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03/04/2023 | FRANCE | N°22/00161

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre civile, 03 avril 2023, 22/00161


N° de minute : 59/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 3 avril 2023



Chambre civile









Numéro R.G. : N° RG 22/00161 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TC2



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 avril 2022 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 21/1270)



Saisine de la cour : 13 juin 2022





APPELANT



S.A. BANQUE DE NOUVELLE CALEDONIE DITE BNC

Siège social : [Adresse 1]

Représenté par Me Marie-Astrid CAZALI,

membre de la SELARL M.A.C AVOCAT, avocat au barreau de NOUMEA





INTIMÉ



M. [J] [F]

né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 4] (VIETNAM)

demeurant [Adresse 3]







COMPOSITION DE LA COU...

N° de minute : 59/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 3 avril 2023

Chambre civile

Numéro R.G. : N° RG 22/00161 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TC2

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 avril 2022 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° 21/1270)

Saisine de la cour : 13 juin 2022

APPELANT

S.A. BANQUE DE NOUVELLE CALEDONIE DITE BNC

Siège social : [Adresse 1]

Représenté par Me Marie-Astrid CAZALI, membre de la SELARL M.A.C AVOCAT, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

M. [J] [F]

né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 4] (VIETNAM)

demeurant [Adresse 3]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 février 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseillère,

Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,

qui en ont délibéré, sur le rapport de Mme Marie-Claude XIVECAS.

Greffier lors des débats : Mme Isabelle VALLEE

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Isabelle VALLEE

ARRÊT :

- rendu par défaut,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Isabelle VALLEE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Par jugement du 25/04/2022, le tribunal de première instance de Nouméa a condamné M. [J] [F] à payer à la BCI les sommes de :

- 245 127 Fcfp au titre du solde débiteur du compte de dépôt à vue avec intérêts au taux légal à compter du 23/04/2021,

- 1 221 695 Fcfp au titre d'un prêt souscrit le 07/03/2017, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 29/10/2019,

- 80 000 Fcfp sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a condamné M. [J] [F] aux dépens et a rejeté les demandes de la BCI pour le surplus.

Pour se déterminer ainsi et rejeter la demande au titre du prêt immobilier, le premier juge a considéré qu'aucune pièce n'était versée au dossier justifiant du bien-fondé de la créance.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête du 13/06/2022, la BCI a fait appel de la décision rendue et demande à la Cour dans son mémoire ampliatif du 13/09/2022, complété par ses dernières écritures, de :

- à titre principal, juger nul le jugement motifs pris que le premier juge a soulevé d'office des moyens sans inviter les parties à formuler des observations ;

- à titre subsidiaire, l'infirmer sur les montants alloués au titre du solde débiteur et du prêt à la consommation ainsi que sur le rejet des autres demandes ;

- condamner M. [J] [F] à lui payer les sommes de :

* 245 127 Fcfp au titre du solde débiteur du compte de dépôt à vue avec intérêts au taux de 13,91 % l'an à compter du 03/12/2019, date de la mise en demeure,

* 1. 468 158 Fcfp avec intérêts au taux de 4,55 % (+ TOF à 6 %) à compter du 24/10/2019, date de la dernière mise en demeure sur 1 382 522 Fcfp,

* 7. 870 850 Fcfp au titre du solde du prêt immobilier avec intérêts au taux de 2,5 % sur 5. 345 814 Fcfp à compter du 24/10/2019,

* 350 000 Fcfp sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que le premier juge a substitué à tort les intérêts au taux légal aux intérêts conventionnels en considérant qu'à l'expiration de l'autorisation de découvert, la banque aurait dû proposer une offre de crédit alors que l'autorisation constitue une ouverture de crédit ; qu'il a également et à tort réduit de son propre chef l'indemnité de résiliation prévue au contrat de prêt.

La requête a été signifiée à l'intimé par acte du 19/07/2022, selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture,

Vu l'ordonnance de fixation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur l'annulation du jugement

Les moyens soulevés à l'appui de la demande en annulation ne sont pas susceptibles d'entraîner la nullité du jugement.

