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25/01/2007 | FRANCE | N°45

France | France, Cour d'appel de Papeete, Chambre civile 1, 25 janvier 2007, 45


No 45

RGo 165/CIV/05

Grosses délivrées à

Mes Piriou et Lam

le

Expéditions délivrées à

Mes Usang

leREPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 25 Janvier 2007

Madame Isabelle PINET-URIOT, conseillère, de la Cour d'Appel de Papeete, assistée de Madame Maeva SUHAS-TEVERO, greffier ;

En audience publique tenue au Palais de Justice ;

A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :

Entre :

La Société Anset anciennement Eurofi Tahiti, ayant son siège 5 aven

ue Prince Hinoi - BP 4656 - 98713 Papeete, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice ;

Appelante par requête en date d...

No 45

RGo 165/CIV/05

Grosses délivrées à

Mes Piriou et Lam

le

Expéditions délivrées à

Mes Usang

leREPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 25 Janvier 2007

Madame Isabelle PINET-URIOT, conseillère, de la Cour d'Appel de Papeete, assistée de Madame Maeva SUHAS-TEVERO, greffier ;

En audience publique tenue au Palais de Justice ;

A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :

Entre :

La Société Anset anciennement Eurofi Tahiti, ayant son siège 5 avenue Prince Hinoi - BP 4656 - 98713 Papeete, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice ;

Appelante par requête en date du 13 avril 2005, déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'Appel le 20 du même mois, sous le numéro de rôle 165/CIV/05, d'un jugement rendu par le tribunal civil de première instance de Papeete en date du 2 mars 2005 no 03/00545 ADD ;

Représentée par Me Yves PIRIOU, avocat au barreau de Papeete ;

d'une part ;

Et :

- Monsieur Stellio X..., né le 23 mai 1973 à Papeete, de nationalité française, demeurant Paea PK 22 côté mer ;

Représenté par Me Jeanne LAM, avocat au barreau de Papeete ;

- Le Fonds de Garantie Automobile, dont le siège social est sis 64, rue Defrance 94682 Vincennes Cédex ;

Représenté par Me Arcus USANG-KARA, avocat au barreau de Papeete ;

Intimés ;

d'autre part ;

Après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique du 30 novembre 2006, devant M. GAUSSEN, président, Mme PINET-URIOT et M. MONDONNEIX, conseillers, assistés de Mme SUHAS-TEVERO, greffier, le prononcé de l'arrêt ayant été renvoyé à la date de ce jour ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

A R R E T,

LES FAITS ET LA PROCEDURE :

Stellio X... a été victime le 15 décembre 2001 d'un accident de la circulation routière, alors qu'il était passager du véhicule Ford appartenant à sa concubine Anne-Marie Y..., et conduit par Moanatini Z....

L'enquête de gendarmerie pratiquée a établi qu'à la suite d'un déjeuner arrosé, Moanatini Z..., non titulaire du permis de conduire, a pris le volant avec comme passager avant Stellio X...  et s'est endormi, provoquant la chute du véhicule sur le bas côté de la voie de circulation.

Stellio X... a été blessé et a fait l'objet d'un arrêt de travail de 60 jours.

Moanatini Z... a fait l'objet d'une convocation en justice pour défaut de permis de conduire, défaut de maîtrise et blessures involontaires ayant entraîné une ITT inférieure à 3 mois.

Par jugement du 15 février 2002 le tribunal de police de Papeete a déclaré, tel que cela résulte du jugement dudit tribunal statuant sur intérêts civils, Moanatini Z... coupable des faits reprochés et responsable des conséquences dommageables de l'accident dont a été victime Stellio X....

Par jugement du 17 janvier 2003, inopposable au Fonds de garantie, le tribunal de police de Papeete, statuant sur intérêts civils a donné acte à Stellio X... de sa constitution de partie civile, ordonné une expertise médicale, condamné Moanatini Z... à lui verser la somme de 300.000 FCFP à titre de provision.

Par requête introductive d'instance notifiée par acte d'huissier de justice en date du 19 septembre 2003, Stellio X... a fait assigner devant le Tribunal de Première Instance de Papeete le Groupe EUROFI, assureur du véhicule au bord duquel il circulait comme passager, aux fins de voir celui-ci condamner à garantir les conséquences dommageables de l'accident causé par Moanatini Z... et d'obtenir, en conséquence, l'organisation d'une mesure d'expertise médicale et sa condamnation au payement d'une indemnité provisionnelle de 500.000 F CFP, outre une somme de 150.000 F CFP au titre des frais irrépétibles .

