N° de minute : 2024/183
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 2 septembre 2024
Chambre civile
N° RG 24/00125 - N° Portalis DBWF-V-B7I-UXV
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 mars 2024 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 21/11)
Saisine de la cour : 8 avril 2024
APPELANT
S.C.I. W.J.C.N.,
Siège social : [Adresse 2]
Représentée par Me Stéphane LENTIGNAC de la SELARL SOCIETE D'AVOCAT DE GRESLAN-LENTIGNAC, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉ
S.E.L.A.R.L. [G] [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la S.C.I. W.J.C.N.,
Siège social : [Adresse 1]
AUTRE INTERVENANT
MINISTERE PUBLIC
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 24 juin 2024, en chambre du conseil, devant la cour composée de :
M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,
Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Philippe ALLARD.
02/09/2024 : Copie revêtue de la formule exécutoire - Me [T] ;
Expéditions - Me LENTIGNAC ; MP ;
- Copie CA ; Copie TPI
Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO
Greffier lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO
L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.
ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
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Par jugement en date du 17 octobre 2016, le tribunal de première instance de Nouméa a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la SCI W.J.C.N. qui était propriétaire de quatre lots dans un ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 4].
Par jugement du 16 octobre 2017, ce tribunal a arrêté un plan de redressement organisant la continuation de l'entreprise prévoyant que le passif définitivement admis serait apuré au moyen de 120 mensualités, les 119 premières d'un montant de 450.000 FCFP et la dernière du solde restant dû à la date de son échéance et désigné la selarl [T] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Par jugement du 17 décembre 2018, ce tribunal a adopté un plan modificatif.
Par jugement du 1er mars 2022, le tribunal de première instance de Nouméa, en raison du défaut de paiement de onze échéances, a prononcé la résolution du plan de redressement et la liquidation judiciaire de la débitrice.
Par arrêt du 29 août 2022, la cour de céans, constatant que la débitrice avait été destinataire d'une offre d'achat d'un lot voire de deux, a :
- infirmé ce dernier jugement,
- ordonné la transmission du dossier aux premiers juges afin de procéder à la vente du lot n° 1 sur autorisation du juge-commissaire pour la somme de 35 000 000 FCFP,
- dit qu'il serait procédé à la mise en place d'un plan de redressement par continuation avec apurement du passif restant.
Par jugement du 19 septembre 2022, le tribunal mixte de commerce de Nouméa a :
- autorisé la poursuite de l'activité de la SCI W.J.C.N.,
- ordonné la prorogation de la période d'observation pour une durée de six mois à compter du 28 août 2022,
- dit que le projet de plan devrait être déposé pour le 18 novembre 2022 au plus tard.
Par ordonnance du 11 août 2023, le juge-commissaire a autorisé la SCI W.J.C.N. à procéder à la cession de gré à gré du lot n° 1 aux époux [L] pour la somme de 35 000 000 FCFP.
Dans une lettre datée du 23 novembre 2023, la société Banque calédonienne d'investissement s'est plainte auprès de la selarl [T] de « l'immobilisme absolu » de la débitrice, la cession du lot n° 1 n'étant toujours pas intervenue.
Dans une note datée du 7 mars 2024, le commissaire à l'exécution du plan a observé que la SCI W.J.C.N. était redevable de vingt-deux échéances pour un montant de 10 206 534 FCFP.
Par jugement en date du 13 mars 2024, le tribunal de première instance de Nouméa, observant que la débitrice n'était pas en mesure d'apurer le retard pris dans l'exécution du plan, a :
- prononcé la résolution du plan de redressement et la liquidation judiciaire de la SCI W.J.C.N.,
- fixé la date de cessation des paiements au 8 septembre 2022,
- désigné la selarl [T] en qualité de liquidateur.
Par requête déposée le 8 avril 2024, la SCI W.J.C.N. a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de son mémoire déposé, la SCI W.J.C.N. demande à la cour de :
- ordonner le renvoi de l'affaire afin de permettre la remise d'un état actualisé de la dette ;
- infirmer le jugement déféré ;
- transmettre le dossier devant le tribunal mixte de commerce de Nouméa afin de procéder à la vente du lot n° 1 sur autorisation du juge-commissaire pour la somme de 35 000 000 FCFP et à la modification du plan de redressement par continuation avec apurement du passif restant, sans préjudices d'offres nouvelles ;
- procéder à la désignation des organes de la nouvelle procédure collective.
