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11/04/2024 | FRANCE | N°22/00264

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre civile, 11 avril 2024, 22/00264


N° de minute : 61/2024



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 11 avril 2024



Chambre civile









N° RG 22/00264 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TJP



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 juillet 2022 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 19/3269)



Saisine de la cour : 12 septembre 2022





APPELANT



SOCIETE GÉNÉRALI VIE, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice,

Siège social : [Adresse 2]

R

eprésentée par Me Carole BOUSSAINGAULT de la SELARL D'AVOCAT CAROLE BOUSSAINGAULT, avocat au barreau de NOUMEA





INTIMÉS



S.A.R.L. FRIGICEAN, prise en la personne de ses représentants légaux e...

N° de minute : 61/2024

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 11 avril 2024

Chambre civile

N° RG 22/00264 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TJP

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 juillet 2022 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 19/3269)

Saisine de la cour : 12 septembre 2022

APPELANT

SOCIETE GÉNÉRALI VIE, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice,

Siège social : [Adresse 2]

Représentée par Me Carole BOUSSAINGAULT de la SELARL D'AVOCAT CAROLE BOUSSAINGAULT, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

S.A.R.L. FRIGICEAN, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice,

Siège social : [Adresse 3]

Mme [V] [L] veuve [W]

née le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 10],

demeurant [Adresse 5]

M. [N] [W]

né le [Date naissance 7] 1995 à [Localité 10],

demeurant [Adresse 1]

Tous représentés par Me Véronique LE THERY de la SELARL CABINET D'AFFAIRES CALEDONIEN, avocat au barreau de NOUMEA

11/04/2024 : Copie revêtue de la formule exécutoire - Me BOUSSAINGAULT et Me DI LUCCIO

Expéditions - Me LE THERY

- Dossiers : CA et TPI

Mme [G] [W]

née le [Date naissance 6] 2000 à [Localité 10],

demeurant [Adresse 5]

Représentée par Me Véronique LE THERY de la SELARL CABINET D'AFFAIRES CALEDONIEN, avocat au barreau de NOUMEA

S.A. SOCIETE GENERALE CALEDONIENNE DE BANQUE (SGCB)

Siège social : [Adresse 9]

Représentée par Me Céline DI LUCCIO de la SELARL CABINET D'AVOCATS BOISSERY-DI LUCCIO-VERKEYN, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 février 2024, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,

Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,

qui en ont délibéré, sur le rapport de Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH.

Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO

Greffier lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Le 15 mai 2010, la société Frigicean a souscrit auprès de la Société générale calédonienne de banque un emprunt d'un montant de 22 686 591 francs pacifique.

M. [F] [W], gérant de l'entreprise, en sa qualité de caution, a souscrit une assurance auprès de la société d'assurances Générali vie le 30 avril 2010.

Le [Date décès 8] 2016, M. [F] [W] est décédé d 'un accident de moto sur la voie publique.

L'épouse de M. [W], Mme [V] [L], déclarait alors le décès de son conjoint à la société Générali vie.

Cette dernière informait alors Mme [V] [L] de son refus de prendre en charge le solde du crédit.

Par requête introductive d'instance du 11 octobre 2019, la société Frigicean a assigné la société Générali vie devant le tribunal de première instance de Nouméa aux fins de :

- enjoindre à la société Générali vie de communiquer le contrat d'assurance et la déclaration faite par M. [F] [W] ;

- dire que la société Générali vie devra prendre en charge l'ensemble du concours bancaire résultant du contrat de prêt depuis le [Date décès 8] 2016 ;

- dire que la société Générali vie devra verser l'ensemble du montant des échéances payées par la société Frigicean depuis le [Date décès 8] 2016,

- condamner la société Générali vie à payer la somme de 250 000 francs au titre de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie et les entiers dépens.

Par requête du 10 juin 2020, la société Frigicean assignait au fin d'appel en cause la Société générale calédonienne de banque (SGBC) à l'instance principale en sa qualité de prêteur.

Par requête du 31 juillet 2020, Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W] intervenaient volontairement à la procédure en leur qualité d'ayants cause du défunt.

