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27/04/2023 | FRANCE | N°21/00362

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre civile, 27 avril 2023, 21/00362


N° de minute : 81/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 27 avril 2023



Chambre civile









Numéro R.G. : N° RG 21/00362 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SQI



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 octobre 2020 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 17/1139)



Saisine de la cour : 15 novembre 2021





APPELANT



S.A.R.L. BCS IMPORT, représentée par ses co-gérants en exercice,

Siège social : 30 rue Alfred de Vigny - B

P 11781 - 98802 NOUMEA CEDEX

Représentée par Me Céline JOANNOPOULOS de la SARL CJ AVOCATS, avocat au barreau de NOUMEA





INTIMÉ



M. [Y] [V]

né le 22 février 1960 à Bouaké (Côte d'Ivoir...

N° de minute : 81/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 27 avril 2023

Chambre civile

Numéro R.G. : N° RG 21/00362 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SQI

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 octobre 2020 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 17/1139)

Saisine de la cour : 15 novembre 2021

APPELANT

S.A.R.L. BCS IMPORT, représentée par ses co-gérants en exercice,

Siège social : 30 rue Alfred de Vigny - BP 11781 - 98802 NOUMEA CEDEX

Représentée par Me Céline JOANNOPOULOS de la SARL CJ AVOCATS, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

M. [Y] [V]

né le 22 février 1960 à Bouaké (Côte d'Ivoire)

demeurant 61 impasse G. Georget - Lotissement Tina presqu'île - 98800 NOUMEA

Représenté par Me Magali MANUOHALALO, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 février 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,

Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,

qui en ont délibéré, sur le rapport de Mme Marie-Claude XIVECAS.

Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, le délibéré fixé au 13/04/2023 a été prorogé au 27/04/2023 les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Selon « convention d'occupation précaire » en date du 19 juin 2010, M. [V] a donné en location à la société BCS IMPORT un immeuble situé à Nouméa, 52 route Despointes, Faubourg Blanchot, consistant en une villa sur deux niveaux, destiné à « un usage de bureaux et d'entrepôt », pour une durée non renouvelable de vingt trois mois à compter du 19 juin 2010,moyennant un loyer de 310.000 FCFP, charges non comprises.

Le 24 novembre 2015, M. [V] a fait délivrer à la société BCS Import un commandement de payer un arriéré locatif, visant la clause résolutoire insérée dans la convention.

Sur assignation délivrée le 30 décembre 2015 à la société BCS IMPORT, le juge des référés du tribunal de première instance de Nouméa, par ordonnance du 24 février 2016, a :

- condamné la société BCS Import à payer à M. [V] la somme de 570.000 FCFP au titre des loyers et charges échus au 24 décembre 2015,

- constaté la résiliation du bail à compter du 26 décembre 2015,

- décidé que les occupants devraient quitter les lieux dans le mois de la signification de l'ordonnance,

- autorisé, passé ce délai, le propriétaire à faire procéder à l'expulsion de la défenderesse,

- condamné la société BCS Import à payer à M. [V] une indemnité d'occupation de 310.000 FCFP par mois depuis le 26 décembre 2015,

- dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes présentées par la société BCS Import,

- condamné la société BCS Import à payer à M. [V] la somme de 80.000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BCS Import aux dépens qui comprendraient le coût du commandement taxé à la somme de 19.000 FCFP.

Par arrêt du 3 janvier 2017, la cour d'appel de Nouméa a confirmé cette ordonnance.

Par requête déposée au greffe le 18 avril 2017, la SARL BCS IMPORT a saisi le tribunal de première instance de Nouméa aux fins, de voir notamment au visa des articles 606, 1719, 1720, 1755 du Code civil, requalifier la convention d'occupation précaire en bail commercial et voir condamner le requis à l'indemniser de son préjudice tant moral que financier.

