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23/03/2023 | FRANCE | N°21/00045

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre sociale, 23 mars 2023, 21/00045


N° de minute : 15/2023



COUR D'APPEL DE NOUMÉA



Arrêt du 23 Mars 2023



Chambre sociale









Numéro R.G. : N° RG 21/00045 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SBX



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mai 2021 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :20/00079)



Saisine de la cour : 16 Juin 2021





APPELANT



M. [S] [L]

né le 20 Septembre 1959 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Nicolas MILLION, a

vocat au barreau de NOUMEA





INTIMÉ



S.A. NORD AVENIR, prise en la personne de son représentant légal en exercice

Siège social : [Adresse 2]

Représentée par Me Marie-Astrid CAZALI membre de la SEL...

N° de minute : 15/2023

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 23 Mars 2023

Chambre sociale

Numéro R.G. : N° RG 21/00045 - N° Portalis DBWF-V-B7F-SBX

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mai 2021 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :20/00079)

Saisine de la cour : 16 Juin 2021

APPELANT

M. [S] [L]

né le 20 Septembre 1959 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Nicolas MILLION, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

S.A. NORD AVENIR, prise en la personne de son représentant légal en exercice

Siège social : [Adresse 2]

Représentée par Me Marie-Astrid CAZALI membre de la SELARL M.A.C AVOCAT, avocat au barreau de NOUMEA

AUTRE INTERVENANT

S.E.L.A.R.L. MARY LAURE GASTAUD ès-qualités de mandataire judiciaire de la société NORD AVENIR

Siège social : [Adresse 1]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Février 2023, en audience publique, devant la cour composée de Monsieur Philippe DORCET, Président de chambre, président, M. François BILLON, Conseiller, M. Thibaud SOUBEYRAN, Conseiller, qui en ont délibéré, sur le rapport de Monsieur Philippe DORCET.

Greffier lors des débats et de la mise à disposition : Mme Isabelle VALLEE

ARRÊT contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, signé par Monsieur Philippe DORCET, président, et par Mme Isabelle VALLEE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Suivant contrat à durée indéterminée du 1er septembre 2013, M. [S] [L] a été recruté par la société NORD AVENIR, en qualité de directeur du développement. Promu directeur adjoint, il émargeait au salaire mensuel de 1'250'000 XPF auquel il convient d'ajouter une prime de fin d'année équivalente au montant d'un mois de salaire, un véhicule et un logement de fonction.

Convoqué le 18 décembre 2018 à un entretien préalable le 21 décembre 2018, il était licencié pour faute simple ainsi qu'exposé dans une lettre de licenciement du 16 janvier 2019 au motif qu'en sa qualité de supérieur hiérarchique, il avait brutalisé verbalement et physiquement M. [D] [J], directeur financier, le 5 décembre 2018. Ce dernier avait subi une ITT de 3 jours outre un arrêt initial de 10 Jours que la société avait dû déclarer en accident de travail déclenchant une enquête de la Direction du travail don't le rapport final mettait en demeure la société de procéder en urgence à une évaluation des risques psychosociaux tant au sein de la société NORD AVENIR qu'au sein de sa filiale CIT dirigée par M. [L].

Le 7 mai 2020, M. [S] [L] a cité la société NORD AVENIR devant le Tribunal du Travail de Nouméa, aux fins de juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner son employeur à lui régler 20'898'093 XPF à titre d'indemnité de licenciement et 5'000'000 XPF pour licenciement vexatoire.

ll indiquait en substance qu'il n'avait pas porté de coups à M. [J] et que c'est ce dernier qui s'était énervé à l'occasion d'une discussion': M. [L] exigeant des explications que celui-ci avait refusé de lui donner, le directeur financier aurait quitté la pièce en déclarant «'Je n'ai pas de réponse à te donner et je me casse.". Sommant M. [J] de respecter sa fonction, M. [L] aurait posé sa main gauche sur son épaule en tendant le bras droit pour l'empêcher de quitter les lieux'suite à quoi, le directeur financier serait tombé en arrière sans qu'aucun coup ne lui soit porté en hurlant': ' Il m'a frappé, il m'a frappé. ' Le seul témoin de l'altercation, Mme [K] n'indiquait pas que M. [J] avait été frappé, cette dernière se bornant à indiquer qu'il avait seulement mis sa main sur son épaule et que M. [J] s'était laissé tomber en arrière.

