N° 47
KS
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Copie exécutoire
délivrée à :
- Me Maisonnier,
le 30.06.2022.
Copies authentiques
délivrées à :
- Me Lamourette,
- Me Passerat,
- Curateur,
le 30.06.2022.
REPUBLIQUE FRANCAISE
COUR D'APPEL DE PAPEETE
Chambre des Terres
Audience du 23 juin 2022
RG 17/00067 ;
Décision déférée à la Cour : arrêt n°1074 - 349, rôle 233 de la Cour d'Appel de Papeete du 9 décembre 1991 ;
Sur requête en tierce opposition déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 13 octobre 2017 ;
Demandeur :
M. [HV] [K], né le 25 décembre 1941 à Fitii et décédé le 3 mars 2018 à Fare, aux droits de sa mère Mme [NU] a [E] a [U], elle-même venant aux droits de dame [EX] [UP] ;
Représenté par Me Mathieu LAMOURETTE, avocat au barreau de Papeete ;
Défendeurs :
Mme [I] [UP] épouse [JF], serait décédée ;
Mme [KT] [G], demeurant à [Adresse 15] ;
Non comparante, assignation transformée en procès-verbal de recherches du 23 septembre 2020 ;
M. Le Curateur aux Biens et Successions Vacants ;
Non comparant, assigné à personne habilitée le 22 septembre 2020 ;
M. [RS] [G], demeurant à [Adresse 1] ;
Non comparant, assigné à domicile le 14 août 2020 ;
M. [JI] [G], demeurant à [Adresse 7] ;
Non comparant ;
Mme [T] [G] épouse [WD], demeurant à [Adresse 3] ;
Non comparante ;
M. [D] [R] [G], né le 25 janvier 1939 à [Localité 6], de nationalité française, demeurant à [Adresse 2] ;
Représenté par Me Michèle MAISONNIER, avocat au barreau de Papeete ;
Mme [H] [EU] épouse [BZ], née le 21 janvier 1942 à [Localité 13], de nationalité française, demeurant à [Adresse 10] ;
Non comparant ;
M. [PE] [O] [G], né le 13 novembre 1976 à [Localité 6], de nationalité française, demeurant à [Adresse 8], nanti de l'aide juridictionnelle n° 2020/003558 du 26 janvier 2021 ;
Représenté par Me Matthieu PASSERAT, avocat au barreau de Papeete ;
Intervenants volontaires :
Les ayants-droit de [HV] [K], né le 25 décembre 1941 à Fitii et décédé le 3 mars 2018 à Fare :
1 - Mme [KT] [HS], né le 24 aopût 1943 à Fare, épouse de [HV] [K] ;
2 - Mme [F] [K] épouse [GK], née le 23 septembre 1963 à [Localité 14], demeurant à Tiarei ;
3 - M. [N] [K], né le 19 octobre 1964 à [Localité 14], demeurant à [Localité 4] ;
4 - M. [Z] [K], né le 22 juin 1967 à [Localité 14], demeurant à [Localité 4] ;
5 - Mme [J] [K], née le 21 novembre 1968 à [Localité 14], demeurant à Tiarei ;
6 - M. [A] [K], né le 23 février 1970 à Tefatii, demeurant à [Localité 4] ;
7 - M. [MG] [K], né le 27 janvier 1971 à [Localité 14], demeurant à [Localité 4] ;
8 - Mme [XN] [K], née le 24 février1972 à [Localité 14], demeurant à Pueu ;
9 - Mme [X] [K] épouse [S], née le 5 décembre 1974 à [Localité 14], demeurant à [Localité 12] ;
10 - Mme [C] [K], née le 28 février 1976 à Tefarii, demeurant en Bretagne ;
11 - M. [Y] [K], né le 13 mai 1977 à [Localité 14], demeurant à [Localité 4] ;
12 - M. [M] [K], né le 24 mai 1978 à [Localité 14], demeurant à [Localité 14] ;
13 - M. [TC] [K], né le 29 juillet 1979 à Fare, demeurant à Afareaitu Moorea ;
14 - Mme [P] [K], née le 8 juin 1981 à [Localité 14], demeurant à [Localité 12] ;
15 - M. [CP] [K], né le 5 juin 1982 à [Localité 14], demeurant à [Localité 5] ;
16 - M. [PH] [K], né le 29 septembre 1987 à Fare, demeurant à [Localité 9] ;
17 - M. [WG] [K], né le 19 octobre 1993 à [Localité 16], demeurant en France ;
18 - M. [HY] [K], né le 6 juin 1995 à Fare, demeurant à [Localité 4] ;
Représentés par Me Mathieu LAMOURETTE, avocat au barreau de Papeete ;
Ordonnance de clôture du 17 décembre 2021 ;
Composition de la Cour :
La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 24 mars 2022, devant Mme SZKLARZ, conseiller faisant fonction de président, M. SEKKAKI, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l'ordre judiciaire aux fins d'exercer à la cour d'appel de Papeete en qualité d'assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;
Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;
Arrêt par défaut ;
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Signé par Mme SZKLARZ, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A R R E T,
FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTIONS :
Par requête enregistrée au greffe de la Cour le 13 octobre 2017, Monsieur [HV] [K], aux droits de sa mère madame [NU] a [E] a [U], elle-même venant aux droits de Dame [EX] [UP], ayant pour avocat Maître Mathieu LAMOURETTE, forme tierce opposition à l'arrêt n°1074-349 de la Cour d'appel de Papeete en date du 19 décembre 1991.