Par jugement du 19 octobre 2020, la juridiction saisie :

- déclaré la SARL BCS IMPORT irrecevable pour prescription en sa demande de requalification du contrat signé le 19 juin 2010 en bail commercial,

- dit que le congé invoqué délivré le 1er octobre 2015 ne saurait être validé,

- constaté que la résiliation du bail est acquise à compter du 26 décembre 2015 du fait du jeu de la clause résolutoire,

- dit que la SARL BCS IMPORT est redevable de la somme de 1.303.667 FCFP au titre des indemnités d'occupation du 26 décembre 2015 au 11 avril 2016,

- condamné la SARL BCS IMPORT à payer à M. [V] la somme de 1.303.667 FCFP,

- rejeté la demande de restitution de la somme de 2.010.143 FCFP,

- déclaré M. [V] irrecevable à solliciter le rappel de la révision des loyers à hauteur de la somme de 524.169 FCFP,

- débouté M. [V] de sa demande de remboursement des travaux de remise en état des locaux loués,

- dit que M. [V] n'est pas fondé à retenir le dépôt de garantie de 620.000 F CFP versé,

- condamné M. [V] à restituer le dépôt de garantie de 620.000 FCFP à la SARL BCS IMPORT,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire de la décision,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête contenant mémoire du 15 novembre 2021, la SARL BCS IMPORTa fait appel de la décision rendue et demande à la Cour dans ses dernières écritures de:

en premier lieu,

- constater la recevabilité de la demande de qualification de la relation contractuelle entre la SARL BCS IMPORT et M. [V] en bail commercial ;

en conséquence,

- constater que les parties étaient liées, à compter du 20 juin 2012, par un bail commercial oral ;

- constater la nullité du commandement de payer délivré le 24 novembre 2015 ;

en conséquence,

- procéder aux diligences utiles afin de vérifier l'écriture de M. [V] et constater que celui-ci est le rédacteur du « Plan de financement des loyers avec changement de bail au 1er janvier 2016 rédigé par M. [V] » (pièce n° 4) ;

- constater que le congé donné par la SARL BCS IMPORT a été accepté par M. [V] ;

en conséquence,

- constater que la SARL BCS IMPORT n'était redevable d'aucune indemnité d'occupation ;

- condamner M. [V] à rembourser à la SARL BCS IMPORT la somme de 2.010.143 FCFP indûment perçue au titre des indemnités d'occupation ordonnées en référé, avec intérêts au taux légal à compter de sa perception par M. [V] le 4 novembre 2016 ;

en outre, à titre principal,

- constater l'existence d'un accord entre les parties concernant la résiliation amiable du contrat de bail de 2012 et la conclusion d'un nouveau contrat de bail commercial pour le rez-de-chaussée avec exécution à compter du 1er janvier 2016 ;

- constater que M. [V] n'a pas respecté les termes de l'accord convenu avec la SARL BCS IMPORT et y a mis un terme de manière fautive ;

en conséquence,

- condamner M. [V] à payer à la SARL BCS IMPORT la somme 3.000.000 FCFP au titre du préjudice moral subi en raison de la rupture brutale de l'accord ;

- condamner M. [V] à verser à la SARL BCS IMPORT la somme de 7.055.000 FCFP au titre du préjudice subi en raison du trouble de jouissance ;

- condamner M. [V] à verser à la SARL BCS IMPORT la somme de 7.055.000 FCFP au titre du préjudice subi en raison du défaut de délivrance conforme;

- condamner M. [V] à payer à la SARL BCS IMPORT la somme de 19.258.729 FCFP au titre de l'indemnité d'éviction due ;

à titre subsidiaire, à défaut de constat de l'existence d'un accord intervenu en octobre 2015,

- constater la résiliation fautive du contrat de bail commercial par M. [V] le 30 décembre 2015 ;

- constater le défaut de délivrance de l'immeuble à compter du 9 novembre 2015;

- constater le trouble de jouissance subi par la SARL BCS IMPORT à compter du 9 novembre 2015 ;

en conséquence,

- condamner M. [V] à payer à la SARL BCS IMPORT la somme de 19.813.729 FCFP au titre de l'indemnité d'éviction due ;

- condamner M. [V] à verser à la SARL BCS IMPORT la somme de 9.278.333 FCFP au titre du préjudice subi en raison du trouble de jouissance pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019 ;

- condamner M. [V] à verser à la SARL BCS IMPORT la somme de 9.278.333 FCFP au titre du préjudice subi en raison du défaut de délivrance conforme pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019 ;

en tout état de cause,

- condamner M. [V] à restituer à la SARL BCS IMPORT la somme de 620.000 FCFP au titre du dépôt de garantie, avec intérêts au taux légal à compter du 1er mars 2016 ;

