N° 69
KS
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Copie exécutoire
délivrée à :
- Me Quinquis,
le 31.08.2022.
Copie authentique
délivrée à :
- Me Usang,
le 31.08.2022.
REPUBLIQUE FRANCAISE
COUR D'APPEL DE PAPEETE
Chambre des Terres
Audience du 25 août 2022
RG 18/00008 ;
Décision déférée à la Cour : jugement n° 521, rg n°13/00015 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, Chambre des Terres, du 29 novembre 2017 ;
Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 23 janvier 2018 ;
Appelante :
Mme [M] [B], née le 18 juillet 1956 à Tevaitoa, de nationalité française, demeurant à [Adresse 11] ;
Représentée par Me Arcus USANG, avocat au barreau de Papeete ;
Intimés :
M. [P] [S], né le 5 juin 1958 à Afaahiti, de nationalité française, demeurant à [Adresse 10] ;
Mme [Y] [A] épouse [S], née le 27 août 1963 à [Localité 12], de nationalité française, demeurant à [Adresse 10] ;
Ayant pour avocat la Selarl Jurispol, représenté par Me François QUINQUIS, avocat au barreau de Papeete ;
Ordonnance de clôture du 4 février 2022 ;
Composition de la Cour :
La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 24 mars 2022, devant Mme SZKLARZ, conseiller faisant fonction de président, M. SEKKAKI, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l'ordre judiciaire aux fins d'exercer à la cour d'appel de Papeete en qualité d'assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;
Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;
Arrêt contradictoire ;
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Signé par Mme SZKLARZ, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A R R E T,
FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTIONS :
Par requête initiale enregistrée le 5 février 2013, Madame [M] [B] a fait convoquer [P] et [Y] [S] devant le tribunal de première instance de Papeete aux fins de voir :
- Constater le trouble causé par les époux [S] sur la personne de Madame [B] ;
- Déclarer les époux [S] responsables des troubles causés sur la personne de Madame [B] en application du principe général selon lequel « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage » ;
- Vu le titre authentique de propriété de Madame [B] datant du 22 mai 1991 soit plus de 10 ans de possession paisible comme propriétaire du lot 3 de la parcelle [G], cadastrée CA 521- section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], sise à [Localité 8] dans la commune de [Localité 13] ;
- Condamner les époux [S] à justifier de l'existence de leur titre de propriété en lieu et place de leur pâle « procès-verbal de bornage » qui ne constitue pas un acte translatif de propriété (Cour de cassation, 3e chambre civile, 10 novembre 2009),
- Déclarer recevable la demande de désignation d'un expert agréé par application de l'acte de vente du 22 mai 1991 opérant un transfert de propriété sur la personne de Madame [B] et valant titre authentique de propriété ;
- Ordonner la désignation d'un expert agréé avec pour mission de procéder, en application du titre de propriété du 22 mai 1991 : aux opérations permettant de déterminer l'état d'enclave ou non de la parcelle litigieuse, ainsi que sur le fondement de l'article 683 du code civil, de déterminer ou de proposer la possibilité d'un autre passage ; aux évaluations permettant l'octroi d'une indemnité au profit de Madame [B] et sur le fondement de l'article 682 du code civil, dans le cas où la situation d'enclave serait constatée et avérée ;
- Ordonner la transcription du jugement à intervenir aux frais des époux [S] ;
- Condamner les époux [S] à payer à Madame [B] la somme de 550.000 FCP à titre de dommages et intérêts outre la somme de 440.000 FCP au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux dépens.
Madame [M] [B] a soutenu devant le tribunal que [P] et [Y] [S] n'ont pas le droit de la troubler en sa propriété en empruntant le chemin qui la traverse pour se rendre à leur domicile, soulignant qu'ils ne justifient d'aucun droit de propriété sur la parcelle qu'ils occupent et qu'ils rejoignent en traversant sa propriété.
Monsieur [P] [S] s'est dit propriétaire de la terre [L] située à [Adresse 9] pour venir aux droits de [D] a [I] qui est la revendiquante de la propriété de la terre (Tomité n°346). Il a affirmé que la terre est enclavée et que depuis des décennies, l'accès à cette terre et aux autres sise en amont de la propriété de Madame [M] [B], se fait par le chemin sis sur la terre [R].
Les parties s'opposent violemment sur le droit de passage en litige, multipliant les plaintes croisées devant le Procureur, les actions en référé, les entraves au passage. Madame [M] [B] se dit harcelée et insultée par les époux [S] qui contestent son droit de propriété et les époux [S] affirment être privés de leur droit de passage et subir des violences, les enfants des uns et des autres participant également des violences.
