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09/06/2022 | FRANCE | N°19/00472

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet b, 09 juin 2022, 19/00472


N° 194





MF B

-------------



Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Quinquis,

le 09.06.2022.





Copie authentique délivrée à :

- Me Algan,

le 09.06.2022.



REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Commerciale





Audience du 9 juin 2022



RG 19/00472 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 116 rg n°2017 001296 du Tribunal Mixte de Commerce de Papeete du 13 septembre 2019 ;



Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 13 décembre 2019 ;



Appelante :



La Sa Société de Distribution de Véhiules Automobiles - Sodiva, société anonyme au capital de 219 156 000 FP don...

N° 194

MF B

-------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Quinquis,

le 09.06.2022.

Copie authentique délivrée à :

- Me Algan,

le 09.06.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Commerciale

Audience du 9 juin 2022

RG 19/00472 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 116 rg n°2017 001296 du Tribunal Mixte de Commerce de Papeete du 13 septembre 2019 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 13 décembre 2019 ;

Appelante :

La Sa Société de Distribution de Véhiules Automobiles - Sodiva, société anonyme au capital de 219 156 000 FP dont le siège social est sis à [Adresse 3], représentée par son directeur général en exercice ;

Ayant pour avocat la Selarl Froment-Meurice & Associés, représentée par Me Vaitiare ALGAN, avocat au barreau de Papeete ;

Intimée :

La Sarl Mana Drive Auto Ecole, inscrite au Rcs de [Localité 2] sous le n° Tpi 17166 B dont le siège social est sis à [Adresse 1], prise en la personne de son gérant : M. [B] [N] ;

Ayant pour avocat la Selarl Jurispol, représentée par Me François QUINQUIS, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 25 mars 2022 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 14 avril 2022, devant Mme BRENGARD, président de chambre, Mme PINET-URIOT et M. SEKKAKI, conseillers, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme BRENGARD, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signatair

A R R E T,

Suivant requête reçue au greffe le 24 novembre 2017, la SARL dénommée 'Mana Drive auto-école', dont le siège social est situé à [Localité 4], a engagé une action civile à l'égard de la société anonyme dénommée 'Société de Distribution de Véhicules Automobiles' (Sodiva) dont le siège social est à [Localité 2], au visa des articles 1147 et 1149 du Code civil applicables en Polynésie française, afin de l'entendre condamner au paiement de la somme de 2'741'500 XPF à titre d'indemnisation de son préjudice économique.

La requérante exposait avoir commandé à la Sodiva, en date du 10 mars 2017, un véhicule qui ne lui a été livré que le 22 septembre 2017 alors qu'il était convenu d'une livraison à la mi-mai, cette échéance ayant été repoussée au 26 juillet 2017. Elle invoquait une perte financière résultant de ce retard qui avait différé la mise en service de la voiture équipée pour des cours d'auto-école.

En défense, la Sodiva répliquait que le report de la date de livraison de la voiture était dû au paiement tardif du prix intervenu le 11 juillet 2017 ainsi qu'aux aménagements demandés sur le véhicule, puis, subsidiairement, alléguait de ce qu'un véhicule avait été mis gracieusement à disposition du client en attendant la livraison de l'automobile, ce qui réduisait la durée éventuelle d'indemnisation du 26 juillet au 4 août 2017.

***

Suivant jugement contradictoire n° 116 (RG 2017 001296), le tribunal mixte de commerce de Papeete a condamné la Sodiva à verser à la société Mana Drive auto-école, la somme de 2'741'500 XPF au titre de la réparation de son préjudice économique, outre celle de 200'000 XPF en application de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française s'ajoutant aux entiers dépens.

Le tribunal a retenu les éléments principaux suivants :

- entre la signature du bon de commande en date du 14 mars 2017 et la livraison du véhicule intervenue le 22 septembre 2017, il s'était écoulé 191 jours soit près de six mois ;

- la société Sodiva ne démontre pas une cause étrangère l'exonérant de sa responsabilité, car :

- il n'est pas établi qu'un lien existe entre le retard de paiement et le report de la livraison, faute d'une clause contractuelle liant ces deux événements,

- la spécificité du produit commandé était connue au jour de la livraison,

- la livraison tardive du kit auto-école commandé au jour de la signature du bon de commande, est due à la négligence de la société Sodiva ;

- la perte commerciale de la société d'auto-école est caractérisée du 12 juillet (jour du règlement du prix total) au 22 septembre 2017.