Le litige soumis à la Cour en 1991 opposait Madame [I] [UP] veuve [JF], se disant ayant droit de [EX] [UP] en ligne collatérale, aux ayants droits de [RO] [ZB] (les consorts [G]). Madame [I] [UP] contestait que ces derniers aient été reconnus par jugements du 29 septembre 1972 et du 12 octobre 1979 comme venant aux droits de [EX] [UP] sur la terre [UM] sise à [Localité 6].
La terre [UM] a été attribuée en 1901 à 4 tomités, dont [EX] a [UP].
Aux termes du jugement n°170/44 en date du 29 septembre 1972, le Tribunal a ordonné le partage de la terre [UM] en 4 lots d'égale valeur dont un lot à attribuer «pour un quart aux ayants droit de [EX] [UP], en l'état les héritiers de [RO] a [ZB] acquéreur tels qu'ils sont énumérés sur la généalogie G-81... ».
Le Tribunal avait alors retenu que :
« 'Attendu que la terre [UM] a été attribuée définitivement en 1901 à Pouvanaa a OOPA, [L] a [KW], Madame [B] et [EX] a [UP] ;
Attendu qu'il est exposé que ce dernier avait, vers 1910, vendu ses droits à [RO] a [ZB], mais que l'acte constatant cette transaction n'a pu être retrouvé ; que, toutefois le procès-verbal de bornage de la terre, établi le 9 novembre 1945 par le service du cadastre, mentionne comme propriétaires les héritiers de [RO] a [ZB] ; que ceux-ci, ainsi qu'il ressort du dossier d'Assistance judiciaire versé aux débats, en sont toujours en possession ; que [XR] a [UP] et [W] a [GH], ayants droit du propriétaire originel [EX] [UP], déclarent avoir effectivement entendu parler de la vente alléguée, et confirment l'occupation qui en a découlé ; que ces éléments concordants constituent des présomptions suffisamment caractérisées en faveur desdits héritiers'. »
Après expertise pour constituer les lots, le partage de la terre [UM] a été homologué par jugement n° 137-60 en date du 12 octobre 1979 et les lots 1, 1A, 1B et 1C ont été attribués «aux héritiers et ayants droit de [EX] a [UP] tels qu'en l'état énumérés sur la généalogie G-81... », soit les héritiers de [RO] a [ZB].
Par requête en date du 25 septembre 1984, Madame [I] [UP] épouse [JF] a formé tierce opposition contre ces deux jugements en qualité d'ayant droit de [EX] a [UP].
Par jugement n°199-29 en date du 14 mars 1986, le Tribunal a débouté Madame [JF] «de tous ses fins, moyens et conclusions».
Madame [I] [UP] épouse [JF] a interjeté appel de ce jugement le 21 octobre 1986.
Par arrêt avant dire droit du 4 juin 1987, la Cour a enjoint à l'appelante de verser aux débats le tableau généalogique dont elle se prévaut, a enjoint aux intimés de verser aux débats le procès-verbal de bornage de la terre, le dossier d'assistance judiciaire de 1970, et une copie certifiée des conclusions écrites ou orales prises par M. [XR] [UP] et Mme [W] [GH] en 1972. La Cour a alors également ordonné une enquête sur la possession plus que trentenaire de la terre [UM] par les consorts [ZB].
L'enquête a été réalisée le 18 février 1988, procès-verbal n° 65-19 a été dressé.
