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04/05/2023 | FRANCE | N°22/00053

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre sociale, 04 mai 2023, 22/00053


N° de minute : 31/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 04 Mai 2023



Chambre sociale









Numéro R.G. : N° RG 22/00053 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TFY



Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 03 Juin 2022 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :22/05)



Saisine de la cour : 20 Juillet 2022



APPELANT



M. [Y] [C]

né le 16 Juillet 1971 à [Localité 3]

demeurant [Adresse 4]

Représenté par Me Aboubakry NIANG membre de

la SCP MILLIARD-MILLION, avocat au barreau de NOUMEA





INTIMÉ



CAISSE DE COMPENSATION DES PRESTATIONS FAMILIALES DES ACCIDENTS DE TRAVAIL DE LA NOUVELLE-CALEDONIE, représentée par son Directe...

N° de minute : 31/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 04 Mai 2023

Chambre sociale

Numéro R.G. : N° RG 22/00053 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TFY

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 03 Juin 2022 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :22/05)

Saisine de la cour : 20 Juillet 2022

APPELANT

M. [Y] [C]

né le 16 Juillet 1971 à [Localité 3]

demeurant [Adresse 4]

Représenté par Me Aboubakry NIANG membre de la SCP MILLIARD-MILLION, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

CAISSE DE COMPENSATION DES PRESTATIONS FAMILIALES DES ACCIDENTS DE TRAVAIL DE LA NOUVELLE-CALEDONIE, représentée par son Directeur en exercice

Siège social : [Adresse 1]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de Monsieur Philippe DORCET, Président de chambre, président, Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseillère, Madame Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,

qui en ont délibéré, sur le rapport de Monsieur Philippe DORCET.

Greffier lors des débats : Mme Isabelle VALLEE

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, signé par Monsieur Philippe DORCET, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

M. [Y] [C] était adjoint d'enseignement titulaire en SVT et physique chimie depuis 9 ans au collège [2] à [Localité 5]. Suite à un arrêt maladie, il retournait au collège le 23 août 2021 et était confronté à un groupe de parents d'élèves qui refusait qu'il reprenne son poste, lui préférant sa remplaçante. Il était placé en arrêt maladie du 23 août au 30 septembre 2021 prolongé jusqu`au 10 décembre 2021 inclus, avec soins jusqu'au 22 décembre 2021.

Le 27 août 2021, le docteur [P] certifiait que "Monsieur [C] s'est trouvé confronté le jour même de sa reprise du travail le 23/08/2021 a l'hostilité d'un petit groupe de parents d'élèves empêchant catégoriquement de se rendre auprès de ses élèves. Victime par le passé d'une agression physique au travail, monsieur [C] devant cette intimidation et en l'absence de tout soutien de sa hiérarchie s'est prudemment conforme à la volonté de ce groupe hostile. Quelques jours après les faits (qui constituent un accident du travail) je constate l'existence d'un stress aigu chez un sujet fragile sur le plan psychique qui devait bénéficier d'une reprise à temps partiel thérapeutique précisément parce que cette mesure était estimée nécessaire à la restauration de son état de santé. Les conséquences psychiques de cette obstruction à la reprise du travail justifient une ITT de dix jours.".

Le 2 septembre 2021, le Vice-Rectorat établissait une déclaration d'accident du travail puis la CAFAT réalisait une enquête de matérialité qui concluait à l'absence de fait accidentel.

Par acte d'huissier en date du 2 mars 2022, M. [C] a assigné la Caisse en référé devant le tribunal du travail aux fins de voire reconnaître qu'il a subi un accident du travail au sens de l'article 2 du décret n° 57-245 du 24 février 1957.

Il soutient principalement d'une part que cette décision de rejet constitue un trouble manifestement illicite et que le juge des référés est compétent en application de l'article 885-2 du CPCNC pour qualifier celui-ci en accident du travail, afin de faire cesser ce trouble et d'autre part que l`agression sur son lieu de travail le 23 août 2021 constatée par des certificats médicaux remis à la CAFAT constituent un accident du travail au sens de l'article 2 du décret de 1957 puisqu'il souffre désormais de troubles anxieux très sévères.

Les faits étant survenus à l'occasion du travail, ils sont présumés imputables à l'employeur, le lien de causalité étant établi entre la lésion et l'incident du 23 août 2021.

