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29/08/2022 | FRANCE | N°21/000945

France | France, Cour d'appel de noumea, 05, 29 août 2022, 21/000945


No de minute : 59/2022

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 29 Août 2022

Chambre commerciale

Numéro R.G. : No RG 21/00094 - No Portalis DBWF-V-B7F-SM4

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Août 2021 par le Tribunal mixte de Commerce de NOUMEA (RG no :20/69)

Saisine de la cour : 14 Septembre 2021

APPELANT

M. [O] [Y]
né le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 5]
Représenté par Me Audrey NOYON de la SELARL A.NOYON AVOCAT, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

S.A. BANQUE DE

NOUVELLE CALEDONIE DITE BNC,
Siège social : [Adresse 4]
Représenté par Me Marie-astrid CAZALI de la SELARL M.A.C AVOCAT, avocat au ...

No de minute : 59/2022

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 29 Août 2022

Chambre commerciale

Numéro R.G. : No RG 21/00094 - No Portalis DBWF-V-B7F-SM4

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Août 2021 par le Tribunal mixte de Commerce de NOUMEA (RG no :20/69)

Saisine de la cour : 14 Septembre 2021

APPELANT

M. [O] [Y]
né le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 5]
Représenté par Me Audrey NOYON de la SELARL A.NOYON AVOCAT, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

S.A. BANQUE DE NOUVELLE CALEDONIE DITE BNC,
Siège social : [Adresse 4]
Représenté par Me Marie-astrid CAZALI de la SELARL M.A.C AVOCAT, avocat au barreau de NOUMEA

S.E.L.A.R.L. MARIE-LAURE GASTAUD, ès qualités de mandataire liquidateur de la lSARL ML DISTRIBUTION,
Siège social : [Adresse 3]

M. [I] [M],
demeurant [Adresse 6]

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 11 Juillet 2022, en audience publique, devant la cour composée de M. Philippe DORCET, Président de chambre, président, Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller, Mme Nathalie BRUN, Conseiller, qui en ont délibéré, sur le rapport de Monsieur Philippe DORCET.

Greffier lors des débats M. Petelo GOGO et lors de la mise à disposition Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, signé par Monsieur Philippe DORCET, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

la Sarl CHB Distribution (importation et vente) a été créée en 2014 par MM. [Y] et [M] , tous deux cogérants et associés à 50 %. La société était titulaire d'un compte no 087 684 41 807 dans les livres de la BNC.

Le 23 décembre 2015, cette banque a consenti sous seing privé à CHB DISTRIBUTION un prêt à moyen terme d'un montant de 3 498 500 XPF pour un véhicule neuf RENAULT NEW MASTER, et remboursable en 60 mensualités. Par courrier du 26 septembre 2019, la banque s'est prévalue de la déchéance du terme à raison du non-paiement des mensualités de remboursement. Aucun cautionnement personnel des gérants n'est venu garantir ce prêt.

Le 5 décembre 2016, la société CHB DISTRIBUTION (désormais ML DISTRIBUTION) a sollicité et obtenu de la S.A. BANQUE DE NOUVELLE CALEDONIE, ci-après désignée "la BNC" ou "la banque", une autorisation de découvert en compte courant professionnel d'un montant de 7 000 000 XPF moyennant des intérêts au taux fixe de 9,55 % l'an plus TOF de 6 %.

Par actes sous seing privé séparés du 6 janvier 2017, MM. [Y] et [M] se sont portés cautions solidaires de CHB DISTRIBUTION au profit de la banque BNC pour l'ensemble des engagements de cette société envers cette dernière, dont le solde débiteur du compte courant, et ce dans la limite, pour chacun d'eux, de la somme de 3 500 000 XPF "couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard".

Le découvert a été dénoncé par la banque le 6 septembre 2017 à effet du 20 suivant et un protocole d'accord a été conclu le 17 novembre 2017 entre la BNC et CHB DISTRIBUTION aux termes duquel cette dernière s'est engagée à ramener à le solde débiteur de son compte courant entre le 14 novembre 2017 et le 14 février 2019.

Ce protocole a finalement été dénoncé, pour inexécution, suivant courrier du 13 mai 2019.