Par arrêt n°1074-349 en date du 19 décembre 1991, la Cour d'appel de Papeete, a dit :
- Constate que les héritiers de [RO] [ZB] (né le 21 mars 1871 à [Localité 6] et décédé vers 1918) sont devenus propriétaires des droits d'un quart provenant de [EX] [UP] dans la terre [UM] (P.V. N°149 de [Localité 6]) et qu'il leur a été justement attribué un lot dans le partage de celle-ci ;
- Déboute l'appelante de toutes ses demandes ;
- Ordonne la transcription du présent arrêt ;
- Condamne l'appelante aux entiers dépens à recouvrer dans les formes de l'assistance judiciaire.
La cour a alors retenu que :
«Attendu qu'il ressort de tous les témoignages recueillis qu'un nommé [PB] [NR], identiquement le même que [RS] a [TF] [RO] a [G], occupait la terre [UM] depuis avant 1938 et en tout cas avant 1945, qu'il y habitait avec sa famille, y récoltait le coprah à son tour par participation à un roulement en tranches de 6 mois pour chacune des 4 souches et y fut enterré, qu'après son décès (en 1981) la possession fut continuée dans la même habitation par ses enfants notamment son fils [RV], et que cette possession s'est exercée notoirement, à titre de propriétaire et sans troubles jusqu'au début du présent litige en 1983 ;
Attendu que tous les droits patrimoniaux pouvant être acquis par la prescription, il en est ainsi spécialement des droits indivis de propriété ; que par ailleurs l'exploitation d'un terrain indivis au moyen d'un tour de récolte organisé entre les indivisaires est un mode de tenure foncière coutumier dans le Territoire ; qu'il n'est pas une marque de promiscuité mais au contraire d'organisation consensuelle, et qu'en l'occurrence il n'en résulte aucune équivoque ; qu'enfin, les travaux récents des intimés n'ont en rien pour effet de contredire leur occupation ancienne ; que toutes les conditions de l'article 2229 du code civil sont ainsi réunies. »
Madame [I] [UP] épouse [JF] a formé un pourvoi contre cet arrêt.
Par arrêt n°1883 D en date du 5 décembre 1995, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi en retenant que :
«Attendu qu'en énonçant que la possession par les consorts [G] et leurs auteurs, de la terre qu'ils habitaient, commencée avant 1954, s'était poursuivie sans troubles jusqu'au présent litige en 1983 et que ne résultait aucune équivoque du fait qu'ils exploitaient au moyen d'un tour de récolte, mode de tenure foncière coutumier, l'arrêt attaqué (Papeete 19 décembre 1991) a répondu aux conclusions dont fait état la troisième branche du moyen, que ses deux premières branches, qui s'attaquent à un motif surabondant, sont inopérants ; qu'ainsi il ne peut être accueilli.»
Monsieur [HV] [K] est décédé le 3 mars 2018. [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K] ont produit un acte de notoriété aux fins d'établir leur qualité d'ayants droit de Monsieur [HV] [K]. Ils sont intervenus volontairement à l'instance par conclusions du 3 octobre 2019 et ont poursuivi l'action en tierce-opposition de leur auteur.
Par conclusions récapitulatives déposées électroniquement au greffe de la Cour le 14 septembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Monsieur [D] [R] [G], ayant pour conseil Maître Michèle MAISONNIER, demande à la Cour de :
Considérant que la tierce-opposition porte sur l'arrêt rendue par la Cour d'appel de Papeete le 19 décembre 1991, lequel a statué sur l'appel interjeté par Madame [I] [UP] à l'encontre d'un jugement du 14 mars 1986 par lequel le Tribunal de Première Instance de PAPEETE, Section de RAIATEA, l'a déboutée de sa tierce opposition à l'encontre de deux jugements des 29 septembre 1972 et 12 octobre 1979,
Considérant dès lors que l'arrêt querellé porte sur l'appel d'un jugement rendu sur tierce-opposition,
Considérant le caractère personnel de l'action en tierce-opposition qui aux termes de l'article 362 al 2 du code de procédure civile de la Polynésie française : «remet en question relativement à son auteur les points jugés qu'elle critique, pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit... »
Considérant que par le biais de leur tierce-opposition, les consorts [HV] [K] tiers-opposants, remettent en cause deux jugements datant de plus de trente ans, puisque des 29 septembre 1972 et 12 octobre 1979 contournant ainsi la prescription extinctive de trente ans instituée par l'article 2262 du code civil en vigueur en Polynésie française,
Par suite.