***

Suivant requête enregistrée le 13 décembre 2019, la société Sodiva a formé appel de la décision entreprise dont elle demande l'infirmation, en intimant la société Mana Drive.

En ses conclusions récapitulatives n°5 du 25 mars 2022, la Sodiva, appelante, demande à la cour, au visa des articles 1147, 1149, et 1603 du Code civil,

- au principal, dire que la livraison du véhicule a été effectuée dans un délai raisonnable, et en conséquence, infirmer le jugement entrepris puis statuant à nouveau, débouter la société Mana Drive de l'ensemble de ses demandes,

- à titre subsidiaire, dire que le retard ne peut lui être imputé,

- à titre plus subsidiaire, dire que la société Mana Drive ne démontre pas avoir subi un préjudice causé par le retard de livraison du véhicule,

- à titre infiniment subsidiaire, limiter le montant du préjudice à la somme de 252'000 XPF,

- en tout état de cause, déclarer irrecevable la demande d'indemnisation au titre du préjudice moral présenté par la société Mana Drive, puis condamner l'intimée au paiement d'une indemnité de procédure de 600'000 XPF au titre de l'article 407 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Reprenant pour l'essentiel son argumentation de première instance, l'appelante soutient que,

- la commande du 10 mars 2017 portait sur un véhicule équipé d'un kit auto-école, cet équipement étant commandé quatre jours après, le 14 mars 2017,

- ce n'est que le 11 juillet 2017, soit quatre mois après la commande, que la société Mana Drive a soldé le prix de vente de la voiture, retardant ainsi la livraison initialement convenue au mois de mai jusqu'au 26 juillet 2017,

- le kit auto-école ayant été livré incomplet, la Sodiva a immédiatement recontacté son fournisseur métropolitain et a reçu un kit opérationnel le 3 août 2017,

- le 4 août, elle a prêté un autre véhicule à la société Mana Drive, ce qui limite l'éventuel préjudice de la société d'auto-école à la période du 26 juillet au 4 août 2017 et le préjudice lié à la non présentation des examens d'auto-école organisés le jeudi, du 26 juillet au 14 août, date de réalisation du contrôle technique du véhicule équipé auto-école,

- les pièces détachées manquantes ont pu être installées sur le véhicule au mois de septembre 2017, la livraison datant du 25 septembre.

- qu'en vertu de l'article 1603 et suivants du Code civil, le juge du fond doit déterminer le délai raisonnable dans lequel le vendeur est tenu de livrer la chose vendue, et dire qu'en l'espèce, elle a respecté ce délai raisonnable,

- qu'aucune faute ne peut lui être imputée car le seul retard dans l'exécution ne suffit pas à condamner le débiteur s'il existe une cause étrangère qui l'exonère de sa responsabilité, et qu'en l'espèce, il existe une cause étrangère imputable d'une part, à la société Mana Drive qui a tardé à payer le prix, et d'autre part, au fournisseur du kit auto-école,

- qu'il n'est pas démontré que la société Mana Drive a subi un dommage financier,

- que l'indemnisation réclamée par la société Mana Drive doit être réduite.

En ses conclusions récapitulatives du 25 mars 2022, la société Mana Drive auto-école entend voir la cour réformer le jugement sur le quantum des sommes qui lui ont été allouées, et statuant à nouveau de ces chefs, condamner la Sodiva à lui payer les sommes suivantes :

- 2'589'680 XPF en réparation de son préjudice économique, outre les intérêts légaux à compter de l'assignation délivrée en première instance le 23 novembre 2017,

- 500'000 XPF au titre de son préjudice moral,

- 200'000 XPF en vertu de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française, en plus des entiers dépens.