Il a justifié son action par le fait qu'il s'était vainement adressé au groupe EUROFI qui refusait toute garantie au motif que le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire au moment de l'accident et ce, malgré les conclusions en sens contraire du Fonds de garantie automobile qui refusait également toute prise en charge invoquant une conduite à l'insu.

Par jugement du 2 mars 2005 le Tribunal de Première Instance a notamment :

- reçu la C.P.S en son intervention volontaire ;

- rejeté l'exception d'exclusion de garantie opposée par le groupe EUROFI ;

- condamné le groupe EUROFI à garantir les conséquences dommageables du sinistre survenu le 15 décembre 2001;

- mis hors de cause le Fonds de garantie automobile ;

- ordonné une mesure d'expertise et fixé la provision à valoir sur la rémunération de l'expert à la somme de 40.000 F CFP ;

- condamné le groupe EUROFI à verser à Stellio X... la somme de 300.000 F CFP à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices ;

- réservé les droits de la C.P.S.

Selon requête enregistrée au greffe de la cour le 20 avril 2005 la Société ANSET anciennement dénommée EUROFI TAHITI a relevé appel de ce jugement.

Elle demande à la Cour de :

« Constater qu'au moment de l'accident, Monsieur X... avait la garde et la conduite du véhicule et avait de ce fait la qualité d'assuré,

Constater que Monsieur Z... n'était pas titulaire du permis de conduire,

Constater que Monsieur Z... ne conduisait pas le véhicule assuré à l'insu de Monsieur X...,

Constater qu'en toute hypothèse, ni Madame Y..., ni Monsieur X... ne sont civilement responsables des agissements de Monsieur Z...,

En conséquence,

Infirmer le jugement du Tribunal de Première Instance de Papeete en date du 2 mars 2005 en ce qu'il a rejeté l'exclusion de garantie opposée par la Compagnie EUROFI et en ce qu'il a condamné cette dernière à garantir les conséquences de l'accident de la circulation survenu le 15 décembre 2001,

Dire et juger que la Compagnie EUROFI est bien fondée à opposer une exclusion de garantie,

Statuer ce que de droit sur une éventuelle demande de prise en charge des conséquences du sinistre par le Fonds de garantie,

Condamner le Fonds de garantie, au paiement de la somme de 150.000 F CFP au titre des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française. »

Au soutien de son appel la Société ANSET invoque à nouveau la clause d'exclusion de garantie prévue dans la police d'assurance dans le cas de l'absence de détention par le conducteur du véhicule d'un permis de conduire valide. Elle soutient que la conduite à l'insu n'est une exception à l'exclusion de garantie que pour autant qu'elle remplit deux conditions cumulatives  qu'il faut ainsi que la démonstration soit faite d'une part d'une conduite à l'insu et d'autre part que la responsabilité civile de l'assuré dont le véhicule a été conduit à l'insu soit engagée ; qu'en l'espèce aucune des deux conditions cumulativement exigées n'est remplie ; qu'il ressort de l'enquête préliminaire que Moanatini Z... ne conduisait pas le véhicule à l'insu de Stellio X... ; que c'est à l'égard de ce dernier que doit être appréciée l'existence d'une conduite à l'insu ; qu'ont la qualité d'assurés en matière d'assurance automobile non seulement le souscripteur du contrat, le propriétaire du véhicule assuré mais également toute personne ayant, avec leur autorisation la garde et la conduite du véhicule ; que Stellio X..., compagnon de madame Y..., souscripteur du contrat et propriétaire du véhicule, en avait, avec l'autorisation de cette dernière la garde ; que Stellio X... ne pouvait ignorer, étant passager avant, la qualité de conducteur de Moanatini Z... ; qu'en tout état de cause il résulte d'une jurisprudence de la cour de cassation que le régime de conduite à l'insu n'a nullement vocation à conférer au conducteur à l'insu la qualité d'assuré ; que l'assureur ne doit sa garantie en cas de conduite à l'insu que pour autant que la responsabilité civile de son assuré puisse être recherchée du chef de l'utilisateur à l'insu.