Dans une note datée du 18 juin 2024, la selarl [T], ès qualités, sollicite la confirmation du jugement entrepris.
Dans des conclusions datées du 13 juin 2024, le ministère public sollicite la confirmation du jugement entrepris.
Sur ce, la cour,
Le plan de redressement, tel que modifié par le jugement du 17 décembre 2018, prévoit que le passif résiduel définitif admis doit être « apuré au moyen des 108 mensualités successives suivantes :
12 mensualités de 350 000 FCFP chacune,
12 mensualités de 370 000 FCFP chacune,
12 mensualités de 390 000 FCFP chacune,
12 mensualités de 410 000 FCFP chacune,
12 mensualités de 547 000 FCFP chacune,
12 mensualités de 558 000 FCFP chacune,
12 mensualités de 569 000 FCFP chacune,
12 mensualités de 580 000 FCFP chacune,
et 12 mensualités de 591 016 FCFP chacune, »
la première mensualité modifiée étant payable le 10 janvier 2019.
Il sera rappelé qu'en première instance, le commissaire à l'exécution du plan avait observé que la SCI W.J.C.N. était redevable à la date du 7 mars 2024 d'une somme de 10 206 534 FCFP représentant vingt-deux échéances impayées et des honoraires qui lui étaient dus.
La SCI W.J.C.N. discute le montant de l'arriéré en reprochant à la selarl [T] d'avoir négligé les loyers encaissés par son mandataire d'août 2022 à février 2023 (2 730 000 FCFP) mais ne disconvient pas être dans l'incapacité de respecter son plan puisqu'elle propose un plan d'apurement moyennant des mensualités de 250 000 FCFP.
La débitrice expose que la location des lots lui rapportent un montant global de 390 000 FCFP, dans la mesure où un de ses locataires, la société Buenos tacos, ne règle pas son loyer. Selon le plan adopté le 17 décembre 2018, elle aurait dû verser des mensualités de 547 000 FCFP en 2023 et devrait verser des mensualités de 558 000 FCFP en 2024. Les mensualités qu'elle propose de régler sont inférieures de plus de moitié à celles qu'elle devrait régler en vertu du plan modificatif du 17 décembre 2018. La mise en oeuvre de cette réduction aboutirait à rallonger de plus de trois ans la durée du plan, au-delà du 30 décembre 2030. Une telle prolongation est prohibée par l'article L 626-12 du code du commerce qui prévoit que la durée du plan ne peut excéder dix ans. La régularisation de la situation et l'exécution d'un plan supposeraient que la SCI W.J.C.N. réussisse à vendre le lot n° 1.
Or, il résulte du dossier que ce projet de cession est ancien puisqu'une cession a été évoquée pour la première fois, lors d'une audience tenue 23 août 2021 dans le cadre de l'examen du rapport en inexécution déposé le 2 février 2021 par la selarl [T]. Cette perspective a été prise en considération par la cour de céans pour infirmer le jugement du 1er mars 2022 qui avait prononcé la résolution du plan de redressement et la liquidation judiciaire de la débitrice, et il s'avère que deux ans plus tard, le projet de cession n'a toujours pas abouti et que la SCI W.J.C.N. ne verse aucune promesse d'achat de l'un ou de l'autre lot.
Il résulte de ce qui précède que le plan de redressement n'est plus respecté depuis plus de trois ans et que les disponibilités que la SCI W.J.C.N. affirme détenir (9 530 505 FCFP) sont insuffisantes pour apurer les échéances exigibles (plus de 10 000 000 FCFP). Dès lors, c'est à bon droit que le premier juge a prononcé la résolution du plan et la liquidation judiciaire de la SCI W.J.C.N..
Par ces motifs
La cour,
Confirme le jugement entrepris ;
Met les dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Le greffier, Le président.