N° de minute : 237/2022
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 29 septembre 2022
Chambre civile
Numéro R.G. : N° RG 20/00466 - N° Portalis DBWF-V-B7E-RT6
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 décembre 2020 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG n° :19/3212)
Saisine de la cour : 30 décembre 2020
APPELANT
Société d'assurances GENERALI IARD, représentée par son agence CAP ASSURANCES,
Siège social : [Adresse 5]
Représentée par Me Marie-Laure FAUCHE de la SELARL LFC AVOCATS, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉS
M. [K] [Y]
né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 6]
Représenté par Me Séverine LOSTE de la SELARL SOCIETE D'AVOCATS JURISCAL, avocat au barreau de NOUMEA
Mme [T] [L]
née le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 8],
demeurant [Adresse 4]
Non représentée
CAISSE DE COMPENSATION DES PRESTATIONS FAMILIALES DES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET DE PREVOYANCE (CAFAT),
Siège : [Adresse 3]
Représentée par Me Nicolas MILLION de la SELARL SOCIETE D'AVOCATS MILLIARD MILLION, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 4 juillet 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,
M. Thibaud SOUBEYRAN, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Thibaud SOUBEYRAN.
Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO
Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT
ARRÊT :
- réputé contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, le délibéré fixé au 01/09/2022 ayant été prorogé au 08/09/2022 puis au 15/09/2022 puis au 29/09/2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
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PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE :
Par courrier électronique du 8 juin 2012, Mme [T] [L] a déclaré à la compagnie GENERALI, assureur du véhicule de la société A VOS SOINS dont elle était la gérante, un accident survenu le 29 mai 2012, au cours duquel M. [K] [Y], alors qu'il descendait du véhicule qu'elle conduisait, avait chuté au sol et s'était blessé, ce qui avait justifié son hospitalisation et une intervention chirurgicale le 1er juin suivant.
Par ordonnance du 9 juillet 2014, le juge des référés du tribunal de première instance de Nouméa, faisant droit à la requête de M. [K] [Y], a ordonné une expertise médicale et lui a alloué une provision de 500'000 francs CFP.
L'expert, le docteur [N] a déposé son rapport le 21 octobre suivant.
Par courriers du 18 décembre 2014, la compagnie GENERALI, invoquant les termes du rapport d'expertise médicale, estimait que les circonstances du sinistre n'étaient pas accidentelles contrairement à la déclaration du 8 juin 2012 et prononçait la déchéance de garantie, sollicitant le remboursement des sommes déjà versées à titre provisionnel.
Par requête enregistrée au greffe de la juridiction le 23 mars 2017, M. [K] [Y] a saisi le tribunal de première instance de Nouméa aux fins de voir condamner Mme [T] [L], sous la garantie de son assureur et en présence de la CAFAT, à lui verser diverses sommes en indemnisation de ses préjudices.
Par jugement du 14 décembre 2020, le tribunal a déclaré Mme [T] [L] entièrement responsable de l'accident de la circulation survenu le 30 mai 2012 et des conséquences dommageables de ce sinistre, sous couvert de la compagnie GENERALI en sa qualité d'assureur. Avant dire droit, il a renvoyé l'affaire à la mise en état et a invité M. [K] [Y] et la CAFAT à produire divers justificatifs des sommes sollicitées.
Pour statuer en ce sens, le tribunal a retenu 'qu'aucune faute volontaire d'une exceptionnelle gravité' imputable à M. [K] [Y] ne permettait, comme le sollicitait l'assureur, d'écarter son droit à indemnisation.
PROCÉDURE D'APPEL :
Par requête déposée au greffe de la cour le 29 décembre 2020, la compagnie GENERALI a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de son mémoire ampliatif du 26 mars 2021, la société GENERALI demande à la cour à titre principal de débouter M. [K] [Y] de l'intégralité de ses demandes, estimant que ses blessures étaient la conséquence exclusive d'un comportement volontaire de ce dernier. Elle sollicite dès lors le remboursement des provisions versées à hauteur de 1 000 000 de francs CFP et la condamnation de M. [K] [Y] à lui verser la somme de 300 000 francs CFP au titre de ses frais irrépétibles. A titre subsidiaire, elle poursuit la confirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la réouverture des débats pour production de diverses pièces justificatives.