Stellio X... fait valoir qu'il a été victime d'un accident de circulation ; qu'en application de la loi Badinter il est en droit de demander l'indemnisation totale de son préjudice au conducteur du véhicule impliqué ; que ce véhicule est assuré à la Compagnie d'assurance EUROFI ; que celle-ci a refusé de prendre en charge les conséquences dommageables de l'accident ; que le Fonds de garantie l'a renvoyé à la compagnie d'assurance ; que le Fonds de garantie lui a soutenu par courrier que le texte écartant l'exclusion de garantie en cas de conduite à l'insu ,ne faisait pas de distinction entre la responsabilité civile de l'assuré et celle du conducteur abusif ; qu'en l'espèce Moanatini Z... conduisait tant à l'insu de Mme Y... que de la sienne, ayant profité de son sommeil ; qu'il est également constant que Mme Y... n'est pas civilement responsable de Moanatini Z... n'en étant ni la mère ni l'employeur ; qu'il a adressé une demande d'indemnité au Fonds de garantie et qu'aux termes de l'article R 420-21 du code des assurances, à défaut d'accord de celui-ci sur l'existence des conditions d'ouverture du droit à indemnité, la victime saisit le tribunal ; qu'il était donc en droit de citer le fonds de telle sorte qu'une condamnation aurait pu intervenir si la compagnie d'assurance était mise hors de cause.

S'en remettant à justice sur la prise en charge de son préjudice il demande à la cour de :

- statuer ce que de droit sur la garantie des conséquences dommageables de l'accident par la compagnie ANSET,

- dire qu'en cas de mise hors de cause de la compagnie ANSET, le Fonds de garantie automobile sera tenu de garantir le sinistre,

- condamner la compagnie ANSET (ou le Fonds de garantie automobile) à lui payer une indemnité provisionnelle de 500.OOO FCFP et 300.000FCFP au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- confirmer le jugement en ce qui concerne l'expertise ordonnée.

Le Fonds de garantie automobile fait valoir que la demande de Stellio X... est irrecevable, celui-ci ayant obtenu une mesure d'expertise et une provision devant la juridiction pénale et qu'il lui appartient de faire exécuter la décision dont elle bénéficie ; que rien n'empêche Stellio X... de diligenter l'expertise et de la rendre opposable.

Il soutient qu'il ne peut être condamné lorsque l'auteur de l'accident est identifié ; que l'exclusion de garantie ne peut être opposée en raison de l'existence en l'espèce d'une conduite à l'insu ; que Stellio X..., s'il peut être considéré comme ayant la garde du véhicule n'en avait pas la conduite et ne peut donc être considéré comme un assuré ; que l'article R211-10 du code des assurances, dont la teneur se retrouve dans l'article 10 de la délibération AT 67-66 du 12 juin 1967 n'opère aucune distinction entre la responsabilité civile de l'assuré et celle du conducteur abusif ; qu'ainsi, même si la responsabilité civile de l'assuré n'est pas engagée, l'assureur doit sa garantie.

En conséquence il sollicite la confirmation en toutes ses dispositions du jugement.

MOTIFS DE L' ARRET :

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas discutée et qu'aucun élément ne permet à la cour d'en relever d'office l'irrégularité ;

Attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a déclaré recevable en son principe la requête de Stellio X... ;

Attendu que l'article 10 de la délibération no 67-66 du 12 juin 1967 modifiée par la délibération no69-29 du 27 mars 1969 rendant obligatoire l'assurance en matière de circulation des véhicules terrestres à moteur dispose que : « le contrat d'assurance pourra… comporter des clauses prévoyant une exclusion de garantie dans les cas suivants :

1) Lorsqu'au moment du sinistre, le conducteur n'a pas l'âge requis ou ne possède pas les certificats, en état de validité, exigés par la réglementation en vigueur pour la conduite du véhicule, sauf en cas de vol, de violence ou d'utilisation du véhicule à l'insu de l'assuré».