S'en remettant à la motivation du jugement en ce que le tribunal a considéré que la Sodiva était pleinement responsable de l'exécution fautive du contrat et que la preuve du préjudice était rapportée, elle soutient en ce qui concerne l'indemnisation qu'elle sollicite,

- que la Sodiva ne s'est pas montrée diligente comme le prétend car elle savait depuis l'origine que la commande portait sur un véhicule équipé du kit auto-école,

- que le prêt du véhicule à compter du 4 août 2017 ne lui a pas permis de continuer son activité, s'agissant d'un véhicule qui n'était pas à double commande et ne présentait pas les caractéristiques d'un véhicule d'auto-école,

- que sa perte financière définitive est chiffrée à 2'589'680 XPF,

- qu'une société peut se prévaloir d'un préjudice moral et qu'en l'espèce elle a été méprisée par la Sodiva qui ne s'est jamais excusée ni expliquée et qui, à titre subsidiaire, lui consentirait 'une aumône de 224'000 XPF' (Sic) mais réclame néanmoins qu'elle soit condamnée à payer les frais irrépétibles, ce qui montre une volonté de lui nuire.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 mars 2022.

Motifs de la décision :

Il apparaît des explications des parties ainsi que des rares éléments matériels versés aux débats que les faits se sont déroulés comme suit :

- dans le cadre de la création d'une auto-école à Mooréa, la société Mana Drive a, suivant bon de commande n° 7263 accepté le 14 mars 2017, acheté auprès de la Sodiva, un véhicule Renault d'occasion, moyennant un prix total de 2 900 000 XPF,

- la société Mana Drive ayant demandé que le véhicule soit équipé d'un kit auto-école, les parties contractantes ont estimé à deux mois, le délai de livraison,

- le 14 mars 2017 un acompte de 120 000 XPF a été versé par la société Mana Drive et le kit d'auto école a été commandé par la Sodiva,

- la société Mana Drive a reçu l'habilitation nécessaire à l'ouverture de l'auto-école par un arrêté ministériel du 12 juin 2017,

- le 11 juillet 2017, la société Mana Drive a payé le solde du prix convenu,

- le kit auto-école commandé par la Sodiva lui est parvenu incomplet et elle a relancé son fournisseur métropolitain qui a confirmé cette nouvelle commande les 23 et 26 juillet 2017,

- le 4 août, la Sodiva a fourni un véhicule de prêt à la société Mana Drive,

- le contrôle technique nécessaire à l'utilisation du véhicule, pour des cours d'auto-école a été réalisé le 14 août,

- les pièces manquantes du kit auto-école sont arrivées en Polynésie en septembre 2017,

- le 25 septembre 2017, le véhicule a pu être livré équipé conformément à l'accord contractuel des parties.

Sur l'absence alléguée de manquement de la société Sodiva à l'obligation de délivrance dans un délai raisonnable :

La Sodiva a été condamnée en première instance pour ne pas avoir livrée le véhicule commandé par la société Mana Drive dans un délai raisonnable.

Elle sollicite en appel l'infirmation de la décision entreprise en indiquant, dans ses conclusions, que le délai 'raisonnable' dans lequel le fournisseur doit livrer le bien commandé court à compter du bon de commande en l'espèce, le 14 mars 2017 et jusqu'au jour de la livraison effective, ici, le 25 septembre 2017.

Il est manifeste que la notion de délai 'raisonnable' est étroitement liée à la nature des évènements qui ont retardé la livraison.

En l'espèce, la cour relève que sur le seul exemplaire du bon de commande (peu lisible) qui est versé aux débats ( pièce 3 de l'intimée), il ne figure pas de date de livraison convenue, mais les parties s'accordent à dire qu'elles l'ont fixé à la mi-mai puis repoussée au 26 juillet. Il est vrai que dans ses conclusions, la société Mana Drive conteste dorénavant avoir accepté le report de la date de livraison au 26 juillet mais les échanges de courriels produits aux débats ne montrent pas qu'elle ait fait une réclamation sur ce point ( pièce 20 de l'intimée) .Du reste, la société Mana Drive n'explique pas les raisons pour lesquelles elle a soldé le prix de vente le 12 juillet seulement et ce différé de paiement concorde avec le report convenu de la livraison du véhicule dûment équipé.

Par ailleurs, le bon de commande constituant le contrat liant les parties ne mentionne pas davantage d'équipements spéciaux sur la voiture, objet de la vente, mais la société Sodiva admet avoir accepté de livrer un véhicule doté d'un kit auto-école.