- condamner M. [V] à verser à la SARL BCS IMPORT la somme de 3.000.000 FCFP au titre du préjudice moral subi ;

- condamner M. [V] à verser à la SARL BCS IMPORT la somme de 750.000 FCFP au titre des frais irrépétibles de première instance, outre 400.000 F CFP au titre des frais irrépétibles d'appel ;

- condamner M. [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions récapitulatives n° 1, M. [V] demande à la cour de :

- confirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté M. [V] de sa demande de remboursement de travaux de remise en état des locaux loués et en ce qu'il l'a condamné à restituer le dépot de garantie ;

- condamner la SARL BCS IMPORT à payer à M. [V] la somme de 516.835 FCFP à titre de remboursement des travaux de remise en état des lieux ;

- condamnner la SARL BCS IMPORT à payer à M. [V] la somme de 2.000.000 FCFP au titre du préjudice moral ;

- condamner la SARL BCS IMPORT à verser à M. [V] la somme de 400.000 FCFP au titre des frais irrépétibles ;

- condamner la SARL BCS IMPORT aux entiers dépens dont distraction au profit de Me MANUOHALALO sur ses offres de droit.

Vu l'ordonnance de clôture,

Vu l'ordonnance de fixation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il convient de rappeler que le dispositif des conclusions doit être formalisé sous la forme d'une demande de confirmation ou d'infirmation de tout ou partie de la décision querellée, en précisant dans le second cas quels sont les chefs de discussion dont est saisie à la cour , sauf à défaut à voir dire irrecevables les demandes.

Sur la prescription biennale

La demande par le preneur, assigné en expulsion, tendant à faire constater l'existence d'un contrat soumis au statut des baux commerciaux né du fait du maintien en possession à l'issue d'un bail dérogatoire, n'est pas soumise à la prescription biennale s'agissant d'une demande reconventionnelle et non d'une action spécifique du droit des baux commerciaux (Cass. 3ème civile, 1er octobre 2014, n° 13-16.806). Dès lors, le bail dérogatoire ayant pris fin le 19 mai 2012 et la SARL BCS IMPORT étant restée en possession des lieux à l'issue, le délai de prescription de droit commun n'a commencé à courir qu'à compter du jour où le bailleur a assigné la SARL BCS IMPORT en référé, soit à compter du 20 décembre 2015. Ayant saisi le tribunal statuant au fond par requête du 18 avril 2017, l'action de la SARL BCS IMPORT est dès lors recevable. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la requalification du contrat en bail commercial.

L'article 145-5 du code de commerce dispose :

« Les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du présent chapitre (relatif au bail commercial) à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à deux ans.

Si, à l'expiration de cette durée, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions du présent chapitre.

Il en est de même, à l'expiration de cette durée, en cas de renouvellement exprès du bail ou de conclusion, entre les mêmes parties, d'un nouveau bail pour le même local.

Les dispositions des deux alinéas précédents ne sont pas applicables s'il s'agit d'une location à caractère saisonnier. »

La SARL BCS IMPORT soutient qu'étant une société commerciale, inscrite au registre du commerce et faisant des actes de commerce, le contrat de location qu'elle a signé est automatiquement soumis au statut des baux commerciaux.

Il est admis en droit que, lorsque le preneur est laissé en possession à l'expiration du bail dérogatoire au statut du bail commercial conclu pour une durée au plus égale à deux ans, il s'opère en application de l'article précité un nouveau bail ; mais encore faut-il pour que l'effet soit réglé par les dispositions légales relatives au statut, que l'occupant exploite dans les lieux loués un fonds de commerce (Cass. 3ème civile,16 juin 2004 ). En effet, le bénéfice du statut qui est inhérent à la reconnaissance de la valeur économique du fonds caractérisé par la clientèle, n'est pas automatique.

La convention dérogatoire signée entre les parties mentionne que les locaux loués pour une durée de 23 mois sont exclusivement à usage d'entrepôt et de bureaux non soumis au statut des baux commerciaux.

