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23/06/2022 | FRANCE | N°17/00191

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet b, 23 juin 2022, 17/00191


N° 217





MF B

--------------



Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Armour-Lazzari,

le 24.06.2022.





Copies authentiques

délivrées à :

- Me Guédikian,

- Me Eftimie-Spitz,

le 24.06.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 23 juin 2022



RG 17/00191 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 44, rg n° 12/00558 du Tribunal Civil de Première instanc

e de Papeete du 25 janvier 2017 ;



Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 10 juillet 2017 ;



Appelante :



La Sci [M], n° Tahiti 621052 dont le siège social est sis Lot n°83 Lotisseme...

N° 217

MF B

--------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Armour-Lazzari,

le 24.06.2022.

Copies authentiques

délivrées à :

- Me Guédikian,

- Me Eftimie-Spitz,

le 24.06.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 23 juin 2022

RG 17/00191 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 44, rg n° 12/00558 du Tribunal Civil de Première instance de Papeete du 25 janvier 2017 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 10 juillet 2017 ;

Appelante :

La Sci [M], n° Tahiti 621052 dont le siège social est sis Lot n°83 Lotissement Miri à Punaauia, BP 230 - 98713 Papeete, prise en la personne de gérant : M. [K] [M] ;

Représentée par Me Gilles GUEDIKIAN, avocat au barreau de Papeete ;

Intimés :

La Sarl BM Constructions Générales, Rc n° 8672 B, n° Tahiti 613935, B.P. 892 - 98713 Papeete, représentée par son gérant : M. [E] [T] ;

Représentée par Me Kari lee ARMOUR-LAZZARI, avocat au barreau de Papeete ;

M. [F] [C] [P] [W], en sa qualité d'ancien architecte de la Sci Dvon, demeurant à Arue PK 4,780 côté montagne, lot Erima Impasse Motoi, BP 14056 - 98701 Arue ;

Représenté par Me Marie EFTIMIE-SPITZ, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 11 mars 2022 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 12 mai 2022, devant Mme BRENGARD, président de chambre, M. RIPOLL, conseiller, Mme TISSOT, vice-présidente placée auprès du premier président, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme BRENGARD, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

Suivant marché privé de travaux signé le 19 juillet 2006, la SCI [M] a commandé à la SARL BM Constructions Générales, entreprise de bâtiment, la réalisation d'une maison d'habitation sur le lot 83 du lotissement Miri à Punaauia (île de Tahiti). Le contrat stipule que les travaux seraient payés par application d'un prix global et forfaitaire hors TVA pour l'ensemble de la construction.

Les lots de charpente couverture en tuiles, les faux plafonds ' enduit emplâtre ont fait l'objet d'un marché complémentaire suivant deux devis signés le 12 mars 2006 et acceptés par le maître de l'ouvrage. Des travaux supplémentaires d'édification d'un mur de soutènement ont également été exécutés par la SARL BM Constructions Générales.

Le 9 juillet 2012, la SARL BM Constructions Générales (ci-après SARL BM) a adressé une sommation à la SCI [M] d'avoir à lui payer la somme de 12'269'955 Xpf soit 5 021'505 Xpf au titre du solde du marché complémentaire de travaux susvisé pour et 7'248'450 Xpf pour le coût du mur de soutènement .

***

Suivant requête déposée le 30 juillet 2012 sur le fondement de l'article 1134 du Code civil et assignation du 26 juillet 2012, la SARL BM, déclarant être représentée par son gérant en exercice M. [E] [T], a saisi le tribunal d'une demande de condamnation de la SCI [M] représentée par son gérant, M. [K] [M], en paiement de la somme susvisée, outre intérêts légaux courant à compter de la sommation délivrée le 9 juillet 2012 et une indemnité de procédure.

La SCI [M] a invoqué la nullité de la requête et de l'assignation pour non-respect des dispositions de l'article 18 du code de procédure civile de la Polynésie française faute d'annexion à la requête d'un extrait K bis.