En réplique, M. [K] [Y] demande à la cour aux termes de ses écritures du 29 décembre 2021 de confirmer le jugement frappé d'appel en toutes ses dispositions et de renvoyer les parties devant le premier juge afin qu'il soit statué sur la liquidation de ses préjudices. Il sollicite en outre une somme de 350 000 francs CFP au titre de ses frais irrépétibles.
Suivant écritures du 30 juillet 2021, la CAFAT sollicite également la confirmation du jugement et la condamnation de l'assureur à lui verser la somme de 120 000 francs CFP au titre de ses frais irrépétibles.
Mme [T] [L] n'a pas constitué avocat quoique la requête d'appel et le mémoire ampliatif d'appel lui aient été signifiés à personne.
Pour un exposé complet des demandes et moyens des parties, la cour renvoie expressément à leurs écritures respectives et aux développements ci-dessous.
SUR CE :
Vu les articles 1er et 3 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, desquels il résulte que la victime non conductrice d'un accident de la circulation a droit à indemnisation des dommages résultant des atteintes à sa personne, sauf lorsqu'elle a commis une faute inexcusable, cause exclusive de l'accident ou qu'elle a volontairement recherché le dommage qu'elle a subi, la faute de la victime pouvant toutefois exclure ou limiter l'indemnisation des dommages aux biens subis par elle.
En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats et notamment des attestations concordantes de Mme [T] [L] et M. [K] [Y] confirmées par les certificats médicaux et rapports d'expertise que les blessures subies par M. [K] [Y] sont survenues dans la soirée du 30 mai 2012 lors de sa descente du véhicule conduit par Mme [T] [L] et régulièrement assuré auprès de la compagnie GENERALI.
Cette dernière, pour dénier sa garantie, se prévaut des termes du compte rendu hospitalier établi à une date indeterminée par le Dr [X] [I], dans les termes suivants : '... évolution de l'état clinique du patient : le patient a sauté de la voiture alors que son amie démarrait car il ne voulait pas la suivre ... Allô docteur [V] OK pour clinique baie des citrons, radio remise au patient pour son chirurgien...', tels que rapportés par l'expert [N] dans son rapport du 21 octobre 2014. Elle soutient que 'la faute volontaire' de M. [K] [Y] est à l'origine de ses dommages, contrairement aux termes de la déclaration de sinistre initial.
Toutefois, la faute intentionnelle invoquée par l'assureur suppose que la victime ait voulu non seulement l'action à l'origine du préjudice mais également le dommage lui-même, ce qui n'est ni soutenu, ni établi en l'espèce.
Par ailleurs, le compte rendu d'hospitalisation invoqué ne caractérise ni faute intentionnelle, ni, à la supposer invoquée, faute inexcusable opposable à M. [Y], ni déclaration mensongère imputable à Mme [T] [L] dès lors qu'il n'est pas présenté comme la transcription exacte des propos tenus directement par M. [K] [Y], qu'il ne revêt pas de caractère précis, qu'il a été établi dans des conditions indéterminées et qu'il n'est corroboré par aucune autre pièce du dossier.
Dès lors, la compagnie GENERALI n'est pas fondée à soutenir que Mme [T] [L] n'est pas tenue à indemnisation et que sa garantie n'est pas due.
La décision entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions.
Sur les demandes annexes :
La compagnie GENERALI, qui succombe à l'instance supportera la charge des dépens d'appel et sera en outre condamnée à payer à M. [K] [Y] la somme de 250 000 francs CFP et à la CAFAT la somme de 120 000 francs CFP au titre de leurs frais irrépétibles non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,
RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal de première instance de Nouméa pour liquidation des préjudices invoqués,
Y ajoutant,
CONDAMNE la compagnie GENERALI à payer à M. [K] [Y] la somme de 250 000 francs CFP et à la CAFAT la somme de 120 000 francs CFP sur le fondement de l'article 700 du code de procéure civile de Nouvelle calédonie ;
CONDAMNE la compagnie GENERALI aux dépens d'appel.
Le greffier,Le président.