La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/05/2023 | FRANCE | N°21/00094

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre sociale, 04 mai 2023, 21/00094


N° de minute : 27/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 04 Mai 2023



Chambre sociale









Numéro R.G. : N° RG 21/00094 - N° Portalis DBWF-V-B7F-STM



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Novembre 2021 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :20/30)



Saisine de la cour : 03 Décembre 2021





APPELANT



Association ARBORICULTEURS DU TERRITOIRE DE NOUVELLE-CALEDONIE ARBOFRUITS

Siège social : [Adresse 2]

Représenté

e par Me Elodie LECORDIER, avocat au barreau de NOUMEA

Représentée par Me Frédéric DESCOMBES membre de la SELARL D'AVOCATS D&S LEGAL, avocat au barreau de NOUMEA





INTIMÉ



M. [J] [S]

né le ...

N° de minute : 27/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 04 Mai 2023

Chambre sociale

Numéro R.G. : N° RG 21/00094 - N° Portalis DBWF-V-B7F-STM

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Novembre 2021 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :20/30)

Saisine de la cour : 03 Décembre 2021

APPELANT

Association ARBORICULTEURS DU TERRITOIRE DE NOUVELLE-CALEDONIE ARBOFRUITS

Siège social : [Adresse 2]

Représentée par Me Elodie LECORDIER, avocat au barreau de NOUMEA

Représentée par Me Frédéric DESCOMBES membre de la SELARL D'AVOCATS D&S LEGAL, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

M. [J] [S]

né le 09 Juin 1982 à [Localité 6]

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Virginie BOITEAU membre de la SELARL VIRGINIE BOITEAU, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de Monsieur Philippe DORCET, Président de chambre, président, Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseillère, Madame Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère, qui en ont délibéré, sur le rapport de Monsieur Philippe DORCET.

Greffier lors des débats : Mme Isabelle VALLEE

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, signé par Monsieur Philippe DORCET, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

M. [J] [S] a été embauché par contrat à durée déterminée à compter du 20 octobre 2014 et pour une durée de 3 mois par l'association des Arboriculteurs du Territoire de la Nouvelle-Calédonie (ci-après dénommée ARBOFRUITS). Il occupait un poste de technicien de vulgarisation en productions végétales, spécialisé sur la production fruitière, affecté en Province Nord, sur zone prioritaire [Localité 3]- [Localité 7], moyennant un salaire mensuel brut de base de 220 000 XPF pour 39 heures de travail par semaine (convention collective territoriale de travail des exploitations agricoles). Le 21 janvier 2015, les parties concluaient un contrat de travail à durée indéterminée sur le même poste moyennant un salaire mensuel brut de base de 230 000 XPF.

Le 25 février 2015 à 15h45, M. [S] était percuté de plein fouet par un véhicule don't la conductrice perdait la vie alors qu'il circulait sur la RT1 avec son véhicule professionnel dans le sens [Localité 4]-[Localité 5]. Gravement blessé, un certificat médical initial du 26 février 2015 constatait une ITT de 45 jours, sauf complications ultérieures. M. [S] était prolongé en accident du travail jusqu'au 28 septembre 2015.

Le 30 septembre 2015, le médecin du travail le considérait apte à une reprise du travail avec restriction soit un mi-temps thérapeutique «'sans marche prolongée, ni conduite de véhicule et un travail plutôt administratif'». '

Le 7 octobre 2015, M. [S] était placé en rechute d'accident du travail jusqu'au 8 mai 2016. Le 12 mai 2016, M. [S], le SMIT le déclarait apte à une reprise de travail à mi-temps thérapeutique.

ll était déclaré en rechute d'accident du travail le 16 février 2017 compte tenu notamment de troubles thymiques en lien avec son état de stress post traumatique. Une visite de contrôle de la médecine du travail à la demande de l'employeur avait lieu le 5 février 2018 concluant sous la signature du Dr [V] à une inaptitude définitive au poste de technicien de vulgarisation chez ARBOFRUITS [Localité 5], mais déclaré apte à un poste sans conduite de véhicules.

Le médecin mentionnait sur cet avis du SMlT': " inaptitude définitive en une seule visite'

Le 8 février 2018 par courrier de la veille, ARBOFRUITS informait le salarié de son impossibilité de procéder à son reclassement suite à sa décision d'invalidité définitive et par courrier du même jour remis en mains propres à M. [S] le 9 février suivant, le convoquait à un entretien préalable pour le lundi 12 février 2018 suite à la décision d'inaptitude définitive du SMIT.

M. [S] était au final licencié pour impossibilité de reclassement par courrier daté du 14 février 2018 remis en mains propres au salarié dans les termes suivants':

'Par courrier don't vous avez accusé réception en date du 9 février 2018, vous avez été convoqué à un entretien préalable en vue d'un reclassement ou d'un licenciement pour inaptitude au poste.