Après production de l'extrait commercial du 23 décembre 2011, la SCI a maintenu son exception de nullité et a également soulevé une fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande, en arguant du défaut de qualité pour agir de M. [E] [T] qui n'était plus le gérant de la SARL BM depuis le 19 novembre 2010, date de la décision d'une assemblée générale extraordinaire ayant nommé à sa place M. [O] [T]. Au fond, elle a notamment fait valoir que la SARL BM était redevable de pénalités de retard.

Suivant ordonnance rendue le 15 octobre 2014 (n°12/00558), le juge de la mise en état a débouté la SCI [M] de l'incident de procédure dont elle l'avait saisi en soulevant la même exception de nullité de la requête et de l'assignation ainsi que la même fin de non-recevoir antérieurement présentées au tribunal.

***

Suivant jugement n° 44 rendu contradictoirement le 25 janvier 2017 (RG 12/00 558), le tribunal civil de première instance de Papeete ayant fait les comptes entre les parties, a condamné la SCI [M] à verser à la SARL BM, une somme de 2 045'979 Xpf outre celle de 150'000 Xpf au titre des frais irrépétibles et à supporter les entiers dépens, rejetant le surplus des demandes.

***

Suivant requête déposée le 10 juillet 2017, la SCI [M] a relevé appel de la décision dont elle sollicite l'infirmation totale.

Suivant ordonnance rendue le 24 juillet 2020, le conseiller de la mise en état a enjoint à la SCI [M] de,

- de solliciter auprès de la banque de Polynésie une copie du chèque n° 05 14 553 d'un montant de 6'500'000 Xpf tiré le 6 mars 2007 sur son compte bancaire et d'en produire une copie aux débats,

-d'appeler en intervention forcée M. [F] [W] architecte.

L'objet de l'incident soumis au conseiller de la mise en état était de déterminer l'identité du bénéficiaire du chèque n°0514533 établi par la SCI [M] en paiement d'une facture de la SARL BM du 13 février 2007 car la SARL BM soutenait que ce chèque avait été encaissé par l'architecte M.[W] qui ne lui aurait jamais rétrocédé la somme de 6 500 000 Xpf .

***

Suivant conclusions déposées le 6 octobre 2020, la SARL BM a appelé en intervention forcée M.[F] [W] en qualité d'ancien architecte de la SCI [M] pour entendre la cour,

' constater que le chèque n° 05 14 553 tiré sur la banque de Polynésie par la SCI [M] et remis le 6 mars 2007 à son architecte en règlement partiel de la facture du 13 février 2007 n'a toujours pas été versé aux débats par la SCI [M] malgré l'injonction qui lui en a été faite par ordonnance du conseiller de la mise en état,

' donner acte à la SARL BM de son appel en intervention forcée de M. [W],

' enjoindre à la SCI [M] d'avoir à produire aux débats, à défaut sous astreinte de 10'000 Xpf par jour de retard, le chèque litigieux,

' enjoindre à M. [W] d'expliquer ce qui a été fait avec ce chèque qui lui a été remis le 6 mars 2007 et à qui a bénéficié ladite somme,

' enjoindre à M. [W] d'expliquer ces annotations apposées sur la facture émise le 13 février 2007 par la SARL BM d'un montant de 7'158'470 Xpf,

' réserver le droit pour la SARL BM de conclure à nouveau sur le fond de l'affaire après production aux débats de ce chèque.

