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01/06/2023 | FRANCE | N°22/00155

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre civile, 01 juin 2023, 22/00155


N° de minute : 100/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 01 Juin 2023



Chambre civile









Numéro R.G. : N° RG 22/00155 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TCN



Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 1er juin 2022 par le président du tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 22/225)



Saisine de la cour : 8 juin 2022



APPELANT



M. [R] [S]

né le 9 février 1963 à [Localité 1] ([Localité 1])

demeurant [Adresse 2]

(béné

ficie d'une aide juridictionnelle provisoire numéro 2022/884 du 21/07/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nouméa)

Représenté par Me Audrey NOYON, membre de la SELARL A.NOYON AVOCAT,...

N° de minute : 100/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 01 Juin 2023

Chambre civile

Numéro R.G. : N° RG 22/00155 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TCN

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 1er juin 2022 par le président du tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 22/225)

Saisine de la cour : 8 juin 2022

APPELANT

M. [R] [S]

né le 9 février 1963 à [Localité 1] ([Localité 1])

demeurant [Adresse 2]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle provisoire numéro 2022/884 du 21/07/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nouméa)

Représenté par Me Audrey NOYON, membre de la SELARL A.NOYON AVOCAT, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

NOUVELLE-CALÉDONIE, représentée par le Président du Gouvernement

Siège social : [Adresse 3]

Non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 avril 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,

M. François BILLON, Conseiller,

qui en ont délibéré, sur le rapport de M. François BILLON.

Greffier lors des débats : Mme Isabelle VALLEE

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Isabelle VALLEE

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, le 15 mai 2023, date à laquelle le délibéré a été prorogé au 01 juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Isabelle VALLEE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

' Par acte d'huissier en date du 19 avril 2022, la NOUVELLE-CALEDONIE a fait assigner M. [S] devant le président du tribunal de première instance de Nouméa statuant en référé en vue de voir ordonner son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef d'une villa sise [Adresse 2] sur la commune de [Localité 4].

Au soutien de sa demande, la NOUVELLE-CALEDONIE a exposé essentiellement que la villa faisait partie d'un ensemble de villa aménagées mises à disposition de la communauté du Pacifique Sud (CPS) ; qu'au mois de juin 2020, la CPS avait fait part à la direction des achats et du patrimoine de la NOUVELLE-CALEDONIE de son souhait de rendre la villa au motif qu'elle était occupée sans droit ni titre par M. [S] ; que, par arrêté du 12 mai 2021, la ville de [Localité 4] avait mis en demeure la NOUVELLE-CALEDONIE de prendre des mesures de sécurisation de la parcelle et de la villa en fermant tous les accès, évacuation des encombrants et maintien du terrain en bon état de propreté ; que l'arrêté précisait qu'en raison des désordres constatés, la villa était interdite à l'habitation et devait être entièrement évacuée de ses occupants.

La NOUVELLE-CALEDONIE a ajouté que, malgré la sommation de quitter les lieux délivrée par huissier le 24 novembre 2021, M. [S] occupait toujours la villa et que le portail était verrouillé à l'aide d'un câble antivol.

M. [S] a soutenu qu'il n'y avait pas lieu de statuer en référé compte tenu de l'existence de contestations sérieuses. ll a fait valoir qu'il avait emménagé dans la villa en accord avec la CPS alors qu'elle était à l'abandon et squattée par des personnes sans domicile fixe, qu'il l'avait remise en état mais que des agents de la ville de [Localité 4] avaient tenté de lui faire quitter les lieux en abîmant une partie de la villa.

ll a soutenu que la NOUVELLE-CALEDONIE ne prouvait pas sa qualité de propriétaire du terrain, et qu'il n'était pas occupant sans droit compte tenu de l'autorisation donnée par la CPS en 2016 d'occuper le bien.

A titre subsidiaire, il a demandé un délai pour quitter les lieux du fait de la précarité de sa situation.