Par jugement n°13/00015, n° de minute 521 en date du 29 novembre 2017, auquel il y a lieu de se reporter pour un exposé plus ample de la procédure, des moyens et des prétentions de première instance, le Tribunal civil de première instance de Papeete, chambre des terres ' section 2, a dit :
- Déclare irrecevable l'intervention volontaire de [X] [C],
- Déboute [M] [B] de l'ensemble de ses demandes,
- Constate que [P] [S] bénéficie d'une servitude légale de passage passant sur le lot 3 de la parcelle [G], cadastrée CA 521- section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], sise à [Localité 8] dans la commune de [Localité 13], dont l'assiette correspond au chemin actuel,
- Condamne [M] [B] à verser à [P] [S] la somme de 200.000 francs en application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile,
- Condamne [M] [B] sera condamnée aux entiers dépens.
Par requête enregistrée au greffe de la Cour le 23 janvier 2018, Madame [M] [B], ayant pour avocat Maître Arcus USANG, a interjeté appel de cette décision dont il n'est rien dit de la signification.
Aux termes de ses écritures récapitulatives reçues par voie électronique au greffe de la Cour d'appel le 16 septembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Madame [M] [B] demande à la Cour de :
1/ Infirmer en toutes ses dispositions le jugement n° 13/00015 en date du 29 novembre 2017 rendu par le Tribunal civil de Première Instance de PAPEETE ;
2/ Débouter Monsieur [S] de ses écritures et demandes.
STATUANT A NOUVEAU AU PRINCIPAL :
3/ Constater le trouble causé par les époux [S] sur la personne de Madame [B] ;
4/ Déclarer les époux [S] responsables des troubles causés sur la personne de Madame [B] en application du principe général selon lequel « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage » ;
5/ Vu le titre authentique de propriété de Madame [B] datant du 22 mai 1991 soit plus de 10 ans de possession paisible comme propriétaire du lot 3 de la parcelle [G], cadastrée CA 521-section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], sise à [Localité 8] dans la commune de [Localité 13] ;
- Condamner les époux [S] à justifier de l'existence de leur titre de propriété en lieu et place de leur pâle « procès-verbal de bornage » qui ne constitue pas un acte translatif de propriété (Cour de cassation, 3e chambre civile, 10 novembre 2009),
6/ Déclarer recevable la demande de désignation d'un expert agréé par application de l'acte de vente du 22 mai 1991 opérant un transfert de propriété sur la personne de Madame [B] et valant titre authentique de propriété ;
7/ Ordonner la désignation d'un expert agréé avec pour mission de procéder, en application du titre de propriété du 22 mai 1991 :
- aux opérations permettant de déterminer l'état d'enclave ou non de la parcelle litigieuse, ainsi que sur le fondement de l'article 683 du code civil, de déterminer ou de proposer la possibilité d'un autre passage ;
- aux évaluations permettant l'octroi d'une indemnité au profit de Madame [B] et sur le fondement de l'article 682 du code civil, dans le cas où la situation d'enclave serait constatée et avérée.
8/ Ordonner la transcription du jugement à intervenir aux frais des époux [S] ;
9/ Condamner les époux [S] à payer à Madame [B] la somme de 550.000 FCP à titre de dommages et intérêts ;
10/ Condamner les époux [S] à payer à Madame [M] [B] la somme de 440.000 FCP au titre des frais irrépétibles ;
11/ Condamner les époux [S] aux dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions récapitulatives reçues par voie électronique au greffe de la Cour d'appel le 12 octobre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Monsieur [P] [S] et Madame [Y] [A] épouse [S], ayant pour avocat La SELARL JURISPOL (Maître François QUINQUIS), demandent à la Cour de :
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal Civil de Première Instance de PAPEETE en date du 29 Novembre 2017;
Y ajoutant,
Vu les articles 682 et suivants et 685 et suivants du code civil,
- Dire et Juger que la Terre [L] située à [Localité 8], actuellement cadastrée [Cadastre 6] pour une superficie de 54.441 m2 et IA 2 pour une superficie de 1.082 m2, est enclavée ;
- Dire et Juger que les propriétaires de la Terre [L] située à [Adresse 9], actuellement cadastrée [Cadastre 6] et [Cadastre 7] - parmi lesquels Monsieur [P] [S] - bénéficient d'une servitude légale de passage ;