En ses conclusions récapitulatives responsives du 28 décembre 2021, la SCI [M] appelante demande à la cour, statuant à nouveau après infirmation du jugement entrepris,

in limine litis,

' constater et prononcer la nullité de la requête de la SARL BM en date du 12 juillet 2012 et de l'assignation délivrée le 26 juillet 2012 pour absence de qualité pour agir de M. [E] [T] mentionnée à tort comme étant gérant et représentant légal de la société,

' débouter la SARL BM de l'intégralité de ses prétentions étant irrecevables compte tenu de 'la fin de non-recevoir précitée' (sic) et de la prescription soulevée,

subsidiairement, au fond, vu l'article 1793 du Code civil, débouter la SARL BM de ses demandes,

' subsidiairement sur ce point, dire que M. [F] [W] devra relever et garantir la SCI [M] de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre au titre du chèque n° 05 14 553 d'un montant de 6'500'000 Xpf ,

' à titre reconventionnel, condamner la SARL BM à payer à la SCI [M] une somme de 6'236'747 Xpf ans remboursement d'un trop-perçu sur travaux effectués et au titre des pénalités de retard,

' à titre infiniment subsidiaire, confirmer le jugement entrepris,

' en toute hypothèse, condamner la SARL BM à verser à la SCI [M], la somme de 600'000 Xpf au titre des frais irrépétibles et à supporter les entiers dépens.

En ses conclusions récapitulatives en réplique du 4 octobre 2021, la SARL BM constructions générales entend voir la cour infirmant partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a limité le montant des condamnations mises à la charge de la SCI [M], à la somme de 2'045'979 Xpf et rejeté le surplus de sa demande en paiement,

Statuant à nouveau,

' débouter la SCI [M] et M. [W] de leurs demandes respectives,

' enjoindre à M. [W] d'avoir à expliquer sa situation et ses agissements en particulier la raison pour laquelle sa concubine Mme [X] [V], étrangère parfaite à la SARL BM, a encaissé le chèque litigieux ' par M. [K] [M] sur la banque de Polynésie le 6 mars 2007 et destiné à payer partiellement sa facture du 13 février 2007 d'un montant de 7'158'470 Xpf ,

' lui enjoindre d'avoir à s'expliquer sur les multiples annotations manuscrites, ratures et rectifications qui figurent sur les factures émises par la SARL BM à l'ordre de la SCI [M],

' condamner la SCI [M] à lui verser,

* la somme de 7'248'450 Xpf au titre de la construction du mur de soutènement, somme assortie des intérêts au taux légal à compter de la sommation de payer du 9 juillet 2012,

* la somme de 3'245'619 Xpf représentant le montant des travaux complémentaires réalisés sur la villa, majorée des intérêts légaux,

* la somme de 400'000 Xpf en remboursement des frais irrépétibles d'appel,

* la somme de 150'000 Xpf pour les frais irrépétibles de première instance,

outre les entiers dépens.

Par conclusions du 5 juillet 2021, M. [F] [W] conclut en sollicitant que la cour,

- lui donne acte de ce qu'il a donné toutes les explications utiles,

- constate qu'à ce stade de la procédure, toutes les demandes formées à son encontre sont irrecevables, ou subsidiairement, prescrites,

-condamne la SARL BM à lui verser une somme de 150 000 Xpf sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française en plus des entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions et moyens dont la Cour est saisie, il est renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties. Pour l'exposé des moyens des parties, tel que requis par les dispositions de l'article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française, il sera renvoyé à la motivation ci-après à l'effet d'y répondre.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 mars 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

La SCI [M] et la SARL BM ont conclu au fond après l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 24 juillet 2020, de sorte qu'étant saisie au fond, la cour n'aura pas à répondre aux demandes d'injonction de la SARL BM qui, du reste, ne constituent pas des prétentionsau sens de l'article 21 du code de procédure civile de Polynésie française .

- Sur la demande de nullité de la requête et assignation introductive d'instance présentée par la SCI [M] à l'égard de la SARL BM représentée par M. [E] [T] -

La SCI [M] rappelle qu'en première instance, elle a soulevé la nullité de la requête introductive d'instance et de l'assignation car l'extrait Kbis de la SARL BM n'avait pas été produit comme l'impose l'article 18 du code de procédure civile ; mais elle n'en tire aucune conséquence dans les prétentions qu'elle soumet à la cour, étant observé qu'en tout état de cause, la SARL BM a versé au dossier un extrait K bis daté du 23 décembre 2011 avec ses conclusions reçues le 30 avril 2013.