Lors de l'entretien préalable qui s'est déroulé le lundi 12 février 2018, nous avons évoqué ensemble notre impossibilité de procéder a votre reclassement au sein de notre Association suite au certificat d'inaptitude au poste de technicien vulgarisateur qui vous avez été signifié par la médecine du travail au cours de votre visite médicale de reprise du lundi 5 février à 16h30 a [Localité 5].

Cette impossibilité de reclassement ressort non seulement des échanges avec le médecin du travail, signataire de la fiche d'inaptitude, mais également de l'avis formulé par les délégués du personnel de l'Association.

Le médecin du Service Médical Interentreprises du Travail (SMIT) vous a en effet déclaré inapte définitif au poste de technicien de vulgarisation en arboriculture chez Arbofruits [Localité 5] ainsi qu'à tous postes nécessitant la conduite de véhicules.

Or, comme nous en avons discuté et comme nous vous l'avons rappelé, dans notre courrier en date du 7 février 2018, l'Association compte un seul et unique emploi sédentaire, celui de la secrétaire comptable qui est actuellement pourvu en CDI à temps plein. Tous les autres postes occupés au sein de l'Association sont des postes de techniciens nécessitant de très nombreux déplacements professionnels en voiture (en moyenne de 30000 km par an). De plus, aucune création de poste sédentaire n'est envisagée au sein de l'Association et il est totalement impossible de procédera des aménagements de votre poste actuel au regard de vos nouvelles aptitudes telles que définies par le médecin du SMIT.

Devant l'impossibilité de pouvoir vous proposer un poste en adéquation avec vos nouvelles aptitudes, qui consisterait à occuper un poste sans conduite de véhicule, nous sommes au regret de vous signifier par la présente votre licenciement pour impossibilité de reclassement suite à votre inaptitude définitive.

Je vous informe en outre que, eu égard a la décision du SMIT, vous êtes dispensé d'avoir à effectuer votre préavis.

Vous voudrez bien restituer à l'association l'ensemble des biens lui appartenant don't vous auriez conservé l'usage à compter de la réception de la présente. Nous tiendrons à votre disposition votre certificat de travail, votre solde de tout compte".

Le salarié recevait son certificat de travail le 14 février 2018 ainsi qu'un reçu pour solde de tout compte du 21 février 2018.

Le Docteur [O] [P] médecin psychiatre indiquait dans un certificat médical du 29 janvier 2018 que ' Monsieur [S] présentait, à la suite de son accident du travail, un état de stress post-traumatique actuellement contrôlé, que la résilience est bonne et que la reprise du travail peut être prononcée.'».

Par requête introductive du 7 février 2020, M. [S] a cité son employeur devant la juridiction du travail aux fins de juger au principal nul et de nul effet le licenciement survenu et subsidiairement le dire irrégulier en condamnant ARBOFRUITS à lui verser un mois de salaire soit 230'000 XPF à ce titre, fixer son salaire de référence à la somme de 230'000 XPF par mois, requalifier la rupture du contrat en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui verser en conséquence 12'763 XPF (reliquat indemnité de préavis) et 46'000 XPF (indemnité de congés payés sur préavis), 72 655 XPF (indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article Lp 127-9 du Code du travail, 3 450 000 XPF (dommages intérêts compte tenu de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement survenu), 1 500 000 XPF en réparation de l'incidence professionnelle et la perte de promotion professionnelle, 1 500 000 XPF (dommages intérêts pour préjudice moral) outre 250'000 XPF au titre des frais irrépétibles.

Au terme de ses écritures auxquelles il convient de se reporter pour plus ample développement, M. [S] soutient à titre principal que son licenciement consécutif à un accident de travail est nul au motif que l'inaptitude du salarié n'a pas été régulièrement constatée en l'absence d'un second examen médical de reprise rendu obligatoire par la jurisprudence, l'employeur méconnaissant l'article 17 alinéa 2 de la Délibération n°240 du 6 décembre 1960.

Il soutient d'une part qu'ARBOFRUITS n'a pas sollicité une seconde visite médicale de reprise, ce qui lui aurait laissé le temps d'envisager des possibilités de reclassement, l'avis du médecin du SMIT ayant en effet par courriel du 8 février 2018, déclaré inapte le salarié en une seule visite compte tenu "de la situation qui présentait un danger immédiat pour la sécurité du salarié et de ses tiers" et d'autre part que les recherches de reclassement n'ont pas été réalisées loyalement, l'employeur notifiant le même jour le 8 février l'absence de possible reclassement sans avoir interrogé les délégués du personnel sur sa situation et les éventuels postes disponibles.

