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24/04/2023 | FRANCE | N°21/00073

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre commerciale, 24 avril 2023, 21/00073


N° de minute : 32/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 24 avril 2023



Chambre commerciale









Numéro R.G. : N° RG 21/00073 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SGI



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 juin 2021 par le tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG n° :19/535)



Saisine de la cour : 22 juillet 2021





APPELANT



M. [K] [Z]

né le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 8],

demeurant [Adresse 2]

Représenté pa

r Me Frédéric DESCOMBES de la SELARL D'AVOCATS D&S LEGAL, avocat au barreau de NOUMEA



INTIMÉ



S.A. BANQUE DE NOUVELLE-CALEDONIE - B.N.C.,

Siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Marie-Astri...

N° de minute : 32/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 24 avril 2023

Chambre commerciale

Numéro R.G. : N° RG 21/00073 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SGI

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 juin 2021 par le tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG n° :19/535)

Saisine de la cour : 22 juillet 2021

APPELANT

M. [K] [Z]

né le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 8],

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Frédéric DESCOMBES de la SELARL D'AVOCATS D&S LEGAL, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

S.A. BANQUE DE NOUVELLE-CALEDONIE - B.N.C.,

Siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Marie-Astrid CAZALI de la SELARL M.A.C AVOCAT, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 6 mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,

Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller,

qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Philippe ALLARD.

Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

Selon « contrat de prêt à moyen terme réescomptable en défiscalisation » en date du 3 décembre 2015, la société Banque de Nouvelle-Calédonie a consenti à la Société de services pour les commerces, les collectivités et les industries, dite S2C2I, un crédit d'un montant de 14.689.039 FCFP, remboursable en 60 mensualités constantes et consécutives de 263.734 FCFP du 30 décembre 2015 au 30 novembre 2020, destiné à « financer l'acquisition de matériels divers dont une plieuse, une cisaille, une machine à raidir et une agrafeuse destinés à être revendus » à la SNC Drouot E 8 qui les louerait à la société S2C2I.

Dans ce même acte, M. [Z] s'est porté « caution personnelle et solidaire (...) à hauteur de 7.344.520 FCFP à majorer des intérêts, frais, commissions et accessoires ». M. [I] a souscrit un engagement identique.

Selon jugement du 1er avril 2019, le tribunal mixte de commerce de Nouméa a prononcé le redressement judiciaire de la société S2C2I.

Par lettre du 3 mai 2019, la banque a déclaré entre les mains du mandataire judiciaire une créance d'un montant de 5.649.357 FCFP au titre de ce prêt.

Par ordonnance du 9 août 2019, le président du tribunal de première instance de Nouméa a autorisé la société Banque de Nouvelle-Calédonie à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur un bien appartenant à M. [I], en garantie d'une créance de 5.649.357 FCFP majorée d'une somme évaluée provisoirement à 500.000 FCFP pour frais de procédure.

Une hypothèque provisoire a été inscrite le 2 septembre 2019 sur le lot n° 249, [Adresse 7], commune de [Localité 4], n° IC 647544-6547.

Par ordonnance du 28 août 2019, le président du tribunal de première instance de Nouméa a autorisé la société Banque de Nouvelle-Calédonie à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur un bien appartenant à M. [Z], en garantie d'une créance de 5.649.357 FCFP majorée d'une somme évaluée provisoirement à 500.000 FCFP pour frais de procédure.

Une hypothèque provisoire a été inscrite le 2 septembre 2019 sur le lot n° 651, [Adresse 7], commune de [Localité 4], n° IC 649543-7374.

Par jugement du 27 avril 2020, le tribunal mixte de commerce de Nouméa a adopté le plan de redressement proposé par la société S2C2I.

Selon requête introductive d'instance déposée le 30 octobre 2019, la société Banque de Nouvelle-Calédonie a attrait M. [Z] et M. [I] devant le tribunal mixte de commerce de Nouméa pour obtenir l'exécution de leurs engagements.

Selon jugement réputé contradictoire en date du 16 juin 2021, la juridiction saisie a:

- condamné M. [I] et M. [Z], ès qualités de cautions solidaires de la société S2C2I, à payer solidairement entre eux à la société Banque de Nouvelle-Calédonie, au titre des échéances impayées du prêt du 3 décembre 2015 la somme de 5 649 357 FCFP, en deniers ou quittances valables et sous réserve des déductions qui s'imposeraient au titre des échéances payées soit directement soit au titre du plan de redressement,

- dit régulières en la forme, justes au fond et validé :

.l'inscription hypothécaire provisoire prise par la banque, sur autorisation présidentielle du 9 août 2019, pour sûreté de la somme de 6 149 357 FCFP, sur la quote-part indivise du bien suivant appartenant à M. [I] : lot 651 d'une contenance de 9 a 22 ca, [Adresse 6], 2ème secteur, 3ème tranche, tranche conditionnelle n° 1, [Adresse 9], en provenance cadastrale du lot 6 de [Localité 5], commune de [Localité 4], n° IC 649543-73 74, et les constructions y édifiées,