La SCI [M] invoque cependant devant la cour comme elle l'a aussi soutenu en première instance, le défaut de qualité pour agir de M.[E] [T] pour représenter la SARL BM alors qu'il n'est plus habilité à agir pour le compte de cette personne morale depuis le 19 novembre 2010, date de l'assemblée générale extraordinaire au cours de laquelle il a cédé toutes ses parts sociales à son fils, [O] [T] en démissionnant de ses fonctions de gérant. Pour l'appelante, tant que la requête d'appel et l'assignation mentionnent que la SCI [M] est représentée par M.[E] [T], les actes introductifs d'instance sont entachées de nullité. Elle se réfère à l'article 45 du code de procédure civile de Polynésie française qui définit les fins de non-recevoir dont en particulier, le défaut de qualité, mais indique parallèlement qu'une irrégularité de fond affecte la validité de l'assignation, ce qui fait référence à une exception de procédure, moyen de défense distinct d'une fin de non-recevoir.

Le tribunal a rejeté le moyen qui lui était présenté comme une fin de non-recevoir au motif que la situation a été régularisée par la SCI [M] dans les conclusions du 30 avril 2013 par lesquelles elle s'est faite représenter par son nouveau gérant [O] [T] nommé par assemblée générale extraordinaire du 19 novembre 2010, de sorte que la situation ayant donné lieu à la fin de non-recevoir était régularisée au jour où le juge statuait.

La cour observe,

- que le tribunal a statué alors que le juge de la mise en état avait déjà tranché l'incident dans son ordonnance du 15 octobre 2014 qui n'a pas été frappée d'appel en même temps que le jugement au fond, et qui, même si elle n'a pas autorité de chose jugée au principal, selon l'article 61 du code de procédure civile, est une décision de justice qui s'impose aux parties dès lors qu'il n'est pas allégué qu'elle se heurte à une décision de fond,

-que le moyen invoqué n'est pas une fin de non-recevoir mais une exception de nullité relevant de l'article 43 du code de procédure civile de Polynésie française puisque le grief concerne l'irrégularité de la représentation de la personne morale ayant assigné par l'intermédiaire d'une personne physique qui n'est plus investi d'aucun pouvoir de la représenter en justice, et non le défaut de qualité pour agir de son gérant,

- qu'en tout état de cause, l'article 44 dispose que la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune déchéance, ni aucine forclusion n'est intervenue et si la régularisation de l'acte ne laisse subsister aucun grief : or, la régularisation est faite dans les conclusions déposées le 30 avril 2013 par le nouveau gérant M.[O] [T] déclarant représenter la SARL BM de sorte que le vice allégué avait disparu à la date de l'ordonnance de clôture ( 19 septembre 2016), étant au surplus relevé que la SCI [M] n'a jamais caractérisé le grief qu'elle a subi avant ou après la régularisation.

Le jugement n'indiquant pas dans son dispositif, de rejet de cette exception, la cour y suppléera en rejetant l'exception soulevée de ce chef par la SCI [M] .

- Sur la prescription opposée à l'action de la SARL BM -

La SCI [M] invoque la prescription à titre subsidiaire, sur le fond.

Or, la prescription constitue au sens de l'article 45 du code de procédure civile de Polynésie française une fin de non-recevoir qui doit donc être présentée selon les conditions de ce texte légal qui figure à la section 3 - 'des fins de non-recevoir'au titre IV (- du déroulement de l'instance ) du chapitre I- 'des moyens de défense' mais qui est distinct de la section 1 '- des défenses au fond.'

Cependant, la SARL BM ne dit rien de ce problème de procédure.

La SCI [M] demande à cet égard de constater que la demande en paiement de son adversaire concernant une facture du 13 février 2007 est largement atteinte par la prescription ou la forclusion.