Or, le fait que la société Sodiva n'a pas disposé d'un kit opérationnel à installer sur le véhicule vendu à la société Mana Drive est la cause exclusive du délai qui s'est écoulé entre la date définitivement arrêtée pour la livraison, après paiement du prix total d'achat, soit le 26 juillet 2017, et la livraison effective intervenue le 25 septembre 2017.

Ainsi que l'a dit le tribunal en visant l'article 1147 du code civil, la société Sodiva ne démontre pas que l'inexécution de son obligation provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée. En effet, à supposer que son fournisseur métropolitain soit à l'origine du retard, la faute de celui-ci serait inopposable à la société Mana Drive qui n'a passé contrat qu'avec la société Sodiva qui reste seule tenue à son égard de respecter l'obligation de délivrance lui incombant en vertu de l'article 1604 du Code civil. La société Sodiva était en mesure d'agir de différentes manières à l'égard de son fournisseur et du reste, elle n'a communiqué que par mail avec le service après vente Renault, ce qui ne constitue pas par nature, un mode de sommation, et les quelques courriers échangés entre M. [Z] (Sodiva) et ce fournisseur n'ont aucun caractère comminatoire et ne montrent pas que la société Sodiva s'est montré particulièrement pressant avec son fournisseur aux fins d'obtenir la livraison sans délai du kit complet ou des pièces manquantes.

La société Sodiva n'établit pas davantage en appel qu'elle ne l'a fait en première instance, que le paiement du solde du prix était une condition de la livraison, et en tout état de cause, même si la société Mana Drive avait payé intégralement le prix avant le 11 juillet 2017, elle n'aurait pu prendre possession du véhicule équipé du kit auto-école opérationnel.

Quant au fait que c'est la commande d'un véhicule complexe qui en a retardé la livraison, la cour observe que ce moyen est sans intérêt puisque l'exigence d'un équipement spécial constitue l'un des éléments du contrat et ne peut donc regardé comme une cause exonératoire de responsabilité.

La négligence de la Sodiva est donc incontestablement à l'origine du retard d'exécution de son obligation de délivrance. Sa faute contractuelle est d'autant plus caractérisée qu'elle n'ignorait pas la destination commerciale de la voiture qu'elle vendait .

C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu le principe de la responsabilité contractuelle de la Sodiva.

Sur le préjudice causé à la société Mana Drive :

Le tribunal a alloué à la société ManaDrive la somme de 2 741 500 XPF qu'elle sollicitait en première instance au titre du préjudice économique. En appel, l'intimée demande une somme principale de 2 589 680 XPF.et pour la première fois, l'indemnisation d'un préjudice moral à hauteur de 500 000 XPF.

Pour sa part, la société Sodiva sollicite le rejet mais, à titre subsidiaire, la réduction de l'indemnisation du préjudice économique de la société Mana Drive et conclut à l'irrecevabilité de la demande au titre du préjudice moral.

- Le préjudice économique :

La société d'auto-école était en cours de constitution et devait débuter son activité après l'achat du véhicule litigieux et surtout après avoir obtenu l'agrément ministériel qu'elle a reçu le 22 juin 2017.

La société Mana Drive n'avait pas une année d'activité quand elle a acheté le véhicule et ne peut donc que présenter une estimation de ce qu'elle aurait gagné si elle avait pu démarrer, comme elle l'avait prévu, les cours d'auto-école et les examens en résultant. Elle ne produit d'ailleurs que des documents comptables concernant son premier exercice d'activité ayant débuté que le 7 avril 2017.

Quant à l'attestation établie le 10 août 2017 par le gérant de la même société AJCOMPTA, elle chiffre le montant provisoire du préjudice, soit 1 070 000 XPF mais sans que soient communiquées des pièces établissant que la société Mana Drive a déjà commencé à travailler avec d'autres véhicules, qu'elle avait obtenu l'inscription de clients- élèves et que certainsavaient déjà suffisamment avancé dans les cours d'auto-école pour être présentés à l'examen à cette date.

