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12/05/2022 | FRANCE | N°18/00137

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet d, 12 mai 2022, 18/00137


N° 170



GR

--------------



Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Maisonnier,

le 16.05.2022.





Copie authentique

délivrée à :

- Me Bourion,

le 16.05.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 12 mai 2022





Rg n° 18/00137 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 785, rg n° 12/00431 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 8 décembre 2017 ;





Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 18 avril 2018 ;



Appelant :



M. [M] [N], né le 7 février 1952 à [Localité 7], de nationalité française, ingénieur, demeurant à [Adresse ...

N° 170

GR

--------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Maisonnier,

le 16.05.2022.

Copie authentique

délivrée à :

- Me Bourion,

le 16.05.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 12 mai 2022

Rg n° 18/00137 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 785, rg n° 12/00431 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 8 décembre 2017 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 18 avril 2018 ;

Appelant :

M. [M] [N], né le 7 février 1952 à [Localité 7], de nationalité française, ingénieur, demeurant à [Adresse 5] ;

Ayant pour avocat la Selarl ManaVocat, représentée par Me Dominique BOURION, avocat au barreau de Papeete ;

Intimé :

M. [J] [I], né le 23 mars 1951 à [Localité 6] (Algérie), de nationalité française, demeurant à [Adresse 8] ;

Représenté par Me Michèle MAISONNIER, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 26 novembre 2021 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 10 février 2022, devant M. RIPOLL, conseiller désigné par l'ordonnance n° 83/OD/PP. CA/21 du Premier Président de la Cour d'Appel de Papeete en date du 15 décembre 2021 pour faire fonction de Président dans le présent dossier, Mme BRENGARD, président de chambre, M. SEKKAKI, conseiller, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par M. RIPOLL, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

Faits, procédure et demandes des parties :

Par acte sous seing privé en date du 22 mai 2007, [M] [N], personnellement et se portant fort pour [Z] [T] Vve [N], a vendu à [U] [W], se portant fort pour [J] [I], les parcelles cadastrées [Cadastre 2] et [Cadastre 1] commune de [Localité 9] (île de Tahiti) au prix de 100 MF CFP payable au plus tard le 31/12/2007, sous les conditions suspensives suivantes à échéance au 30/11/2007 :

- absence de servitudes administratives et d'urbanisme de nature à rendre le bien impropre à l'édification d'un hôtel ;

- justification du droit de propriété du vendeur ;

- absence de sûretés réelles pour un montant supérieur au prix.

Il a été convenu que le transfert de propriété aurait lieu au moment de la signature de l'acte authentique au plus tard le 31/12/2007.

Il a aussi été stipulé que :

Si nonobstant la réalisation de l'ensemble des conditions suspensives l'acquéreur ne pouvait pas ou ne voulait pas passer l'acte de vente et en payer le prix et les frais, le vendeur pourrait : soit considérer le présent accord comme nul et non avenu de plein droit et sans mise en demeure ni demande en justice ; soit contraindre l'acquéreur par tous les moyens et voies de droit en vue de la réalisation de la vente.

Le vendeur sera considéré comme ayant opté pour la première solution s'il n'a pas notifié à l'acquéreur par acte extrajudiciaire ans le délai d'un mois à compte de l'expiration du délai prévu pour la signature de l'acte authentique son intention de poursuivre la vente.

Si le vendeur venait à refuser de réitérer les présentes, il y serait contraint par tous les moyens et voies de droit et devra supporter tous les frais de poursuite et des frais engagés par l'acquéreur.

Si les conditions suspensives ne sont pas toutes réalisées, le vendeur et l'acquéreur reprendront leur entière liberté.

Une clause pénale a été stipulée en ces termes :

Il est en outre convenu, sauf l'effet des conditions suspensives, qu'au cas où l'une des parties viendrait à refuser de réitérer les présentes conventions par acte authentique, elle y sera contrainte et à ses frais par tous les moyens et voies de droit et devra payer à l'autre partie, à titre de dommages et intérêts, une somme égale à dix pour cent du prix stipulé ci-dessus et qui sera payable huit jours après une mise en demeure de payer faite par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte extrajudiciaire.