À titre principal
Vu l'article 362 du code de procédure civile de la Polynésie française,
- Voir déclarer les consorts [HV] [K] irrecevables en leur action en tierce-opposition ;
- Débouter les consorts [K] de toutes leurs prétentions fins et conclusions ;
À titre subsidiaire,
Vu l'article 449-17 dudit code,
Si par impossible, la Cour considérait que les Consorts [K] sont recevables à former tierce opposition à l'encontre de l'arrêt du 19 décembre 1991 en ce qu'il a consacré les droits des héritiers de [RO] [ZB] sur le quart appartenant à [EX] [UP] dans la terre [UM] (PV n° 149 de [Localité 6]),
- Les déclarer prescrits en leur action ;
- Débouter les consorts [K] de toutes leurs prétentions fins et conclusions ;
À titre infiniment subsidiaire,
- Prendre acte que le concluant s'associe aux moyens de fait et de droit développés par M. [PE] [O] [G] ;
- Débouter les consorts [K] de toutes leurs prétentions fins et conclusions ;
En tout état de cause,
Vu l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
- Condamner in solidum, [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K], à payer à Monsieur [D] [R] [G], la somme de 280.000 FCP ;
- Les condamner sous la même solidarité aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe de la Cour le 9 septembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Monsieur [PE] [O] [G], Bénéficiaire de l'aide juridictionnelle et ayant pour avocat Maître Matthieu PASSERAT, demande à la Cour de :
Vu l'article 363 du code de procédure civile de la Polynésie Française,
Vu l'arrêt du 5 décembre 1995 de la Cour de cassation,
- Rejeter la tierce opposition des ayants droit de [HV] [K] contre l'arrêt du 19 décembre 1991 de la Cour d'appel de Papeete.
Monsieur [PE] [O] [G] soutient que, pour ne pas prouver ni la dévolution successorale de [EX] [UP], ni leur qualité d'ayant droit de [EX] [UP], et donc leur intérêt à agir, les consorts [K] ne démontrent pas que l'arrêt contesté préjudicie à leurs droits. Il souligne que les griefs soulevés par les consorts [K] à l'encontre de l'arrêt contesté ont déjà été rejetés par la Cour de cassation. Il conteste qu'un nouveau délai de prescription acquisitive ait commencé à courir à compter de l'arrêt de 1991, la Cour de cassation ayant définitivement débouté Mme [UP].
Par conclusions récapitulatives déposées au greffe de la Cour le 28 octobre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K] (les consorts [K]) demandent à la Cour de :
- Débouter les intimés de l'ensemble de leur moyens, fins et prétentions.
- Recevoir les ayants droit de [HV] [K] en leur intervention volontaire.
- Recevoir les consorts [K] en leur présente tierce opposition à l'encontre de l'arrêt de la Cour d'appel de Papeete du 19 décembre 1991.
- Constater que les consorts [K] justifient venir aux droits de [EX] [UP] par leur grand-mère [NU] a [V].
- Dire et juger recevable leur tierce opposition.
- Dire et juger équivoque l'occupation réalisée par [RO] [ZB] puis après lui par ses ayants droits.
- Dire et juger par ailleurs que les concluants justifient donc d'un titre de propriété indivis sur un quart de la terre [UM].
- Ordonner la transcription de l'arrêt à intervenir à la conservation des hypothèques de [Localité 11] sur le compte de [EX] [UP].
- Condamner les consorts [G] au paiement aux concluants d'une somme de 678.000 F Cfp sur le fondement de l'article 407 du Code de procédure civile de la Polynésie française.
- Les condamner également aux entiers dépens dont distraction d'usage au profit de maître Mathieu LAMOURETTE, avocat au barreau de Papeete sur ses offres de droit.
Les consorts [K] affirment que leur tierce-opposition est recevable ; que l'arrêt de la cour du 19 décembre 1991 fait bien grief à l'auteur de la tierce opposition, et désormais à ses ayants-droits, et qu'il n'y a pas lieu de leur opposer que la tierce opposition aurait dû être dirigée contre les jugements du 29 septembre 1972 et du 12 octobre 1979. Sur la prescription de 10 ans invoquée, ils soutiennent que l'article 449-17 du code de procédure civile de la Polynésie française ne s'applique pas à la présente instance puisque la décision à l'encontre de laquelle il est présentement fait tierce opposition n'est pas un jugement du tribunal foncier mais un arrêt de la cour d'appel.
