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28/10/2004 | FRANCE | N°47

France | France, Cour d'appel de Papeete, Chambre civile 1, 28 octobre 2004, 47


No 617/ADDRGo182/CIV/93 Grosse délivrée à Me Quinquis le Expéditions délivrées àMes Lollichon, Gibeaux etGiau le REPUBLIQUE FRANCAISECOUR D'APPEL DE PAPEETEChambre CivileAudience du 28 octobre 2004Monsieur Pierre X..., conseiller à la Cour d'Appel de Papeete, assisté de Mme Maeva TEVERO greffier ;En audience publique tenue au Palais de Justice ;A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :Entre :1- Monsieur Françis Y..., né à Papeete le 15 juin 1926 à Papeete, demeurant à Pamatai, Faa'a ; 2- Monsieur Arthur Y..., né à Faa'a le 26 juillet 1939, demeurant à Pamatai, Faa'a ;3- Mada

me Isabelle Y... épouse Z..., née à Faa'a le 5 juin 1945, demeuran...

No 617/ADDRGo182/CIV/93 Grosse délivrée à Me Quinquis le Expéditions délivrées àMes Lollichon, Gibeaux etGiau le REPUBLIQUE FRANCAISECOUR D'APPEL DE PAPEETEChambre CivileAudience du 28 octobre 2004Monsieur Pierre X..., conseiller à la Cour d'Appel de Papeete, assisté de Mme Maeva TEVERO greffier ;En audience publique tenue au Palais de Justice ;A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :Entre :1- Monsieur Françis Y..., né à Papeete le 15 juin 1926 à Papeete, demeurant à Pamatai, Faa'a ; 2- Monsieur Arthur Y..., né à Faa'a le 26 juillet 1939, demeurant à Pamatai, Faa'a ;3- Madame Isabelle Y... épouse Z..., née à Faa'a le 5 juin 1945, demeurant à Pamatai Faa'a ;4- Madame Jeannine Y... épouse A..., née à Papeete le 9 janvier 1944, demeurant à Pamatai Faa'a ;5- Madame Lina Y..., née à Faa'a le 18 février 1948, demeurant à Pamatai, Faa'a ;6- Madame Choun Yin Y... B..., née à Papeete le 7 septembre 1930, demeurant à Pamatai, Faa'a ;7- Monsieur Loutinekone Y... B..., né à Faa'a le 5 mai 1934, demeurant à Pamatai, Faa'a ;8- Monsieur Louthékion Y... B..., né à Faa'a le 31 mai 1936, demeurant Pamatai, Faa'a ;Appelants par requête en date du 18 juin 1993, déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'Appel le 25 du même mois, sous le numéro de rôle 182/CIV/93, d'un jugement du Tribunal Civil de première instance de Papeete en date du 3 février 1993 no 267-205 ;Représentés par Me LOLLICHON, avocat à Papeete ;

D'une part ;Et :1- Madame Tepuaihimatoa C..., épouse D... dit William E..., née à Manihi le 9 septembre 1933, demeurant à Takapoto - Tuamotu ;Représentée par Me QUINQUIS, avocat à Papeete ;2- Monsieur Michel Christian Marama F..., né à Papeete le 2 septembre 1950, demeurant avenue du Chef Vairaatoa, quartier Puea, à Papeete ;3- Madame Violette Tera G... épouse F..., née à Papeete le 26 octobre 1946, demeurant avenue Chef Vairaatoa, quartier Puea, à Papeete ;4- Monsieur Tata G..., né à Mutuaura-Rimatara le 8 avril 1950, demeurant avenue Chef Vairaatoa, à Papeete ou à Pirae

