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19/06/2008 | FRANCE | N°360

France | France, Cour d'appel de Papeete, Ct0173, 19 juin 2008, 360


No 360

RG 584/SOC/07

Grosse délivrée à

Me Eftimie-Spitz

le

Expédition délivrée à

Polynésie française

le

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Sociale

Audience du 19 juin 2008

Madame Catherine TEHEIURA, conseillère à la Cour d'Appel de Papeete, assistée de Mme Maeva SUHAS-TEVERO, greffier ;

En audience publique tenue au Palais de Justice ;

A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :

Entre :

Monsieur Auguste X... Y..., né le 15 août 1963 à Papeete, de

nationalité française, demeurant ... ;

Appelant par déclaration d'appel reçue au greffe du Tribunal du Travail de Papeete sous le numéro 07/00106 le 23 octob...

No 360

RG 584/SOC/07

Grosse délivrée à

Me Eftimie-Spitz

le

Expédition délivrée à

Polynésie française

le

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Sociale

Audience du 19 juin 2008

Madame Catherine TEHEIURA, conseillère à la Cour d'Appel de Papeete, assistée de Mme Maeva SUHAS-TEVERO, greffier ;

En audience publique tenue au Palais de Justice ;

A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :

Entre :

Monsieur Auguste X... Y..., né le 15 août 1963 à Papeete, de nationalité française, demeurant ... ;

Appelant par déclaration d'appel reçue au greffe du Tribunal du Travail de Papeete sous le numéro 07/00106 le 23 octobre 2007, déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'Appel le 24 du même mois, sous le numéro de rôle 584/SOC/07, ensuite d'un jugement du tribunal du travail de Papeete rendu le 1er octobre 2007 ;

Représenté par Me Marie EFTIMIE-SPITZ, avocat au barreau de Papeete ;

d'une part ;

Et :

La Polynésie Française, représentée par M. le Président du Gouvernement, sis Avenue Pouvanaa a Oopa, BP 2551-98713 Papeete ;

Intimée ;

Représentée par Mme Roselyne WONG, comparante le 10 avril 2008 ;

d'autre part ;

Après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique du 22 mai 2008, devant M. SELMES, président de chambre, Mme TEHEIURA et Mme LASSUS-IGNACIO, conseillères, assistés de Mme SUHAS-TEVERO, greffier, le prononcé de l'arrêt ayant été renvoyé à la date de ce jour ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

A R R E T,

Par acte sous seing privé du 15 mars 1991, Auguste Y... a été engagé par le territoire de la Polynésie française en qualité d'ouvrier qualifié à compter du 1er mars 1991.

Par avenant du 17 décembre 1993, il a été engagé en qualité d'employé d'administration à compter du 1er décembre 1993.

Il a été affecté au service d'hygiène scolaire, au ministère de la Santé et de la Recherche, au ministère de la Culture et de la Vie associative, au service territorial du Tourisme et au ministère de l'Education et de l'Enseignement technique.

Par lettre du 10 mai 2005, il a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 30 mai 2005.

Par lettre du 15 juin 2005, il a été licencié pour faute grave mais avec préavis de deux mois.

Il lui est reproché de s'être absenté irrégulièrement du 9 au 31 mars 2005 inclus et d'avoir insulté son supérieur hiérarchique ainsi qu'un de ses collègues de travail.

Par lettre du 23 juin 2005, Auguste Y... a répondu à son employeur qu'il le considérait responsable de la rupture du contrat de travail en raison du non-paiement des salaires depuis le 1er mars 2005 et de rappels de salaires depuis le 1er septembre 2003.

Par jugement rendu le 1er octobre 2007, le tribunal du travail de Papeete a :

- dit que le licenciement est régulier et fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

- alloué à Auguste Y... :

* la somme de 1 704 556 FCP, à titre d'indemnité légale de licenciement,

* la somme de 48 702 FCP, à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

* la somme de 60 000 FCP, sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Par déclaration faite au greffe du tribunal du travail de Papeete le 23 octobre 2007, Auguste Y... a relevé appel de cette décision.