À titre principal,
- Dire et Juger que la servitude légale de passage desservant la Terre [L] a pour assiette le chemin passant sur le Lot 3 de la Parcelle [R] actuellement cadastrée à [Localité 8] section [Cadastre 5] et [Cadastre 1];
- Ordonner la transcription de la décision à intervenir ;
- Dire et juger irrecevable en raison de la prescription l'action en indemnisation formée par Madame [B] ;
- Condamner Madame [M] [B], et toutes personnes de son chef, au paiement de la somme de 500.000 F CFP en cas d'entrave à la servitude de passage, constatée au besoin par simple témoignage, augmentée de 100.000 F CFP par jours jusqu'à libération complète des lieux ;
À titre subsidiaire,
Si une expertise devait être ordonnée,
- Mettre la consignation à la charge de Madame [M] [B] ;
- Dire et Juger que l'Expert aura pour mission de :
' se rendre sur les lieux,
' constater l'état d'enclave de la Terre occupée par les concluants,
' identifier les Terres occupées par chaque partie,
' dire si Madame [M] [B] occupe ou non la parcelle qu'elle a achetée : dire notamment si elle occupe effectivement le Lot 3 de la Terre [R] qu'elle a acheté, ou la Terre [L],
' et tracer le chemin le plus court et le moins dommageable afin de permettre à l'exposant d'accéder librement à son domicile ;
En toutes hypothèses,
- Rejeter toutes demandes fins et conclusions de Madame [M] [B] ;
- La condamner au paiement de la somme de 300.000 F CFP au titre des frais irrépétibles d'Appel, ainsi qu'aux entiers dépens.
Après échec de deux calendriers de procédure, la clôture de la procédure a été ordonnée par ordonnance en date du 4 février 2022 pour l'affaire être fixée à l'audience de la Cour du 24 mars 2022. En l'état l'affaire a été mise en délibéré au 23 juin 2022, délibéré qui a dû être prorogé.
MOTIFS :
Sur la recevabilité de l'appel :
La recevabilité de l'appel n'est pas discutée et aucun élément de la procédure ne permet à la Cour d'en relever d'office l'irrégularité.
Sur la propriété du lot 3 de la terre [R] sise à [Localité 8], cadastrée section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], et de la terre [L] sise à [Localité 8], cadastrée [Cadastre 6] et [Cadastre 7] :
Aux termes des articles 711 et 712 du code civil, la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, et par l'effet des obligations. La propriété s'acquiert aussi par accession ou incorporation, et par prescription.
Madame [M] [B] produit un acte authentique en date du 22 mai 1991 transcrit à la conservation des hypothèques de [Localité 12] le 4 juin 1991 vol.1725 n°10. Aux termes de cet acte, Madame [M] [B] et son époux [N] [T] [U] ont acquis de [Z] [K] épouse [E] le lot n°3 de la terre [R], aujourd'hui cadastrée section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], sise à [Adresse 9].
Il est précisé à l'acte que le vendeur déclare qu'à sa connaissance l'immeuble présentement vendu n'est grevé d'aucune servitude autre que celles résultant de la loi et de la situation naturelle des lieux.
Madame [M] [B] a ainsi, pour être propriétaire indivis avec son époux des parcelles sur lequel le chemin litigieux a son assiette, qualité et intérêt à agir.
Devant la Cour, comme devant le Tribunal, Monsieur [P] [S] démontre venir aux droits de [D] a [I]. Il est en effet produit les actes d'état civil qui permettent de retenir que :
- [P] [S], né le 5 Juin 1958 à AFAAHITI est fils de [J] [S].
- [J] [S] est fils de [H] [F] [O] épouse [S]
- [H] [F] [O] épouse [S], décédée le 20 janvier 1947 est fille de [D] a [I] et de son époux [F] a [O]. Il est cependant mentionné en marge de l'acte de décès de celle-ci que, sur décision du Procureur de la république en date du 17 mars 1988, elle doit être dite fille de [D] a [V].
Suivant Tomité n°436 du registre public des terres de [Localité 8] de l'année 1856, la terre Terre [L] a été revendiquée par [D] a [I].
Ce Tomité est expressément visé au procès-verbal de bornage n° 264 en date du 17 octobre 1929. [H] a [F] est présente aux opérations de bornage et signe le procès-verbal en qualité de propriétaire. Il est également précisé au procès-verbal que d'après un extrait cadastral en date du 23 juin 1899, cette terre appartient à [W] a [F] et [H] a [F].
Ces éléments viennent confirmer les éléments d'état civil quant aux liens existant entre [H] [F] [O] épouse [S] et [D] a [I].