M. [L] suggérait que le rapport des pompiers qui étaient intervenus fût consulté et des vérifications effectuées avec les vidéos de télésurveillance. Il précisait que le certificat médical produit par M. [J] ne suffisait pas à établir qu'il avait reçu un coup à l'épaule et s'étonnait que dernier qui indiquait avoir souffert pendant 3 mois d'un stress post traumatique n'ait pas consulté un spécialiste. Enfin, Il relevait que l'affaire avait été classée sans suite au plan pénal et qu'en toute hypothèse, le rapport de l'inspection du travail échouait à établir les violences qui lui étaient reprochées.

NORD AVENIR répliquait que la preuve de l'altercation était rapportée par le témoignage de Mme [K] et le certificat médical qui décrivait un choc psychologique et une douleur à l'épaule droite.

Par ailleurs, la société faisait état de ce que la Direction du travail avait entendu les salariés et conclu que M. [J] avait été victime d'une agression physique et verbale de la part de son supérieur hiérarchique, le classement sans suite invoqué par le requérant n'étant pas de nature à établir que les faits de violence n'avaient pas été commis. Elle relevait sur ce point que le Parquet avait motivé sa décision en considérant que le licenciement envisagé paraissait une sanction «'suffisante'» tout en précisant que l'infraction avait bien été commise.

Elle considérait en conséquence le licenciement justifié compte tenu d'une part de l'obligation de sécurité de résultat don't elle est tenue à l'égard de ses salariés et d'autre part, de la position de cadre du requérant, la pétition de 48 salariés sur 200 produite par ce dernier ne remettant pas en cause la réalité des faits qui lui sont reprochés.

S'agissant du caractère vexatoire du licenciement, elle indique qu'elle ne peut pas se faire remettre le rapport des pompiers sans réquisitions judiciaires et qu'il n'y avait pas de caméra de vidéosurveillance à l'endroit où se sont déroulés les faits.

La SELARL Mary-Laure GASTAUD, désignée mandataire judiciaire par décision du Tribunal mixte de commerce de NOUMEA en date du 25 mai 2020 prononçant le redressement judiciaire de la SAEM NORD AVENIR, est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement en date du 28 mai 2021, le tribunal du travail a débouté M. [L] de toutes ses demandes considérant que le licenciement pour faute était justifié.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête en date du 10 juin 2021, M. [L] a relevé appel de cette décision.

Il réaffirme dans de dernières écritures du 15 février 2023 développées lors de l'audience d'appel, n'avoir pas commis les actes de violences qui lui sont reprochés. Il rappelle, s'agissant d'une procédure disciplinaire, que la charge de la preuve incombe à l'employeur aux termes de l'article L 132-8 du code du travail. Or la lettre de licenciement fait état de violences physiques et verbales dont la démonstration repose sur les seules déclarations de M. [J] et sur une décision de classement sans suite du Parquet de Nouméa qui ne concerne pas le dossier en cours mais une plainte distincte.

Il prétend ensuite que la conviction du premier juge repose que les seuls témoignages de M. [J] et Mme [K], ce dernier ayant été interprété par le tribunal «'au détriment de l'appelant'» puisqu'elle ne fait nullement cas de propos injurieux ou menaçants alors que la lettre de licenciement qui lie la juridiction évoque des menaces verbales. Il soutient que c'est bien plutôt M. [J] qui suite à une discussion houleuse lui manqué de respect en indiquant qu'il «'se cassait'», M. [L] ayant seulement tenté de le retenir en posant sa main sur son épaule ce qu'il a toujours reconnu.

Il affirme que le certificat médical initial fait état de simples douleurs à l'épaule ne résultant que des déclarations de M. [J] au médecin. Quant à l'évanouissement de ce dernier à l'origine de la venue des pompiers, il ne se fonde que sur ses déclarations, M. [L] s'étonnant qu'il ne se soit trouvé aucun de ses collègues pour venir en témoigner.

Aucune preuve extrinsèque (rapport des pompiers, caméras de vidéosurveillance) n'a été produite qui eut été de nature à établir la vérité et il demeurerait une contradiction avérée entre les versions résultant de la plainte de M. [J], le témoignage de Mme [K] laquelle ne fait pas état d'un coup de poing et la déclaration d'accident du travail effectuée par l'employeur qui indique que ce dernier a reçu un «'coup à la poitrine'».