Sur le fond, les consorts [K] soutiennent qu'il est à tout le moins surprenant que la Cour ait écarté le vice d'équivoque dont elle était pourtant saisie alors même que le tour de rôle institué par chacun des 4 propriétaires puis après eux leurs ayants droits, pour des raisons agricoles, ne peut s'accommoder d'une occupation exclusive et à titre de propriétaire ; qu'en l'absence de toute occupation utile au sens de l'article 2262 (nouveau) du Code civil, il y a lieu de s'en tenir au titre de propriété ; et qu'il importe de constater que l'acte de vente prétendu de 1910 n'a jamais été produit aux débats en telle sorte que les droits de [EX] [UP] lui sont demeurés par titre. Ils affirment que l'occupation réalisée par les consorts [G], venant aux droits de [RO] [ZB], est affectée d'un trouble et d'un vice d'équivoque notamment.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance en date du 17 décembre 2021 pour l'affaire être fixée à l'audience de la Cour du 24 mars 2022. En l'état l'affaire a été mise en délibéré au 23 juin 2022.
MOTIFS :
Il résulte de l'article 362 du code de procédure civile de la Polynésie française que la tierce opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l'attaque. Elle remet en question relativement à son auteur les points jugés qu'elle critique, pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit.
Aux termes de l'article 363 de ce même code, ceux qui veulent s'opposer à un jugement ou une ordonnance auquel ils n'ont pas été appelés et qui préjudicient à leurs droits peuvent former tierce opposition au greffe de la juridiction qui a rendu le jugement, dans les formes de l'article 21 du présent code. Toutefois, lorsque le partage est exécuté, la tierce opposition n'est pas recevable contre les décisions judiciaires en sortie d'indivision en matière foncière mais ceux dont les droits auraient été lésés peuvent se pourvoir par voie d'action personnelle en indemnité sans pouvoir remettre le partage en question.
Il doit cependant être considéré que ce qui ne peut pas être remis en question, c'est la constitution des lots et leur attribution. Lorsque la tierce-opposition ne remets pas en question les quotités du partage mais porte exclusivement sur la question de la détermination des ayants droits des attributaires des lots du partage, la question peut toujours faire l'objet d'une remise en question si aucun sous-partage n'est intervenu.
Ainsi, pour être recevable à former tierce opposition, il faut ne pas avoir été appelé à la décision et celle-ci doit préjudicier aux droits de celui qui forme la tierce opposition. Les points jugés, critiqués par la tierce opposition, ne peuvent être remis en question que relativement à l'auteur de la tierce opposition.
En l'espèce, il est constant et acquis aux débats que la terre [UM] a été attribuée en 1901 à 4 tomités, dont [EX] a [UP].
Par la production de son acte de naissance et de celui de sa mère, madame [NU] a [E] a [U], [HV] [K] démontre devant la Cour venir aux droits de Dame [EX] [UP] qui est indiquée à l'acte de naissance de [YY] a [E] en date du 26 novembre 1910 comme étant sa mère. Il est par ailleurs indiqué en marge de l'acte de naissance en date du 25 décembre 1941 que [HV] [K] a été reconnu par sa mère [YY] a [E] le 25 septembre 1954.
Ainsi, pour venir aux droits de [EX] a [UP], Monsieur [HV] [K] a qualité à agir, et ses ayants droit également.
Il est constant que Monsieur [HV] [K], qui démontre devant la Cour être petit-fils de [EX] a [UP], n'était pas partie à l'arrêt n°1074-349 de la Cour d'appel de Papeete en date du 19 décembre 1991. Seule Madame [I] [UP] épouse [JF], agissait alors en qualité d'ayants droit de [EX] a [UP] et ce en soutenant venir aux droits de [EX] a [UP] en ligne collatérale. La Cour, en son arrêt de 1991, avait d'ailleurs constaté, mais sans en tirer les conséquences, que «Attendu que l'appelante n'a en aucune manière justifié de sa qualité prétendue d'héritière en ligne collatérale de [EX] [UP] en dépit de l'injonction faite par l'arrêt préparatoire, que cette seule circonstance suffirait à fonder son débouté.»