.l'inscription hypothécaire provisoire prise par la même banque, sur autorisation présidentielle du 28 août 2019, pour sûreté de la somme de 6 149 357 FCFP sur la quote-part indivise du bien suivant appartenant à M. [Z] : lot 249 d'une contenance de 8 a 31 ca, [Adresse 7], en provenance cadastrale des lots 14 et 15 de ladite section, commune de [Localité 4], n° IC 64 7544-6547, et les constructions y édifiées,

- ordonné, aux frais de la banque, les transcriptions nécessaires au service de la publicité foncière de [Localité 8],

- débouté la banque du surplus de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné M. [I] et M. [Z], solidairement entre eux, aux entiers dépens, dont distraction au profit de la selarl M.A.C. avocat.

Selon requête déposée le 22 juillet 2021, M. [Z] a interjeté appel de cette décision en intimant la société Banque de Nouvelle-Calédonie. Cette dernière a formé un appel incident.

Aux termes de ses conclusions transmises le 16 juin 2022, M. [Z] demande à la cour de :

à titre principal,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [Z] à payer à la société Banque de Nouvelle-Calédonie, au titre des échéances impayées du prêt du 3 décembre 2015 la somme de 5.649.357 FCFP, en deniers ou quittances valables et en ce qu'il a dit régulière en la forme, juste au fond et validé l'inscription provisoire d'hypothèque prise par la banque sur le bien de M. [Z] ;

- débouter la société Banque de Nouvelle-Calédonie de toutes ses demandes ;

à titre subsidiaire,

- enjoindre la société Banque de Nouvelle-Calédonie de justifier de la réalité de sa créance, eu égard aux distributions d'ores et déjà reçues dans le cadre du plan de redressement de la société S2C2I ;

- prononcer la déchéance du droit de la société Banque de Nouvelle-Calédonie aux intérêts conventionnels du contrat de prêt ;

- ordonner la substitution du taux légal au taux conventionnel depuis le 3 décembre 2015 ; - enjoindre à la société Banque de Nouvelle-Calédonie d'avoir à recalculer le montant de sa créance en tenant compte de ladite substitution ;

- débouter la société Banque de Nouvelle-Calédonie de sa demande de voir la condamnation principale assortie d'intérêts au taux contractuel Euribor 3 mois majoré de 4 % et de 6 % de la TOF ;

en tout état de cause,

- condamner la société Banque de Nouvelle-Calédonie à payer à M. [Z] la somme de 250.000 FCFP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de la selarl D & S Légal.

Dans des conclusions transmises le 25 juillet 2022, la société Banque de Nouvelle-Calédonie prie la cour de :

- juger l'appel incident formulé par la concluante recevable et bien fondé ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Banque de Nouvelle-Calédonie de ses demandes au titre des intérêts applicables à la somme de 5.649.357 FCFP ;

- confirmer le jugement en ses autres dispositions ;

à titre principal,

- juger irrecevable comme prescrite la demande de déchéance des intérêts présentée par M. [Z] ;

- débouter M. [Z] de toutes ses demandes ;

à titre subsidiaire,

- débouter M. [Z] toutes ses demandes ;

en tout état de cause,

- condamner M. [Z], en sa qualité de caution personnelle et solidaire, au règlement de la somme de 4.562.587 FCFP, au profit de la société Banque de Nouvelle-Calédonie, au titre du prêt du 3 décembre 2015 ;

- dire que la somme de 4.562.587 FCFP sera assortie d'intérêts de retard contractuel Euribor 3 mois majoré de 4 % et de 6 % de TOF, dans la limite de 7.344.520 FCFP en principal, en deniers ou quittances, jusqu'au complet règlement ;

- valider l'inscription hypothécaire provisoire prise par la société Banque de Nouvelle-Calédonie sur le bien suivant de M. [Z] : lot n° 249 d'une superficie de 8a 31ca, [Adresse 7], provenance cadastrale : lots 14 et 15 de ladite section, commune de [Localité 4], n° IC 647544-6547, et les constructions y édifiées ;

- ordonner la transcription de l'arrêt à intervenir à la publicité foncière ;

- condamner M. [Z] au paiement d'une somme de 500.000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Cazali.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 septembre 2022.

Sur ce, la cour,

1) M. [Z] s'oppose à la demande de la banque en excipant de l'absence d'exigibilité de la créance puisqu'aucune échéance du prêt n'était impayée au jour de l'ouverture de la procédure collective et que le redressement judiciaire n'a pas rendu la créance exigible.

S'il résulte de l'article L 622-28 du code du commerce que les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie ne peuvent être poursuivis durant la période d'observation de la procédure collective du débiteur principal, le dernier alinéa de ce même article autorise les créanciers bénéficiaires de ces garanties à prendre des mesures conservatoires.