Il fait valoir en outre que son licenciement est nul en l'absence de décision de l'inspection du travail en violation des dispositions de l'article 17 de la délibération N°240 fixant les mesures de réadaptation fonctionnelle de rééducation fonctionnelle et de reclassement des victimes d'accident du travail.

Il rappelle qu'une somme de 447 237 XPF lui a été réglée au titre du préavis mais que n'ont pas été pris en compte les congés payés sur préavis': il sollicite de ces chefs les sommes de 12 763 XPF au titre du solde de l'indemnité de préavis outre 46 000 XPF à titre de congés payés sur préavis.

En outre, il affirme qu'une partie de l'indemnité spéciale de licenciement lui est toujours due à hauteur de 72 655 XPF au titre de l'article Lp 127-9 du Code du Travail (74'655 XPF x 2 soit 149 500 XPF), l'employeur ayant déjà réglé la somme de 76 845 XPF.

Enfin, il estime que le montant de la somme qu'il réclame au titre du règlement de l'indemnité sans cause réelle et sérieuse est justifiée au motif qu'il est resté sans emploi pendant un an et a subi de graves difficultés financières et qu'il a subi un préjudice d'incidence professionnelle et de perte de promotion professionnelle ayant dû renoncer à ses projets professionnels et contraint de se réorienter professionnellement.

ll soutient avoir subi un préjudice moral distinct de celui cause par L'accident et la rupture, s'étant trouvé brutalement sans rémunération alors qu'il était immobilisé et en convalescence.

Au terme de ses écritures auxquelles il convient de se reporter pour plus ample développement, ARBOFRUITS conclut au rejet de la demande de nullité du licenciement soutenant qu'elle a respecté la procédure de licenciement, le médecin du travail ayant prononcé l'inaptitude définitive du salarié à son poste de technicien de vulgarisation en une seule visite le 5 février 2018 et confirmé l'absence de nécessité d'organiser interrogé par l'employeur une seconde visite le 8 février 2018, (piéce N° 14 def) de sorte que cette décision est valable.

Elle fait valoir, par ailleurs d'une part que le requérant ne saurait valablement lui opposer que le danger immédiat doit être mentionné dans l'avis médical et non dans un autre document alors que la Cour de Cassation a déjà reconnu un constat médical d'inaptitude d'un courrier d'un médecin du travail, d'autre part que la jurisprudence citée par le requérant est inapplicable en l'espèce faisant référence à des textes métropolitains inapplicables en Nouvelle-Calédonie, et qu'il n'a pas contesté l'avis d'inaptitude auprès de l'inspecteur du travail.

S'agissant de la nullité sur la violation de l'article 17 de la délibération N° 240 du 6 décembre 1960, elle soutient que ce texte rappelant l'obligation de soumettre la décision de licencier un salarié en situation d'invalidité permanente à l'inspection du travail ne prévoit pas la nullité du licenciement en cas d'omission, soutenant qu'il s'agit là d'une irrégularité de procédure et en opposant ne pas avoir été informée de la situation d'invalidité du requérant, celle-ci ayant été prononcée en décembre 2018 postérieurement au licenciement.

Elle conclut au rejet des demandes de M. [S] sur le fondement du licenciement sans cause réelle et sérieuse aux motifs qu'elle a parfaitement respecté ses obligations (recherches de reclassements et informations écrites du salarié de l'impossibilité de reclassement avant).

Ainsi, elle indique avoir informé le salarié par courrier daté du 7 février 2018 remis le lendemain au salarié de l'impossibilité de pouvoir le reclasser (piéce N° 11 def) puis notifié la convocation à entretien préalable le 9 février 2018.

Par ailleurs, elle conteste avoir méconnu son obligation de reclassement, invoquant que la majorité des salariés a un poste de terrain hormis 2 qui sont sur des postes administratifs (le directeur et la secrétaire) au sein de l'association tel que le prouve l'organigramme produit (piéce N° 15 def) de sorte qu'elle se trouvait dans l'impossibilité de procéder à son reclassement, les recherches de reclassement devant être engagées conformément à la taille de l'entreprise et l''étendue de l'inaptitude selon la jurisprudence de la Cour de Cassation de sorte que le délai des recherches peut être réduit tel qu'en l'espèce, l'association n'appartenant pas à un groupe et l'inaptitude étant prononcée en raison de l'impossibilité de conduire un véhicule.

Elle estime donc le licenciement pour inaptitude, justifié et conclut au rejet des demandes formulées par le requérant.

Elle soutient avoir déjà réglé l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de licenciement de sorte qu'il n'est pas fondé à solliciter une indemnité spéciale de licenciement dès lors qu'elles ont le même objet.

