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03/04/2023 | FRANCE | N°21/00129

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre commerciale, 03 avril 2023, 21/00129


N° de minute : 26/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 3 avril 2023



Chambre commerciale









Numéro R.G. : N° RG 21/00129 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SUF



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 novembre 2021 par le tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG n° :21/34)



Saisine de la cour : 13 décembre 2021





APPELANT



S.A.R.L. ALIZES LOCATION VEHICULES, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice

Siège soc

ial : [Adresse 2]

Représentée par Me Martin CALMET, membre de la SARL DESWARTE-CALMET, avocat au barreau de NOUMEA



INTIMÉ



Société d'assurances QBE,

prise en la personne de son repré...

N° de minute : 26/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 3 avril 2023

Chambre commerciale

Numéro R.G. : N° RG 21/00129 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SUF

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 novembre 2021 par le tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG n° :21/34)

Saisine de la cour : 13 décembre 2021

APPELANT

S.A.R.L. ALIZES LOCATION VEHICULES, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice

Siège social : [Adresse 2]

Représentée par Me Martin CALMET, membre de la SARL DESWARTE-CALMET, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

Société d'assurances QBE,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

Siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Véronique LE THERY, membre de la SELARL CABINET D'AFFAIRES CALEDONIEN, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 février 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseillère,

Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,

qui en ont délibéré, sur le rapport de Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH.

Greffier lors des débats : Mme Isabelle VALLEE

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Isabelle VALLEE

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Isabelle VALLEE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

La société Alizés location véhicules exploite une activité de location de véhicules pour laquelle elle a souscrit le 10 octobre 2017, auprès de la société d'assurances QBE, par l'intermédiaire de son courtier Assurpac un contrat d'assurance de sa flotte de véhicules au titre de leur utilisation à la fois pour son compte personnel et pour le compte de ses clients, locataires.

Le 17 juillet 2019, elle a notifié à la société d'assurances QBE son changement de courtier, ayant fait choix du cabinet Richard Koch.

Le 29 août 2020, elle a loué à Mme [Z] [M] un véhicule Kia Picanto n° 414 187 NC pour la période du 29 août au 1er septembre 2020, qui a été volé puis incendié dans la nuit du 31 août 2020 au 1er septembre par le frère de la locataire, M. [C] [M].

Mme [Z] [M], locataire, et elle-même ont déposé plainte, en suite de quoi le voleur et incendiaire a été condamné pénalement et civilement dans le cadre de l'homologation d'une peine proposée et acceptée à l'issue d'une procédure de comparution sur reconnaissance de culpabilité.

Parallèlement, dès le 2 septembre 2020, elle a déclaré ce sinistre à son assureur, lequel a été enregistré sous le n° 03.16492, en réponse à quoi, par mail du 8 suivant, la société QBE a dénié sa garantie sur le fondement des articles 4.2.3 et 4.2.4 des conditions générales selon lesquels sont exclus de ses garanties "les vols commis ou tentés par (les) préposés ou les membre de (la) famille ou avec leur complicité" et "vols commis par utilisation des clés du véhicule sans effraction du véhicule ou du local contenant les clés".

Par la suite, en réponse à ses protestations, la société QBE a refusé de s'exécuter en réponse à une mise en demeure par lettre recommandée du 18 novembre 2020.

La société Alizés location véhicules a saisi le tribunal mixte de commerce de Nouméa, par requête du 23 février 2021, lequel a, par jugement en date du 10 novembre 2021 :

- débouté la société Alizés location véhicules de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société Alizés location véhicules à payer à la société d'assurances QBE une indemnité de 200 000 francs pacifique au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

PROCÉDURE D'APPEL

La société Alizés location véhicules a relevé appel de ce jugement par requête enregistrée au greffe de la cour le 13 décembre 2021.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 3 février 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Alizés location véhicules demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal mixte de commerce de Nouméa le 10 novembre 2021 en ce qu'il a débouté la société Alizés location véhicules de l'ensemble de ses demandes ;

statuant à nouveau,

- condamner la société d'assurances QBE à garantir la société Alizés location véhicules à hauteur de 800 000 francs pacifique ;

- condamner la société d'assurances QBE à verser à la société Alizés location véhicules la somme de 350 000 francs pacifique sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société d'assurances QBE aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la société Deswarte- Calmet.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 août 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour est saisie du seul appel principal de la société Alizés location véhicules qui conteste la décision des premiers juges l'ayant déboutée de sa demande en paiement de l'indemnité fondée sur le contrat d'assurance.

I. Sur le bien fondé de la demande

Le tribunal mixte de commerce a débouté la société Alizés location véhicules de ses demandes indemnitaires fondées sur le contrat d'assurance, en retenant que le sinistre avait pour seule origine causale le vol du véhicule commis par le frère de la locataire qui avait pris possession des clés de la voiture sans commettre d'effraction, ni au domicile de cette dernière, ni sur le véhicule lui même, avant de s'en saisir puis de l'incendier. La juridiction a considéré que cette situation entrait dans les exclusions visées au conditions générales du contrat, et plus particulièrement à l'article 4.2.4 duquel il ressort que sont exclus 'les vols commis par l'utilisation des clés du véhicule sans effraction du véhicule ou du local contenant les clés" et a écarté le moyen soulevé par l'assurée, tiré de la nullité de cette clause. Elle a estimé par ailleurs, que l'incendie volontaire du véhicule par l'auteur du vol faisait du vol la cause nécessaire et exclusive de l'incendie, pour exclure par voie de conséquence la garantie applicable 'aux incendies" au sinistre litigieux.