Comme elle l'a fait devant le tribunal, elle se prévaut de l'application des textes suivants :

' l'article L 137-2 du code de la consommation qui dispose que l'action des marchands pour les marchandises qu'ils vendent aux particuliers non marchands, se prescrit par deux ans.

Mais le tribunal a rappelé que la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 qui a créé ledit article, ne l'a pas rendu applicable en Polynésie française, où le délai reste fixé à 10 ans pour ces actions.

' l'article L 110-4 3° du code de commerce qui prévoit un délai d'un an après réception des ouvrages, pour les actions en paiement... A cet égard, la SCI [M] fait valoir que les travaux en cause sont achevés depuis le 26 novembre 2008.

Cependant, c'est à juste titre que le tribunal a écarté ces dispositions, puisque la réception des ouvrages n'a pas fait l'objet d'un procès-verbal dressé entre les parties et qu'ainsi les conditions d'application de ce texte légal ne sont pas réunies.

la SCI [M] ne répond pas précisément aux motifs du jugement relatifs à l'application des articles L137-2 et L110-4 et se borne à reprendre devant la cour, la même argumentation qui a été rejetée par le tribunal au terme d'une argumentation juridique circonstanciée.

Dès lors, l'action de la SARL BM n'est atteinte par aucune des prescriptions alléguées.

-Sur les comptes entres les parties -

Le tribunal a jugé que,

- la SCI [M] restait devoir à la SARL BM , la somme de 3'245'979 Xpf sur le coût total de 19 794 739 Xpf du marché complémentaire de charpente-couverture et faux plafonds et enduit plâtre,

-- la SCI [M] avait réglé le prix total des travaux supplémentaires de construction du mur de soutènement, par un chèque de 6 500 000 Xpf, montant convenu par les parties sur la facture du 13 février 2007 d'un montant initial de 7 158 470 Xpf,

- la SARL BM est redevable de pénalités de retard de 1 200 000 Xpf de juillet à octobre 2008,

- après compensation, la SCI [M] demeure débitrice de 2 045 979 Xpf au bénéfice de la SARL BM.

A l'appui de sa demande d'infirmation du jugement, la SCI [M] soutient que,

- l'article 1793 du Code civil interdisait à la SARL BM de facturer des travaux supplémentaires,

- dans le cadre d'un marché privé de travaux signé le 24 juillet 2006, la SARL BM s'est engagée à réaliser une résidence en 6 mois pour un prix stipulé 'global et forfaitaire' hors TVA de 40 448 756 Xpf soit 44 493 632 Xpf TTC,

- Selon deux devis acceptés le 12 mars 2006, les parties ont passé un complément de marché pour le lot charpente-couverture d'un montant de 11 609 043 Xpf et le lot faux plafonds-enduit plâtre pour un montant de 5 153 500 Xpf,

- dans le cadre du marché à forfait, le montant des sommes dues ne peut donc excéder l'addition des deux contrats soit 61 256 175 Xpf,

- les parties ont souhaité se soumettre au contrat et à la norme Afnor P03-001 si bien que la SARL BM ne pouvait sortir de ce cadre contractuel pour présenter une réclamation 5 ans après la fin des travaux,

- son prétendu décompte définitif établi à hauteur de 19 794 739 Xpf est une simple tentative de se faire payer des prestations indues pour un montant de 3 031 796 Xpf au-delà du prix convenu du marché complémentaire.

La SCI [M] reproche au tribunal d'avoir retenu que le montant total de sa dette sur la base des deux devis acceptés, s'élevait à 18 019 213 Xpf alors que la somme de de 1 256 310 Xpf correspond à des travaux de peinture qui auraient dû être inclus dans le marché complémentaire du faux plafond.

