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11/07/2022 | FRANCE | N°22/000125

France | France, Cour d'appel de noumea, 05, 11 juillet 2022, 22/000125


No de minute : 47/2022

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 11 Juillet 2022

Chambre commerciale

Numéro R.G. : No RG 22/00012 - No Portalis DBWF-V-B7G-S2P

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Août 2021 par le Tribunal mixte de Commerce de NOUMEA (RG no :17/593)

Saisine de la cour : 11 Février 2022

APPELANT

S.A.R.L. ELECTRICAL,
Siège social : [Adresse 5]
Représentée par Me Philippe O'CONNOR de la SELARL POC et ASSOCIES, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

S.E.L.A.R.L. MARY LAURE [Z],
Siège so

cial ;[Adresse 3]
Représentée par Me Valérie ROBERTSON, avocat au barreau de NOUMEA

M. [R] [I]
né le [Date naissance 1] 1957 à [Lo...

No de minute : 47/2022

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 11 Juillet 2022

Chambre commerciale

Numéro R.G. : No RG 22/00012 - No Portalis DBWF-V-B7G-S2P

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Août 2021 par le Tribunal mixte de Commerce de NOUMEA (RG no :17/593)

Saisine de la cour : 11 Février 2022

APPELANT

S.A.R.L. ELECTRICAL,
Siège social : [Adresse 5]
Représentée par Me Philippe O'CONNOR de la SELARL POC et ASSOCIES, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

S.E.L.A.R.L. MARY LAURE [Z],
Siège social ;[Adresse 3]
Représentée par Me Valérie ROBERTSON, avocat au barreau de NOUMEA

M. [R] [I]
né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 10] ([Localité 10]),
demeurant [Adresse 8]
Représenté par Me Martin CALMET de la SARL DESWARTE-CALMET, avocat au barreau de NOUMEA

M. [S] [V]
né le [Date naissance 4] 1955 à [Localité 9],
demeurant [Adresse 7]
Représenté par Me Martin CALMET de la SARL DESWARTE-CALMET, avocat au barreau de NOUMEA

M. [B] [P] décédé en cours d'instance
né le [Date naissance 2] 1943 à [Localité 11] ([Localité 11]),
demeurant [Adresse 6]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 Avril 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller, président,
Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller,
M. Thibaud SOUBEYRAN, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de Mme Marie-Claude XIVECAS.

Greffier lors des débats : M. [S] GOGO
Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :

- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par Mme Marie-Claude XIVECAS, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

La société ELECTRICAL a pour activité le travail aérien par hélicoptère et par avion, la formation au pilotage, le transport aérien de passagers et la location d'aéronefs coque nue notamment, dans le cadre desquelles, courant 2010, elle a acheté deux avions légers, un CESSNA 150 E no F-OCFE, d'une part, et d'autre part, un RALLYE SOCATA MS893E no F-ODJD ;

L'entretien du premier avait été confié à la société [H] Maintenance Aéronautique depuis 2006 et le second avait fait l'objet, le 11 décembre 2009, de travaux de la part de la même société [H] pour le prix de 2 386 659 F CFP comprenant un forfait Grande Visite réalisé toutes les 2000 heures ou tous les 4 ans.

La société ELECTRICAL a continué de confier ces deux aéronefs à ladite société pour leur entretien et leur maintien en état de navigabilité pour leur permettre de continuer d'être autorisés à voler ;

En février 2012, le gérant de la société ELECTRICAL, M. [U], a acquis 39 % du capital social de la société [H] pour le prix de 5 000 000 F CFP. Se plaignant de ce que la société [H] n'avait pas su assurer ses obligations d'entretien et de navigabilité de ces deux aéronefs à elle confiés à cette fin en 2011, de vol de pièces détachées et de mise en danger de la vie d'autrui, la société ELECTRICAL a fait appeler ladite société, mais aussi MM [S] [V], [R] [I] et [B] [P] devant le juge des référés du tribunal de première instance de Nouméa aux fins d'expertise. Par ordonnance du 12 novembre 2014, ce juge a ordonné une mesure d'expertise aux frais avancés de la société requérante et désigné M. [D] [K], remplacé ensuite, par ordonnance du 27 février 2015, par l'expert [W] [C], inscrit sur la liste de la cour d'appel de Versailles.