Toujours en date du 6 janvier 2017, la BNC a consenti par acte sous seing privé à la société CHB DISTRIBUTION devenue ML DISTRIBUTION un prêt à moyen terme d'un montant de 2 921 000 XPF destiné à financer l'achat d'un véhicule neuf RENAULT TRAFFIC, et remboursable en 60 mensualités intégrant des intérêts au taux de 6 % l'an. Dans le même acte, MM. [Y] et [M] se sont portés cautions solidaires de la société CHB DISTRIBUTION au profit de la banque BNC pour le remboursement de ce prêt, et ce dans la limite, pour chacun d'eux, de la somme de 1 460 500 XPF "couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard". Ce véhicule sera finalement vendu par la Banque le 10 juillet 2019 pour 500 000 XPF, somme venant en déduction de la créance produite.

Dès 2017, les associés ont souhaité mettre un terme à leur collaboration et le 08 janvier 2018 ont signé un acte par lequel M. [M] cédait ses parts et s'obligeait (article 10 de l'acte) à « ...rapporter la mainlevée de caution solidaire donnés par [O] [Y] à la BNC pour les découverts autorisés et crédits bancaires de telle manière que [O] [Y] soit déchargé de toutes obligations à l'égard de la BNC au titre des avances, facilités et prêts cautionnés par [O] [Y].

Pour le cas où la mainlevée de caution ne serait pas donnée par la BNC, [I] [M] s'oblige à faire son affaire personnelle et à payer de ses deniers personnels toute somme que [O] [Y] pourrait être appelé à verser en sa qualité de caution» .

Sur autorisation du président du tribunal de droit commun du 26 novembre 2019, la BNC a fait inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur un bien immobilier appartenant à M. [Y] et sis à KOUMAC, village, lotissement municipal, No IC 424 725-7547, pour garantie d'une somme totale de 2 258 319 XPF outre 500 000 XPF pour les frais évalués provisoirement.

Le 24 avril 2020, ML DISTRIBUTION a déposé une déclaration de cessation de paiement au greffe du tribunal de commerce pour demander sa liquidation judiciaire « immédiate » qui sera prononcée par jugement du 04 mai 2020, la Selarl GASTAUD étant désignée en qualité de liquidateur.

La Sarl ML DISTRIBUTION qui succédait à CHB était placée en liquidation judiciaire le 04 mai 2020. Par courrier du 26 mai 2020, la BNC, créancier chirographaire, a produit au passif de ML Distribution une créance de 4 305 061 XPF inscrite le 28 mai soit notamment 630 617 XPF au titre du découvert en compte courant et 2 220 327 XPF au titre du prêt cautionné par M. [Y].

Les 4 et 10 décembre 2020, M. [M] prenait contact avec le conseil de la BNC en ces termes « Je ne sais pas la somme exact (sic) que je dois à la BNP, c'est pour cela que je souhaiter (sic) avoir un rdv. »

***

Dénonçant l'absence de la débitrice principale et des deux cautions solidaires à ses mises en demeure concomitantes ou postérieures à la résiliation des trois concours bancaires qui avaient été accordés à la société CHB DISTRIBUTION, la BNC, par requête en date au greffe du 19 février 2020, a fait appeler la société ML DISTRIBUTION, anciennement CHB DISTRIBUTION, M. [I] [M] et M. [O] [Y], ès qualités, pour ces deux derniers, de caution solidaire de ladite société, à l'effet de voir, avec exécution provisoire :

? condamner solidairement la S.A.R.L. ML DISTRIBUTION, débitrice principale, et MM [I] [M] et [O] [Y], ès qualités de cautions solidaires de ladite société, à lui payer la somme de 797 819 XPF au titre du découvert en compte courant no [XXXXXXXXXX02], avec intérêts au taux d'usure à compter du 18 juillet 2019, date de la première mise en demeure pour la débitrice principale, et à compter du 16 octobre 2019 à l'égard des cautions, dans la limite de 3 500 000 XPF chacune pour ces dernières, en deniers ou quittances