Par acte sous seing privé en date du 22 mai 2007 :

[M] [N] et [L] [N] épouse [X] ont vendu à [J] [I] la parcelle [Cadastre 4] commune de [Localité 7] avec ses constructions ;

[Z] [T] Vve [N], [M] [N] et [L] [N] épouse [X] ont vendu à [J] [I] la parcelle [Cadastre 3] commune de [Localité 7] avec ses constructions.

La vente a été faite au prix de 120 MF CFP sous les conditions suspensives suivantes à échéance au 31/12/2007 :

- obtention par l'acquéreur avant le 31/12/2007 d'un permis de construire pour un immeuble de R+9, la demande devant être faite avant le 31/07/2007 ;

- absence de servitudes administratives et d'urbanisme de nature à rendre le bien impropre à l'édification d'un immeuble ;

- justification du droit de propriété du vendeur ; règlement de la succession de feu [C] [N] père du vendeur ;

- absence de sûretés réelles pour un montant supérieur au prix.

Le transfert de propriété a été subordonné à la signature de l'acte authentique au plus tard le 31/12/2007.

Il a aussi été stipulé que :

Si nonobstant la réalisation de l'ensemble des conditions suspensives l'acquéreur ne pouvait pas ou ne voulait pas passer l'acte de vente et en payer le prix et les frais, le vendeur pourrait : soit considérer le présent accord comme nul et non avenu de plein droit et sans mise en demeure ni demande en justice ; soit contraindre l'acquéreur par tous les moyens et voies de droit en vue de la réalisation de la vente.

Le vendeur sera considéré comme ayant opté pour la première solution s'il n'a pas notifié à l'acquéreur par acte extrajudiciaire ans le délai d'un mois à compte de l'expiration du délai prévu pour la signature de l'acte authentique son intention de poursuivre la vente.

Si le vendeur venait à refuser de réitérer les présentes, il y serait contraint par tous les moyens et voies de droit et devra supporter tous les frais de poursuite et des frais engagés par l'acquéreur.

Si les conditions suspensives ne sont pas toutes réalisées, le vendeur et l'acquéreur reprendront leur entière liberté.

Une clause pénale a été stipulée en ces termes :

Il est en outre convenu, sauf l'effet des conditions suspensives, qu'au cas où l'une des parties viendrait à refuser de réitérer les présentes conventions par acte authentique, elle y sera contrainte et à ses frais par tous les moyens et voies de droit et devra payer à l'autre partie, à titre de dommages et intérêts, une somme égale à dix pour cent du prix stipulé ci-dessus et qui sera payable huit jours après une mise en demeure de payer faite par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte extrajudiciaire.

Un acte sous seing privé daté du 30 octobre 2007, dont les signataires ne sont pas nommés mais que les parties reconnaissent, a reporté les échéances de paiement du prix.

Par acte sous seing privé en date des 14 septembre 2010 et 13 janvier 2011, [M] [N], personnellement et représentant sa mère [Z] [T] Vve [N], et [J] [I] ont convenu de résilier purement et simplement et sans indemnité l'avant contrat de vente qu'ils ont signé le 22 mai 2007 ayant pour objet les parcelles [Cadastre 2] et [Cadastre 1]. [M] [N] s'est engagé irrévocablement à rembourser à [J] [I] la somme de 45 MF CFP déjà perçue par lui d'avance sur le prix de vente de 100 MF CFP.

Il a été néanmoins convenu que ce remboursement aurait lieu le jour de la régularisation par Me [D], notaire, en un acte authentique de la revente au profit d'un tiers des biens sus désignés et en tout état de cause au plus tard le (date laissée en blanc).

Il a aussi été stipulé qu'en l'absence de régularisation d'un acte authentique de vente au profit d'un tiers des biens sus désignés dans le délai de neuf mois à compter des présentes, [M] [N] consentait d'ores et déjà à accorder un droit de priorité à [J] [I] pour l'acquisition des mêmes biens.

Selon acte authentique en date des 12 et 7 avril 2010, [Z] [T] Vve [N], [M] [N] et [L] [N] épouse [X] ont vendu à l'ÉTABLISSEMENT PUBLIC D'AMÉNAGEMENT ET DE DÉVELOPPEMENT les parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 4] et leurs constructions au prix de 95 MF CFP.