Elle conclut au rejet des demandes de dommages et intérêts au titre de l'incidence professionnelle et de perte de promotion professionnelle, soutenant que ce contentieux ne se place pas dans le cadre de la faute inexcusable.

Enfin, elle conclut au rejet des dommages et intérêts pour préjudice moral soutenant ne pas être responsable des griefs invoqués par le requérant victime d'un accident de la circulation et sollicite le versement de la somme de 420 000 XPF au titre des frais irrépétibles.

Par jugement en date du 23 novembre 2021, le tribunal du travail de Nouméa rejetait la demande d'annulation du licenciement mais déclarait que pour être régulier et non vexatoire, le dit licenciement n'en était pas moins dépourvu d'une cause réelle et sérieuse. Il condamnait en conséquence l'association ARBOFRUITS à régler à M. [S] 2.760. 000 XPF (dommages-intérêts Lp127-10 alinéa 2et 3 du Code du travail), douze mille sept cent soixante-trois (12.763) francs au titre du reliquat de l'indemnité de préavis, 46.000 XPF (congés-payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis), 72 .655 XPF au titre du reliquat de l'indemnité spéciale de licenciement outre 180'000 XPF au titre des frais irrépétibles et fixait la moyenne des trois derniers mois de salaire à 230'000 XPF.

Par requête en date du 03 décembre 2021, ARBOFRUITS relevait appel de cette décision. Dans un mémoire en réponse du 20 juin 2022, M. [S] formait appel incident pour avoir été débouté de sa demande en nullité du licenciement «'et de certains postes de préjudice'».

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité du licenciement :

Sur l'absence d'une deuxième visite médicale par le SMIT

ll résulte des dispositions de l'article R 263-14 du Code du Travail qu'après une absence supérieure à 15 jours des suites d'un accident de travail, le salarié bénéficie d'un examen de reprise par le médecin du travail.

Par ailleurs, selon la jurisprudence, le licenciement d'un salarié prononcé en raison de l'état de santé d'un salarié est nul.

Appelant incident, M. [S] fait état de ce que si la législation métropolitaine introduit désormais le principe d'une inaptitude cantonnée à une seule visite, tel ne serait pas le cas des textes calédoniens puisqu'il résulterait d'une jurisprudence de la cour de cassation que le licenciement pour inaptitude ne peut intervenir à peine de nullité «'sans qu'un second examen médical n'ait été pratiqué.'»

Pour ce qui concerne l'exception concernant la situation de danger, elle devait résulter d'un avis «'motivé » du médecin du travail concernant la situation d'urgence qui en toute hypothèse ne pouvait provenir d'une confirmation ultérieure.

L'association ARBOFRUITS expose de son côté avoir, dès le 07 février 2018, sollicité expressément la nécessité d'une deuxième visite (PJ n° 14 ARBOFRUITS) prenant en compte l'existence d'un danger immédiat pour la sécurité de son salarié ou des tiers.

A quoi il était répondu par le médecin le 08 février 2018': « Oui, je vous confirme l'inaptitude M. [S] en une seule fois, en effet l'inaptitude en une seule visite concerne bien les situations présentant un danger immédiat pour la sécurité du salarié ou de ses tiers.'»

Il est constant que le médecin du travail (Le Dr [V]) avait à plusieurs reprises reçu le requérant depuis son accident, disposait des fiches de poste indiquant notamment que la conduite de véhicule était quotidienne et connaissait parfaitement sa situation et sa fonction : l'avis rendu le 5 février 2018 indiquant que le requérant était inapte définitivement au poste de technicien de vulgarisation chez ARBOFRUITS en une seule visite précisait qu'il était apte à un poste sans conduite de véhicules.

C'est dans ces conditions que ce praticien a confirmé trois jours après et ce, on ne peut plus clairement à la demande de l'employeur, que l'inaptitude avait été prononcée en une seule visite compte tenu du danger immédiat que présentait la situation de M. [S] don't l'état de santé interdisait la conduite de véhicules. Il ne saurait dans ces conditions être reproché à l'employeur de ne pas avoir organisé la seconde visite.

Aucun texte de loi en Nouvelle-Calédonie ne prévoit de seconde visite obligatoire': l'argument tiré de jurisprudences variées sera écarté car inapplicables localement, les textes visés étant sans équivalent dans le code du travail local.

Contrairement à ce que soutient le requérant et ainsi que relevé par le premier juge, la jurisprudence admet que l'inaptitude en une seule visite compte tenu du danger immédiat, et tel était bien le cas en l'espèce, peut être constatée dans un courrier postérieur à l'avis.