route de l'hippodrome ;5- Monsieur Manase H... dit Manate, né à Mutuaura- Rimatara le 29 mars 1930, demeurant avenue du Chef Vairaatoa, quartier Puea, à Papeete ;6- Madame Titaupoo G... épouse H..., née à Aanatonu le 10 avril 1933, demeurant avenue Chef Vairaatoa, quartier Puea, à Papeete ;Les numéros 2 à 6 représentés par Me GIBEAUX, avocat à Papeete ;7- Monsieur Michel I..., notaire, 8- Madame Dominique J..., notaire, tous deux demeurant rue du Docteur K..., BP 555 à Papeete ;Appelés en cause ;Représentés par Me GIAU, avocat à Papeete ; d'autre part ;Après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 2 septembre 2004 devant, M. AIMOT, premier président, M. X... et Mme LASSUS-IGNACIO, conseillers, assistés de Mme TEVERO, greffier, le prononcé de l'arrêt ayant été renvoyé à la date de ce jour ;Après en avoir délibéré conformément à la loi ;A R R E T I - EXPOSE DES ELEMENTS NECESSAIRES A LA COMPREHENSION DU LITIGE ET A SA SOLUTION :1- Exposé du litige :Suivant acte reçu par Me I..., notaire suppléant de Me J..., le 9 mai 1988, Mme C... épouse E... a vendu aux consorts F..., G... et H... la "parcelle A dépendant d'une parcelle du Domaine de Pamatai lot 9 bis (2ème) contenant 31 ares 96 ca et cadastrée section T3 no 896 de Faa'a , moyennant le prix de 12.400.000 FCP.Par acte du 1er juin 1988, les acquéreurs ont notifié à la venderesse et au notaire qu'ils s'opposaient à la poursuite des formalités et au paiement du prix, au motif principal des difficultés faites par un tiers qui s'opposait au passage, en l'espèce, les consorts Y... qui revendiquaient tout ou partie de la parcelle vendue.Par courrier en date du 16 avril 1991, Me J..., notaire, informait le président du Tribunal que compte tenu de la mésentente totale régnant, le prix de vente avait été bloqué à la Caisse des Dépôts et Consignation .Les différentes juridictions se sont saisies de l'entier litige aux fins notamment de

déterminer qui était propriétaire de la parcelle litigieuse et donc de dire s'il y avait lieu de remettre en question l'acte de vente. La Cour a statué sur le titre invoqué par les consorts Y.... Le litige concerne désormais dans un premier temps la demande d'usucapion formée par les consorts Y... ; la réponse à cette demande conditionnant la réponse aux questions restées en suspens et qui porte en outre sur la nullité de la vente et les demandes de dommages et intérêts.2- Résumé des demandes initiales et de la décision déférée :Mme E... a saisi le Tribunal pour demander la réalisation de la vente.Les consorts Y... sont intervenus pour s'y opposer en faisant valoir que leur titre, relatif à une terre TAURAAMANU, englobait la parcelle vendue, et en indiquant qu'ils avaient eux-mêmes intenté une action en reconnaissance de propriété.Les consorts L... ont alors invoqué les dispositions de l'article 1653 du code civil qui permettent à l'acheteur troublé, notamment par une action en revendication, de suspendre le paiement du prix jusqu'à ce que le vendeur ait fait cesser le trouble.Par décision en date du 3 février 1993, le Tribunal de Première Instance de Papeete a notamment :- ordonné le versement par Me J... entre les mains de Mme E... du prix de la vente passée entre elle et les consorts L... ;- ordonné au notaire d'accomplir les formalités de publicité foncière ;- condamné le notaire à payer à Mme E... la somme de 150.000 francs à titre de dommages et intérêts ;- condamné le notaire à payer à Mme E... la somme de 50.000 francs en application de l'article 48-1 du code de procédure civile de Polynésie française ;- condamné les consorts L... à payer à Mme E... la somme de 300.000 francs à titre de dommages et intérêts ;- condamné les consorts L... à payer à Mme E... la somme de 100.000 francs en application de l'article 48-1 du code de procédure