Ainsi, en l'état des éléments produits devant la Cour, Monsieur [P] [S] justifie venir, par succession, aux droits de la revendiquante de la terre [L], [D] a [I].
La cour retient donc que Monsieur [P] [S], pour être propriétaire indivis de la Terre [L] située à [Localité 8], cadastrée [Cadastre 6] et [Cadastre 7], est recevable en son action reconventionnelle en reconnaissance de l'état d'enclavement de la terre [L] et de la fixation de la servitude légale nécessairement au désenclavement de celle-ci.
Sur l'état d'enclave de la Terre [L] située à [Localité 8], cadastrée [Cadastre 6] et [Cadastre 7] :
Aux termes des articles 682 et 683 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.
Le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique.
Néanmoins, il doit être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé.
Et aux termes de l'article 691 du Code civil, les servitudes continues non apparentes, et les servitudes discontinues apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titres. La possession même immémoriale ne suffit pas pour les établir, sans cependant qu'on puisse attaquer aujourd'hui les servitudes de cette nature déjà acquises par la possession, dans les pays où elles pouvaient s'acquérir de cette manière.
Ainsi, le propriétaire d'un fonds bénéficiant d'une servitude conventionnelle de passage ne peut prétendre avoir prescrit par une possession trentenaire une assiette différente de celle originairement convenue.
Il en résulte que le droit de passage, qui est nécessairement une servitude discontinue, ne peut faire l'objet d'aucune prescription acquisitive et ne peut s'établir que par titre, ou pour cause d'enclave.
Si l'état d'enclave du fonds est démontré, il est cependant possible de se prévaloir d'une prescription de 30 ans mais uniquement pour fixer l'assiette du passage.
En l'espèce, il résulte des éléments soumis à la Cour que les parcelles cadastrées [Cadastre 6] et [Cadastre 7] sont situées en fond de vallée, bordée par une rivière. Les parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 1] sont situées en dessous des parcelles [Cadastre 6] et [Cadastre 7] et sont également bordées par la rivière. Les parcelles [Cadastre 6] et [Cadastre 1] comme [Cadastre 5] et [Cadastre 1] ne disposent pas d'un accès direct à la route de ceinture qui est très éloignée.
Il doit donc être retenu que les parcelles cadastrées [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises à [Localité 8], n'ont aucune issue directe sur la voie publique et sont enclavées et ce, sans qu'il y ait lieu de mettre en 'uvre une expertise sur ce point, la configuration des lieux montrant avec évidence l'état d'enclave.
La Cour doit rechercher le chemin d'accès dont le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique et fixer le tracé du chemin dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé.
Il est constant que depuis de très nombreuses années, et dès l'achat par Madame [M] [B] de sa propriété, les parcelles sises entre la route de ceinture et les parcelles des parties, ainsi que les parcelles sises au-dessus des parcelles des parties, sont desservies par un chemin qui longe la rivière. Ce chemin est le seul accès vers la route de ceinture pour l'ensemble des terres de la vallée. Il traverse de nombreuses propriétés privées avant de desservir la propriété de Madame [M] [B] et il traverse en continuité la propriété de Madame [M] [B] avant de desservir la propriété de Monsieur [P] [S].
En l'absence de ce chemin, sur lequel les propriétaires en aval tolèrent le passage tant de Monsieur [P] [S] que de Madame [M] [B] et de l'ensemble des propriétaires de la vallée, personne ne pourrait rejoindre la route de ceinture.
Respectant la configuration naturelle des lieux, ce chemin a été fixé dans l'endroit le moins dommageable des fonds servant puisqu'il a été positionné le long de la rivière.
L'existence de ce chemin déjà tracé et dont il est fait usage depuis de très nombreuses années, et dont l'implantation est la moins dommageable pour le fonds servant, fait qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise pour fixer le tracé du passage nécessaire au désenclavement.
En conséquence, la Cour fixe le tracé de la servitude légale indispensable au désenclavement des parcelles cadastrées section [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises à [Localité 8] sur le fonds servant, les parcelles cadastrées section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], le long de la rivière, tel qu'il existe depuis des années, et dans le prolongement du chemin qui traverse les parcelles [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et autres jusqu'à la route de ceinture.
Madame [M] [B] ne chiffre pas devant la Cour sa demande d'indemnité proportionnée au dommage que ce droit de passage pourrait occasionner à son fond, elle est donc irrecevable en cette demande.