Par ailleurs, le code du travail offrait au salarié une possibilité de recours à l'encontre de la décision du SMIT devant l'inspection du travail (Lp 263-9 du code du travail) qui aurait été amenée à apprécier la motivation de l'avis d'inaptitude. Sur ce point, pour mémoire et de jurisprudence constante et ancienne, en matière d'appréciation de l'état de santé d'un salarié, tant ce dernier que l'employeur ont toujours eu la possibilité de solliciter un nouvel examen (Soc. 18 juillet 1996).

M. [S] sera donc débouté de sa demande d'annulation du licenciement au motif que le médecin a rendu qu'un seul avis après une seule visite médicale constatant son inaptitude.

Sur la violation de la délibération n°240

Au terme des dispositions combinées des articles 16 et 17 de la délibération n°240 du 6 décembre 1960, est soumis à la décision de l'inspecteur du travail, le licenciement de toute victime d'accident du travail atteinte d'une invalidité permanente avec une réduction de capacité la rendant professionnellement inapte à son ancien emploi et pour laquelle l'employeur ne dispose d'aucun emploi permettant le reclassement.

Il résulte d'une lecture combinée des dispositions des articles Lp 127-6 et Lp 127-7 du code du travail qu'en cas d'inaptitude, l'employeur qui ne peut proposer un reclassement «'respecte alors la procédure applicable au licenciement pour motif personnel'» (articles Lp122-3 et sq)

M. [S] critique la décision du tribunal en rappelant qu'en l'absence de reclassement, son licenciement aurait dû être soumis préalablement à la décision de l'inspection du travail.

Ainsi que rappelé par le tribunal et comme exposé ci-dessus, les articles 16 et 17 de la délibération précitée de 1960, même reprises dans une délibération du 12 septembre 1986 doivent être interprétés au regard des dispositions des articles Lp 127-6 et Lp 127-7 du code du travail lesquelles, très largement postérieures s'agissant d'une délibération N°281 du 24 février 1988, ne prévoient aucune obligation pour l'employeur de demander l'autorisation à l'inspecteur du travail pour licencier un salarié inapte.

Il ne peut qu'être constaté que les dispositions des articles Lp 127-6 et Lp127-7 ont abrogé implicitement les articles 16 et 17 de la délibération n°240 du 6 décembre 1960. La cour relève d'ailleurs que la jurisprudence de la cour d'appel de Nouméa citée par M. [S] s'interrogeait déjà dès 2010 sur la compatibilité de ces deux textes sans toutefois se'prononcer sur l'abrogation tacite du texte antérieur contradictoire.

En outre, il sera rappelé que toute nullité doit être explicitement formulée par un texte': l'absence de consultation de la DTE pourrait tout au plus entraîner l'irrégularité de la procédure de licenciement mais en aucun cas son annulation.

Enfin, M. [S] fait état, au vu de l'article 17 de la délibération, de ce que l'employeur engagerait sa responsabilité pour faute pour avoir omis de l'interroger sur son invalidité afin d'«éviter d'avoir à obtenir une autorisation de la DTE'» s'agissant d'un salarié protégé.

Il sera relevé ainsi qu'exposé supra que les dispositions des articles Lp 126 et Lp 127 ont abrogé ce texte, leurs dispositions étant incompatibles.

Il en résulte que M. [S] qui n'avait pas fait l'objet d'une décision d'invalidité permanente au moment de l'avis d'inaptitude délivré par le médecin du travail ne saurait soutenir que l'employeur devait solliciter l'avis de l'inspection du travail, celui-ci ayant respecté les dispositions sur l'inaptitude applicables au moment du licenciement.

Sur l'obligation de reclassement :

ll résulte des dispositions des articles Lp 127-3 et Lp 127-6 du code du travail de Nouvelle-Calédonie et de la jurisprudence de la cour d'appel de Nouméa qu'en cas de maladie professionnelle, ou d'accident de travail '...lorsqu'à l'issue des périodes de suspension consécutives à un accident de travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

- Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise.

- L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

- l'employeur ne peut rompre le contrat que s'il justifie de son impossibilité de proposer un emploi soit du refus par le salarié de l'emploi proposé.'»

En cause d'appel, ARBOFRUITS maintient avoir tout mis en 'uvre pour procéder au reclassement de M. [S] en soumettant pour avis sa situation lors de la réunion mensuelle des délégués le 6 février 2018. L'association explique à cet égard que sa recherche a été '«'loyale et sérieuse'» et que le tribunal a alourdi les obligations lui incombant en créant «'une sorte d'obligation de reclassement de résultat'» alors que la recherche d'emploi ne doit porter que sur les postes vacants autrement dit sur les emplois disponibles dans l'entreprise.