civile de Polynésie française ;- rejeté les autres chefs de demandes ;- mis les dépens pour moitié à la charge des consorts Y... et pour moitié à la charge des consorts L... 3- Exposé succinct de la présente procédure :Ayant régulièrement interjeté appel, les consorts Y... ont critiqué l'option prise par le premier juge d'aligner l'action de Mme E... sur leur propre action en revendication.Abordant à titre subsidiaire le fond du problème, ils ont exposé comme en première instance que leur père a acquis en 1928 la terre TAURAAMANU, à l'issue d'une chaîne d'actes translatifs remontant à un titre originel de 1852 qui décrivait ce terrain comme borné d'un côté par un ruisseau; qu'ils en ont eu de longue date une jouissance conforme à ces abornements, ce qui a déjà été constaté par plusieurs décisions de justice ; qu'il suffira donc de constater une possession conforme au titre ; que les consorts F... - G... ne pouvaient valablement acquérir les droits en litige sans que leurs propres titres, connus et publiés, ne soient renversés au préalable ; que la définition cadastrales des parcelles est inopérante pour conférer ou enlever des droits.Ils ont demandé à la Cour :- à titre principal, de constater que Mme E... ne pouvait vendre l'espace situé sur la terre TAURAAMANU, au-delà du ruisseau (...) ;- de constater qu'ils ont saisi le Tribunal de première instance d'une requête dirigée contre Mme E..., aux fins de voir juger contradictoirement entre parties la propriété de la zone litigieuse ;- subsidiairement et pour le cas où la Cour aborderait la question de la propriété ;- de constater qu'ils sont propriétaires de la terre TAURAAMANU qui s'étend jusqu'au ruisseau séparant ladite terre de la propriété de Mme E... ;- de dire et juger en conséquence que cette dernière n'a aucun droit au-delà, c'est à dire au sud du ruisseau ;- de dire et juger en conséquence que la tentative de vente par cette dernière à des tiers constitue une faute dont elle doit

réparation en vertu de l'article 1382 du code civil ;- en conséquence, de condamner Mme E... à leur payer une somme de 500.000 FCP à titre de dommages et intérêts ;- et en toutes hypothèses, de condamner Mme E... au paiement d'une somme de 300.000 FCP au titre des frais irrépétibles.Mme E... a rétorqué qu'elle a demandé au Tribunal saisi de la revendication de se dessaisir au profit de la Cour d'appel ; qu'elle est propriétaire des lots 7 bis et 9 bis du domaine de Pamatai pour les avoir hérités de Mme M... qui en était devenue propriétaire par usucapion ; que le ruisseau dont les appelants se réclament n'est pas la branche traversant le lot 9 bis mais un autre tronçon de ruisseau ; et que l'auteur des consorts Y... avait été introduit sur les parcelles 545-546-547 et 527 comme locataire.Sur les conclusions des consorts L..., elle a fait valoir que la contestation non sérieuse des consorts Y... ne les autorisait pas à suspendre le paiement du prix et que l'accès à la parcelle vendue ne soulève pas non plus de difficulté sérieuse.Elle a demandé à la Cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner les consorts Y... et les consorts L... à lui payer une somme de 250.000 FCP pour ses frais irrépétibles.De leur côté, les consorts N... ont fait valoir, en 1994, que 5 ans après le compromis de vente, ils n'ont toujours pas accès au terrain et n'ont pu y faire construire ; que le problème de désenclavement aurait dû être réglé avant la signature de l'acte de vente et ne l'a pas été, ce qui invalide l'acte pour cause d'erreur ou de dol ; que de surcroît le droit de propriété de Mme E... est très incertain puisqu'il se base sur un acte de notoriété dont la valeur est toute relative ; qu'ils ont donc agi en toute légitimité sur le fondement de l'article 1653 du code civil ; et qu'ils subissent un énorme préjudice dont la venderesse et le notaire sont responsables.Ils ont

demandé à la Cour :1-

d'infirmer totalement le jugement ; 2-

de dire nul l'acte de vente reçu par Me J... le 9 mai 1988, sur le fondement des articles 1109 et suivants du code civil ; 3-

de dire que Me J... sera tenue de leur restituer le prix de vente, soit la somme de 12.400.000 FCP outre les intérêts versés par la Caisse des Dépôts et Consignation ; 4-

de condamner solidairement Mme E... et Me J..., ce dernier sur le fondement de l'article 1382 du code civil, à leur payer la somme de 15.000.000 FCP à titre de dommages et intérêts ;