Par jugement dont appel du 25 juillet 2022, le tribunal de première instance de Nouméa a :

- fait droit à l 'appel en cause de la Société générale calédonienne de banque,

- pris acte de l 'intervention volontaire de Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W],

- déclaré recevable l'action de la société Frigicean,

- rejeté la demande subsidiaire avant-dire droit d'expertise judiciaire,

- débouté la société Générali vie de sa demande de nullité de l'adhésion de M. [F] [W],

- déclaré sans objet la demande de production du contrat d 'assurance,

- condamné la société Générali vie à verser à la société Frigicean le montant des échéances payées par ses soins au titre du contrat de prêt souscrit auprès de la Société générale calédonienne de banque du 15 octobre 2016 au jour de la décision,

- condamné la société Générali vie à verser à la Société générale calédonienne de banque, le montant du capital restant dû au jour du jugement,

- condamné la société Générali vie à verser à la société Frigicean, à Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W] la somme de 400 000 francs pacifique au titre de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie, dont distraction au profit de la selarl Cabinet d'affaires calédonien,

- condamné la société Générali vie aux entiers dépens.

PROCÉDURE D'APPEL

La société d'assurances Générali vie a relevé appel de ce jugement par requête déposée au greffe de la cour le 12 septembre 2022.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 octobre 2023, auxquelles il y a lieu de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Générali vie demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau et y ajoutant,

à titre principal,

- déclarer irrecevable l'action de la société Frigicean à l'encontre de la société Générali vie, faute de qualité à agir ;

- prononcer la nullité de l'adhésion de M. [F] [W] en date du 13 novembre 2009 au contrat groupe Générali vie sur le fondement de la fausse déclaration intentionnelle ;

- débouter la société Frigicean, Mme [V] [L], M. [N] [W], et Mme [G] [W] de l'ensemble de leurs prétentions.

- débouter la Société générale calédonienne de banque de sa prétention formulée au visa de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;

- condamner solidairement la société Frigicean, Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W] aux entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Carole Boussaingault en application de l'article 699 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie ;

- les condamner, sous la même solidarité, à verser à la société Générali vie la somme de 2.000 € au visa de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;

à titre subsidiaire,

vu l'article 143 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- désigner tel médecin expert qu'il plaira à la cour avec pour mission de :

se faire remettre tous documents contractuels et médicaux concernant l'assuré, feu M. [F] [W] ;

. décrire l'état de santé de l'assuré lors de son adhésion au contrat d'assurance, en particulier dire s'il était atteint d'une affection et dans ce cas la définir en précisant la date de constatation des premiers symptômes et les traitements administrés et les éventuels arrêts de travail ;

. dire et juger que l'expert judiciaire pourra s'adjoindre, s'il y a lieu, tout sapiteur de son choix et pourra entendre le ou les médecins ayant déjà eu l'occasion d'ausculter M. [W] sans qu'il ne soit opposé à l'expert judiciaire un quelconque secret médical ;

. dire et juger que l'expert judiciaire pourra se faire communiquer le dossier médical de la caisse d'assurance maladie auprès de laquelle était affilié M. [F] [W] ;

. répondre à tout dire des parties ;

. dire que l'expert judiciaire devra communiquer un pré-rapport aux parties, en leur fixant un délai d'au moins un mois pour présenter leurs observations écrites ;

. donner acte à la société Générali vie qu'elle consignera pour le compte de qui il appartiendra les frais à valoir sur les honoraires de l'expert judiciaire ;

- en ce cas, réserver les dépens ;

à titre infiniment subsidiaire,

vu l'article 1134 du code civil applicable en Nouvelle-Calédonie,

- limiter le montant de la somme mise à la charge de la société Générali vie à 15.204.513 francs pacifique, soit 127.413,82 €, laquelle devra être réglée entre les mains de la SGCB ;

- débouter la société Frigicean, Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W] du surplus de leurs prétentions.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 juillet 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la SGCB demande à la cour de :

- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel,

- au fond le dire non fondé,

à titre subsidiaire,

- mettre hors de cause la SGBC,

- condamner la société Générali vie à payer à la SGBC la somme de 200.000 francs pacifique au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Boissery-Di Luccio-Verkeyn.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 22 juin 2023, la société Frigicean, Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris ;

y ajoutant,

- condamner la société Générali vie à payer le capital restant dû au titre du prêt souscrit par la société Frigicean à la date du décès de M. [F] [W] ;

- condamner la société Génerali vie à payer à la société Frigicean, Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W] la somme de 500.000 francs pacifique au titre de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie outre les entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Cabinet d'affaires calédonien.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 novembre 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 26 février 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

La cour est saisie de l'appel principal de la société d'assurances Générali vie qui conteste la décision l'ayant condamnée à régler les échéances du prêt souscrit par la société Frigicean avec la caution de son dirigeant, M. [F] [W], décédé dans un accident de la circulation le [Date décès 8] 2016.