2. Sur les demandes au titre du compte de dépôt

Il ressort des pièces produites (ouverture de compte à particulier, extrait du relevé de compte et lettre de mise en demeure du 03/12/2019) que le compte DAV numéro 04585511716 ouvert par M. [J] [F] présentait un découvert de 245 127 FCFP au 10 mai 2019.

L'intéressé ne l'a pas régularisé dans le délai imparti ; en conséquence, il sera condamné à payer cette somme. Le jugement entrepris sera confirmé par motifs adoptés en ce qu'il a rejeté la demande d'application d'un intérêt au taux d'usure en l'absence d'une offre de prêt proposée en présence d'un compte laissé débiteur de plus de trois mois au-delà de l'autorisation de découvert. Le fait que le débiteur ait renoncé au découvert autorisé est sans importance sur les obligations légales qui pèsent sur la banque en sa qualité de professionnel du crédit. Qu'il y ait autorisation ou non, un compte ne peut être débiteur au-delà de trois mois sauf à la banque de proposer une offre de crédit comportant mention du taux d'intérêt conventionnel.

En l'espèce, les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter du 03/12/2019, date de la mise en demeure.

3. Sur le prêt à la consommation

Le montant de la créance reconnue par le premier juge n'est pas contesté, excepté sur l'application des intérêts de retard, la BCI lui faisant grief d'avoir refusé d'appliquer les intérêts conventionnels sur le montant des échéances échues en choisissant d'appliquer le taux d'intérêt légal.

L'article L 312-22 du code de la consommation dispose :

« En cas de défaillance de l'emprunteur et lorsque le prêteur n'exige pas le remboursement immédiat du capital restant dû, il peut majorer, dans des limites fixées par décret, le taux d'intérêt que l'emprunteur aura à payer jusqu'à ce qu'il ait repris le cours normal des échéances contractuelles. Lorsque le prêteur est amené à demander la résolution du contrat, il peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, ainsi que le paiement des intérêts échus. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, sans préjudice de l'application des dispositions applicables localement, ayant le même objet, ne peut excéder un montant qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat, est fixé suivant un barème déterminé par décret. »

En application de ce texte, il sera fait droit à la demande de la BCI et M. [J] [F] sera condamné à payer la somme de 1 221 695 Fcfp se décomposant comme suit :

- capital restant dû : ........................... 1 026 795 Fcfp

- mensualités échues et impayées : ......194 900 Fcfp

avec intérêts de retard de 4,82 % (4,55 % + TOF) à compter du 24/10/19, date de déchéance du terme jusqu'au règlement effectif.

La BCI fait également grief au premier juge d'avoir réduit l'indemnité de défaillance de 7 % en la limitant à 10 000 Fcfp.

Cette indemnité légale s'analyse en une clause pénale qui peut être réduite si elle est excessive. En l'espèce, la cour relève que le débiteur n'a pas invoqué ce caractère excessif ; la cour relève que l'indemnité demandée à hauteur de 85 636 Fcfp est au contraire proportionnée au coût du crédit et du montant du prêt. En revanche, elle a été calculée à la fois sur le capital restant dû, sur les échéances échues et impayées et sur une partie des intérêts de retard. Or, elle ne doit être calculée conformément au contrat que sur le seul capital restant dû. En l'absence de décompte détaillant dans les échéances échues, la part en capital, l'indemnité sera décomptée sur le seul capital non échu soit sur la somme de 1. 026 795 Fcfp. M. [J] [F] sera ainsi condamné à payer la somme de 71 875 Fcfp au titre de l'indemnité de défaillance.

Comme rappelé par le premier juge, l'anatocisme est interdit de sorte que les intérêts de retard, même échus pour une année entière, ne porteront pas eux-mêmes intérêts.