S'agissant du rapport accablant de l'inspecteur du travail, il y voit une «'absence totale de neutralité'» voire «'une totale partialité'» de la part de ce dernier lequel avait manifestement pris fait et cause pour M. [J] puisqu'il était «'partie prenante'» dans ce dossier.

Il soutient ainsi être victime d'une manipulation «'avec la complicité conciliante de (l') employeur'» et relève que M. [J] a rapidement négocié son départ «'à des conditions inconnues qu'il n'a en tout cas pas souhaité communiquer à l'inspecteur du travail'et qu'il en a profité pour partir faire le tour du monde (') en s'organisant pour soutirer un maximum en peu de temps à son employeur'».

Il conclut à l'infirmation intégrale du jugement déféré, à la condamnation de Nord Avenir aux sommes de 20'898'093 XPF à titre d'indemnité de licenciement et 5'000'000 XPF pour licenciement vexatoire outre 500'000 XPF sur le fondement de l'article 700 CPCNC.

NORD AVENIR dans ses dernières écritures demande confirmation du jugement entrepris au bénéfice de la motivation exposée par le premier juge estimant que la preuve de l'altercation était rapportée tant par le témoignage de Mme [K] que par le certificat médical circonstancié établi par un médecin urgentiste qui décrivait un choc psychologique et une douleur «'exquise'» à l'épaule droite. Elle observe que M. [J] a produit 6 certificats médicaux fondés sur un constat de stress post-traumatique entre le 05 décembre 2018 et le 26 février 2019.

Elle rappelle qu'à l'époque des faits M. [L] bénéficiait d'une délégation de pouvoir totale du 30 novembre au 12 décembre 2018 de la part du directeur général

Elle souligne que le rapport de la DTE corrobore en tous points sa position quant aux violences exercées par M. [L] et relève que la lecture d'un courriel intitulé «'Excès'» cinq semaines avant les faits montre que l'appelant s'excuse déjà pour avoir eu envers M. [J] une «'réaction de paranoïa excessive et impardonnable (') une réaction épidermique, injustifiée et 'peu professionnelle (') une forme d'impulsivité qui nous amène à l'exagération et à l'excès quelquefois ».

Elle sollicite en conséquence, outre la confirmation du jugement, une somme de 350'000 XPF sur le fondement de l'article 700 CPCNC.

SUR QUOI LA COUR,

Sur la légitimité du licenciement.

Le licenciement n'est légitime que s'il est fondé sur une cause réelle et sérieuse, ce qui nécessite la preuve de griefs matériellement vérifiables et objectifs qui sont suffisamment pertinents et rendent inéluctables la rupture du contrat de travail.

Le licenciement pour faute grave a nécessairement un caractère disciplinaire mais le licenciement peut être légitime même si la faute n'est pas qualifiée de grave. Il faut et il suffit qu'elle ne permette plus la poursuite de la relation de travail.

M. [L] ne nie pas avoir élevé le ton avec M. [J] pour un différend professionnel mais conteste l'avoir frappé soutenant n'avoir fait que poser sa main sur l'épaule de ce dernier. Il en veut pour preuve que Mme [K] seul témoin des faits ne rapporte pas avoir vu de coup porté.

Or, ainsi que relevé par le premier juge, il résulte de l'attestation que cette dernière, qui se trouvait à l'étage du dessous lorsqu'elle a entendu le ton monter entre les protagonistes, a vu devant le bureau les deux hommes se faire face, M. [L], main droite sur l'épaule gauche poussant M. [J] auquel il s'adressait en ces termes': 'Tu arrêtes' et provoquant la chute de ce dernier. Après s'être relevé M. [J] a «'hurlé'» qu'il avait été frappé, M. [L] ayant rejoint son bureau en lui répondant': ' Je ne t'ai pas frappé, je t'ai poussé et tu me dois le respect'.