1-

d'ordonner le remboursement des condamnations de première instance à savoir 350.000 FCP de dommages et intérêts et 100.000 FCP au titre de l'article 48-1 ; 2-

de condamner Mme C... à leur payer les frais irrépétibles de première instance et d'appel, soit 400.000 FCP.Mes J... et I... ont répondu que les conditions d'application de l'article 1382 ne sont pas remplies ; que les consorts F..., ayant signé une décharge de responsabilité postérieurement à l'acte de vente, auraient pu et dû ne pas la signer s'ils n'étaient pas d'accord ; que ceux-ci ne démontrent pas que leur consentement ait été vicié ; et que c'est tout à fait normalement que le notaire, au vu des difficultés soulevées, a consigné le prix ; ils ont demandé à la Cour de débouter les consorts L... de leur demandes contre Me J... et de les condamner à leur payer la somme de 100.000 FCP au titre des frais.Par arrêt en date du 9 octobre 1997, la Cour d'appel a :- rappelé que le régime foncier local se fonde sur des titres originels de propriété et nécessite, soit une chaîne continue de successions ou d'actes translatifs se rattachant au titre originel,

soit à défaut une usucapion légalement établie ;- estimé que c'est à bon droit que le premier juge a entendu examiner l'ensemble du litige ;- observé que le titre originel de la terre TAURAAMANU, établi en 1852, indique qu'elle mesure environ 570 x 760 m et qu'elle est bornée d'un côté notamment par un ruisseau ; mais que l'acte de vente de "1911" (sic pour 1921) indique des abornements analogues, avec des mesures produisant un périmètre de 1374 m (très inférieur à celui paraissant découler du titre originel) et précise qu'elle est bornée, du côté paraissant aujourd'hui litigieux, "par la terre PAMATAI... suivant la crête de la colline" ; et que l'acte de vente consenti à M. Francis Y... (transcription du 22 novembre 1948, vol. 342 no 119) reproduit fidèlement cette dernière description ;

.- considéré, en droit, que les consorts Y... ne pourraient prétendre, sauf à bénéficier de l'usucapion, à plus que ne fournit leur titre propre d'acquisition, lequel ne fait pas état d'un ruisseau mais d'une colline ; que, la question étant de déterminer si cette différence procède d'une erreur, ou au contraire d'une diminution de la propriété originelle survenue entre temps, en l'état, il n'était pas manifeste que la possession invoquée soit conforme au titre ; que cette question ne pourrait être tranchée que par l'application des titres sur les plans, mais qu'elle n'était pas mise en mesure d'y procéder et elle a enjoint aux parties de produire différentes pièces.Les consorts F..., Y... et C... ont versé aux débats leurs pièces respectives ; toutes les parties, sans plus conclure en détail, ont sollicité le bénéfice de leurs écritures antérieures, et l'ordonnance de clôture a été rendue le 22 janvier 1999.Par décision en date du 18 mars 1999, la Cour d'Appel de Papeete a notamment :- constaté que le titre des consorts Y... ne s'étend pas, du côté Est, au delà de la limite cadastrale déterminée en 1962 ;- constaté que le titre de Mme C... épouse E... n'est pas opposable aux

consorts Y... ;Avant-dire-droit sur l'usucapion, autorisé Mme C... d'une part, et les consorts Y... d'autre part, à rapporter la preuve par témoins de leur possession trentenaire dans les conditions de l'article 2229 du code civil ;- dit que l'enquête sera effectuée sur les lieux ;- commis le conseiller CALINAUD pour y procéder et pour en fixer la date par ordonnance ; - sursis à statuer sur les autres demandes ;- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état.Elle avait notamment précisé dans sa motivation : Attendu qu'il ressort du rapprochement des actes et plans qu'en effet, la limite originelle de la terre TAURAAMANU "du côté de Papeete" (à l'Est) se situait sur la branche principale du ruisseau Vaihi, lequel passe aujourd'hui à travers la parcelle cadastrée sous le nom de "Domaine de Pamatai, 2ème groupe, lot 9 bis", que les délimitations cadastrales opérées en 1951 (plan MARAEAURIA) et 1962 (plan O...) placent la limite sur une ligne de crête secondaire conforme aux indications des actes de 1921 et 1948, et que la parcelle litigieuse, faisant l'objet de l'acte de vente de 1988, occupe l'espace entre ces deux lignes ;Que par ailleurs la photocopie de plan présentée sous la dénomination de "plan établi en 1961 par M. O..." est suspecte, étant manifestement une photocopie du plan de 1962 qui se trouve illisible sur toute la zone de la ligne de crête en question, qu'elle ne peut être prise en considération ;Que si les héritiers du propriétaire originel ont déclaré, en 1958, que la terre de leur ancêtre s'étendait jusqu'au ruisseau, ceci n'empêche pas que l'un des acquéreurs intermédiaires ait pu en modifier la contenance par une cession partielle, et que cette déclaration n'est donc pas probante ; qu'une ligne de crête constitue une "limite naturelle" aussi bien qu'un ruisseau, qu'ainsi les consorts ne rapportent pas la preuve d'une erreur affectant leur acte d'acquisition de 1948, et qu'il faut donc bien constater que leur titre ne s'étend pas au delà vers l'Est de la limite cadastrale