Elle fait valoir que l'emploi «''aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail'» au sens de l'article L 127-6 alinéa 3 du CTNC ne saurait déboucher sur une création de poste don't il n'a pas l'utilité économique (Soc. 21 mars 2012). Elle précise d'ailleurs qu'étant financée exclusivement par des bailleurs publics, elle ne peut procéder à la création d'emploi.

Elle soutient que l'ensemble des 15 postes de l'association répartis sur l'ensemble de la Calédonie stipulent tous expressément la conduite d'un véhicule à raison d'une obligation de se rendre «'sur le terrain'» tant pour ce qui regarde les techniciens que les coordinateurs': elle produit huit attestations des salariés en ce sens. Quant aux deux seuls postes administratifs ne nécessitant pas la conduite d'un véhicule, celui du directeur et de la secrétaire de l'association, ils étaient occupés en CDI et se trouvaient donc indisponibles.

Contrairement à ce qu'indique M. [S] en appel, elle rappelle que les techniciens ne travaillent pas en binôme, les zones de compétence étant exclusives. Quant au travail administratif des techniciens qu'il aurait pu centraliser, il n'aurait pas occupé le quart de son temps.

En outre, s'agissant du poste de Mme [M] qui aurait selon lui quitté son poste le 11 mars 2018 et qui aurait pu lui être proposé, ARBOFRUITS indique qu'elle n'a quitté l'entreprise que le 30 avril 2019.

Enfin, elle indique qu'il ne saurait être tiré argument sur ce point ainsi que l'a fait le tribunal de la brièveté du délai entre l'avis d'inaptitude et l'engagement de la procédure de licenciement pour caractériser le peu de sérieux dans la recherche d'un reclassement. D'autres critères doivent être pris en compte à cet égard que sont la taille de l'entreprise, l'étendue de l'inaptitude, les termes de la lettre de licenciement, la nature des activités de l'association ou le niveau de qualification du salarié.

Elle conclut ainsi à l'impossibilité absolue de procéder au reclassement de M. [S] malgré toutes les recherches qu'elle avait entreprises et à l'infirmation sur ce point de la décision de première instance.

M. [S] sollicite en appel la confirmation du premier jugement.

Il rappelle qu'il incombe à l'employeur de prouver qu'il a tout mis en 'uvre pour remplir son obligation loyalement et prouver que le reclassement était impossible. Il doit justifier de ses recherches, la production d'un simple compte-rendu de la consultation de délégués du personnel ne pouvant caractériser l'impossibilité de reclassement.

Il relève que la lettre de licenciement ne détaille aucune des diligences entreprises pour la recherche d'un reclassement se bornant à constater soit que les postes sont occupés soit qu'ils sont incompatibles avec l'inaptitude à la conduite relevée par le médecin du travail.

De même, il ne justifierait nullement avoir interrogé les trois Provinces du terrritoire.

Enfin, il souligne que la brièveté du délai entre l'avis d'inaptitude du 05 février 2018 et la lettre de licenciement fondée sur l'impossibilité de reclassement signe en elle-même, jurisprudence à l'appui, le peu de sérieux de la recherche.

Il est de jurisprudence établie que l'employeur doit prouver d'une part qu'il a tout mis en 'uvre pour remplir son obligation loyalement et d'autre part que le reclassement était réellement impossible étant observé qu'il est tenu de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement (CA Nouméa 19 mai 2010, 09/00221)

Au vu des pièces produites, l'employeur justifie parfaitement avoir effectué des recherches de reclassement ayant envisagé une modification ou un aménagement de postes tels que prévus par les textes précités puisque ces possibilités ont fait l'objet d'un débat et d'une discussion détaillée avec les élus du personnel ainsi qu'il ressort du procès verbal de séance du 06 février 2017 et de l'attestation de Mme [Y] qui détaille ce que sont les fonctions de technicienne de terrain et le sérieux avec lequel furent examinées les possibilités de reclassement de M. [S]. Ces derniers ont en effet rappelé que l'association ne comportait qu'un poste sédentaire, à savoir celui de la secrétaire comptable, puis observé lors de leur réunion qu'il était impossible de procéder à des aménagements de postes au regard des conditions exigées par le médecin du SMIT s'agissant en particulier de l'interdiction totale de conduite automobile à laquelle devait être soumis le salarié.