? condamner la S.A.R.L. ML DISTRIBUTION, débitrice principale, à lui payer la somme de 1 276 613 F XPF au titre du crédit à moyen terme du 23 décembre 2015, avec intérêts au taux contractuel de 6 % l'an + TOF sur la seule somme due en principal pour 1 160 557 XPF à compter du 26 septembre 2019, date de la dernière mise en demeure, en deniers ou quittances,

? condamner solidairement la S.A.R.L. ML DISTRIBUTION, débitrice principale, et MM [I] [M] et [O] [Y], ès qualités de cautions solidaires de ladite société, à lui payer la somme de I 949 291 XPF au titre du découvert du crédit à moyen terme du 6 janvier 2017, dans la limite de 1 460 500 XPF pour chacune des cautions, avec intérêts au taux contractuel de 6 % l'an + TOF sur la seule somme due en principal pour 1 772 083 XPF à compter du 26 septembre 2019, date de la dernière mise en demeure, en deniers ou quittances,

? valider l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire prise en vertu de l'ordonnance présidentielle du 26 novembre 2019, sur un bien immobilier appartenant à M. [Y],

? ordonner la transcription du jugement à venir à la Publicité Foncière,

? condamner solidairement la société ML DISTRIBUTION, M. [M] et M. [Y] à lui payer la somme de 500 000 XPF au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens de 1'instance, sous distraction ;

***
Dans ses écritures complémentaires, la BNC a modifié ses demandes eu égard à la liquidation judiciaire de la débitrice principale, et souhaite voir désormais, toujours avec exécution provisoire :

? fixer sa créance au passif de cette liquidation judiciaire aux sommes suivantes :

** 630 617 XPF arrêtée au 4 mai 2020 au titre du solde débiteur du compte courant no [XXXXXXXXXX02],

** 2 220 327 XPF arrêtée au 4 mai 2020 au titre du crédit à moyen terme du 6 janvier 2017, avec intérêts au taux contractuel de 6 % l'an + TOF sur la seule somme due en principal pour 1 772 083 XPF à compter du 26 mai 2020, date de sa déclaration de créance,

** 1 454 117 XPF arrêtée au 4 mai 2020 au titre du crédit à moyen terme du 23 décembre 2015, avec intérêts au taux contractuel de 6 % 1'an + TOF sur la seule somme due en principal pour 1 160 557 XPF à compter du 26 mai 2020, date de sa déclaration de créance,

? condamner solidairement MM [I] [M] et [O] [Y], ès qualités de cautions solidaires de la société en liquidation ML DISTRIBUTION, à lui payer la somme de 630 617 XPF au titre du découvert en compte courant no [XXXXXXXXXX02],

? dire que les intérêts non payés à leur échéance porteront eux-mêmes intérêts de plein droit pour une armée entière, conformément à I'article 1154 du code civil,

? condamner solidairement MM [I] [M] et [O] [Y], ès qualités de cautions solidaires de la société en liquidation ML DISTRIBUTION, à lui payer la somme de 2 220 327 XPF au titre du crédit a moyen terme du 6 janvier 2017, dans la limite de 1 460 500 XPF pour chacune des cautions, avec intérêts au taux légal sur la seule somme due en principal pour 1 772 083 XPF à compter du 16 octobre 2019, date de la dernière mise en demeure, en deniers ou quittances,

? dire que les intérêts non payés à leur échéance porteront eux-mêmes intérêts de plein droit pour une année entière, conformément à l'article 1154 du code civil,

? valider l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire prise en vertu de l'ordonnance présidentielle du 26 novembre 2019, sur un bien immobilier appartenant à M. [Y],

? ordonner la transcription du jugement à venir à la Publicité Foncière,

? débouter M. [Y] de toutes ses demandes,

? condamner solidairement M. [M] et M. [Y] à lui payer la somme de 500 000 XPF au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, sous distraction ;

La BNC indique pour l'essentiel concernant M. [Y] :

-que la circonstance qu'il a cédé ses parts sociales dans la société débitrice n'a pas eu pour effet de révoquer ses cautionnements, une telle révocation ayant exigé l'accord de la banque, lequel ne lui a jamais été donné ni demandé,

-qu'il a reçu tous les éléments d'information nécessaires, tant dans une précédente procédure de référés que dans le cadre de la présente instance,

***

Alors que la société ML DISTRIBUTION n'avait ni conclu ni constitué avocat, le tribunal de commerce a prononcé, à la demande de son représentant légal, l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire suivant jugement du 4 mai 2020, en suite de quoi, à l'inverse, la SELARL Mary-Laure GASTAUD, par conclusions en date au greffe du 25 juin 2020, a déclaré intervenir volontairement en cette instance en qualité de mandataire liquidateur de cette société.