' Par ordonnance de référé du 1er juin 2022, il a été statué ainsi qu'il suit :

« Dès à présent, par provision, tous droits et moyens des parties étant réservés au principal,

Ordonnons à M. [R] [S] de libérer le bien immobilier situé [Adresse 2] sur la commune de [Localité 4], de corps, de biens et de tous occupants de son chef dans le délai de quatre mois suivant la signification d'un commandement de quitter les lieux, et, qu'à défaut, il pourra être expulsé au besoin avec le concours de la force publique,

Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision,

Laissons les dépens à la charge de la NOUVELLE-CALEDONIE,

Fixons à 4 (quatre) le nombre d'unités de valeur servant de base à l'indemnisation de Maître [T] intervenant au titre de l'aide judiciaire. »

PROCÉDURE D'APPEL

M. [S], par requête déposée au greffe le 8 juin 2022, a interjeté appel de la décision.

Le mémoire ampliatif d'appel a été enregistré au greffe le 13 juillet 2022.

Par ses conclusions récapitulatives enregistrées au RPVA le 11 novembre 2022, il fait valoir, pour l'essentiel :

- que la demande d'expulsion ne saurait aboutir dans la mesure où elle se heurte à plusieurs contestations sérieuses qui doivent être tranchées par le juge du fond ; qu'il réside dans les lieux depuis 2016, en accord avec Ie service de la gestion immobilière de la CPS, et qu'il était convenu verbalement avec les gestionnaires du parc immobilier qu'il pouvait s'y installer, à charge pour lui de garder, nettoyer et entretenir les lieux, pour une durée indéterminée ; qu'il n'a reçu aucun courrier, ni simple ni recommandé, l'invitant à quitter Ies lieux, avant l'intervention d'un huissier mandaté par la ville de [Localité 4] ; qu'il a déposé plainte contre des représentants de la ville ou de la NOUVELLE-CALEDONIE qui auraient tenté de lui retirer ce confort sommaire (notamment en détruisant son kit et en arrachant les gouttières) pour le contraindre à partir sans passer par les voies légales ;

- que la demande d'expulsion ainsi formée est irrecevable faute de preuve par la Nouvelle-Calédonie de la détention d'un titre de propriété ;

- qu'à titre principal, s'il ne dispose d'aucun écrit venant corroborer l'accord verbal passé à l'époque avec la CPS, il sollicite que la NOUVELLE-CALÉDONIE soit déboutée de sa demande d'expulsion ;

- qu'à titre principal, il demande un délai pour quitter les lieux ;

- qu'enfin, il conteste tout contentieux avec le voisinage et demande que les pièces versées par la Nouvelle-Calédonie soient déclarées irrecevables au motif qu'il est impossible de s'assurer de l'identité du rédacteur, de sa qualité et de son pouvoir.

' En conséquence, M. [S] demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

- infirmer l'ordonnance de référé du 01 juin 2022 en toutes ses dispositions,

- débouter la partie adverse de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- dire et juger irrecevable la demande de la NOUVELLE-CALÉDONIE pour incompétence du Juge des référés, vu les contestations sérieuses soulevées, et l'inviter à mieux se pourvoir ;

- dire et juger irrecevable la demande de la NOUVELLE-CALÉDONIE pour défaut de preuves suffisantes de sa qualité de propriétaire ;

à défaut à titre principal,

- constater que M. [S] n'occupe pas le logement litigieux sans droit ni titre, pour y avoir été autorisé verbalement et pendant des années par la CPS, et,

- rejeter la demande d'expulsion ;

à titre subsidiaire,

- accorder un délai de douze mois à compter de la signification à M. [S] pour libérer les lieux ;

en tout état de cause,

- rejeter les dernières conclusions et pièces de la partie adverse, tel que détaillé en page 6 ;

- laisser les dépens à la charge du demandeur ;

- fixer à 6 le nombre d'unités de valeurs revenant à l'avocat, intervenant au titre de l'aide judiciaire, Me [T], selon une décision n°2022/000884.

*****************************

La NOUVELLE-CALEDONIE, par conclusions enregistrées au greffe le 17 janvier 2023, fait valoir pour l'essentiel :

- qu'en application des dispositions de l'article 809 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie et de la jurisprudence, une contestation sérieuse sur le fond du droit n'interdit pas au juge des référés de prendre les mesures prévues par cet article pour faire cesser un trouble manifestement illicite, l'occupation sans droit ni titre d'un immeuble appartenant à autrui constituant précisément un trouble manifestement illicite ; que l'atteinte au droit de propriété constitue par elle-même une voie de fait et cause un trouble manifestement illicite que le juge des référés a le devoir de faire cesser ;

- qu'elle justifie bien d'un titre de propriété ;

- que la demande d'expulsion est fondée et que la CPS n'aurait pas pu autoriser M. [S] à y résider, n'étant pas propriétaire de la villa qui n'avait été que mise à sa disposition ;

- que cela fait déjà deux ans que les services de la NOUVELLE-CALÉDONIE ont invité, en vain, M. [S] à quitter les lieux et qu'en conséquence aucun délai supplémentaire ne doit lui être accordé pour quitter les lieux.