Cette faculté est rappelée par l'article 101 de la délibération n° 352 du 18 janvier 2008 portant mesures de procédure en matière de sauvegarde des entreprises dans les termes suivants :

« Les instances et les procédures civiles d'exécution suspendues en application du deuxième alinéa L 622-28 du code de commerce sont poursuivies à l'initiative des créanciers bénéficiaires de garanties mentionnés au dernier alinéa de cet article sur justification du jugement arrêtant le plan, selon les dispositions applicables à l'opposabilité de ce plan à l'égard des garants.

En application du troisième alinéa de l'article L 622-28 du même code, ces créanciers peuvent pratiquer des mesures conservatoires dans les conditions prévues aux articles 48 et suivants du code de procédure ancien applicable en Nouvelle-Calédonie. »

Par ailleurs, selon l'article 54 du code de procédure ancien, le créancier peut être autorisé à « prendre une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire » sur les immeubles de son débiteur, dans les cas prévus par l'article 48 de ce code, à savoir « en cas d'urgence et si le recouvrement de la créance semble en péril ». L'article 48 alinéa 2 prévoit, dans l'hypothèse où la mesure conservatoire est autorisée, que le créancier doit former, devant la juridiction compétente, « l'action en validité de saisie conservatoire ou la demande au fond, à peine de nullité » de la mesure dans le délai imparti par l'ordonnance rendue sur requête.

Il résulte de ces textes qu'en dépit de l'absence de déchéance de terme, la société Banque de Nouvelle-Calédonie était autorisée à solliciter l'autorisation d'inscrire une hypothèque provisoire sur les biens de M. [Z], caution personnelle.

Puisqu'elle ne détenait aucun titre exécutoire à l'encontre de M. [Z], elle était légalement tenue, pour valider la mesure conservatoire autorisée, de saisir le tribunal compétent « de sa demande au fond », c'est-à-dire d'une demande de condamnation, dans un délai de trois mois, ainsi que l'avait fixé l'ordonnance sur requête du 28 août 2019. Elle a respecté cette obligation puisque sa requête introductive d'instance a été déposée le 30 octobre 2019.

Enfin, dès lors que selon l'article L 631-20 du code du commerce, dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie, les coobligés et les personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie ne peuvent se prévaloir des dispositions du plan du redressement et, ainsi que le souligne la banque, que le contrat de prêt est arrivé à échéance le 30 novembre 2020, le tribunal mixte de commerce de Nouméa était autorisé à prononcer une condamnation en paiement à l'encontre de M. [Z] lorsqu'il a statué.

2) M. [Z] demande que la banque soit déchue de son droit aux intérêts conventionnels au motif qu'elle a failli à son obligation d'information annuelle. La banque intimée rétorque qu'elle a rempli son obligation en se prévalant des copies des lettres datées des 18 mars 2016, 28 mars 2017, 19 mars 2018 et 27 mars 2019 qu'elle verse aux débats (annexes n° 11) et des relevés du compte ouvert par la débitrice principale dans ses livres, au débit duquel ont été enregistrés les frais d'envoi des lettres (annexes n° 34).

C'est à bon droit que M. [Z] soutient que ces lettres ne contenaient pas les informations prescrites par l'article L 313-22 du code monétaire et financier dans la mesure où, si les lettres précitées mentionnaient le capital restant dû au 31 décembre de l'année précédente, elles étaient muettes en ce qui concerne le montant des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre 2015, au 31 décembre 2016, 31 décembre 2017 et 31 décembre 2018.

La société Banque de Nouvelle-Calédonie qui a failli à son obligation d'information annuelle encourt la sanction prévue par le dernier alinéa de l'article L 313-22. Les paiements effectués par le débiteur principal étant réputés, dans les rapports entre M. [Z] et la société Banque de Nouvelle-Calédonie, affectés au règlement de la dette au principal, la dette de M. [Z] envers la banque s'établissait, au vu du tableau d'amortissement, à 5.435.621 - (34.274 + 404.279 + 338.784 + 271.186 + 38.724) = 4.348.374 FCFP.

3) Dès lors que la déchéance des intérêts est déjà prononcée, il est inutile d'examiner les demandes présentées par M. [Z] tenant à une « absence fautive d'indication du TEG dans le contrat de prêt » ou à une « absence fautive d'indication du taux de période dans le contrat de prêt ».

4) En conclusion, M. [Z] sera condamné à régler, en quittances ou deniers pour tenir compte des répartitions faites par le commissaire à l'exécution du plan de la société S2C2I, la somme de 4.348.374 FCFP, outre intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2020, et l'inscription hypothécaire provisoire, régulière en la forme et juste au fond, sera validée.

Par ces motifs

La cour,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné M. [Z], solidairement avec M. [I], à payer à la société Banque de Nouvelle-Calédonie, au titre des échéances impayées du prêt du 3 décembre 2015 la somme de 5 649 357 FCFP, en deniers ou quittances ;

Statuant à nouveau,

Condamne M. [Z] à payer, en quittances et deniers, à la société Banque de Nouvelle-Calédonie la somme de 4.348.374 FCFP, outre intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2020 ;

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [Z] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/00073
Date de la décision : 24/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-24;21.00073 ?
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