Pour ce qui concerne le fait de n'avoir pas interrogé les «'Provinces'», il est rappelé par l'appelant que l'association est centralisée et gérée par le seul Directeur qui connaît ses effectifs et n'a nul besoin de consulter des antennes qui n'existent pas.

ll sera observé en outre que le délai de 3 jours entre l'avis du SMIT du 5 février 2018 et la remise au salarié du courrier daté du 8 février lui notifiant son impossibilité de le reclasser, pour bref qu'il puisse apparaître, ne constitue pas en soi un obstacle pour une recherche sérieuse et loyale de reclassement dans la mesure où la jurisprucdence considère que d'autres facteurs peuvent rentrer en ligne de compte qu'il convient de prendre en considération tels que la taille de l'entreprise, l'étendue de l'inaptitude et le caractère circonstancié des restrictions imposées par le médecin du travail, le niveau de qualification du salarié et la nature ds activités de l'entreprise.

En l'espèce, la société comptait 17 salariés au moment du licenciement et à l'exception du Directeur et de la secrétaire comptable occupant des postes à plein temps, soit une petite structure. Pour mémoire, il est fourni une copie du registre du personnel en date de mai 2021 lequel démontre qu'aucun poste n'a été créé depuis le départ de M. [S].

Les termes de la lettre de licenciement sont d'une parfaite clarté dès lors qu'était rappelé outre la consultation des élus du personnel, l'impossibilité d'aménager nu poste de technicien de terrain dès lors que la conduite d'un véhicule était absolument nécessaire.

Le licenciement est donc pourvu d'une cause réelle et sérieuse.

Sur l'indemnisation :

Sur le salaire de référence

Les deux parties s'accordent sur le salaire de référence fixé à 230'000 XPF / mois.

Sur l'indemnisation pour méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié':

L'article Lp 127 -10 du code du travail dispose : "Lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives à la réintégration des salariés déclarés aptes prévues à l'article Lp. 127-5, le tribunal saisi peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise avec maintien de ses avantages acquis.

ll en va de même en cas de licenciement prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte prévues à l'article Lp. 127-6 et au deuxième alinéa de l'article Lp. 127-7.

En cas de refus par l'une ou l'autre des parties, le tribunal octroie au salarié une indemnité. Cette indemnité, qui ne peut être inférieure à douze mois de salaire, est due sans préjudice de l'indemnité compensatrice et, le cas échéant, de l'indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article Lp. 127-9. Lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions du dernier alinéa de l'article Lp. 127-7, il est fait application des dispositions prévues à l'article Lp. 122-35 pour le cas d'inobservation de la procédure requise."

Au vu des développements qui précèdent, la cour infirmera sur ce point l'indemnisation accordée par le tribunal à M. [S]

Sur la forclusion du solde de tout compte :

L'article Lp 122-32 du Code du travail de Nouvelle-Calédonie prévoit que lorsqu'un reçu pour solde de tout compte est délivré par le salarié à l'employeur à l'occasion de la rupture ou de l'expiration de son contrat de travail, régulièrement dénoncé ou à l'égard duquel la forclusion ne peut jouer, ce reçu n'a que la valeur d'un simple reçu des sommes qui y figurent.

Selon les dispositions de l'article R 122-6, du Code du travail, le reçu pour solde de tout compte mentionne à l'article Lp 122-32 est établi en double exemplaire. Mention en est faite sur le reçu. L'un des exemplaires est remis au salarié. Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé par écrit dans les deux mois de signature. La dénonciation est motivée. Elle est faite par lettre recommandée.

La forclusion ne peut être opposée au salarié'd'une part si la mention "pour solde de tout compte' n'est pas entièrement écrite de sa main et suivie de sa signature, d'autre part si le reçu ne porte pas mention, en caractères très apparents, du délai de forclusion.

L'appelante soulève à nouveau devant la cour la forclusion de la demande d'indemnité de préavis et de congés payés sur préavis au motif que le solde de tout compte mentionne expressément «'Indemnité de préavis'».

Il est constant que l'employeur a remis au salarié le 21 février 2018 un solde de tout compte reprenant en détail les sommes qui lui étaient dues lors de la rupture du contrat de travail': si M. [S] y a bien porté sa signature, il n'y a pas inscrit de sa main la mention 'Pour solde de tout compte.'».

Les termes des articles précités sont particulièrement clairs': la forclusion lui est en conséquence inopposable et l'association ne saurait s'opposer aux demandes salariales et indemnitaires du requérant.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et congés-payés sur préavis :

Par application des dispositions combinées de l'article Lp 122-22 alinéa du Code du travail et de l'article 68 alinéa 1 de la «'Convention exploitations agricoles'», il est dû au salarié sur la base du salaire moyen précité une somme de 460'000 XPF (230'000 XPF X 2). Il indique avoir déjà perçu à ce titre une somme de 447'237 XPF de sorte qu'il ne reste dû que la somme de 12'763 XPF à ce titre outre 46'000 XPF au titre des congés-payés sur préavis.