Elle est également saisie de l'appel incident de la société Frigicean et des ayants droit de M. [F] [W], tendant à obtenir la condamnation de la société d'assurances à leur verser la somme correspondant au capital restant dû à la date du décès de M. [F] [W].

La cour statuera en premier lieu sur la fin de non-recevoir opposée par la société Génerali vie à la société Frigicean.

I. Sur la fin de non-recevoir

La société Générali vie soulève à nouveau devant la cour la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société Frigicean.

La société Générali vie rappelle que le contrat d'assurance en cause a été souscrit par M. [F] [W] afin de se couvrir contre les risques décès, invalidité, et incapacité le touchant personnellement et le mettant dans l'impossibilité de tenir ses engagements à l'égard du prêteur, la SGCB, en sa qualité de caution de la société Frigicean.

Les intimés, et les consorts [W] en particulier, font valoir qu'ils sont intervenus volontairement dans l'instance principale initialement engagée par la société Frigicean, dès le 31 juillet 2020, de sorte qu'ils ont bien repris l'action engagée à leur propre compte.

La cour, observe que, l'absence de tout lien contractuel entre la société Frigicean et la société Générali vie n'est pas contestée par les consorts [W] qui sont, en tout état de cause, dans l'incapacité de prouver le contraire, n'étant pas détenteurs de la convention, qui ne leur a jamais été communiquée par l'assureur, en dépit de leur réclamation.

Il en découle que la société Frigicean doit effectivement être déclarée irrecevable en son action faute de qualité à agir, ce qui ne remet pas en cause en revanche la recevabilité de l'action en remboursement du solde du prêt garanti, poursuivie par Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W] en leur qualité d'héritiers de l'assuré, lui-même caution en qualité de gérant, de la société qu'il dirigeait.

II. Sur le moyen tiré de la nullité du contrat d'assurance

Le tribunal a écarté le moyen tiré de la nullité de l'adhésion, en retenant que le certificat médical post-mortem délivré par le docteur [Z] sur lequel la société d'assurance s'appuie pour soutenir que M. [F] [W] avait intentionnellement dissimulé une pathologie qui aurait modifié l'évaluation du risque, était quasiment illisible, et que ni les questions, ni les réponses ne permettaient de déterminer la fréquence du suivi médical, la date d'apparition et la gravité des pathologies, ni la durée du traitement.

La société Générali vie soutient, comme devant les premiers juges, que M. [W] a délibérément omis de signaler ses pathologies pour éviter le paiement d'une surprime manquant ainsi à son obligation générale de bonne foi sans puisse lui être opposé le fait de ne pas avoir procédé à des investigations supplémentaires qui ne présentaient aucune utilité dès lors que M. [W] avait précisément répondu négativement à l'ensemble des questions qui lui étaient posées. Elle rappelle par ailleurs avoir totalement satisfait à son obligation de remise de la notice d'information, comme cela résulte de la mention portée sur la notice individuelle au terme de laquelle M. [F] [W] a expressément reconnu l'avoir reçue.

Les ayants droit de ce dernier demandent à la cour de confirmer le jugement de ce chef en rappelant que les éléments médicaux versés aux débats ne démontrent nullement le caractère mensonger des déclarations du défunt alors que, la bonne foi se présumant, il appartient à la société d'assurances d'apporter cette preuve. Ils ajoutent qu'en tout état de cause, l'économie du contrat n'aurait pas été atteinte par la connaissance du risque allégué par l'assureur, qui aurait seulement majoré le montant de la prime, et exclut sa garantie dans l'hypothèse, en tout état de cause, non avérée, d'un décès en lien avec ces pathologies, M. [F] [W] étant décédé dans un accident de la circulation.

La cour rappelle que selon les dispositions de l'article L 113-8 du code des assurances, dans sa rédaction issue de la loi du 7 janvier 1981, déclarée applicable en Nouvelle Calédonie, l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge.

Au cas d'espèce, le questionnaire médical confidentiel auquel M. [F] [W] a répondu le 13 janvier 2009, adossé à sa demande d'adhésion, comportait neuf items, comportant des questions fermées, avec des questions complémentaires auxquelles l'assuré était invité à répondre dans l'hypothèse d'une réponse affirmative à l'item de référence.