Pour sa part, la SARL BM demande,

D'une part, que la SCI [M] soit condamnée à lui payer ,

- la somme de 7 158 470 Xpf au titre des travaux du mur de soutènement, en expliquant n'avoir pas reçu le règlement de 6 500 000 Xpf que la SCI a remis sous la forme du chèque n° à l'architecte M.[W] au titre de ces travaux.

- la somme de 3 245 619 Xpf au titre du solde du prix des travaux complémentaires acceptés sur la base des devis du 12 mars 2006. Sur ce point, elle s'en remet à la motivation du jugement sauf sur l'erreur matérielle de calcul faite par le tribunal qui a fixé le solde à 3 245 979 Xpf .

D'autre part, qu'aucune pénalité de retard ne lui soit imputée .

Les travaux complémentaires :

L'article 1793 dispose que lorsqu'un architecte ou un entrepreneur s'est chargé de la construction à forfait d'un bâtiment, d'après un plan arrêté et convenu avec le propriétaire du sol, il ne peut demander aucune augmentation de prix, ni sous prétexte de l'augmentation de la main d'oeuvre ou des matériaux, ni sous celui de changements ou d'augmentations faits sur ce plan, si ces modifications n'ont pas été autorisées par écrit, et le prix convenu avec le propriétaire.

D'après les pièces produites aux débats,

- le décompte définitif des travaux complémentaires établi au 25 janvier 2012 par la SARL BM s'élève à 19 794 739 Xpf,

- les deux devis acceptés à un prix global et forfaitaire s'élevaient à 11 609 043 Xpf pour le premier devis, et de 5 153 500 Xpf pour le second soit 16 762 543 Xpf,

- le dépassement est donc de 3 032 196 Xpf.

Pour la SCI [M] , ce dépassement est indû. Pour la SARL BM il a été accepté par le maître d'ouvrage et s'élève en fait à 3 245 619 Xpf.

Cependant, comme le conclut à juste titre la SCI [M], le marché à forfait obéit à des règles légales strictes résultant de l'article 1793 précité . Et en l'espèce, compte tenu des ratures affectant les devis des travaux complémentaires, il ne peut être retenu avec certitude la légalité du dépassement du coût du marché initial qui ne devait pas excéder la somme totale de 61 256175 Xpf sauf autorisation expresse et écrite du client propriétaire des lieux.

En outre, la SARL BM n'a établi de décompte final que le 25 janvier 2012 soit plusieurs années après la fin du chantier. Or, ce décompte qui est prévu dans le contrat initial aurait dû être adressé au client dans un délai de 45 jours après la date de notification de réception des travaux.

En tout état de cause, il appartient à l'entreprise qui réclame le paiement d'un solde de travaux de justifier de la date à laquelle le client a déclaré recevoir l'ouvrage qui est le point de départ de sa demande en paiement du solde des travaux. En l'espèce, la SARM BM ne fournit pas ces informations.

Les travaux complémentaires ont donc été chiffrés à un coût final de 19 794 739 Xpf soit un dépassement de 3 031 796 Xpf par rapport aux prévisions des deux devis acceptés du 12 mars 2006 concernent le lot 'charpente- couverture' et le lot ' faux plafonds & enduit plâtre'.

Or, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la facture de 1 256 310 Xpf se rapportait à des travaux de peinture antirouille charpente qui auraient dûs être inclus dans le marché complémentaire du faux plafond et le seul fait que le client ait réglé la facture ne suffit pas à établir qu'il a clairement identifié la cause du règlement qu'il effectuait dans le cadre d'un marché à forfait. IL en va de même pour le surplus de la somme réclamée , la SARL BM ne justifie pas plus d'avoir obtenu un accord non équivoque et écrit de la SCI [M] pour payer un excédent au marché de travaux complémentaire. Et du reste, la SARL BM ne verse pas aux débats d'éléments permettant d'expliquer la cause de cette facturation non comprise dans l'accord initial.

En définitive, après infirmation partielle du jugement sur ce point, la SARL BM sera déboutée de sa demande en paiement au titre du marché de travaux complémentaires.