Celle-ci confirme que la BNC a bien déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société ML DISTRIBUTION pour un total de 4 305 061 XPF au titre des trois engagements litigieux et conclut aux fins de voir constater que les conditions de reprise de l'instance sont réunies et fixer la créance de la BNC au passif de la société ML DISTRIBUTION dans la limite de la somme de 4 305 061 XPF, les dépens restant à la charge de la demanderesse.

***
M. [O] [Y], ès qualités de caution solidaire de la société ML DISTRIBUTION, conclut au débouté de l'ensemble des demandes de la BNC sollicitant quant à lui la remise des justificatifs de situation ou fiches de renseignements des cautions lors des engagements, du retour AR du courrier du 26 septembre 2019 , de l'information dès les premiers incidents de paiement, de la convention de découvert, des relevés de compte de janvier à septembre 2017 attestant du dépassement et d'un décompte modifié prenant en compte le solde déclaré à la liquidation judiciaire et le prix de vente du véhicule.

Il a fait valoir au principal que la responsabilité de la banque est engagée, celle-ci ayant commis une faute dans son obligation de conseil et d'information à son égard, en sa qualité de caution, lui faisant perdre une chance de ne plus être engagé ou au minimum de régler ce litige à l'amiable. A titre subsidiaire, il demandait que M. [M] fût seul condamné au paiement au vu de ses engagements pris envers lui dans le cadre de la cession des parts sociales de M. [Y].

Par jugement en date du 30 août 2021, le tribunal mixte de commerce de Nouméa a reçu l'intervention volontaire de la SELARL Mary-Laure GASTAUD, rejeté l'exception dilatoire et l'exception de communication de pièces soulevées par M. [Y] puis fixé les créances de la BNC au passif de ML Distribution au 04 mai 2020 à hauteur de 630 617 XPF (compte courant), 2 220 327 XPF (crédit du 6 janvier 2017), 1 454 117 XPF (Crédit du 23 décembre 2015) avec intérêts au taux contractuel de 6 % Pan + TOF d 6 % sur la seule somme de 1 160 557 XPF à compter du 26 mai 2020. Il a en outre condamné MM. [M] et [Y], ès qualités de cautions solidaires de ML DISTRIBUTION, à payer solidairement entre eux à la BNC les sommes de 630 617 XPF (découvert compte no [XXXXXXXXXX02]), 2 220 327 XPF avec intérêts sur la seule somme de 1 772 083 XPF à compter du 16 octobre 2019, mais ce dans la limite, pour chacune des cautions, de la somme de 1 460 500 XPF (crédit du 06 janvier 2017). Il a enfin validé l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire sur le bien immobilier appartenant à M. [O] [Y]

PROCEDURE D'APPEL

M. [Y] a relevé appel de cette décision par requête en date du 13 septembre 2021.

Par mémoire d'appel enregistré le 13 décembre 2021 à la cour, il sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a fixé les sommes dues par les cautions à 630 317 XPF (compte courant) et 1 460 500 XPF (crédit du 06 janvier 2017) pour chacune des cautions ainsi que le rejet des frais irrépétibles demandés par la BNC.