Si l'arrêt peut sembler faire grief aux consorts [K] pour avoir constaté en son dispositif que les héritiers de [RO] [ZB] (né le 21 mars 1871 à [Localité 6] et décédé vers 1918) sont devenus propriétaires des droits d'un quart provenant de [EX] [UP] dans la terre [UM] (P.V. N°149 de [Localité 6]) et qu'il leur a été justement attribué un lot dans le partage de celle-ci, la présente Cour retient qu'il ne s'agit là que d'un constat de la Cour qui reprend ce qui a été jugé par le premier Juge ; et que le dispositif de l'arrêt déboute Madame [I] [UP] de toutes ses demandes et donc de sa demande de rétraction des jugements n°170/44 en date du 29 septembre 1972 et n° 137-60 en date du 12 octobre 1979. Or, c'est aux termes de ces jugements qu'il a été dit que les lots du partage à revenir au Tomité de [EX] a [UP] étaient attribués aux héritiers de [RO] [ZB]. C'est donc bien ces jugements qui sont susceptibles de faire grief aux consorts [K], en leur qualité d'héritier de [EX] a [UP], la Cour n'ayant pas fait droit aux demandes de rétraction.
En application de l'article 2262 du code civil, dans sa version applicable en Polynésie française, toutes les actions tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi. Le point de départ de la prescription est la date à laquelle l'acte irrégulier a été passé.
Les règles de prescription ont pour finalité de permettre de garantir la sécurité juridique. De plus, il est constant qu'au-delà d'un certain délai, rechercher et établir la réalité de certain fait devient par trop aléatoire, c'est pourquoi la prescription existe.
En l'espèce, les consorts [K] introduisent une action en tierce-opposition en 2017 contre un arrêt de 1991, soit plus de 26 ans après cette décision, et ce alors que cet arrêt a refusé la rétractation de jugements rendus, pour l'un en 1972, soit plus de 45 avant la mise en 'uvre de son action par Monsieur [HV] [K], et pour l'autre en 1979, soit 38 ans. La sécurité juridique exige que les règles de prescription qui interdisent aujourd'hui toute action en tierce-opposition contre un jugement rendu il y a 50 ans au jour où la Cour statue, ne puissent pas être contournées en agissant contre un arrêt rendu en 1991, arrêt qui a alors refusé de faire droit à la demande de rétractation des jugements.
Ce n'est pas les dispositions de l'arrêt n°1074-349 de la Cour d'appel de Papeete en date du 19 décembre 1991 qui font grief aux consorts [K] mais bien les dispositifs des jugements du 29 septembre 1972 et du 12 octobre 1979 et toute action à l'encontre de ces jugements est nécessairement prescrite.
En conséquence, la Cour dit les consorts [K] irrecevables en leur tierce-opposition à l'encontre de l'arrêt n°1074-349 de la Cour d'appel de Papeete en date du 19 décembre 1991.
Il serait inéquitable de laisser à la charge des défendeurs à la tierce- opposition les frais exposés par eux et non compris dans les dépens. La Cour condamne in solidum [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K] à payer à Monsieur [D] [R] [G] la somme de 280.000 francs pacifiques sur le fondement de l'article 407 du code de procédure de la Polynésie française.
Les dépens devant la Cour d'appel doivent être mis à la charge de [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K] qui sont déclarés irrecevables en leur tierce opposition.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, par défaut, en matière civile et en dernier ressort ;
DÉCLARE [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K] recevables en leur intervention volontaire en suite du décès de l'appelant Monsieur [HV] [K] ;
DÉCLARE [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K] irrecevables en leur tierce opposition à l'encontre de l'arrêt n°1074-349 de la Cour d'appel de Papeete en date du 19 décembre 1991 ;
CONDAMNE in solidum, [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K] à payer à Monsieur [D] [R] [G] la somme de 280.000 francs pacifiques sur le fondement de l'article 407 du code de procédure de la Polynésie française ;
REJETTE tout autre chef de demande des parties, plus ample ou contraire au présent arrêt ;
METS les dépens devant la Cour à la charge de [KT] [HS] veuve [HV] [K], [F] [K], [N] [K], [Z] [K], [J] [K], [A] [K], [MG] [K], [XN] [K], [X] [K], [C] [K], [Y] [K], [M] [K], [TC] [K], [P] [K], [CP] [K], [CM] [K], [WG] [K] et [HY] [K] à payer à Monsieur [D] [R] [G] la somme de 280.000 francs pacifiques sur le fondement de l'article 407 du code de procédure de la Polynésie française.
Prononcé à [Localité 11], le 23 juin 2022.
Le Greffier, Le Président,
signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : K. SZKLARZ