actuelle ;Attendu que le titre dont se prévaut la venderesse, Mme C... épouse E..., procède seulement d'un acte de notoriété transcrit le 13 août 1980 (vol. 1025 no 9) prétendant constater la prescription acquisitive de l'ensemble du lot 9 bis au profit de son propre auteur Mme M... ; que la valeur probante d'un tel acte est faible ; qu'en supposant admise sa véracité, il ne suffit pas à démontrer que la possession utile se soit étendue vers l'Ouest au delà du ruisseau, ce qui est expressément contesté; et qu'il est en tout cas inopposable aux consorts Y... ;Attendu qu'il ressort du jugement attaqué que les consorts Y... se sont également prévalu de l'usucapion ; que cette prétention est implicitement reprise dans leurs écritures d'appel, en ce qu'elles font état d'une longue possession ; que le moyen tiré de la prescription est donc mis dans le débat par chacune de ces deux parties ;Attendu que les consorts Y... ont produit une déclaration enregistrée en 1959, un plan O... de 1966 et un jugement du 26 mai 1967 constatant leur occupation, deux constats de 1975 et 1990, et huit attestations; que par ailleurs, si leur auteur Francis Y... écrivait, en 1988, que "la totalité du lot 527" (numéro cadastral du lot 9 bis) a été exploitée par son père ... puis par lui-même" en vertu d'un bail, la lecture complète de ce même document montre qu'il entendait parler, non de la parcelle litigieuse, mais du surplus du lot 9 bis ; que cette pièce ne contredit pas l' animus domini sur ladite parcelle litigieuse, qu'au contraire elle l'affirme ; qu'ainsi les assertions des consorts Y... sont pertinentes et vraisemblables ;Attendu qu'il est nécessaire d'ordonner une enquête sur ces faits L'enquête s'est déroulée sur les lieux le 6 octobre 1999.La décision rendue le 18 mars 1999 avait été frappée d'un pourvoi en cassation par les consorts Y... P..., par décision en date du 18 juin 2002, la Cour de Cassation avait rejeté le pourvoi.Les parties ont conclu après la reprise

d'instance.La procédure a été clôturée le 16 juillet 2004.4- Résumé des moyens et exposé des prétentions des partiesA- Exposé des prétentions et résumé des moyens des consorts Y... :Ils sollicitent de la Cour :- qu'elle dise qu'ils sont propriétaires par usucapion de la partie de la terre TAURAAMANU en litige entre eux-mêmes et les consorts E... ;- qu'elle ordonne la transcription de sa décision à la conservation des hypothèques ;- la condamnation de Mme C... épouse E... à lui verser la somme de 200.000 FCP à titre de dommages et intérêts ;- la condamnation de Mme C... épouse E... à lui verser la somme de 250.000 FCP en application de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française ;- la condamnation de Mme C... épouse E... aux dépens avec distraction au profit de Maître LOLLICHON qui déclare en avoir fait l'avance.Au soutien de leurs demandes, ils exposent qu'il ressort tant des éléments déjà versés au dossier, que des constatations opérées sur les lieux par le magistrat enquêteur, que des différents témoignages recueillis, qu'ils ont établi leur usucapion sur la partie litigieuse de la terre TAURAAMANU.B- Résumé des moyens et exposé des prétentions de Mme C... épouse E... :Elle fait valoir que contrairement à ce que déclarent les consorts Y..., l'enquête diligentée sur place n'a pas permis d'établir l'usucapion qu'ils invoquent ; que leurs prétentions ne pourront donc qu'être rejetées.En conséquence, elle sollicite de la Cour : - la confirmation de la décision rendue par le Tribunal de Première Instance le 3 février 1993 ;- qu'elle lui alloue le bénéfice de ses précédentes écritures ;- le rejet des demandes des consorts Q...- Résumé des moyens et exposé des prétentions des consorts R... :Ils font valoir que si la Cour faisait droit à la demande d'usucapion présentée par les consorts Y..., cela reviendrait à infirmer totalement le jugement rendu le 3 février 1993