Devant la cour, la société Alizés location véhicules développe les mêmes arguments. Elle soutient en premier lieu que l'article 4.2.4 qui écarte la garantie pour les vols commis par utilisation des clés du véhicule sans effraction du véhicule ou du local contenant les clés, doit être réputée non écrite au regard des dispositions de l'article L 113-1 du code des assurances et de la jurisprudence constante qui subordonne la validité d'une clause d'exclusion à son caractère formel et limité. La société appelante estime en effet, que cette clause vide en réalité la garantie de tout contenu, dès lors qu'elle a vocation à s'appliquer à la majorité des vols susceptibles d'être commis au détriment de l'assurée.

En second lieu, elle affirme que le véhicule a été incendié et qu'il n'existe aucune clause, ni dans les conditions générales, ni dans les conditions particulières, qui exclut la garantie au titre d'un incendie lorsque celui-ci résulte d'un acte volontaire ou se trouve consécutif à un vol. Elle soutient que la jurisprudence dont se prévaut l'intimée, issue d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Nouméa, ne peut être invoquée au cas d'espèce, car les termes précis de la clause d'exclusion de garantie ne sont pas connues. La société Alizés location véhicules rappelle que les clauses d'exclusion sont d'interprétation stricte et qu'en l'état aucune des causes d'exclusion définies à l'article 3 .2 des conditions générales ne vise l'hypothèse de l'incendie consécutif à un vol, ni ne prévoit dans ce cas l'application de la seule garantie applicable aux vols.

Elle demande en conséquence à la cour de condamner la société d'assurances à lui verser la somme de 800 000 francs pacifique due en application des dispositions de l'article 3 du contrat d'assurance, correspondant à la valeur vénale du véhicule, telle que déterminée par le cabinet Olmos .

La société d'assurances QBE fait valoir que la clause litigieuse est parfaitement claire et précise en ce qu'elle subordonne la garantie à l'existence d'un vol par effraction, soit du véhicule lui-même, soit du local dans lequel se trouvent les clés, et soutient que cette clause ne vide pas la garantie de son sens en se référant à la jurisprudence de la Cour de cassation. Elle estime que l'assurée ne peut pas d'avantage réclamer la garantie au titre de l'incendie, qui n'est qu'une conséquence indirecte du vol en se prévalant d'une jurisprudence de la cour d'appel de Nouméa.

La cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 1134 du code civil de Nouvelle-Calédonie, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Au cas d'espèce, l'article 4.2.4 des conditions générales 'assurance automobile et assistance", liant les parties en vertu du contrat d'assurance souscrit le 10 octobre 2017, exclut la garantie pour les vols de véhicule commis par utilisation des clés du véhicule sans effraction du véhicule lui-même ou du local dans lequel se trouvaient les clés.

Tel est bien le cas en l'espèce, puisqu'il ressort des déclarations faites par Mme [M], auprès des services de police, le 31 août 2020, qu'elle avait constaté, à 5 heures du matin, la disparition du véhicule qu'elle avait stationné la veille au soir sur le parking de sa résidence, ainsi que des clés qu'elle avait laissées sur un bureau situé dans sa chambre à coucher. Elle précisait soupçonner son petit frère, M. [C] [M], qu'elle hébergeait à ce moment-là, d'être à l'origine de la disparition de la voiture, ce qu'il devait d'ailleurs lui confirmer par téléphone avant de lui promettre de la restituer au plus vite.

La cour retient qu'en tout état de cause, la culpabilité de M. [C] [M], parfaitement assumée par celui-ci, dans la commission du vol puis de l'incendie volontaire du véhicule est acquise au regard de l'ordonnance portant homologation de la peine proposée par le ministère public, rendue le 3 septembre 2020.

La cour considère, comme le premier juge, que cette clause est formelle, claire et univoque. Elle permet à l'assurée d'avoir une parfaite connaissance de la portée et de l'étendue de la garantie. Ainsi, le moyen tendant à la voir réputée non écrite sur le fondement de l'article L 113-1 du Code des assurances, dont l'applicabilité au territoire de la Nouvelle-Calédonie est admise des parties, doit être écarté .

De la même manière, la société Alizés location véhicule ne peut utilement soutenir que l'indemnisation du sinistre lui serait acquise au titre du risque 'incendie', au motif qu'aucune clause contractuelle n'exclut la garantie pour cette situation précise du vol suivi de l'incendie

du véhicule, alors qu'il ressort du chapitre 2 des conditions générales que figurent au titre des exclusions communes, quelles que soient les garanties choisies, 'tous les dommages causés intentionnellement par le conducteur ou par toute personne à qui la qualité d'assuré est attribuée par le contrat'.

Il est manifeste, qu'au cas d'espèce, la destruction du véhicule est bien la conséquence de l'incendie volontairement provoqué par M. [M], qui en était de fait le conducteur de sorte que ce moyen doit également écarté.

Dans ces conditions, il convient de confirmer la décision du tribunal qui a débouté la société Alizés location véhicule de sa demande de garantie.

II. Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Compte tenu de la position économique respective des parties, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais irrépétibles qu'elles ont dû exposer pour assurer la représentation de leurs intérêts en cause d'appel.

III. Sur les dépens

En revanche, la société Alizés location véhicules qui succombe devant la cour sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu le 10 novembre 2021 par le tribunal de première instance de Nouméa n° 21/318 en toutes ses dispositions ;

Exonère les parties de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Alizés location véhicules aux dépens de l'instance d'appel.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/00129
Date de la décision : 03/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-03;21.00129 ?
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