Il demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué en ses dispositions relatives à l'indemnité de congés payés sur préavis ;

- de l'infirmer pour le surplus 

- de lui allouer les sommes de :

* 354 280 FCP, au titre des rappels de salaires

* 243 508 FCP, au titre de l'indemnité pour non-respect de la procédure

* 1 948 064 FCP, au titre de l'indemnité légale de licenciement

* 14 610 480 FC, au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 250 000 FCP, au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Il soutient que la lettre de convocation à l'entretien préalable ne mentionne aucun grief ; que l'employeur ne justifie pas avoir notifié les motifs de licenciement lors de l'entretien préalable ; que le délai de convocation à l'entretien préalable n'a pas été respecté ; que les fait reprochés sont prescrits ; que l'employeur n'a pas rempli son obligation de payer le salaire, ce qui le rend responsable de la rupture du contrat de travail ; que le comportement de la Polynésie française l'a rendu dépressif et que les fautes invoquées par cette dernière à l'appui du licenciement sont postérieures à la faute de l'employeur ; que son absence à compter du 1er mars 2005 avait déjà été sanctionnée par la cessation du versement de sa rémunération ; que la règle du service fait n'est pas supérieure à un principe général du droit et aux dispositions de l'article 34 alinéa 1 de la délibération no 91-002 AT du 16 janvier 1991 ; que les faits du 8 mars 2005 étaient prescrits à la date de la convocation à l'entretien préalable et que l'employeur ne peut se prévaloir de «faits prescrits non sanctionnés à l'occasion de nouveaux faits qu'il estime fautifs» ; que la précarité de sa situation et « l'indélicatesse de Mme Myriam Z...» ne permettent pas de qualifier l'incident du 29 avril 2005 de faits justifiant le licenciement ; qu'il lui est dû au 15 août 2005 la somme de 354 280 FCP, à titre de salaires ; que les textes applicables en Polynésie française n'excluent pas le cumul de l'indemnité pour défaut de respect de la procédure de licenciement et de l'indemnité pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ; qu'au 16 mars 1991, il avait déjà accompli deux années complètes de service et qu'il possédait une ancienneté de 16 ans au moment du licenciement.

La Polynésie française demande à la cour de constater que l'absence irrégulière d'Auguste Y... a duré du 9 février au 31 mars 2005 et de confirmer le jugement attaqué pour le surplus.

Elle fait valoir que la procédure de licenciement est régulière ; que l'absence irrégulière d'Auguste Y... qui a pris fin le 1er avril 2005 et les insultes du 29 avril 2005 ne sont pas prescrites ; qu'Auguste Y... ne justifie que de 14 ans complètes de service ; que la preuve est rapportée d'une absence injustifiée débutant le 8 février 2005 et de «propos particulièrement grossiers et insultants …tenus le 29 avril 2005 » ; que «tous les retards de salaires invoqués proviennent en fait de l'accomplissement des formalités administratives tendant à régulariser une situation administrative provoquée par les dérives professionnelles de» l'appelant ; que la demande en paiement de rappels de rémunération doit être rejetée en considération des périodes d'absence de service fait et qu'elle n'a pas manqué à son obligation relative aux salaires.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 avril 2008.

La cour a reçu du conseil d'Auguste Y... une note en délibéré déposée au greffe le 3 juin 2008.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de l'appel :

La recevabilité de l'appel n'est pas contestée et aucun élément ne permet d'en soulever d'office l'irrecevabilité.

Sur la note en délibéré :

La note en délibéré a été adressée après l'ordonnance de clôture et sans avoir été autorisée par la cour.

Elle doit donc être déclarée irrecevable et écartée des débats.

Sur l'irrégularité du licenciement :

L'article 13 de la délibération no 91-2 AT du 16 janvier 1991 dispose que «l'employeur qui envisage de licencier un salarié doit respecter la procédure suivante :

«Avant toute décision, l'employeur doit convoquer l'intéressé à un entretien par lettre recommandée avec avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge.

Cette lettre de convocation doit indiquer à l'intéressé que son licenciement est envisagé et la nature personnelle ou économique de celui-ci, ainsi que la date, l'heure et le lieu de l'entretien.

Elle précise qu'il peut se faire assister lors de l'entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, ou, avec l'accord du chef d'entreprise, par une personne extérieure à l'entreprise.