Du reste, l'attestation comptable de la société AJCOMPTA du 19 juin 2020 commence par cette phrase : 'si on part du principe d'heures minimum pour l'obtention du permis de conduire qu'il convient de réaliser soit 20 heures de conduite en moyenne.', ce libellé confirmant qu'il s'agit d'une évaluation selon des éléments abstraits et non faite sur la base de l'expérience pratique de la nouvelle auto-école.

La cour observe que la société Mana Drive n'a jamais mis en demeure la Sodiva de remplir son obligation de délivrance mais l'appelante n'ayant pas conclu sur ce point et le juge étant lié par les écritures des parties, ne peut tirer aucune conséquence juridique de cette constatation .

Dès lors, il apparait que la société Mana Drive a effectivement subi un préjudice qui s'analyse en une perte de chance de débuter son activité avec le véhicule commandé, conformément à ce qu'elle pouvait espérer en signant le bon de commande du 14 mars 2017.

C'est donc sur la base d'un calcul hypothétique que la société Mana Drive a chiffré son préjudice et que le tribunal lui a alloué une somme de 2 741 500 XPF, le jugement devant dès lors, être réformé sur ce quantum non justifié.

La société Mana Drive n'a pas formé de demande subsidiaire au titre de la perte de chance mais la société Sodiva en fait état dans ses conclusions (in fine page 21) de sorte que ce principe de réparation pécuniaire est dans les débats.

La période de la perte de chance doit être examinée au regard du prêt d'un véhicule dont a bénéficié la société Mana Drive à compter du 4 août 2017. En réalité ce véhicule de courtoisie n'a reçu sa validation d'auto école que le 21 août 2017, date à compter de laquelle la société Manad Drive a pu débuter son activité. Celle-ci ne verse pas de pièce aux débats confirmant qua comme elle le prétend, cette voiture même ancienne et d'un modèle différent de celui commandé, n'était pas utilisable provisoirement aux fins de cours de pilotage ou même d'examens.

Il est donc avéré que la société Sodiva a fait perdre une chance à la société Mana Drive de débuter dans les conditions contractuellement attendues, son activité, du 26 juillet au 21 août 2017.

Au regard des éléments de fait et de droit du dossier, la cour condamnera la société Sodiva au paiement d'une somme de 600 000 XPF au titre de la perte de chance qu'elle a fait subir à la société Mana Drive.

- Le préjudice moral :

La société Sodiva conclut à l'irrecevabilité de cette prétention que la société Mana Drive présente pour la première fois en appel.

Cependant, l'article 349 du code de procédure civile de Polynésie française dispose que si les juges d'appel ne peuvent se prononcer que sur les demandes qui ont été soumises au premier juge, il prévoit des exceptions, notamment quand la prétention est connexe à la demande principale, ce qui est le cas de l'indemnisation d'un préjudice moral accessoire au préjudice matériel.

Pour autant, la cour doit rejeter cette prétention, faute d'avoir trouvé dans le dossier, des éléments concrets de nature à établir le mépris dont aurait fait preuve la société Sodiva ou encore son manque de considération pour sa cliente ou les mensonges qu'elle aurait proférés, mais également le dommage que ces comportements auraient fait subir à la société Mana Drive en sa qualité de personne morale.

Sur les frais de procédure :

Même si la société Sodiva obtient la réduction du quantum de sa condamnation en paiement, elle est jugée responsable du préjudice causé à la société Mana Drive et doit donc supporter les entiers dépens du procès et payer également une indemnité de procédure d'appel à l'intimée.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort ;

Vu l'appel principal de la société Sodiva (Société de Distribution et Véhicules Automobiles) ;

Confirme le jugement entrepris excepté sur la nature juridique et le quantum de la condamnation principale prononcée à l'égard de la société Sodiva,

Statuant à nouveau,

Condamne la société Sodiva à payer à la société Mana Drive, la somme de 600 000 XPF au titre de la perte de chance de débuter son activité dans les conditions contractuellement convenues, pour la période du 26 juillet au 21 août 2017 ;

Y ajoutant,

Condamne la société Sodiva au paiement des dépens d'appel ainsi que d'une indemnité de procédure d'appel de 300 000 XPF sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Rejette toutes les autres demandes plus amples ou contraires.

Prononcé à Papeete, le 9 juin 2022.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : MF BRENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet b
Numéro d'arrêt : 19/00472
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;19.00472 ?
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