et donnerait dans ce cas toute légitimité à leur demande de déclarer nulle la vente passée entre eux et les consorts S... conséquence, ils sollicitent de la Cour qu'elle leur alloue le bénéfice de leurs précédentes écritures et notamment celles du 25 janvier 1994 par lesquelles ils sollicitaient de la Cour :- qu'elle dise nul, non avenu et de non effet l'acte de vente reçu par Me J... le 9 mai 1988, sur le fondement des articles 1109 et suivants du code civil ;- qu'elle dise que Me J... sera tenue de leur restituer le prix de vente, soit la somme de 12.400.000 FCP, outre les intérêts versés par la Caisse de Dépôts et Consignation ;- la condamnation solidaire de Mme E... et de Me J... sur le fondement de l'article 1382 du code civil, à leur payer la somme de 15.000.000 FCP à titre de dommages et intérêts ;- qu'elle ordonne le remboursement des condamnations de première instance à savoir 350.000 FCP de dommages et intérêts et 100.000 FCP au titre des frais irrépétibles ;- la condamnation de Mme C... à leur payer la somme de 400.000 FCP en application de l'article 407 du nouveau code de procédure civile local.D- Résumé des moyens et exposé des prétentions de Mes I... et J... :Ils font valoir qu'en l'absence de toute faute établie à leur encontre, il conviendra de faire droit aux demandes qu'ils ont exprimées dans leurs conclusions du 15 mai 1997. II- SOLUTION DU LITIGE :A propos de l'acquisition de partie la terre litigieuse par usucapion :En application de l'article 2229 du code civil, pour prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaires. En application de l'article 2230 du code civil, on est toujours présumé posséder pour soi et à titre de propriétaire, le tout sauf la preuve contraire. En application de l'article 2234 du code civil, le possesseur actuel qui prouve avoir possédé anciennement est présumé avoir possédé dans le temps intermédiaire.

En application de l'article 2262 du code civil, toutes les actions, tant réelles que personnelles, se prescrivent par trente ansà.Le magistrat enquêteur a précisé que l'enquête portait sur la partie litigieuse de la terre soit le lot 9 bis du domaine de Pamatai comprise entre le chemin d'accès du côté Ouest et le ruisseau VAIHI du côté Est. Il indique : Le terrain naturel, avant terrassements, semble avoir été en bosse descendant rapidement sur l'axe Sud Est-Nord Ouest et arrondie sur les flancs; la limite cadastrale (que ce soit l'une ou l'autre de ses deux variantes) ne correspond pas à un trait marquant du relief. En ces lieux, on ne peut parler de crête de colline Dans la partie inférieure du terrain (pointe proche du ruisseau) se voit une petite terrasse d'aspect assez ancien; un peu plus en amont, une terrasse proche du chemin accède à un emplacement plus vaste, en partie terrassé, s'étendant jusque aux abords immédiats du ruisseau. Cet emplacement a été débroussé et partiellement brûlé récemment ; on distingue des troncs coupés et calcinés d'arbres ou arbustes, dont il nous est dit qu'il s'agissait de bambous ; un tuyau d'eau traverse cet emplacement dans le sens ruisseau vers chemin ; aux alentours on voit encore quelques arbres fruitiers, notamment manguiers, ainsi qu'un pied de nono. Un chemin a été tracé récemment le long du ruisseau, à partir du ponceau et en remontant assez loin en amont. De l'autre côté du ruisseau VAIRI, (à l'Est) le flanc du vallon est abrupt et recouvert de brousse arbustière dans laquelle on discerne l'emplacement d'une petite terrasse et on voit des bananiers, manguiers et cocotiers. Le sommet de ce versant est nettement plus élevé que le terrain en litige.De l'autre côté du chemin d'accès (à l'Ouest) un petit ruisseau affluent du précédent et nettement moins important, semble remonter moins loin . Ont été entendus au cours de l'enquête quatre témoins : M. Raymond VAN T..., né en 1934, M. Bertie U..., né en 1939, M. V...