Il demande en revanche l'infirmation de la première décision en relevant  la responsabilité de la BNC 1- qui ne rapporte pas avoir pris des renseignements sur la situation de M. [Y] lors de son engagement de caution. 2 - qui a tardé à informer M. [Y] le 30 avril 2019 par courrier alors que les premiers incidents de remboursement dataient de 2018 3 - qui était informée du conflit entre les deux associés et de l'acte de cession du 08 janvier 2018. 4 - qui lui a fait perdre une chance de régler le litige à l'amiable quand il était en fonds, le silence de la Banque pouvant lui laisser penser qu'il n'était plus engagé. 5 - qui avait engagé des démarches dès septembre 2017 (avec plan d'apurement du 17 novembre 2017) avec M. [M] pour régler le litige à l'amiable sans qu'il soit contacté 6 - qui n'avait pas répondu en 2019 à sa proposition de rachat du Renault TRAFIC (crédit du 06 janvier 2017) qui a été vendu 500 000 XPF sans qu'il soit informé modifiant ce faisant les conditions et l'étendue de son engagement 7 - alors que sa société CR Distribution a fait l'acquisition à cette période de 2 autres fourgons dont 1 financé par OCEOR LEASE NOUMEA, filiale de la BNC pour lequel il s'est porté caution.

Certes, le tribunal relève que la BNC n'a pas commis de faute puisqu'elle n'était pas tenue par les accords passés avec les cautions et n'était pas obligée de résilier l'engagement de M. [Y] malgré la cession du TRAFIC, mais cette attitude signe un manque de professionnalisme et de bonne foi dans l'exécution des contrats.

En outre, il convient de prendre en compte l'engagement pris entre MM. [M] et [Y] sur la mainlevée des cautionnements ainsi qu'il résulte d'une attestation non datée de M. [M] qui se serait engagé à rapporter tous les engagements de caution donnés par M. [Y] à l'égard de la BNC puisque la BNC, à l'inverse de la BCI, n'avait pas été visée dans l'article 10 du protocole du 08 janvier 2018.

Enfin, il sollicite la somme de 400 000 XPF au titre des frais irrépétibles.

La BNC, en réponse indique rejeter sa responsabilité et sollicite la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il l'a débouté de ses demandes d'article 700 CPC. Elle sollicite sur ce point que lui soit attribués 500 000 XPF par M. [M] et M. [Y]. Outre leur condamnation aux dépens d'appel.

Elle reprend pour l'essentiel à son compte ses conclusions de première instance aux quelles il sera renvoyé pour plus ample informé.

SUR QUOI

Sur la fixation des créances au passif de la liquidation de ML Distribution

La BNC produit aux débats :

? les justificatifs de son autorisation de découvert en compte courant bancaire au profit de la société ML DISTRIBUTION, anciennement CHB DISTRIBUTION, les deux contrats de prêt à moyen terme, les actes de mise en demeure ayant entraîné la dénonciation du découvert et la résiliation de plein droit, pour défaut de paiement des mensualités de remboursement, de ces deux prêts,

? le décompte des sommes restant dues à ce titre, en principal, intérêts et pénalités conformes aux stipulations contractuelles ;
?
Il y a donc lieu de confirmer la fixation des créances de la BNC au passif de la liquidation judiciaire de ML DISTRIBUTION aux sommes suivantes :

- solde débiteur du compte courant no [XXXXXXXXXX02] : 630 617 XPF arrêtée au 4 mai 2020,
- crédit du 6 janvier 2017 : 2 220 327 XPF arrêtée au 4 mai 2020, avec intérêts au taux contractuel de 6 % l'an + TOF de 6 % sur la seule somme de 1 772 083 XPF à compter du 26 mai 2020,
- crédit du 23 décembre 2015 : 1 454 117 XPF au 4 mai 2020 avec intérêts au taux contractuel de 6 % l'an + TOF de 6 % sur la seule somme de 1, 160 557 XPF à compter du 26 mai 2020,

Ces sommes seront augmentées des intérêts au taux contractuel jusqu'au règlement définitif portant eux-mêmes intérêts aux mêmes taux dans les conditions de l'article 1154 du code civil

Sur les demandes à l'encontre des deux cautions au titre du découvert en compte courant et du prêt du 6 janvier 2017 :

Il est constant que MM [Y] et [M] se sont portés cautions solidaires des engagements de la société ML DISTRIBUTION au titre du découvert autorisé en compte courant et du prêt de 2017, à l'exclusion du prêt de décembre 2015.