Par jugement du 2 mai 2016, le tribunal mixte de commerce de Nouméa a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société [H] et désigné la SELAR [N] [Z] en qualité de mandataire judiciaire, ce pourquoi, par ordonnance du 21 septembre 2016, le juge des référés de la juridiction civile de Nouméa a étendu à ce mandataire, ès qualités, la mesure d'expertise confiée à M. [C]

L'expert judiciaire a établi un pré-rapport daté du 31 août 2016 puis a déposé en suivant son rapport définitif le 21 mars 2017 ;

Sur la base du pré-rapport, la société ELECTRICAL a fait appeler la S.A.R.L. [H], M. [R] [I], mécanicien aéronautique, M. [B] [P], mécanicien aéronautique, M. [S] [V], dirigeant de société, et la SELARL [N] [Z], ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire alors en cours de la société [H] (jugement du 2 mai 2016), devant le tribunal de première instance de Nouméa, chambre civile, a l'effet de voir retenir la responsabilité de la société [H] et de ses dirigeants responsables MM [V] et [I] et [P],

Par ordonnance du 14 août 2017, le juge de la mise en état du tribunal de première instance a notamment :

- déclaré le tribunal de première instance, chambre civile, incompétent à raison de la matière, et ce au profit du tribunal mixte de commerce de ce siège,

-renvoyé par suite les parties devant cette juridiction commerciale pour voir statuer sur l'exception d'irrecevabilité,

- ordonné, à la diligence du greffe, la transmission du dossier au greffe de la juridiction de renvoi passé le délai d'appel,

- débouté la SELARL ML [Z], en qualité de mandataire judiciaire (après rectification) de la société [H], la S.A.R.L. [H], [R] [I], [S] [V] et [B] [P] de leur demande au titre de l'article 700 CPCNC, et a condamné la société ELECTRICAL aux dépens de l'instance, sous distraction ;

Le dossier de l'affaire a été adressé au tribunal de commerce et les parties ont été invitées à y comparaître et conclure. Par jugement en date du 8 juin 2021 le Tribunal Mixte de Commerce a prononcé la résolution du plan de redressement de la société [H] et prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire.

En cours de procédure, la S.A.R.L. ELECTRICAL a indiqué se désister à l'encontre de la société [H] compte tenu de l'accord transactionnel conclu avec celle-ci le 16 octobre 2019 mais a demandé de prendre acte en revanche du maintien de ses demandes à l'encontre des autres parties, à savoir MM [V] et [I] ainsi que la SELARL [Z] au titre de commissaire à I'exécution du plan. La société [H] a accepté expressément ce désistement d'instance et d'action ;

Par ordonnance du 17 février 2020, le juge de la mise en état du Tribunal Mixte de Commerce a déclaré ce désistement parfait et constaté, à l'égard de la société [H], l'instance et l'action éteintes ;

Par ordonnance du même jour, le même juge a constaté l'interruption de l'instance à raison du décès de l'un des défendeurs en la personne de M. [P] et a enjoint ELECTRICAL a faire appeler en cause ses héritiers ;

M. [P] est décédé en 2017. La société ELECTRICAL a abandonné toutes demandes à son encontre, mais a maintenu ses demandes à l'encontre des autres parties présentées comme suit :

-constater les manquements aux règles administratives, aux règles de sécurité, aux règles de l'art commis par les dirigeants responsables de la société [H], MM [V] et [I],
-constater que les avions sont restés immobilisés sans raison pendant plus de 3 ans, sans recevoir l'entretien qui aurait néanmoins dû correspondre aux factures émises,
-constater les préjudices subis par elle,
-dire en conséquence que MM [V] et [I] ont manqué à leurs obligations extra-contractuelle et qu'ils ont commis des fautes personnelles engageant leur responsabilité "quasi-délictuelle ,
-condamner "conjointement et solidairement" MM [V] et [I] à lui payer la somme de 10 000 000 F CFP à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi,
-débouter Me [N] [Z] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
-condamner "conjointement et solidairement" MM [V] et [I] à lui payer enfin une indemnité de 2 000 000 F CFP au titre de l'article 700 CPCNC, ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire d'un montant de 1 552 968 F CFP, sous distraction ;

Elle faisait valoir que dans son rapport définitif du 21 mars 2017, l'expert judiciaire [C] concluait d'une part à l'application du règlement CE 2042/2003 sur le territoire de la Nouvelle Calédonie et reprochait à [H] une sur facturation notoire associée à quelques prestations réalisés en dehors des règles de l'art ; Elle estimait que MM [V] et [I], dirigeants de la société [H], avaient incontestablement engagée "leur responsabilité quasi délictuelle" en acceptant d'entretenir les avions au titre d'un programme destiné à leur permettre de voler, en encaissant les factures émises au titre dudit programme, en ne réalisant pas les travaux correspondants, ou que très partiellement et en tout état de cause non conformément aux règles de l'art, et en ne suivant aucunement la navigabilité des appareils, que "la responsabilite' quasi délíctuelle des dirigeants responsables d'une société peut être recherchée sur le fondement de l'article 1382 du code civil (calédonien) ; que l'article 1383 du même code "ajoute opportune'ment" que chacun des responsables du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence, et que la jurisprudence considère que les décisions prises par les dirigeants sociaux d'une entreprise engagent leur responsabilité personnelle dès lors que, même agissant dans les limites de leurs attributions, ils commettent des fautes intentionnelles d'une particulière gravité incompatibles avec l'exercice normal de leurs fonctions sociales ;

En réponse, M [S] [V] et [R] [I] soutenaient quant à eux qu'ils n'avaient commis aucune faute et en tout état de cause que les fautes qui leur étaient reprochées n'étaient pas détachables de leurs fonctions de gérants de [H].