Il n'est pas contesté que la SARL BCS IMPORT exerce une activité de commerce de gros de marchandises diverses non alimentaires. Néanmoins, elle ne justifie pas en l'absence de production d'un Kbis daté de 2010/12011 que l'adresse du local loué à M. [V] constituait bien son siège social, lieu d'exercice du commerce. Or, il ressort de l'attestation ECC qu'elle avait souscrit pendant la période locative deux abonnements de fourniture d'électricité : l'un au 85 rue Bénébig du 5 février 2009 au 12 avril 2016 et l'autre au 52 rue du port Despointes pour une période quasiment équivalente du 24 juin 2010 au 5 janvier 2016, ne permettant pas à la cour de considérer que la société exerçait son activité commerciale dans la villa louée à M. [V]. Il s'en suit que la SARL BCS IMPORT est défaillante à démontrer qu'une clientèle y était attachée.

En conséquence, la SARL BCS IMPORT n'est pas fondée à voir requalifier le bail signé entre les parties en bail commercial.

Au demeurant et pour répondre de manière superfétatoire à la SARL BCS IMPORT, à supposer qu'elle ait pu prétendre à une requalification en bail commercial, elle serait infondée à faire valoir un préjudice. La cour relève en effet qu'à supposer qu'un bail commercial succède au bail dérogatoire, il aurait été en vigueur à effet du 19 mai 2015, pour une période de neuf ans avec possibilité de dénonciation par le preneur à échéance triennale (soit au 19 mai 2018, 2021 ou 2024). Or, d'une part, la SARL BCS IMPORT qui a sollicité la résiliation du contrat n'aurait pu prétendre à aucune indemnité d'éviction et ayant rompu le contrat hors délai, elle aurait été tenue des loyers à échoir jusqu'au mois de mai 2018.

Sur la résiliation amiable et la modification du contrat

La SARL BCS IMPORT se prévaut du congé qu'elle a donné le 1er octobre 2015 par lettre recommandée avec accusé de réception et de l'accord donné par le bailleur pour ne louer que le bas de l'immeuble.

Il est constant que la SARL BCS IMPORT a rencontré des difficultés financières et a pris contact avec M. [V] pour voir s'il accepterait de ne lui louer que le rez-de-chaussée de la villa à compter de janvier 2016. Selon ses dires, l'accord prévoyait que le contrat de bail commercial serait résilié amiablement sans préavis et qu'un nouveau contrat portant uniquement sur le bas serait signé moyennant un loyer de 125 000 FCFP ; que s'agissant des loyers échus d'octobre à décembre 2015, à hauteur de 780 000 Fcfp, soit le reliquat d'octobre pour 160 000 FCFP et les deux loyers de 310 000 FCFP chacun, un échéancier serait mis en place.

La SARL BCS IMPORT en veut pour preuve :

1/ la formalisation de l'accord du bailleur ressort des termes du SMS adressé par M. [V] le 31 octobre 2015 en réponse à la demande de résiliation amiable formée par la SARL BCS IMPORT le 1er octobre 2015 par lettre recommandée avec accusé de réception ;

2/ la restitution par la locataire des clés portant sur l'étage de la villa intervenue le 8 novembre 2015 ;

3/ la reprise des lieux par le bailleur qui a procédé au changement de serrure et a fait exécuter des travaux de mise en conformité du haut de la villa aux fins de mise en location ;

4/ le plan de financement des loyers établi de la main de M. [V].

La cour approuve le premier luge d'avoir considéré que les discussions entre les parties n'avaient débouché sur aucun accord formel et sont restées à l'état de pourparlers.

La cour relève que d'une part, l'accord de M. [V] était subordonné à la possibilité de diviser l'immeuble : « (... ) indiquez moi quand je peux venir faire visiter l'immeuble afin de savoir s'il est possible de louer le haut ou pas » ; que le bailleur n'a pas sollicité la restitution des clés mais seulement de pouvoir disposer d'une clé pour faire visiter l'étage selon le courriel du 8 novembre 2014 : « pourriez vous me laisser une clé pour pouvoir faire visiter les locaux au plus vite de façon à essayer de trouver une solution rapidement merci de me tenir informé » ; qu'il n'est d'ailleurs nullement démontré que le changement de serrure soit le fait du bailleur, alors que :

- lors de l'état des lieux de sortie en date du 11 avril 2015, l'huissier a constaté que la SARL BCS IMPORT disposait des clés de la porte latérale du premier étage ;

- le témoignage de Mme [G] qui a attesté avoir constaté le changement de serrure par le bailleur est en réalité indirect, l'intéressée rapportant ce que lui avaient dit ses employeurs sur l'auteur du remplacement des serrures mais n'en ayant pas été témoin ;

- enfin, contrairement aux affirmations de la SARL BCS IMPORT, l'état des lieux du 11 avril 2016(photos y annexées) montre qu'aucun travail de modification n'avait été entrepris dans les locaux à l'exception de travaux ponctuels de peinture que le preneur aurait pu faire puisqu'il détenait encore les clés.