Il résulte du décompte des demandes de la banque à l'égard des deux cautions, que chacune des sommes qui y sont adjointes sont accessoires desdits cautionnements puisque chacun des écrits de MM [Y] et [M] intègre clairement une somme qui "couvre le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard". Les indemnités de défaillance de 10 % du principal prévues au contrat constituent bien une "pénalité" au sens de cette mention

La BNC justifie par surcroît de la vente du véhicule acquis grâce au prêt de 2017 pour 500 000 XPF et de la réduction de la dette de la société ML DISTRIBUTION à cet égard puisque seules des échéances impayées à compter de mai 2019 sont réclamées.

Il est établi également que les deux cautions ont été informées dès le 30 avril 2019 des défaillances de leur société étant observé, ainsi que relevé par le premier juge, que les dispositions du code de la consommation relatives à la protection des cautions civiles ne sont pas applicables aux cautions commerciales litigieuses.

Pour ce qui regarde le découvert en compte courant à l'égard des cautions, il est exigible tant à raison de la dénonciation qui a été faite à leur égard de la résiliation du découvert suivant courriers du 18 juillet 2019 pour lesquels sont produits les retours des accusés de réception démontrant un « choix délibéré et fautif  de ne point aller les chercher à la Poste », que de la liquidation judiciaire de la débitrice principale.

Par ailleurs, M. [Y] estime, qu'il doit être déchargé de ses cautionnements au motif qu'il avait cédé ses parts dans la société débitrice et que M. [M] s'était engagé à le débarrasser de ses cautionnements. Or cette cession est inopposable à la BNC puisqu'elle n'y est pas partie et a toujours conservé ses garanties envers MM. [Y] et [M]. Il ne peut d'ailleurs être produit aucun témoignage d'un consentement écrit ou oral de ce que la Banque aurait pu renoncer à agir contre les deux cautions.

Les engagements de caution de M. [Y] au profit de la BNC s'agissant des deux concours accordés à la société ML DISTRIBUTION, ne sont pas résiliés et sont toujours en vigueur.

Sur la perte de chance d'un règlement amiable

M. [Y] reproche à la banque un préjudice de perte de chance d'avoir pu régler le litige à l'amiable bien plus tôt et à une époque où il était in bonis.

En premier lieu, il fait état notamment d'un mail de la BNC du 29 mai 2019, laquelle se borne à accuser réception des documents relatifs à la cession des parts sociales, tout en lui précisant qu'elle a rejeté la demande de M. [M] concernant la résiliation des cautionnements du cédant. L''absence de réponse de la BNC à la proposition de M. [Y] de lui racheter le gage du crédit à moyen terme de 2017, la Banque étant libre de vendre à qui elle l'entend, étant relevé qu'i n'est pas démontré que la vente aurait été faite à un vil prix.

En réalité, M. [Y] a eu tout loisir de surmonter la difficulté de la seule façon qui importait s'agissant de la réclamation d'une dette de caution, savoir son règlement, soit en une seule fois, soit en plusieurs échéances le cas échéant, et ce à réception des premières mises en demeure qui lui auraient révélé très tôt, s'il avait pris la peine de les réceptionner, la défaillance de la société ML DISTRIBUTION. Ainsi que relevé par le tribunal, «  il y a lieu en effet de rappeler à cet égard que le principe inscrit dans le code civil est que les contrats s'exécutent de bonne foi et spontanément et que l'objet même d'une garantie telle qu'un cautionnement est de permettre à son bénéficiaire d'échapper aux affres des lenteurs du débiteur principal ». Or, M. [Y] ne justifie d'aucun règlement ou proposition de règlement même partiel, et en saurait invoquer ainsi la perte de chance d'un quelconque règlement amiable.