' En conséquence, la NOUVELLE-CALÉDONIE demande à la cour de :

- rejeter la requête d'appel présentée par M. [S] ;

- déclarer

recevables les conclusions déposées par la NOUVELLE- CALEDONIE le 30 septembre 2022.

*****************************

L'ordonnance de fixation de la date de l'audience a été rendue le 20 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

De la compétence du juge des référés

Attendu que conformément aux dispositions de l'article 809, alinéa 1er du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, ' le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires on de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite' ;

Attendu que l'occupation sans droit ni titre d'un immeuble appartenant à autrui constituant bien un trouble manifestement illicite, la demande formée par la NOUVELLE-CALEDONIE doit être déclarée recevable ;

Du défaut de preuve de la propriété par la NOUVELLE-CALEDONIE

Attendu M. [S] soutient que la requête de la NOUVELLE-CALEDONIE doit être déclarée irrecevable dans la mesure où la qualité de propriétaire de la villa n'est pas démontrée, l'acte d'échange entre la ville de [Localité 4] et la NOUVELLE-CALEDONIE étant illisible et incompréhensible ;

Attendu que la Cour constate cependant que l'acte d'échange du 28 août 1985 entre le territoire et la commune de [Localité 4] de divers terrains, qui émane du service des domaines de la NOUVELLE-CALÉDONIE, valant titre de propriété, est parfaitement lisible et décrit avec précision les limites des biens qui ont été cédés par la mairie de [Localité 4] à la NOUVELLE-CALEDONIE, dont le lot n° 2 sur lequel est située la villa occupée par M. [S] ; que l'acte précise, par ailleurs, qu'il a été transcrit au service des hypothèques de [Localité 4] le 9 septembre 1985 (volume 1595, n° 18) ; que la NOUVELLE-CALEDONIE indique enfin que le lot n° 2 (NIC 648535-6177) a fait l'objet d'une division foncière entraînant ainsi la création du lot n° 2 Partie (NIC 648535-6086) sur lequel est située la villa occupée par M. [S] ; que la preuve de la propriété est ainsi parfaitement établie ;

De l'expulsion

Attendu M. [S] soutient que la NOUVELLE-CALEDONIE doit être déboutée de sa demande d'expulsion dans la mesure où il aurait été autorisé verbalement par la CPS à occuper la villa en cause ;

Attendu que la Cour constate qu'il ne s'agit que de simples allégations, au demeurant sans réelle portée, la villa n'ayant été mise qu'à disposition de la CPS qui n'en était par conséquent aucunement propriétaire ; que la NOUVELLE-CALEDONIE qui n'a jamais autorisé M. [S] à s'installer dans la villa, ce dernier l'a donc toujours occupée sans droit ni titre ;

Attendu en conséquence, que la NOUVELLE-CALEDONIE, propriétaire de la villa, est fondée à solliciter du juge des référés l'expulsion de M. [S] ;

De la demande de délais supplémentaire pour quitter les lieux

Attendu que M. [S] demande, de manière subsidiaire, à pouvoir bénéficier d'un délai de douze mois à compter de la signification de la décision, pour quitter les lieux, ce à quoi s'oppose la NOUVELLE-CALEDONIE en faisant valoir que depuis deux ans les services de la NOUVELLE-CALÉDONIE ont invité, en vain, M. [S] à quitter les lieux ;

Attendu que, dans ces conditions, qui ne sont pas combattues, le délai demandé par M. [S] ne saurait être accordé, sans qu'il soit utile de s'appuyer sur les problèmes de salubrité et de voisinage dont il est demandé par l'appelant que les attestations s'y rattachant soient écartées des débats ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé entreprise ;

Y ajoutant :

Condamne M. [S] aux dépens de la procédure d'appel ;

Fixe à quatre le nombre d'unités de valeurs revenant à l'avocat, intervenant au titre de l'aide judiciaire, Me [T], selon une décision n° 2022/000884.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00155
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;22.00155 ?
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