Sur l'indemnité spéciale de licenciement :

En premier lieu, à l'instar des indemnités liées au préavis et congés payés sur préavis, l'employeur invoque la forclusion de cette demande qui figure sur le solde de tout compte. Ainsi qu'expliqué supra, ce solde et les mentions qui y figurent sont inopposables à M. [S].

Dès lors, les articles Lp 127-6, Lp 127-7, Lp 127-9 du Code du travail de Nouvelle-Calédonie disposent que le salarié a droit en cas d'impossibilité de reclassement à une indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité prévue par l'article Lp 122-27 du code du travail qui prévoit une indemnité de licenciement si le salarié compte deux ans ininterrompus au service du même employeur sauf faute grave.

L'ancienneté de M. [S] du 20 octobre 2014 au 14 février 2018 est de 39 mois. Il lui est du 149'500 XPF (74'750 XPF = (230'000 X 10% X 3 ans) + ((230'000 X 10'% X 0.25)) x 2) compte tenu de son ancienneté de 3 ans et 3 mois. Il importe peu que la somme de 76'845 XPF figurant sur le solde de tout compte à ce titre ne corresponde pas à la somme légale due puisque celle-ci était due en toute hypothèse.

Conformément à la décision du premier juge ARBOFRUITS sera condamnée à verser à titre complémentaire à M. [S] la somme de 72'655 XPF.

Sur l'indemnité pour licenciement irrégulier :

ll résulte des dispositions de l'article Lp127-7 du Code du travail que lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions du dernier alinéa de l'article Lp127-7, il est fait application des dispositions prévues par l'article Lp122-35 pour le cas d'inobservation de la procédure requise.

L'employeur rappelle qu'il a convoqué le salarié à un entretien préalable conformément à la procédure de licenciement pour motif personnel de l'article Lp122-4 et suivants du code du travail.

C'est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a constaté que ce licenciement était régulier en la forme et a débouté M. [S] de sa demande d'indemnité pour licenciement irrégulier.

Dans ces conditions, le requérant ne peut qu'être que débouté de sa demande d'indemnisation à hauteur d'un mois de salaire qu'il formule devant la cour.

Sur le préjudice moral distinct :

Si l'association demande pour ce chef de préjudice la confirmation de la décision du tribunal, M. [S], dans le cadre de son appel incident, soutient que l'accident don't il a été victime a bouleversé sa vie et entraîné de nombreuses difficultés au plan médical, professionnel, financier voire conjugal. Il demande de ce chef 1'500'000 XPF de dommages et intérêts.

Il verse à cet effet son jugement de divorce ainsi que deux rapports médicaux émanant des docteurs [W] et [H] indiquant que la présente procédure a été pour lui une cause de stress supplémentaire.

Pour mémoire, le préjudice moral distinct de celui résultant de la perte d'un emploi doit établir la preuve d'un lien de causalité entre un comportement fautif de l'employeur et le préjudice subi.

Or outre le fait que le jugement de divorce ne figure pas dans les pièces jointes et produites devant la cour, il ressort clairement de la lecture des deux rapports d'expertise psychiatriques et de l'attestation de son ex conjointe Mme [T] que c'est l'accident de voiture qui est à l'origine directe de la névrose dépressive anxio-phobique diagnostiquée.

Aucun lien de causalité directe n'est établi avec l'attitude de l'employeur.

Dans ces conditions, M. [S] ne rapporte pas la preuve d'un préjudice moral distinct de celui causé par la rupture, aucune circonstance du licenciement n'étant vexatoire et sera débouté de sa demande à ce titre.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

ll serait inéquitable de laisser à la charge de l'association ARBOFRUITS les frais irrépétibles qu'il a engagés. M. [S] sera en conséquence condamné au titre des frais irrépétibles d'appel à verser 100'000 XPF ainsi qu'aux dépens

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

CONFIRME le jugement prononcé le 23 novembre 2021 par le tribunal du travail de Nouméa en ce qu'il a débouté M. [S] au titre de ses demandes de nullité, d'irrégularité et du caractère vexatoire du licenciement et en ce qu'il a condamné ARBOFRUITS à régler au salarié les sommes de douze mille sept cent soixante-trois (12'763) francs au titre du reliquat de l'indemnité de préavis, quarante-six mille (46'000) XPF au titre des congés-payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis, soixante-douze mille six cent cinquante-cinq francs (72'655) XPF au titre du complément de l'indemnité spéciale de licenciement) et statuant à nouveau,

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a jugé le licenciement de M. [S] sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE M. [S] à verser 100'000 XPF au titre des frais irrépétibles à ARBOFRUITS ainsi qu'aux dépens d'appel,

DÉBOUTE les parties du reste de leurs demandes

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00094
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;21.00094 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award