Les travaux supplémentaires d'édification du mur de soutènement.

La SARL BM a élevé un mur de soutènement pour un montant initialement facturé à 7 248 450 Xpf . Il s'agit de travaux qui ont fait l'objet d'un accord contractuel distinct du marché à forfait initial .En outre, comme l'a jugé le tribunal par des motifs pertinents et sérieuxqui ne sont pas remis en cause par l'analyse juridique proposée par la SCI [M], l'article 1793 du Code civil ne s'applique pas à l'édification du mur de soutènement qui ne constitue pas un bâtiment.

La SCI [M] indique que d'un accord commun le coût de ces travaux a été ramené à 6 500 000 Xpf alors que la SARL BM poursuit le recouvrement de la somme de 7 248 450 Xpf.

Le tribunal a retenu que la SCI [M] s'était libérée de son obligation de paiement du montant de ces travaux supplémentaires qu'elle a acceptés par l'établissement du chèque n° 0514553 d'un montant de 6 500 000 Xpf remis à l'architecte M. [W] le 6 mars 2007.

Le fait est que la SCI [M] a établi le chèque n° 0514553 pour acquitter la facture du 13 février 2007 concernant des travaux d'aménagement extérieur/ travaux pour mur de soutènement. Les annotations sur la facture montrent que le montant initial a été ramené d'un commun accord à 6 500 000 Xpf et du reste, la SARL BM n'a jamais réclamé la différence avant d'engager le présent procès.

Cependant, ce chèque a fait l'objet d'un incident de communication de pièce qui a permis d'établir que si la SCI [M] avait bien remis ce chèque à l'architecte M. [W] au titre du paiement de la facture du 13 février 2007, mais ce chèque a été endossé et encaissé par Mme [V] qui serait la compagne de M. [W].

La SARL BM conteste avoir perçu la somme de 6 500 000 Xpf et demande à la cour d'infirmer le jugement ayant retenu que le paiement avait été fait par la SCI [M] et de la condamner au paiement du montant initialement convenu soit 7 248 450 Xpf. Il a déjà été dit que la somme de 6 500 000 Xpf résultait d'un accord des parties sur le prix du mur de soutènement.

Il est certain que la SCI [M] doit faire son affaire personnelle de son différend avec M. [W] et/ou Mme [V] car, au regard des éléments mis en lumière par l'ordonnance du conseiller de la mise en état, l'appelante ne peut plus sérieusement soutenir qu'elle s'est libérée de son obligation de paiement à l'égard de la SARL BM qui n'a aucune responsabilité dans l'erreur d'aiguillage (ou le détournement) du chèque qui lui était destiné.

Dans ses conclusions du 5 juillet 2021, M. [W] admet avoir perçu le montant du chèque et prétend avoir payé la SARL BM en espèces, ce que celle-ci dément. M. [W] n'est pas en mesure de produire le moindre élément concret pour confirmer ce paiement . Certes, il verse aux débats, les attestations d'entrepreneurs qui travaillent avec lui et qui indiquent qu'il les rémunère fréquemment en espèces, mais certains sont des concurrents de la SARL BM et pour certains assez virulents à son égard ( cf attestation de M. [J] [L] pièce 8) - et surtout, aucun ne rapporte avoir assisté en personne à la remise de la somme de 6 500 000 Xpf à la SARL BM.

En conséquence, la SCI [M] doit être condamnée au paiement de ladite somme au titre des travaux du mur de soutènement.

-Sur l'appel en garantie subsidiaire à l'égard de l'architecte M. [W] -

Cependant, la cour constate que le premier juge fait en premier lieu, référence à l'article 1147 du Code civil qui concerne la responsabilité contractuelle de droit commun, avant de se reporter à des pénalités de retard qui seraient contractuellements fixées, sans toutefois préciser à quelle clause de quel contrat il se réfère.