Afin de permettre la libre circulation sur la servitude de passage légale, il y a lieu d'enjoindre à Madame [M] [B], et toutes personnes de son chef, de laisser le libre passage sur le chemin longeant la rivière, en bordure de sa propriété, les parcelles cadastrées section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], sises à [Localité 8], et ce sous astreinte fixée à la somme de 250.000 F CFP en cas d'entrave à la servitude de passage, constatée par huissier, policier national ou municipal, ou gendarme, augmentée de 50.000 F CFP par jour jusqu'à libération complète des lieux, durant un délai de trois mois.
Sur les troubles anormaux du voisinage reprochée par Madame [M] [B] aux époux [S] :
Il est constant que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal du voisinage ou encore excédant les inconvénients normaux du voisinage. Il existe ainsi un droit à une qualité et une tranquillité de vie.
Le trouble anormal du voisinage est de l'appréciation souveraine des juges du fond qui se doivent de rechercher le caractère continu et permanent du trouble, sa réalité ainsi que sa gravité et pour cela prendre en compte les données de temps et de lieux de l'espèce.
En l'espèce, outre que les parties ne procèdent que par affirmations, qu'elles soient devant le premier juge, la Cour ou les services de police, Madame [M] [B] et les époux [S] se reprochent mutuellement insultes et menaces. Il ressort de l'ensemble des éléments du dossier que les tensions entre ceux-ci trouvent leur origine dans le présent litige quant à l'existence d'un droit de passage sur la propriété de Madame [M] [B] mais aussi quant à la propriété de Madame [M] [B] du lot 3 de la terre [R], propriété que lui contestent les époux [S].
En l'état, comme le premier juge l'a retenu, la preuve des faits dénoncés n'est pas rapportée et il ne peut être entré en voie de condamnation.
En conséquence, de l'ensemble de ces éléments, la Cour confirme le jugement du Tribunal civil de première instance de Papeete, chambre des terres ' section 2, n°13/00015, n° de minute 521 en date du 29 novembre 2017 en toutes ses dispositions.
Sur les autres chefs de demande :
Il y a lieu d'ordonner la transcription du présent arrêt à la conservation des hypothèques à la charge de Monsieur [P] [S], propriétaire indivis bénéficiant de la servitude.
Compte tenu des éléments du litige, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chacun des parties les frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
Madame [M] [B] qui succombe pour le tout doit être condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
DÉCLARE l'appel recevable ;
CONFIRME le jugement du Tribunal civil de première instance de Papeete, chambre des terres ' section 2, n°13/00015, n° de minute 521 en date du 29 novembre 2017 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
DIT que les parcelles cadastrées [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises à [Localité 8], n'ont aucune issue directe sur la voie publique et sont enclavées et ce, sans qu'il y ait lieu de mettre en 'uvre une expertise sur ce point, la configuration des lieux montrant avec évidence l'état d'enclave ;
FIXE le tracé de la servitude légale indispensable au désenclavement des parcelles cadastrées section [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises à [Localité 8] sur le fonds servant, les parcelles cadastrées section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], le long de la rivière, tel qu'il existe depuis des années, et dans le prolongement du chemin qui traverse les parcelles [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et autres jusqu'à la route de ceinture ;
DIT que les propriétaires de la Terre [L] située à [Adresse 9], actuellement cadastrée [Cadastre 6] et [Cadastre 7], parmi lesquels Monsieur [P] [S], bénéficient de cette servitude légale de passage ;
ENJOINS à Madame [M] [B], et toutes personnes de son chef, de laisser le libre passage sur le chemin longeant la rivière, en bordure de sa propriété, les parcelles cadastrées section [Cadastre 5] et [Cadastre 1], sises à [Localité 8], et ce sous astreinte ;
FIXE à la somme de 250.000 F CFP en cas d'entrave à la servitude de passage, constatée par huissier, policier national ou municipal, ou gendarme, augmentée de 50.000 F CFP par jour jusqu'à libération complète des lieux, durant un délai de trois mois ;
DIT Madame [M] [B] irrecevable en sa demande d'indemnité proportionnée au dommage que ce droit de passage pourrait occasionner à son fond, pour ne pas l'avoir chiffrée ;
ORDONNE la transcription du présent arrêt au Bureau de la conservation des hypothèques de [Localité 12], à la charge de Monsieur [P] [S], propriétaire indivis bénéficiant de la servitude légale ;
REJETTE tout autre chef de demande des parties, plus ample ou contraire au présent arrêt ;
CONDAMNE Madame [M] [B] aux dépens d'appel.
Prononcé à Papeete, le 25 août 2022.
Le Greffier, Le Président,
signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : K. SZKLARZ