Il sera en conséquence débouté de sa demande de condamnation de la banque

M. [M] et M. [Y], ès qualités de cautions solidaires de la société en liquidation ML DISTRIBUTION, seront condamnés à payer solidairement entre eux à la BNC les sommes suivantes :

- au titre du découvert en compte courant no 08768441807: 630 617 XPF

- au titre du crédit à moyen terme du 6janvier 2017: 2 220 327 XPF avec intérêts au taux légal (comme expressément requis) sur la seule somme due en principal pour 1 772 083 XPF à compter du 16 octobre 2019, mais ce dans la limite, pour chacune des cautions, de la somme de 1 460 500 XPF en principal, pénalités et intérêts

Les intérêts non payés à leur échéance porteront eux-mêmes intérêts de plein droit pour une année entière à compter du présent jugement, conformément à L'article 1154 du code civil

Sur la demande de garantie à l'encontre de M. [M]

M. [Y], dans son mémoire d'appel, demande qu'en cas de condamnation au paiement « d'une quelconque somme », M. [M] soit condamné à le relever et le garantir des condamnations prononcées à son encontre, ce qui suppose qu'il doit apporter la preuve des engagements de M. [M] à son égard ainsi que des manquements fautifs qu'il lui reproche.

A cet effet, il fait état en premier lieu de l'acte de cession de ses parts sociales du 8 janvier 2018 au profit de M. [M] par lequel, aux termes de l'article 10, ce dernier s'est "oblig(é) à rapporter la mainlevée de tous les engagements (dont il déclar(ait) avoir parfaite connaissance) de caution solidaire donnés par le CEDANT ci la Banque Calédonienne d'Investissement pour le découvert autorisé, en sa qualité d'associé de la société, le tout de telle manière que le CEDANT soit déchargé de toutes obligations à l'égard dudit établissement, au titre des avances, facilités ou prêts cautionnés par lui."

Or ainsi que relevé par le tribunal, il s'avère que cet article et l'obligation qu'il renferme à la charge de M. [M] ne concernait que les cautions offertes à la banque BCI, à l'exclusion de la banque BNC seule demanderesse à l'instance.

Il est en outre produit la copie d'un écrit censément rédigé par M. [M], "gérant de la société CHB DISTRIBUTION" par lequel il aurait ajouté la BNC à son engagement pris dans l'acte de cession envers M. [Y] s'agissant des cautionnements faits au profit de la BCI.

Le premier juge a rejeté l'appel en garantie considérant que cet acte manuscrit, ni daté ni enregistré ne pouvait constituer, en l'absence d'autres documents, un début de preuve opposable à M. [M]. Au vu de quoi, M. [M] aurait « rajouté de sa main » le 08 septembre 2021 qu'il était bien l'auteur de cette attestation effectuée le 31 mai 2019.

Or aucun original de ce document n'est produit et si l'écriture semble bien être celle de M. [M], elle ne saurait être considérée comme une attestation puisque ne remplissant pas les conditions de forme prévues à l'article 2020 du CPCNC.

En l'état, aucune faute ne saurait en conséquence être relevée en ce qui concerne les cautionnements litigieux, de sorte que M. [Y] sera débouté de sa demande de garantie à son encontre.

Sur l'inscription provisoire d'une hypothèque judiciaire sur un immeuble de M. [Y]

L'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire contestée a été prise au vu d'une autorisation présidentielle du 26 novembre 2019 dont la demande de rétractation a été rejetée par le juge des référés : elle est donc régulière en la forme et sera confirmée.

Sur l'exécution provisoire

Il sera rappelé pour mémoire que l'exécution provisoire est de droit en cause d'appel

Sur les frais irrépétibles

La Selarl GASTAUD ès qualité de mandataire liquidateur de la société ML Distribution, M. [Y] et M. [M] seront solidairement condamnés à verser une somme de 300 000 XPF sur le fondement de l'article 700 du CPCNC.

Sur les dépens

M. [Y] et M. [M] supporteront pour moitié chacun tous les dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la BNC de ses demandes de frais irrépétibles à l'endroit de M. [Y] et de M. [M]

CONDAMNE M. [O] [Y], M. [I] [M] et la Selarl GASTAUD ès qualités de liquidateur de ML Distribution solidairement au paiement d'une somme de 300 000 XPF à la BNC sur le fondement de l'article 700 du CPCNC

CONDAMNE M. [O] [Y] et M. [I] [M] aux entiers dépens de l'instance d'appel dont distraction au profit de Maître CAZALI

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de noumea
Formation : 05
Numéro d'arrêt : 21/000945
Date de la décision : 29/08/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2022-08-29;21.000945 ?
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