L'entretien ne peut avoir lieu moins de deux jours francs et plus de quinze jours francs, dimanche et jour férié exclus, après la présentation de la lettre recommandée ou sa remise en main propre.

Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'exposer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié.»

A la lecture des éléments versés aux débats, il ressort que les premiers juges ont fait une application exacte de cet article ainsi que de la règle de computation des délais francs.

Par ailleurs, aucun texte n'exige l'énumération des griefs dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, ni la rédaction d'un procès-verbal à la suite de cet entretien.

Enfin ledit entretien a eu lieu et aucun élément ne permet de conclure, ni même de présumer, qu'il n'a pas eu pour objet le licenciement.

Le jugement attaqué doit donc être confirmé en ce qu'il a dit régulière la procédure de licenciement.

Sur le bien fondé du licenciement :

Il résulte de l'article 13 de la délibération no 91-2 AT du 16 janvier 1991 que le licenciement doit intervenir par lettre ; que cette lettre doit être motivée et qu'elle fixe les limites du litige.

En l'espèce, la lettre du 15 juin 2005 fait état d'une absence du 9 au 31 mars 2005 et, le 9 ne pouvant être interprété que comme étant le 9 mars, la juridiction sociale n'a pas le pouvoir de modifier cette date mentionnée dans la lettre de licenciement.

En tout état de cause, ainsi que le souligne à juste titre le tribunal du travail, une absence injustifiée de 22 jours constitue un motif sérieux de licenciement.

En outre, Auguste Y... n'a pas hésité, le 28 avril 2005, à proférer des insultes particulièrement vulgaires à l'encontre d'une collègue Mirianne A... épouse B... en lui disant notamment : «va te faire enculer…regarde ton cul avant de regarder le mien…».

Ces propos faisaient suite à ceux, racistes, adressés, le 8 mars 2005, à la supérieure hiérarchique de l'appelant, Lysiane C... D... qui sont les suivants : «tu ne mérites pas qu'on te respecte, c'est la race..».

Auguste Y... ne saurait tirer argument de leur prescription puisque la poursuite par un salarié d'un fait fautif autorise l'employeur à se prévaloir de faits similaires.

En outre, les pièces versées aux débats par la Polynésie française font ressortir que la carrière professionnelle d'Auguste Y... a été émaillée d'incidents, d'agressions verbales et d'absences qui ont pu rendre difficile le calcul de sa rémunération.

Compte-tenu de ces motifs et de ceux pertinents tant en fait qu'en droit et exempts d'insuffisance ou de contradiction des premiers juges que la cour adopte purement et simplement, le jugement attaqué doit être confirmé en ce qu'il a :

- dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

- constaté qu'avant le licenciement, le salarié n'a pas démissionné, ni pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ;

- constaté également qu'il s'est excusé et a souhaité reprendre le travail.

Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement :

L'article 34 de la convention collective des agents non fonctionnaires de l'administration, plus favorable au salarié que l'article 12 de la délibération no 97-2 AT du 16 janvier 1991, dispose que : «l'indemnité est fixée à 50% de rémunération mensuelle par année complète de service, les fractions d'année n'étant pas pris en compte.»

Dans la mesure où une année complète commence le 1er janvier et se termine le 31 décembre, c'est à juste titre que le tribunal du travail a fixé à 14 ans l'ancienneté d'Auguste Y... et lui a alloué la somme de 1 704 556 FCP.

Sur les rappels de salaires :

Les éléments versés aux débats font apparaître que la somme de 354 280 FCP réclamée par l'appelante correspond aux périodes d'absences injustifiées et qu'elle n'est pas due, le paiement d'une rémunération étant subordonné, conformément aux règles de la comptabilité publique, à l'exécution du service.

La décision attaquée doit ainsi être confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort ;

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 1er octobre 2007 par le tribunal du travail de Papeete en toutes ses dispositions.

Prononcé à Papeete, le 19 juin 2008.

Le Greffier, Le Président,

M. SUHAS-TEVERO JP SELMES


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : 360
Date de la décision : 19/06/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de première instance de Papeete, 01 octobre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.papeete;arret;2008-06-19;360 ?
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