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04/05/2023 | FRANCE | N°21/00086

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre commerciale, 04 mai 2023, 21/00086


N° de minute : 40/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 4 mai 2023



Chambre commerciale









Numéro R.G. : N° RG 21/00086 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SJI



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 avril 2021 par le tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG n° 19/479)



Saisine de la cour : 19 août 2021





APPELANTS



M. [L] [K]-[J],

demeurant [Adresse 3] (POLYNESIE FRANCAISE)

Représenté par Me François QUINQUIS de la SEL

ARL JURISPOL, avocat au barreau de PAPEETE, et par Me Nicolas MILLION, avocat au barreau de NOUMEA

M. [G] [J]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 5],

demeurant [Adresse 4] (POLYNESIE FRA...

N° de minute : 40/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 4 mai 2023

Chambre commerciale

Numéro R.G. : N° RG 21/00086 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SJI

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 avril 2021 par le tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG n° 19/479)

Saisine de la cour : 19 août 2021

APPELANTS

M. [L] [K]-[J],

demeurant [Adresse 3] (POLYNESIE FRANCAISE)

Représenté par Me François QUINQUIS de la SELARL JURISPOL, avocat au barreau de PAPEETE, et par Me Nicolas MILLION, avocat au barreau de NOUMEA

M. [G] [J]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 5],

demeurant [Adresse 4] (POLYNESIE FRANCAISE)

Représenté par Me François QUINQUIS de la SELARL JURISPOL, avocat au barreau de PAPEETE, et par Me Nicolas MILLION, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

S.E.L.A.R.L. MARY-LAURE GASTAUD, ès qualités de mandataire liquidateur de la société NORD TRAVAUX PUBLICS,

Siège social : [Adresse 1]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

M. Philippe DORCET, Président de chambre,

Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller,

qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Philippe ALLARD.

Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

Le 30 juillet 2001, il a été procédé à l'immatriculation de la société Nord travaux publics, ayant une activité de terrassement.

A la suite de la reprise de cette société, M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] sont devenus co-gérants.

Par jugement du 1er février 2016, le tribunal mixte de commerce de Nouméa, sur une déclaration de cessation de paiements déposée le 9 décembre 2015, a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à 1'égard de la société Nord travaux publics et fixé la date provisoire de cessation des paiements au 1er mars 2015.

Selon requête introductive d'instance déposée le 10 janvier 2019, la selarl Gastaud, ès qualités, a recherché la responsabilité de M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] pour insuffisance d'actif et sollicité le prononcé de sanctions personnelles.

Les défendeurs ont excipé de l'irrecevabilité de l'action et contesté tant l'insuffisance d'actif que les fautes alléguées.

Par jugement en date du 30 avril 2021, le tribunal mixte de commerce de Nouméa a:

- rejeté comme infondée la fin de non recevoir soulevée par les défendeurs,

- dit recevable la selarl Gastaud, ès qualités de liquidatrice de la société Nord travaux publics, en ses action et demandes,

- condamné M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] solidairement entre eux à supporter le comblement de l'insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société Nord travaux publics à hauteur de la somme de 14.000.000 FCFP,

- dit que cette somme serait payable entre les mains de la selarl Gastaud, ès qualités,

- dit n'y avoir lieu à interdiction de gérer et débouté la selarl Gastaud, ès qualités, de sa demande de ce chef tant à l'encontre de « M. [I] [J] » qu'à l'encontre de M. [G] [J],

- dit que le jugement devrait faire l'objet de la publicité prévue à l'article 220 de la délibération n° 352 du 18 janvier 2008,

- débouté chacune des parties du surplus de ses demandes,

- condamné M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J], solidairement entre eux, aux dépens de l'instance.

Les premiers juges ont principalement retenu :

- que le tribunal mixte de commerce de Nouméa a été régulièrement saisi par le dépôt d'une requête introductive d'instance dans les trois années qui avaient suivi l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Nord travaux publics ;

- que les dirigeants avaient été convoqués et entendus ;

- que l'insuffisance d'actif était supérieure à 28.000.000 FCFP ;

- que les défendeurs avaient commis des fautes de gestion graves (gestion indifférente, absence de comptabilité, dépôt tardif du bilan, poursuite d'activité en partie fictive et en totalité abusive qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements) qui avaient contribué à l'insuffisance d'actif ;

- qu'il convenait de dispenser les défendeurs d'une interdiction de gérer puisque leurs centres d'intérêt étaient situés en Polynésie française et qu'il n'était pas démontré que leurs affaires étaient mal gérées.

Selon requête déposée le 19 août 2021, M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] ont interjeté appel de cette décision. La selarl Gastaud, ès qualités, a formé un appel incident.