Le 22 mars 2011, [J] [I] a mis en demeure [M] [N] de lui restituer la somme de 55 MF CFP qu'il lui a versée en suite des compromis de vente du 22 mai 2007.

Par requête en date du 4 juin 2012, [J] [I] a demandé la condamnation de [M] [N] à lui payer la somme en principal de 55 000 000 F CFP avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure. [M] [N] a invoqué la non-réalisation de toutes les conditions suspensives et la transaction.

Par jugement rendu le 8 décembre 2017, le tribunal de première instance de Papeete a :

Déclaré irrecevable l'exception de procédure tirée de la nullité de l'assignation ;

Condamné [M] [N] à verser à [J] [I] une somme de 47 500 000 F CFP avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2012 date de l'assignation ;

Condamné [M] [N] à verser à [J] [I] une somme de 200 000 F CFP au titre des frais irrépétibles ;

Débouté pour le surplus ;

Condamné [M] [N] aux dépens.

[M] [N] a relevé appel par requête enregistrée au greffe le 18 avril 2018.

Par arrêt en date du 18 juin 2020, la cour a :

Débouté [M] [N] de sa demande d'annulation du jugement entrepris ;

Avant dire droit,

Ordonné la réouverture des débats ;

Enjoint aux parties de conclure sur les questions suivantes :

- Les parcelles [Cadastre 2] et [Cadastre 1] objet du protocole d'accord des 14 septembre 2010 et 13 janvier 2011 ont-t-elles été vendues par la suite ' Si oui, quand, à qui, à quel prix et à quelle date ' Il y a lieu de produire les actes de vente.

- L'omission dans ce protocole de l'indication de la date d'un terme pour la revente des biens à un tiers est-elle de nature à priver la transaction de tout effet, peu important de quelle partie cette omission émanerait puisque toutes deux l'ont signée en l'état '

- La subordination du remboursement des sommes versées par [J] [I] à [M] [N] à une vente à un tiers à la discrétion de ce dernier rend-elle la transaction déséquilibrée au profit de [N], et donc nulle '

- La stipulation qu'à défaut de vente à un tiers dans le délai de 9 mois, un droit de priorité pour acquérir les biens en cause est accordé à [J] [I], constitue-t-elle une contrepartie réelle et non dérisoire, à défaut de quoi la transaction serait nulle '

- En cas de vente des parcelles [Cadastre 2] et [Cadastre 1] à un tiers, les stipulations du protocole d'accord des 14 septembre 2010 et 13 janvier 2011 trouvaient-elles à s'appliquer à compter de cette vente puisque le protocole d'accord n'avait pas fixé de terme '

- L'annulation du protocole d'accord des 14 septembre 2010-13 janvier 2011 serait de nature à faire revivre les compromis de vente du 22 mai 2007, et par conséquent les clauses pénales qu'ils contiennent. En cas d'annulation du protocole d'accord, les parties soulèvent-elles d'autres moyens, en demande ou défense, que ceux qui tiennent au fondement de l'action d'[J] [I] sur la répétition de l'indu '

Il est demandé :

1° par [M] [N], appelant, dans ses dernières conclusions visées le 22 avril 2021, de :

À titre principal :

Vu l'article 6 du Code de procédure civile de la Polynésie française, vu la jurisprudence,

Dire et juger que les juges du Tribunal de Première Instance de PAPEETE ont méconnu les dispositions du Code de procédure civile local relative au contradictoire ;

En conséquence,

Prononcer la nullité du jugement n° 12/00431 du 8 décembre 2017 ;

À titre subsidiaire :

Vu le protocole d'accord des 14 septembre 2010 et 13 janvier 2011, vu tout ce qui précède,

Dire et juger que ce protocole ne contient aucune condition potestative ;

Constater que s'il n'a jamais été suivi d'effet, cela est dû aux seuls agissements de Monsieur [I] ;

Constater que les premiers juges ne précisent pas à quel titre Monsieur [N] devrait rembourser à l'intimé la somme de 2 500 000 XPF que ce dernier lui aurait versé ;

En conséquence,

Réformer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné Monsieur [M] [N] à verser à Monsieur [J] [I] 47 500 000 XPF, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2012, date de l'assignation ;

Statuant à nouveau,

Débouter Monsieur [J] [I] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause :

Constater que l'action du demandeur à la première instance était manifestement prématurée et abusive, et qu'elle a porté préjudice à [M] [N] ;

En conséquence,

Condamner Monsieur [I] au paiement d'1 000 000 XPF à titre de dommages-intérêts ;

Condamner Monsieur [I] au paiement de 800 000 XPF sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et appel, dont distraction ;

2° par [J] [I], intimé, dans ses dernières conclusions visées le 22 mars 2021, de :

Vu l'arrêt n° 239 ADD du 18 juin 2020 de la chambre civile de la Cour d'appel de PAPEETE,

Considérant que cet arrêt mixte, a débouté Monsieur [M] [N] de sa demande d'annulation du jugement entrepris, et avant dire droit, a enjoint aux parties de conclure sur différentes questions ;

Considérant, concernant les deux parcelles de la terre dénommée VALLÉE TEFAFAOITI d'une superficie totale de 110.746 m2, cadastrées section [Cadastre 2] pour 5ha 04a 19ca et [Cadastre 1] pour 6ha 03a 27ca sises commune de [Localité 9], que les parties à savoir, Monsieur [M] [N] agissant tant à titre personnel, qu'au nom et pour le compte de sa mère, Madame [Z] [T] d'une part et M. [J] [I] d'autre part, ont signé successivement un compromis de vente daté du 22 mai 2007, un avenant daté du 30 octobre 2007 relatif au paiement du prix et modificatif du terme de la convention initialement fixé au 30 novembre 2007 et un protocole d'accord signé par M. [M] [N], le 14 septembre 2010 et par Monsieur [J] [I] le 13 janvier 2011 par lequel les signataires «déclarent résilier purement et simplement et sans indemnité l'avant contrat de vente qu'ils ont signé le 22 mai 2007» ;

Considérant que ledit protocole stipule : «Comme conséquence du présent accord, les consorts [N] reprennent la libre disposition des biens susdésignés et Monsieur [M] [N] s'engage irrévocablement à rembourser à Monsieur [J] [I] la somme de 45.000.000 FCP d'ores et déjà perçue par lui, à titre d'avance sur le prix de vente. Ce remboursement aura lieu le jour de la régularisation en un acte authentique de la revente au profit d'un tiers des biens susdésignés et en tout état de cause au plus tard le (il n'y a aucune mention de date). En l'absence de régularisation d'un acte authentique de vente au profit d'un tiers des biens susdésignés dans le délai de neuf mois à compter des présentes, Monsieur [M] [N] consent d'ores et déjà à accorder un droit de priorité à Monsieur [J] [I] pour l'acquisition des mêmes biens» ;

Considérant que l'acte ne comporte aucun terme et que dès lors le remboursement est soumis à la seule volonté de M. [M] [N] ;

Considérant cependant que la volonté des parties de résilier l'avant-contrat signé le 22 mai 2007 est claire et sans équivoque, de même que l'engagement de Monsieur [M] [N] de rembourser la somme perçue à titre d'acompte sur le prix de vente ;

Considérant en ce qui concerne le premier compromis de vente signé de même, le 22 mai 2007, les consorts [N], ont vendu à un tiers à l'insu de Monsieur [I], les deux terres sises commune de [Localité 7] ;

Considérant dès lors que le premier compromis portant sur la vente desdites parcelles est devenu caduc ;

Par suite,

1°/ Du chef du protocole de résiliation amiable du compromis de vente les deux parcelles de la terre dénommée VALLÉE TEFAFAOITI d'une superficie totale de 110.746 m2, cadastrées section [Cadastre 2] pour 5ha 04a 19ca et [Cadastre 1] pour 6ha 03a 27ca sises commune de [Localité 9],

Vu l'article 1174 du code civil, vu l'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation le 13 décembre 2005 (pourvoi 04- 11572),

Voir dire et juger que la clause de remboursement par M. [M] [N] au jour de la régularisation par acte authentique de la revente au profit d'un tiers des deux parcelles est indéniablement une clause potestative dans la mesure où l'acte ne prévoit pas d'alternative ;

Dire nulle et de nul effet ladite clause ;