Ainsi, en question n° 2, il était demandé à M. [W] : 'êtes-vous ou avez-vous été atteint au cours des dix dernières années d'une maladie ou d'un accident ayant provoqué, soit des arrêts de travail ; soit des traitements soit les deux, d'une durée supérieure à 30 jours: cardiovasculaire (hypertension artérielle en particulier) respiratoire, rénale ,digestive, nerveuse ou neuropsychiatrique (dépression) affection du système génito-urinaire, endocrinologique nutritionnelle (diabète hypercholestérolémie en particulier), hématologique immunitaire (syndrome d'immuno-déficience acquise) tumorale ou autre ...'

A cette question, M. [F] [W] a répondu par la négative alors qu'il ressort du certificat médical délivré post-mortem par le docteur [Z], le 11 octobre 2016, qu'il suivait ce patient depuis le mois de juillet 2005 (son médecin de famille ayant cessé son activité) pour traiter une dyslipidémie et d'une HTA (hypertension artérielle) suivie par lui depuis le mois de mai 2006 et traités par statines (suite illisible). Même incomplet en ce qui concerne la durée de la maladie et son évolution, ce certificat établit de manière très claire, qu'en 2009, au moment où il a répondu au questionnaire, M. [F] [W] présentait des antécédents médicaux pour des pathologies chroniques, pour lesquelles il était traité par 'statines' (traitement destiné à réduire le taux de cholestérol en prévention des risques cardiovasculaires ou d'autres facteurs de risques comme le diabète et l'hypertension), depuis trois ans. Il est en effet manifeste au regard de la présentation de ce document, et de l'articulation des questions auxquelles le praticien devait répondre que la mention manuscrite de la date de mai 2006, portée par le docteur [Z], en réponse à la question : 'quand pour la première fois ' Évolution ' Et durée '', était elle-même en relation avec la question précédente, faisant référence explicite à la maladie traitée.

Ainsi, il est établi, que M. [F] [W], qui était traité depuis plusieurs années pour ces deux pathologies (dont l'hypertension, explicitement visée par le questionnaire), s'est abstenu de communiquer cette information, manquant ainsi à l'obligation de loyauté et de sincérité (pourtant explicitement rappelée à l'assuré au terme de ce questionnaire), cette réticence plaçant la société d'assurances dans l'impossibilité de se faire une exacte opinion du risque.

La cour écartera par ailleurs, au regard des dispositions d'ordre public de l'article L 113-8 du code des assurances, le moyen opposé par les ayants droit du défunt, qui prétendent que rien n'indique que l'assureur aurait modifié son opinion s'il avait connu l'existence d'un risque complémentaire en faisant valoir que la société Générali vie aurait probablement simplement exclu les causes de décès liés à ces pathologies, ce qui n'aurait eu aucune incidence au cas d'espèce, puisque le décès de M. [F] [W] était purement accidentel. En effet, ce texte précise que le contrat d'assurance est nul, indépendamment des causes ordinaires de nullité en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre.

En définitive, il convient au regard des motifs ci-dessus exposés d'infirmer la décision déférée en prononçant la nullité de l'adhésion de M. [F] [W] en date du 13 novembre 2009 au contrat groupe Générali vie sur le fondement de la réticence volontaire d'information sur son état de santé, et de débouter en conséquence, Mme [V] [L], M. [N] [W] et Mme [G] [W] de l'ensemble de leurs demandes, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les demandes formées à titre subsidiaire par l'appelante, tendant à la mise en 'uvre d'une expertise ou à la réduction des prétentions adverses.

III. Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Compte tenu de la position économique respective des parties, il y a lieu d'exonérer les parties à l'exception de la société Générali vie, de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. En effet, la société Générali vie sera condamnée à verser à la Société générale calédonienne de banque la somme de 150 000 francs pacifique au titre des frais qu'elle a dû exposer, puisqu'aucune demande n'a été formée à son encontre.

IV. Sur les dépens

Les dépens de première instance et d'appel resteront à la charge de la société Générali vie pour les mêmes raisons.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Déclare irrecevable pour défaut de qualité à agir l'action engagée par la société Frigicean,

Prononce la nullité du contrat d'assurance souscrit par M. [F] [W] le 13 novembre 2009 auprès de la société Générali vie, pour réticence intentionnelle portant sur une information concernant son état de santé ;

Déboute en conséquence, Mme [V] [L], M. [N] [W], et Mme [G] [W] de l'ensemble de leurs prétentions ;

Y ajoutant,

Condamne la société d'assurances Générali vie à verser à la Société générale calédonienne de banque la somme de 150 000 francs pacifique sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de la société d'assurances Générali vie.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00264
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;22.00264 ?
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