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives transmises le 25 février 2022, M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] demandent à la cour de :

- infirmer parte in qua le jugement entrepris ;

- dire et juger que le tribunal de commerce de Nouméa n'était pas valablement saisi, les actes introductifs d'instance ne respectant pas les mentions exigées par les articles « 317-1 et 324 de la délibération n° 352 du 08 janvier 2001 » ;

- constater que cette situation n'est plus régularisable, la prescription de trois ans étant acquise depuis le 1er février 2019 ;

- constater que les actes introductifs ne respectent pas le délai de comparution, en ce compris le délai de distance ;

- annuler les actes introductifs d'instance ;

- débouter la selarl Gastaud de sa demande de condamnation solidaire entre M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] ;

- constater qu'aucune faute de gestion n'est caractérisée ni a fortiori constituée ;

- constater encore que ni le jugement dont appel, ni la selarl Gastaud n'identifient le préjudice né de chacune des fautes reprochées, ni leur auteur, ni le lien de causalité entre chacune de ces fautes et le préjudice invoqué ;

- débouter la selarl Gastaud, ès qualités, de toutes ses prétentions ;

- condamner la selarl Gastaud, ès qualités, au versement d'une somme de 500.000 FCFP au titre des frais irrépétibles ;

- condamner la selarl Gastaud aux dépens.

Aux termes de ses conclusions déposées le 29 novembre 2021, la selarl Gastaud, ès qualités, prie la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté des fautes de gestion particulièrement graves à l'encontre de M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] ;

- infirmer le jugement sur le montant de la condamnation mis à la charge de M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] ;

- condamner M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] à supporter le comblement de la totalité de l'insuffisance d'actif de la société Nord travaux publics, soit la somme de 28.023.461 FCFP à parfaire ;

- débouter M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] de toutes leurs demandes ;

- condamner les appelants aux dépens d'appel.

Dans des conclusions datées du 7 juillet 2022, le ministère public s'en rapporte à justice.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 novembre 2022.

SUR CE, LA COUR,

Les appelants soutiennent que le tribunal mixte de commerce de Nouméa n'a pas été régulièrement saisi dans la mesure où ils « n'ont jamais reçu de convocation contenant l'indication exigée par l'article R 651-2 du code du commerce (convocation personnelle du dirigeant en vue de son audition). »

Le tribunal mixte de commerce de Nouméa a écarté cette critique en observant qu'il avait été régulièrement saisi par le dépôt de la requête du mandataire liquidateur dans les trois années qui ont suivi l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Nord travaux publics, ce dépôt valant saisine de la juridiction, et que les dirigeants avaient été convoqués par le greffe plus d'un mois avant leur comparution personnelle du 9 décembre 2020.

L'intimée fait sienne cette argumentation.

L'article R 651-2 du code du commerce dans sa version issue du décret n° 2007-431 du 25 mars 2007 auquel se réfèrent les appelants n'est pas applicable en Nouvelle-Calédonie. Il existe toutefois des dispositions similaires dans la délibération n° 352 du 8 janvier 2008 portant mesures de procédures en matière de sauvegarde de justice puisque:

- l'article 317-1 relatif à l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif prévoit : « Pour l'application de l'article L. 651-2 du code du commerce, le ou les dirigeants mis en cause sont convoqués, à la diligence du greffier, un mois au moins avant leur audition, par acte d'huissier de justice ou dans les formes prévues à l'article 173. »

- l'article 324 relatif à la faillite personnelle et aux autres mesures d'interdiction dispose : « Pour l'application de l'article L. 653-7 du code du commerce, le ou les dirigeants mis en cause sont convoqués dans les formes prévues à l'article 317-1. »

Ainsi que l'ont observé les premiers juges, la convocation du dirigeant aux fins d'audition prévue par les articles 317-1 et 324 de la délibération n° 352 du 8 janvier 2008 peut intervenir postérieurement au dépôt de la requête introductive d'instance.

Selon la note d'audience du 9 décembre 2020 qui figure au dossier de première instance, M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] ont, à cette date, été entendus en visio-conférence par le tribunal sur les fautes que leur reprochait le liquidateur judiciaire.

Il résulte du dossier que le greffier a saisi Me [C], huissier de justice, le 20 mai 2020 aux fins de citation à une audience du 24 août 2020. Toutefois, le dossier ne fait pas apparaître que les citations ont été effectivement remises aux intéressés, un mois au moins avant leur audition.

La circonstance que M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] aient comparu le 9 décembre 2020 est insuffisante pour inférer que les formalités instituées par les articles précités avaient été respectées.

Or, il est acquis que la convocation du dirigeant pour être entendu personnellement par le tribunal est un préalable obligatoire aux débats en ce qu'elle constitue une mesure de protection : l'omission de cette formalité, qui fait obstacle à toute condamnation, constitue une fin de non-recevoir.

Dès lors qu'aucune pièce de la procédure n'établit que les appelants ont été convoqués en temps utile pour leur audition par le tribunal mixte de commerce de Nouméa, les demandes de sanctions formulées par le mandataire liquidateur sont irrecevables.

Par ces motifs

La cour,

Infirme le jugement entrepris ;

Statuant à [J],

Déclare irrecevables l'action en comblement de l'insuffisance d'actif et l'action en interdiction de gérer dirigées contre M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] ;

Déboute M. [L] [K]-[J] et M. [G] [J] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la selarl Gastaud, ès qualités, aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/00086
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;21.00086 ?
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