4. Sur le prêt immobilier

Selon offre de prêt du 30/08/2017 acceptée le 26/09/2017, la BCI a consenti à M. [J] [F] un prêt destiné à l'acquisition de son logement d'un montant de 37 253 950 Fcfp remboursable en 300 mensualités de 162 478 Fcfp au taux de 2,439 % (assurance et TOF inclus). Cette offre a été enregistrée dans l'acte notarié de vente du 08/12/2017.

Il ressort du décompte de la créance arrêtée au 23/07/2021, de la lette de mise en demeure, de la lettre de déchéance du terme du 24/10/2019 que M. [J] [F] reste devoir la somme de 5 989 973 FCFP, et non de 9 415 434 Fcfp, se décomposant comme suit :

- capital restant dû : 34 788 405 Fcfp, et non 35 235 097 Fcfp comme réclamé ainsi qu'en atteste le tableau d'amortissement dont il appert que le montant mis en cause est totalement fantaisiste

- échéances impayées du 05/06/19 au 05/10/2019 : 812 380 Fcfp (162 476 x 5) et non 832 685 Fcfp comme réclamé

- indemnité de défaillance de 7 % : 2 435 188 FCFP,

soit un sous-total de 38 035 973 Fcfp, sur lequel s'impute le prix de la vente du 25/06/2021, soit 32 046 000 Fcfp.

Par ailleurs, les intérêts échus sur les échéances (4 163 Fcfp) ayant été calculés sur un montant erroné seront rejetés. Il en sera de même des intérêts décomptés du 24/10/19 au 23/07/2021 dont on ne connaît ni le taux appliqué, ni l'assiette de calcul, et qui courent au surplus au-delà de la vente du bien alors qu'il aurait dû y avoir deux décomptes d'intérêts : un avant la vente (sur les sommes échues) et un après la vente, sur le solde restant dû. Il n'appartient pas à la juridiction de refaire tous les calculs, s'agissant d'autant plus d'une créance émanant d'un professionnel.

En définitive, M. [J] [F] sera condamné à payer à la BCI la somme de 5 989 973 Fcfp avec intérêts au taux conventionnel nominal de 2, 25 % l'an à compter du 26/06/2021.

L'anatocisme est là encore prohibé s'agissant d'un contrat de prêt soumis à des dispositions d'ordre public.

5. Sur l'article 700

Il n'est pas inéquitable de débouter la BCI de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dès lors qu'elle perçoit l'indemnité de résiliation légale destinée à compenser les frais de poursuites judiciaires.

6. Sur les dépens

La carence de la BCI dans l'administration de la preuve de sa créance du prêt immobilier a conduit le premier juge a rejeté la demande de requérante, amenant celle-ci à interjeter appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité du jugement ;

Confirme la décision, excepté en ce qu'il a débouté la BCI de sa demande au titre du prêt immobilier, en ce qu'il a réduit l'indemnité de résiliation, a appliqué l'intérêt légal sur les échéances impayées au titre du prêt à la consommation et sur le point de départ des sommes dues au titre du compte de dépôt à vue ;

Statuant de nouveau de ces chefs,

S'agissant du compte de dépôt à vue, condamne M. [J] [F] à payer à la BCI la somme de 245 127 Fcfp avec intérêts au taux légal à compter du 03/12/2019 ;

S'agissant du prêt à la consommation, condamne M. [J] [F] à payer à la BCI la somme de 1.221.695 Fcfp avec intérêts de retard de 4,82 % à compter du 24/10/2019, date de déchéance du terme, jusqu'au règlement effectif, et celle de 71 875 Fcfp au titre de l'indemnité de défaillance ;

S'agissant du prêt immobilier, condamne M. [J] [F] à payer à la BCI la somme de 5 989 973 Fcfp avec intérêts au taux conventionnel nominal de 2,25 % l'an à compter du 26/06/2021 ;

Déboute la BCI de ses autres demandes ;

Confirme la décision sur le surplus ;

Y ajoutant,

Rejette la demande de la BCI sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la BCI aux dépens de l'appel.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00161
Date de la décision : 03/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-03;22.00161 ?
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