Au terme de conclusions du 11 mars 2022, la CAFAT confirmait ne pas avoir reconnu le caractère d'accident du travail au fait du 23 août 2021, compte tenu de l'absence de fait accidentel, les faits rapportés par le requérant ne pouvant être rattachés à la lésion psychologique don't souffrait l'assuré compte tenu du caractère tardif du certificat médical, de la déclaration d'accident du travail, et des conclusions du rapport d'enquête de matérialité.

Elle précise que le requérant n'a pas exercé préalablement à son recours devant ce tribunal, le recours devant la commission de conciliation et de recours gracieux de la CAFAT et s 'en rapporte à justice quant à la qualification des faits.

Par ordonnance en date du 03 juin 2022, le juge des référés a renvoyé les parties à mieux se pourvoir et M [C] en a relevé appel le 20 juillet 2022.

SUR QUOI LA COUR,

Dans tous les cas d'urgence, le président du travail est compétent pour statuer en référé et dans la limite de sa compétence. Il peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

ll peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Sur l'existence d'un trouble manifestement illicite et la qualification d'accident du travail

Au terme des dispositions de l'article 2 du décret N° 57-245 du 24 février 1957 "est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail'.

Constitue un accident de travail un évènement ou une série d'événements survenu à des dates certaines parle fait ou à l'occasion du travail don't il résulte une lésion corporelle, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci (Soc. 02 avril 2003, n°00-21763).

De jurisprudence constante, la lésion corporelle doit s'entendre au sens large c'est à dire qu'elle peut être interne ou externe et inclut donc une douleur, un simple malaise ou une atteinte psychique.

Enfin la jurisprudence a posé le principe que tout accident survenu au temps et au lieu du travail est réputé survenu par le fait ou à l'occasion du travail jusqu'à preuve contraire (présomption d'imputabilité).

En l'espèce, la CAFAT conteste l'existence d'un fait accidentel et le lien entre la lésion et les faits qui se sont produits sur son lieu de travail le 23 août 2021, celui-ci déclarant s'être vu interdire l'accès à la salle des professeurs par un comité de parents d'élèves lui signifiant de ne pas reprendre les cours.

ll résulte de l'enquête de matérialité que le proviseur donne une autre version des faits en indiquant qu'il a demandé au requérant de ne pas sortir de son véhicule et de rebrousser chemin car le groupe de parents d'élèves posté devant le collège était agité et déterminé.

Une enquête de gendarmerie a été diligentée sur les faits mais celle-ci n'est pas produite, ce qui aurait pourtant permis d'en savoir plus sur les circonstances des faits du 23 août dénoncés par le requérant.

Par ailleurs, le certificat médical et la déclaration d'accident de travail ont été établis quatre jours après les faits, de sorte qu'il n'est pas évident que la lésion (troubles psychologiques) constaté le 27 août par le médecin soit imputable aux faits du 23 août alors qu'il est constant que le requérant avait fait l'objet d'un arrêt maladie précédemment.

La matérialité de l'accident et le lien entre les faits et la lésion étant contestés, la présomption d'imputabilité ne peut être retenue concernant un accident de travail le 23 août 2021 n'est pas incontestable.

Le requérant n'établit pas dès lors avec les éléments qu'il produit que la décision de la CAFAT de rejet de qualification des faits du 23 août en accident de travail constitue un trouble manifestement illicite.

Enfin, l'employeur n'a pas été mis dans la cause alors qu'il a un intérêt évident au litige, puisqu'en cas de qualification d'accident de travail, le requérant pourra agir à l'encontre de l'employeur éventuellement sur le fondement de la faute inexcusable.

Le requérant sera donc débouté de sa demande et renvoyé à mieux se pourvoir, le juge des référés n'étant pas compétent en cas de contestation sérieuse, ce qui est le cas en l'espèce.

Sur les frais irrépétibles

ll n'est pas inéquitable en l'espèce de laisser a la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elles ont engagés, compte tenu de la situation financière respective des parties.

Sur les dépens

Le requérant qui succombe sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

DIT que la matérialité de l'accident et le lien entre les faits et la lésion étant contestés, la présomption d'imputabilité ne peut être retenue et que l'obligation de retenir la qualification d'accident de travail aux faits du 23 août 2021 de la CAFAT n'est pas incontestable ;

CONSTATE qu'il n'existe pas de trouble manifestement illicite et en conséquence,

CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée du 03 juin 2022 ;

DIT n`y avoir lieu a paiement de frais irrépétibles.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00053
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;22.00053 ?
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