ll s'ensuit, sans préjuger de violences qui auraient pu être commises avant l'arrivée de Mme [K], que le requérant, a bien poussé volontairement avec sa main droite l'épaule de M. [J] et provoqué sa chute. La divergence de Mme [K] sur le point de savoir s'il s'agissait de l'épaule gauche ou de l'épaule droite peut s'expliquer comme le soutient le tribunal «'' par le fait qu'elle ait pu confondre la droite de la gauche dans la mesure où elle n'était pas au même niveau que les protagonistes ou que M. [J] se soit blessé à l'épaule droite en tombant.'» Ce point est confirmé par la victime qui, dans ses déclarations à la DTE, expliquera que le «'coup'» n'était pas douloureux': «'C'était le fait de ce qu'il ait été bousculé qui a provoqué sa chute.'» (Page 8). En tout état de cause, le témoin affirme que M. [L] a reconnu l'avoir poussé en répondant 'Je t'ai poussé, tu me dois le respect' à M. [J] qui hurlait qu'il l'avait frappé.

Il s'agit donc plutôt d'une bousculade laquelle constitue'au même titre qu'un coup, une violence répréhensible de la part d'un supérieur hiérarchique qui n'a, en toute hypothèse, pas à porter la main sur un salarié, serait-ce pour le stopper, au risque, ce qui fut le cas, de le faire chuter. Il est d'ailleurs établi que quelques minutes plus tard, M. [J] s'est évanoui entraînant l'intervention des pompiers. M. [L] remet en cause jusqu'à cet évanouissement': pour mémoire, le médecin des urgences relate une douleur «'exquise'» à l'épaule droite et «'un choc psychologique +++'» (sic).

En outre, cette hypothèse est confortée par le rapport de l'inspecteur du travail de [Localité 4] qui est également intervenu pour des comportements inappropriés suite à cette affaire et à d'autres doléances de salariées au sein de la société CIT (Compagnie d'investissements Touristiques), filiale à 100'% de Nord Avenir don't M. [L] était directeur. L'enquête conclut que M. [D] [J] a bel et bien été victime d'une agression physique et verbale par son supérieur hiérarchique qui occupait les fonctions de directeur général par intérim. Le fait que le requérant n'ait pas été suivi par un psychiatre ou que le rapport des pompiers ne soit pas produit n'est pas suffisant pour établir que M. [J] n'ait pas été poussé violemment par monsieur [L].

Dans ces conditions, il sera retenu que M. [L] a bien commis une agression physique et verbale a minima en parlant fort à M. [J] et en le poussant, qui a eu pour conséquence d'entraîner un stress post-traumatique et un arrêt de travail de plusieurs semaines pour la victime.

M. [L] entend cependant tirer argument de ce que la plainte initiale déposée par M. [J] a été classée sans suite. Pour mémoire, il résulte de l'avis de classement produit par le requérant que la plainte a été classée non parce que les faits de violence n'ont pas été commis mais parce qu'une suite administrative, comprendre le licenciement, apparaissait une sanction suffisante pour le Parquet.

D'ailleurs contrairement à ce qu'indique le conseil de M. [L] dans ses écritures, la décision de classement concerne bien les mêmes faits et non des faits distincts. En effet, la procédure numérotée 2019/16 pour des faits de harcèlement moral et violence a été initiée dès décembre 2018 par la DTE de Koné et a été clôturée le 27 mai 2019 prenant en compte non le seul M. [J] mais également Mme [E] salariée de Nord Avenir don't le cas a été joint par l'administration s'agissant de la même entreprise et du même mis en cause. Cette transmission au Parquet dans le cadre de l'article 40 du CPP correspond donc parfaitement à «'''une affaire révélée le 05 juin 2019 par la DTE (') contre [L] [S]'» pour menaces et chantage, infractions concernant essentiellement Mme [E] mais à laquelle a été jointe celle de M. [L].

Il sera en outre observé qu'à l'occasion de cette enquête administrative, M. [L] a indiqué lors de deux auditions les 16 et 26 décembre 2018 par l'administration qu'il était victime d'un «'complot'» et que M. [J] avait simulé une chute pour toucher de l'argent n'hésitant pas à ajouter que ce dernier, gros consommateur d'alcool et tout à fait «'incompétent'», s'était livré à diverses malversations (acquisition d'un véhicule sur le compte de la société, voyages au Vanuatu et en Nouvelle-Zélande payés par des prestataires de l'entreprise, compte bancaire au Vanuatu). Il accusait également son supérieur hiérarchique, M. [W] «'d'activités douteuses'». Invité à saisir le Parquet ou la Chambre régionale des comptes pour fournir les preuves de ce qu'il avançait, il s'avérait incapable de présenter une quelconque preuve de ses accusations.