TSING, né en 1935 et Mme W... 1... , né en 1943.En l'espèce, il ressort des éléments du dossier et notamment de la mesure d'enquête et de contre-enquête réalisée le 6 octobre 1999 que le terrain était occupé par les consorts Y... et qu'ils y avaient construit un fare en pinex et tôles ; que cette maison aurait été construite dans les années 1980 selon M. VAN T... ; qu'elle existait dans les années 70 selon M. U... et Mme W... ; qu'il y avait une construction sommaire en 1963 selon M. 2... convient toutefois de préciser que la requête introductive d'instance a été déposée devant la Cour d'appel en 1993 et que l'action a été introduite devant le premier juge en 1989. Il n'est donc pas établi que la possession de la parcelle litigieuse s'est poursuivie pendant au moins trente ans de manière paisible, non équivoque et à titre de propriétaire conformément aux dispositions des article 2229 et 2262 du code civil. En effet, l'enquête diligentée ne permet pas de l'établir avec certitude et les éléments déjà versés au dossier ne permettent pas de couvrir une période de trente ans qui serait antérieure aux premières actions en justice. En outre, la qualité de propriétaire de M. Y... sur la période de référence n'est pas clairement établie, Mme E... affirmant qu'il y aurait été placé comme locataire et il n'est fait état que de constructions précaires ou fare cow-boy , lors des auditions de témoins. Les consorts Y... n'ont donc pas apporté la preuve de leur usucapion sur partie de la terre litigieuse. Il convient en conséquence de les débouter de ce chef de prétention.3-

A propos de la propriété de la parcelle vendue :

La revendication des consorts Y... n'ayant pas abouti que ce soit sur le fondement du titre ou sur celui de l'usucapion, Mme E... doit être considérée comme propriétaire de la parcelle vendue et la

contestation des consorts Y... devra être rejetée de ce chef.

1-

A propos des demandes des consorts Y... :

Les consorts Y... ayant été déboutés de leurs demandes en revendication de propriété fondées tant sur le titre que sur l'usucapion, ils seront déboutés de l'ensemble de leurs prétentions que ce soit de leur demande de dommages et intérêts ou leurs demandes au titre des frais irrépétibles.

1-

A propos des demandes des consorts N... :

Les consorts N... demandent à la Cour d'une part de dire que c'est à juste titre qu'ils ont sollicité la suspension du paiement du prix, d'autre part qu'en cas de confirmation du jugement quant à la propriété de la parcelle litigieuse, la vente doit être déclarée nulle s'agissant de la vente d'une parcelle enclavée.

A- A propos des troubles résultant de l'action en revendication des consorts Y... :

Le premier juge avait estimé que n'était pas justifiée la résistance des consorts N... fondée sur l'article 1653 du code civil aux motifs notamment que l'action des consorts Y... était intervenue plus d'une année (17 mai 1989) après que la vente eut été passée et qu'il appartenait aux acquéreurs de payer le prix de vente.

Les consorts N... avaient fait valoir qu'en fait, alors que l'acte sous seing privé avait été passé le 8 avril 1987, ils n'avaient été convoqués par le notaire que le 9 mai 1988 aux motifs que le problème d'accès était enfin réglé ; que ce problème d'accès concernait directement M. 3... qui s'opposait au passage dans la mesure où il revendiquait tout ou partie de la propriété qui leur avait été vendue.

La motivation du premier juge ne pourra toutefois pas être retenue alors qu'il ressort d'un courrier du notaire en date du 16 avril 1991 que les problèmes d'accès au terrain sont apparus dès le départ et que la vente a été retardée de ce fait.

La question qui se pose alors est de savoir si les consorts N... peuvent se plaindre de troubles résultant de l'action en revendication des consorts Y... alors qu'ils connaissaient l'existence de la revendication et qu'ils ont cependant accepté de signer l'acte de vente. De la même façon, la question se pose de savoir si le notaire qui n'ignorait pas qu'il y avait un problème d'accès au terrain vendu ainsi que cela ressort de son propre courrier et qui n'ignorait pas non plus que le titre du vendeur était fragile, l'origine de propriété reposant sur une notoriété prescriptive dont la valeur juridique est toute relative devait cependant passer l'acte de vente.