Voir dire et juger que la nullité ainsi prononcée n'affecte pas les autres clauses du protocole d'accord, les parties ayant clairement exprimé leur volonté de résilier l'avant-contrat du 22 mai 2007 et M. [M] [N] s'étant irrévocablement engagé à rembourser la somme de 45 millions perçue à titre d'acompte ;

Considérant que l'absence de terme audit-remboursement rend la créance immédiatement exigible ;

2°/ du chef des acomptes perçus par M. [M] [N] sur les fonds versés par M. [J] [I] en vertu du premier compromis devenu caduc et du second compris résilié d'accord- parties ;

Vu le relevé de compte transmis par courrier du 21 juin 2019 par Maître [Y] [O], notaire en l'étude de Me [D] qui établit que le total des fonds reçus par Monsieur [M] [N] de la comptabilité du notaire se monte à 62.500.000 FCP ;

Vu les justificatifs versés aux débats qui font foi que M. [M] [N] a perçu directement 2 millions de Mme [J] [I] qui a émis à son profit quatre chèques de 500.000 FCP chacun au titre de l'achat des parcelles sises à [Localité 9] ;

Constater que M. [M] [N] toutes causes confondues a reçu au total 64.500.000 FCP ;

Vu la mise en demeure de payer adressée par courrier recommandé à M. [M] [N] le 7 mars 2011 de payer 55.000.000 FCP, courrier réceptionné par le 22 mars 2011 ;

Par suite,

Vu les articles 1134 et 1147 du code civil,

Réformer le jugement entrepris du chef des condamnations pécuniaires prononcées,

Statuant à nouveau.

Voir dire et juger que Monsieur [M] [N] doit rembourser à Monsieur [J] [I] la somme de 64.500.000 FCP, montant des acomptes perçus par lui toutes causes confondues ;

Le condamner à payer à Monsieur [J] [I] la somme de 55.000.000 FCP avec intérêts de droit à compter de la réception par lui de la mise en demeure, soit le 22 mars 2011 ;

Le condamner à payer à Monsieur [J] [I] le surplus de 9.500.000 FCP, avec intérêts de droit à compter de la décision à intervenir ;

Débouter Monsieur [M] [N] de toutes ses prétentions, fins et conclusions contraires ;

Le condamner à payer, par application de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française, à Monsieur [J] [I], la somme de 800.000 FCP,

Le condamner de même aux entiers dépens dont distraction.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 novembre 2021.

Il est renvoyé à l'arrêt du 18 juin 2020 pour l'exposé de la décision déférée et des prétentions antérieures des parties. Il est répondu dans les motifs aux moyens et arguments des parties, aux écritures desquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé.

Motifs de la décision :

L'appel a été interjeté dans les formes et délais légaux. Il est recevable.

L'arrêt du 18 juin 2020 a débouté [M] [N] de sa demande d'annulation du jugement entrepris. Aucun moyen ne permet de remettre en cause celui-ci en ce qu'il a déclaré irrecevable l'exception de procédure tirée de la nullité de l'assignation.

Me [D], notaire à [Localité 7], a établi le 7 novembre 2007 deux attestations aux termes desquelles il était chargé de la régularisation des actes de vente des parcelles [Cadastre 2] commune de [Localité 9] et [Cadastre 3] et [Cadastre 4] commune de [Localité 7].

Il est constant que ces actes authentiques n'ont pas été passés. Le transfert de propriété des immeubles qui faisaient l'objet des deux compromis de vente en date du 22 mai 2007 ne s'est donc pas produit.

Il résulte des stipulations claires et précises de ces deux compromis que les conditions suspensives qui y étaient inscrites devaient être toutes réalisées au plus tard le 31 décembre 2007.

Mais il n'est pas justifié qu'elles l'aient été.

L'avenant en date du 30 octobre 2007 ne contient aucune stipulation ayant pour objet le report de la date de réalisation des conditions suspensives. Il ne traite que «des clauses relatives au paiement du prix», pour lequel un échelonnement fut convenu.

Mais le prix n'est pas dû puisque le transfert de propriété n'a pas eu lieu.

Les compromis de vente ont par conséquent produit leurs effets, en pareil cas, à compter du 1er janvier 2008, à savoir que la vente a été rendue «nulle et non avenue» et le vendeur et l'acquéreur «ont repris leur entière liberté».