Attendu que selon les dispositions du contrat d'assurance « par « Assuré » il faut entendre le contractant, le propriétaire du véhicule assuré et toute personne ayant la garde ou la conduite du véhicule…. Il n'y a pas d'assurance… si le conducteur au moment du sinistre ne satisfait pas aux obligations réglementaires en vigueur pour la conduite du véhicule quant à l'âge requis et aux certificats (permis de conduire) en état de validité dont il doit être titulaire. »

Attendu qu'il résulte de ces dispositions, comme l'a déjà jugée la présente cour dans ses arrêts rendus les 18 septembre 2003, 25 novembre 2004 et 28 juillet 2005, que si l'exception de non garantie ne s'applique pas en cas de « conduite à l'insu », c'est seulement au profit de l'assuré, lorsque sa responsabilité est recherchée, et non au profit du conducteur non autorisé ;

Attendu en l'espèce qu'il ressort des éléments du dossier que :

- Stellio X..., concubin de Anne-Marie Y... et conducteur déclaré au contrat avait la garde du véhicule au moment de l'accident, et à ce titre la qualité d'assuré,

- qu'il savait que Moanatini Z... ne possédait pas de permis de conduire,

- que lors de l'accident Stellio X... était passager avant du véhicule,

- que s'il résulte de la procédure que Stellio X... avait absorbé de l'alcool, rien ne permet , notamment en l'absence de contrôle du taux d'alcool dans le sang ou l'air expiré, d'établir une absence totale de conscience de ce dernier ; qu'au surplus Stellio X... reconnaît dans ses déclarations, s'être en cours de trajet, réveillé, avoir demandé à Moanatini Z... pourquoi il conduisait, s'être rendormi et lui avoir laissé le volant ;

Attendu qu'ainsi il ne peut être retenu de « conduite à l'insu » de Stellio X... ;

Qu'en revanche s'il est établi que Moanatini Z... a conduit sans l'autorisation et à l'insu de Anne-Marie Y..., absente de son domicile le jour de l'accident, il est également constant que la responsabilité civile de celle-ci ne saurait être retenue ;

Attendu ,dans ses conditions que la Compagnie EUROFI est bien fondée à opposer une exclusion de garantie et doit être mise hors de cause ; qu'il y a donc lieu de réformer le jugement déféré de ce chef.

Attendu que le Fonds de garantie a pour mission ,lorsque le responsable de l'accident est inconnu ou n'est pas assuré d'indemniser les victimes des dommages résultant des atteintes à leur personne lorsque ces dommages résultent d'un accident dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur en circulation ;

Attendu que c'est à juste titre que le tribunal a ordonné une mesure d'expertise confiée au Docteur A... et réservé les droits de l'organisme social jusqu'à l'indemnisation définitive du préjudice de Stellio X... et qu'il convient de confirmer la décision de ces chefs ; qu'en revanche, compte tenu des éléments du dossier il y lieu de ramener la provision allouée à la somme de 100.000 F CFP ;

Attendu que l'équité ne commande pas de faire droit à la demande des parties sur le fondement de l'article 407 du Code de Procédure Civile local.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort ;

Confirme le jugement du Tribunal de Première Instance en date du 2 mars 2005 en ce qu'il reçu la Caisse de Prévoyance Sociale en son intervention volontaire, réservé ses droits et ordonné une mesure d'expertise ;

L'infirme en ce qu'il a rejeté l'exclusion de garantie opposée par la Compagnie EUROFI et en ce qu'il a condamné celle-ci à garantir les conséquences dommageables de l'accident du 15 décembre 2001 et fixé le montant de la provision allouée à la somme de 300.000 F CFP ;

Et statuant à nouveau,

Dit que la compagnie EUROFI est bien fondée à opposer une exclusion de garantie ;

Met hors de cause la compagnie EUROFI ;

Dit que le Fonds de garantie sera tenu de prendre en charge les conséquences de l'accident ;

Fixe la provision à valoir sur l'indemnisation des préjudices à la somme de CENT MILLE (100.000) FRANCS PACIFIQUES ;

Dit que cette somme sera à la charge du Fonds de garantie ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 407 du Code de Procédure de la Polynésie Française

Dit que le Fonds de garantie supportera les dépens d'appel ;

Prononcé à Papeete, le 25 JANVIER 2007

Le Greffier, Le Président,

M. SUHAS-TEVERO P. GAUSSEN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 45
Date de la décision : 25/01/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de première instance de Papeete, 02 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.papeete;arret;2007-01-25;45 ?
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