En l'espèce, les consorts N... ont signé le 11 mai 1988, soit trois jours après la vente, devant notaire, une décharge de responsabilité dans laquelle ils déclaraient vouloir faire leur affaire personnelle quant à l'accès audit terrain et déchargent l'étude de Me André J... de toute responsabilité à cet égard .

Les consorts N... ne contestent pas avoir tenté de régler à l'amiable le conflit qui les opposait à M. Y... 4... ailleurs M. William E... a signé, le 27 mai 1988, une attestation par laquelle il s'engage à prendre à sa charge tous les frais de procédure pour le cas où une contestation s'élèverait quant à l'utilisation du chemin d'accès au terrain

Il appartenait toutefois au notaire de faire preuve de prudence et de prendre toutes les précautions utiles et de ne pas passer un acte de vente dont la signature avait déjà été retardée, sans s'assurer que les problèmes relatifs à l'accès avaient été correctement réglés. Il ne saurait s'abriter derrière une curieuse décharge de responsabilité ou une attestation signées sur papier libre, postérieurement à l'acte, pour éluder sa responsabilité fondée notamment sur son devoir de conseil.

C'est donc à juste titre que les consorts N... ont invoqué les dispositions de l'article 1653 du code civil.

B- A propos de la nullité de la vente fondée sur les articles 1109 et 1110 du code civil :

Les consorts N... demandent la nullité de la vente fondée sur le vice du consentement.

En l'espèce, les consorts N... semblent invoquer l'erreur sur la chose, même si cela ne ressort pas clairement de leurs écritures.

Il ressort toutefois des éléments du dossier que les consorts N... connaissaient parfaitement le terrain vendu et qu'ils n'ignoraient pas les problèmes d'accès qui se posaient puisqu'ils avaient eux-mêmes tenter de les résoudre. Ils affirment qu'ils ont été piégés par le notaire et qu'ils pensaient le problème réglé alors que ce n'était pas le cas. La lecture de l'acte de vente ne permet pas de vérifier que le problème avait été réglé dans la mesure où il n'est fait aucune mention d'une quelconque difficulté sur ce point dans la partie Charge et Conditions qui est rédigée de manière habituelle.

En l'état actuel de la procédure, la cour ignore si du fait de sa décision sur l'usucapion et donc sur la propriété de la parcelle litigieuse, le problème de l'accès se pose dans les mêmes termes qu'auparavant et il conviendra d'inviter les parties à conclure sur ce point.

1-

A propos des autres demandes :Il convient de surseoir à statuer sur les autres demandes dont la solution est conditionnée par la décision sur la nullité de la vente.PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et par arrêt mixte ;Vu les arrêts de la Cour d'Appel en date des 9 octobre 1997 et 18 mars 1999 ;Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 18 juin 2002 ;Vu l'enquête diligentée sur les lieux le 6 octobre 1999 ;Déboute les consorts Y... de leur demande d'usucapion ;En conséquence, déboute les consorts Y... de l'ensemble de leurs demandes ;Dit que la parcelle de terre litigieuse était la propriété de Mme C... épouse E... ;Dit que c'est à juste titre que les consorts N... ont invoqué les dispositions de l'article 1653 du code civil ;Invite les parties à conclure sur l'application des dispositions des articles 1109 et 1110

du code civil relatifs aux vices du consentement et notamment sur l'état d'enclave de la parcelle vendue ;Invite les parties à préciser par des conclusions récapitulatives leurs moyens et prétentions actuels au regard des décisions rendues;Sursoit à préciser par des conclusions récapitulatives leurs moyens et prétentions actuels au regard des décisions rendues;Sursoit à statuer sur les autres demandes ;Renvoie à l'audience de mise en état du 21 janvier 2005 ;Réserve les dépens.Prononcé à Papeete le 28 octobre 2004.Le Greffier,

P/Le Président empêché,M. TEVERO P. X...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 47
Date de la décision : 28/10/2004
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.papeete;arret;2004-10-28;47 ?
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