Par jugement du 13/08/2021, le Tribunal Mixte de Commerce a statué en ces termes:
etlt;etlt;- Rappelle que par l' ordonnance du 17 février 2020, l'extinction de l'instance et de l'action à l'encontre de la S.A.R.L. [H] a été constatée,

- Dit en conséquence irrecevable l'intervention volontaire de la SELARL [N] [Z] en qualité de mandataire liquidateur de la S.A.R.L. [H], en date du 27 mai 2021, et la met hors de cause,

- Prend acte du décès en 2017 de feu M. [B] [P] et du renoncement de la société ELECRICAL à toute demande à son encontre,

- Dit par suite qu'il n'y a plus lieu d'enjoindre la demanderesse à faire appeler en cause les héritiers ou ayants-droit de feu M. [B] [P] et que l'interruption de l'instance ayant résulté de ce décès a pris fin,

-Dit qu'il peut donc être statué sans désemparer sur les demandes résiduelles de la société ELECTRICAL à l'encontre de MM [S] [V] et [R] [I],

-Déboute la S.A.R.L. ELECTRICAL de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de MM [S] [V] et [R] [I],

-Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- Condamne la S.A.R.L. ELECTRICAL à payer à M. [S] [V] et M. [R] [I] une indemnité globale de 500 000 F CFP au titre de l'article 700 CPCNC, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance. etgt;etgt;

Pour se déterminer le 1er juge a considéré que la demanderesse ne rapportait pas la preuve que M [R] [I] et M. [S] [V] avaient commis des fautes d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de leurs fonctions sociales ; que le rapport d'expertise avait seulement mis en lumière des fautes commises par la société [H] dont la personnalité juridique est distincte de celle de ses dirigeants.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête du 29/10/2021, la société ELECTRICAL a fait appel de la décision rendue. Elle n'a pas déposé son mémoire ampliatif d'appel dans le délai prévu.

Par ordonnance du 09/02/2022, le juge de la mise en état a ordonné la radiation de l'affaire .

Par écritures déposées le14/02/2022, M [R] [I] a demandé le rétablissement de l'affaire au visa de l'article 904 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie aux fins qu'il soit statué au vu des conclusions de première instance en sollicitant la confirmation du jugement. Il demande également condamnation de la société ELECTRICAL à lui payer la somme de 150 000 Fcfp sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Par conclusions du 11/02/2022, La selarl [Z] ès-qualités a saisi la cour d'une demande identique.

Vu l'ordonnance de clôture.
Vu l'ordonnance de fixation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

sur la recevabilité de l'appel

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée ;

Sur la forme

L'article 904 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie dispose que :

etlt;etlt; l'appelant doit dans les trois mois de la requête d'appel déposer au greffe son mémoire ampliatif . ( ...) A défaut , l'affaire est radiée du rôle par une décision non susceptible de recours dont une copie est envoyé à l'appelant par lettre simple adressée à son domicile déclaré. Cette radiation prive l'appel de tout effet suspensif hors les cas où l'exécution provisoire est interdite par la loi . L'affaire est rétablie soit sur justificatif du dépôt des conclusions de l'appelant , l'appel restant privé de tout effet suspensif soit sur l'initiative de l'intimé qui peut demander que la clôture soit ordonnée et l'affaire renvoyée à l'audience pour être jugée au vu des conclusions de première instance ..." etgt;etgt;

Sur le fond

L'affaire a été rétablie à l'initiative de la SELARL [Z] et de M. [R] [I] intimés, qui ont demandé que l'affaire soit jugée au vu des conclusions de première instance.

En l'espèce, c'est par une exacte appréciation des éléments de la cause, et par des motifs pertinents que la Cour adopte, que les premiers juges ont retenu que la preuve d'une faute intentionnelle des dirigeants de la société [H] détachable de leurs statut n'était pas rapportée et a débouté la société ELECTRICAL de ses demandes indemnitaires considérant que les griefs reprochés étaient liés à une incompétence conjoncturelle et partant à des fautes de simple négligence et imprudence des dirigeants de la société survenues dans le cadre de leur fonctions sociales, et non en dehors de celles-ci. Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur l'article 700

Il n'est pas inéquitable de débouter l'intimé, M. [R] [I], de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme la décision en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute M. [R] [I] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société ELECTRICAL aux dépens de la présente procédure.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de noumea
Formation : 05
Numéro d'arrêt : 22/000125
Date de la décision : 11/07/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2022-07-11;22.000125 ?
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