ces conditions, il convient d'infirmer le jugement attaqué et de déclarer irrecevable, pour défaut de droit d'agir en raison de la prescription, la tierce opposition formée par [AB] [CW] [PW] [OX].
Il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés la totalité des frais exposés pour leur défense en appel et non compris dans les dépens et il doit ainsi leur être alloué la somme de 200 000 FCP, sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.
La partie qui succombe doit supporter les dépens.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
Déclare l'appel recevable ;
Infirme le jugement rendu le 21 février 2018 par le tribunal foncier de la Polynésie française section 1, sauf en ce qu'il a mis les dépens à la charge de [AB] [CW] [PW] [OX] ;
Déclare irrecevable, pour défaut de droit d'agir en raison de la prescription, la tierce opposition formée par [AB] [CW] [PW] [OX] à l'encontre du jugement rendu le 14 juin 1974 par le tribunal de première instance de Papeete ;
Dit que [AB] [CW] [PW] [OX] doit verser à [A] [MT] [FG] et [E] [FG] épouse [AZ] la somme de 200 000 FCP, sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;
Rejette toutes autres demandes formées par les parties ;
Dit que [AB] [CW] [PW] [OX] doit supporter les dépens d'appel.
Prononcé à Papeete, le 25 août 2022.
Le Greffier, Le Président,
signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : K. SZKLARZ