Il n'y a pas eu d'accord du bailleur sur une résiliation du bail (partielle ou totale) qui plus est sans préavis, avec volonté de signer un nouveau contrat portant sur le seul rez-de-chaussée à un prix de 125 000 FCFP ; que ne saurait constituer la preuve d'un arrangement financier, une rangée manuscrite de chiffres correspondant apparemment aux loyers, sans autre explication, dont on ne sait qui les a écrits et de qui émane ce document.

La cour confirme donc le jugement qui a considéré que le contrat passé entre les parties relève des dispositions du code civil prévues aux articles 1713 et suivants dans leur version applicable en Nouvelle-Calédonie, s'agissant d'un bail verbal à usage professionnel qui a succédé au bail dérogatoire.

La SARL BCS IMPORT n'ayant pas payé les loyers à leurs termes, les indemnités d'occupation mises en compte pour la totalité du loyer jusqu'à la libération effective des lieux étaient justifiées et la SARL BCS IMPORT est mal fondée à en demander la restitution, motifs pris que le bail dérogatoire étant expiré, le bail verbal qui y a succédé était dénué de toute clause de résiliation de plein droit de sorte que le bailleur ne pouvait réclamer une indemnité d'occupation. La cour en convient mais la SARL BCS IMPORT qui a fait appel de l'ordonnance de référé n'a pas soutenu son recours de sorte qu'elle a acquiescé à la décision ; en tout état de cause, elle n'a subi aucun préjudice puisqu'elle avait résilié le contrat et qu'elle était tenue des loyers jusqu'à la libération des lieux. De même, elle est mal fondée à considérer que M. [V] a abusivement rompu leur accord d'octobre 2015. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit la SARL BCS IMPORT tenue au paiement de la somme de 1.303.667 FCFP et a rejeté la demande de restitution des indemnités d'occupation.

Sur les travaux de remise en état

Le jugement qui a débouté le bailleur de sa demande en paiement de ce chef sera confirmé par motifs adoptés en ce que M. [V] ne démontre pas que la fuite d'eau signalée par le preneur et provenant du premier étage de la villa proviendrait d'une faute du locataire alors que les infiltrations dans le bien qui relèvent de désordres liés à la structure du bâtiment ne peuvent être imputées au locataire. En l'état, le premier juge a considéré à juste titre que la facture nommée « rénovation d'une maison coloniale » ne pouvait être mise à la charge de la SARL BCS IMPORT.

Sur la restitution du dépôt de garantie

Là encore, le jugement sera confirmé, le procès-verbal de sortie des lieux ne faisant pas état de dégradations imputables à la locataire.

Sur le préjudice moral

M. [V] à qui incombe la charge de la preuve, ne démontre pas que le non paiement des loyers par la société locataire l'a placé dans un 'chaos financier ' parce qu'il a eu du mal à recouvrer les impayés et à relouer le bien en raison des dégâts nécessitant la remise en état que ses faibles moyens financiers ont retardée. Sa demande sera rejetée.

La SARL BCS IMPORT succombant en ses prétentions, est infondée à se prévaloir à son tour d'un préjudice moral.

Sur l'article 700

Il est équitable d'allouer à M. [V] qui a dû se défendre en justice la somme de 250 000 FCFP.

Sur les dépens d'appel

La SARL BCS IMPORT succombant supportera les dépens de la procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme la décision en ce qu'elle a dit prescrite la demande de la SARL BCS IMPORT en requalification du bail ;

Et statuant à nouveau de ce chef,

Dit recevable la demande de la SARL BCS IMPORT mais au fond l'en déboute ;

Confirme pour le surplus la décision en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la SARL BCS IMPORT à payer à M.[V] la somme de 250 000 FCFP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL BCS IMPORT aux dépens de l'appel.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00362
Date de la décision : 27/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-27;21.00362 ?
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