Le paiement du prix devait être fait au moment de la signature de l'acte authentique. Les avances faites par l'acquéreur sont donc devenues sans cause et sont par conséquent sujettes à répétition (C. civ., art. 1235).

Le protocole d'accord en date des 14 septembre 2010 et 13 janvier 2011 ne traite que du sort de la vente des parcelles [Cadastre 2] et [Cadastre 1] commune de [Localité 9].

Tout en s'engageant « irrévocablement » à rembourser à [J] [I] la somme de 45 MF CFP « d'ores et déjà perçue par lui à titre d'avance sur le prix de vente », [M] [N] a fait stipuler une condition qui est pour lui purement potestative : « ce remboursement aura lieu le jour de la régularisation par Me [D] en un acte authentique de la revente au profit d'un tiers des biens susdésignés et en tout état de cause au plus tard le (date laissée en blanc) ».

Autrement dit, [M] [N] pouvait différer indéfiniment son remboursement « irrévocable » en s'abstenant de vendre ces terrains à un tiers.

Et, en l'absence de mention d'une date limite de signature de l'acte de vente à un tiers, l'alternative prévue par l'accord n'en était pas réellement une : passés neuf mois en l'absence de régularisation d'une telle vente, [M] [N] consentait seulement à accorder un « droit de priorité » à [J] [I] pour l'acquisition des mêmes biens, engagement ne comportant pas d'accord sur le prix, et tout autant purement potestatif de sa part.

Le protocole d'accord en date des 14 septembre 2010 et 13 janvier 2011 contient la reconnaissance par [M] [N] d'une dette d'un montant de 45 000 000 F CFP envers [J] [I]. Les conditions fixées pour le remboursement ne dépendent que de la volonté du débiteur et sont par conséquent inopposables au créancier.

Cette créance est certaine, liquide et exigible. Elle a pour cause le remboursement d'avances sur le prix d'une vente d'immeubles qui ne s'est pas réalisée.

Et il résulte des pièces produites que la créance d'[J] [I] contre [M] [N] est d'un montant encore supérieur.

Le compte d'A. [I] communiqué par l'étude notariale [D] enregistre en effet des avances faites par celui-ci à C. [N] d'un montant total de 62 500 000 F CFP entre juillet 2007 et septembre 2008.

En outre, la signature de [M] [N] sur un reçu de remise d'espèces et la copie de chèques à son ordre en février, août, septembre et décembre 2009 et février 2010 prouve qu'il lui a été versé au moins 2 000 000 F CFP hors la comptabilité du notaire. La demande d'[J] [I] de remboursement de la somme totale de 64 500 000 F CFP est par conséquent bien fondée.

Ce montant constitue une créance certaine, liquide et exigible d'[J] [I] à l'égard de [M] [N] qui a pour cause le remboursement d'avances sur le prix d'une vente d'immeubles qui ne s'est pas réalisée. Elle doit être remboursée en application de l'article 1235 du code civil et elle porte intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure notifiée le 22 mars 2011.

Le jugement sera donc confirmé, sauf sur le point de départ du cours des intérêts, et actualisé sur le montant total des paiements sujets à répétition.

La solution de l'appel motive le rejet de la demande de dommages et intérêts de l'appelant pour action en justice abusivement formée par l'intimé.

Il sera fait application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française au bénéfice de ce dernier. La partie qui succombe est condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Statuant sur les points non jugés par l'arrêt du 18 juin 2020 ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a fixé la date de départ du cours des intérêts au taux légal à celle de l'assignation du 29 mai 2012 ;

Statuant à nouveau de ce chef, fixe le départ du cours des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure notifiée le 22 mars 2011 ;

Y ajoutant, condamne [M] [N] à payer à [J] [I] les sommes supplémentaires de :

17 000 000 FCP avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure notifiée le 22 mars 2011 ;

800 000 FCP en application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française devant la cour ;

Déboute [M] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Rejette toute autre demande ;

Met à la charge de [M] [N] les dépens de première instance et d'appel, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 409 du Code de procédure civile de la Polynésie française.

Prononcé à Papeete, le 12 mai 2022.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : G. RIPOLL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet d
Numéro d'arrêt : 18/00137
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;18.00137 ?
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