Dans ses conclusions, la SCI [M] renvoie aux extraits du marché privé de travaux liant les parties.

Il peut donc être immédiatement relevé que s'il y a des pénalités de retard, elles ne peuvent concerner que le marché initial et non les travaux supplémentaires du mur de soutènement.

Il doit être également observé qu'il n'est produit aux débats, aucune mise en demeure ni même aucun courrier de relance adressé par la SCI [M] à l'entreprise SARL BM ni dans le cadre de l'exécution des clauses du contrat (page 12) concernant le délai d'exécution des travaux, ni dans le cadre des obligations légales du cocontractant. Il est vrai que la clause II.4.3 stipule que la pénalité s'appliquera d'office sans mise en demeure préalable, mais encore faut-il que le délai d'exécution du chantier soit strictement déterminé dans les conditions de l'article II.4.1, ce qui ne ressort pas des pièces communiquées à la cour. A cet égard, il apparaît que sur la copie du marché de travaux produit par la SCI [M], une rature affecte la lisibilité du nombre de mois fixé par les parties pour le délai d'exécution des travaux à la clause I.1.3. DELAIS, cette rature n'étant pas validée par le paraphe des parties signataires .En tout état de cause, il est fait référence à 'un délai global', formule insuffisamment précise pour faire courir des pénalités de retard sans mise en demeure de livrer les travaux.

Enfin, en l'absence d'éléments produits à cet égard, il apparait que le fait que des travaux supplémentaires aient été confiés à l'entrepreneur ne permet pas d'établir dans des conditions claires, le retard dans l'exécution du contrat initial.

En conséquence, la cour infirmera le jugement ayant fait courir des pénalités de retard à l'encontre de la SARL BM qui n'a jamais été sommée de livrer le chantier à une échéance claire, et de remplir des obligations contractuelles ou légales à ce titre.

En définitive, la SCI [M] doit donc être condamnée au paiement de la somme de 6 500 000 Xpf représentant le coût de construction du mur de soutènement, outre intérêts légaux courant à compter de la signification du présent arrêt.

-Sur les frais de procédure -

Les parties succombant sur certaines de leurs demandes respectives, statuant par infirmation du jugement sur ce point, la cour fera masse des dépens et les condamnera chacune à supporter la moitié de ces dépens.

Quant à M. [W] qui demande la condamnation de la SARL BM aux dépens, il sera débouté de cette prétention et conservera la charge de ses propres dépens.

Les demandes au titre des frais irrépétibles seront rejetées.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Vu l'appel principal de la SCI [M] et l'appel incident de la SARL BM Constructions Générales ;

Infirme le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

Déclare recevables la requête introductive d'instance du 12 juillet 2012 et l'assignation du 26 juillet 2012 délivrées par la SARL BM Constructions Générales ;

Rejette le moyen de prescription de l'action de la SARL BM Constructions Générales ;

Condamne la SCI [M] à payer à la SARL BM Constructions Générales la somme de 6.500.000 Xpf représentant le coût convenu de construction du mur de soutènement ;

Dit que cette somme est assortie des intérêts légaux courant à compter de la signification du présent arrêt ;

Déboute la SCI [M] de l'ensemble de ses autres demandes y compris celle tenant aux pénalités de retard, et la SARL BM Constructions Générales du surplus de sa demande en paiement ;

Déclare irrecevable, la demande de garantie formée par la SCI [M] à l'égard de M. [F] [W] ;

Vu l'article 406 du code de procédure civile ;

Fait masse des dépens de première instance et d'appel et condamne la SCI [M], d'une part, et la SARL BM Constructions Générales d'autre part, à en payer la moitié ;

Rejette la demande de M. [W] présentée à l'égard de la SARL BM Constructions Générales au titre de ses dépens ;

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire y compris fondée sur l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française.

Prononcé à Papeete, le 23 juin 2022.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : MF BRENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet b
Numéro d'arrêt : 17/00191
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;17.00191 ?
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