Informé des risques psychosociaux liés à son attitude, l'inspecteur du travail relevait ce qui suit concernant l'appelant : «''après avoir été informé des deux situations (MM. [J] et [E]), le dirigeant n'a pris aucune mesure de nature à faire cesser le trouble mais s'est engouffré toujours plus dans sa volonté de nuire'». La DTE mettait en outre l'accent sur plusieurs employés avec lesquels M. [L] avait eu des relations «'difficiles'» et qui avaient été suivis de départs de l'entreprise ou de congés maladie concluant : «'M. [L] dirige les entreprises dont il a la charge par la peur et l'intimidation.'» (Page 24)

Les nombreux salariés qui ont été entendus par la DTE accréditent de plus fort ce diagnostic auquel peut être joint le courriel d'excuses du 30 octobre 2018 produit par le conseil de M. [J] laissant entrevoir que M. [L] a certainement quelques difficultés à gérer son impulsivité qu'il qualifie lui-même d'excès.

Comme rappelé dans le courrier qui lui a été adressé de tels faits inappropriés commis par un supérieur hiérarchique au vu et au su des autres employés, de surcroît alors qu'il assurait par intérim les fonctions de directeur, ne peuvent être tolérés alors que l'employeur est soumis à une obligation de résultat s'agissant de la santé mentale et physique de ses salariés.

Quant au fait que 45 salariés sur 200 salariés aient signé une pétition pour que M. [L] reste à son poste, cet argument est parfaitement est inopérant puisque d'une part, il n'atténue en rien sa responsabilité, la Cour observant d'autre part que, les 150 autres salariés sollicités, soit la grande majorité des employés, se sont abstenus d'exprimer un quelconque soutien à l'intéressé.

Il apparaît en conséquence que le licenciement pour faute est justifié, eu égard à la nature des faits et à la position hiérarchique du requérant': la décision du premier juge qui l'a débouté de toutes ses demandes sera intégralement confirmée.

Sur le préjudice distinct pour licenciement vexatoire :

Il est de jurisprudence constante qu'un licenciement, même justifié par une cause réelle et sérieuse, ne doit pas être vexatoire et qu'à défaut,l'employeur peut être condamné à payer au salarié des dommages-intérêts.

Le requérant soutient qu'il était promis au poste de directeur de Nord Avenir quelques semaines avant son licenciement et que les circonstances dans lesquelles il a été mis fin à son contrat de travail seraient «'particulièrement vexatoires ou brutales'». 'Il n'est pas demandé de préjudice moral.

Outre le fait qu'aucune pièce ne vient étayer l'argument selon lequel M. [L] devait accéder au poste de directeur, il sera rappelé à ce stade qu'incombe à l'employeur une obligation de résultat pour ce qui regarde la santé mentale et physique des salariés. Ce dernier n'a fait que réagir dans les brefs délais qui lui étaient impartis en procédant à une enquête et en saisissant la DTE sauf à risquer de voir se reproduire des comportements inappropriés de la part de M. [L].

D'ailleurs, loin d'accabler M. [L], Nord Avenir n'a pas retenu de faute grave permettant à l'appelant de percevoir son indemnité compensatrice de 3 mois.

Enfin, il sera observé que les faits datent du 05 décembre et que la convocation à l'entretien préalable date du 18 décembre, ce qui démontre sans équivoque que l'employeur a pris le temps de la réflexion puisque près de deux semaines s'étaient écoulés avant d'envoyer le courrier.

La décision du tribunal sera donc confirmée en ce qu'elle déboute le requérant

Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile de Nouvelle-Calédonie :

L'article 700 du Code de procédure civile dispose que, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu de cette condamnation.

ll serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimé les frais irrépétibles qu'il a engagés. M. [L], succombant à l'instance, sera condamnée à lui payer la somme de 350'000 XPF à ce titre.

Sur les dépens :

L'appelant qui succombe sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant en dernier ressort, publiquement et contradictoirement,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du tribunal du travail du 28 mai 2021,

CONDAMNE au titre des frais irrépétibles d'appel M. [L] à la somme de 350'000 XPF ainsi qu'aux dépens.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00045
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;21.00045 ?
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