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25/11/2021 | FRANCE | N°20/001277

France | France, Cour d'appel de Nouméa, 02, 25 novembre 2021, 20/001277


No de minute : 104

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 25 Novembre 2021

Chambre sociale

Numéro R.G. : No RG 20/00127 - No Portalis DBWF-V-B7E-RTT

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Décembre 2020 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG no :18/320)

Saisine de la cour : 28 Décembre 2020

APPELANT

M. [C] [MO]
né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 6],
demeurant [Adresse 2]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/000081 du 12/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de N

OUMEA)
Représenté par Me Gustave TEHIO de la SELARL TEHIO, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

Mme [P] [V]
née le [Date ...

No de minute : 104

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 25 Novembre 2021

Chambre sociale

Numéro R.G. : No RG 20/00127 - No Portalis DBWF-V-B7E-RTT

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Décembre 2020 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG no :18/320)

Saisine de la cour : 28 Décembre 2020

APPELANT

M. [C] [MO]
né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 6],
demeurant [Adresse 2]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/000081 du 12/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)
Représenté par Me Gustave TEHIO de la SELARL TEHIO, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

Mme [P] [V]
née le [Date naissance 3] 1938 à [Localité 10],
demeurant [Adresse 4]
Représentée par Me Siggrid KLEIN, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Octobre 2021, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe DORCET, Président de chambre, président,
M. François BILLON, Conseiller,
M. Thibaud SOUBEYRAN,,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. François BILLON.

Greffier lors des débats et lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO

ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par Monsieur Philippe DORCET, président, et par M. Petelo GOGO, greffier auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Par requête enregistrée le 10 décembre 2018 complétée par des conclusions postérieures, M. [C] [MO] a fait convoquer devant le tribunal du travail de Nouméa Mme [P] [V], représentée par sa tutrice, Mme [S] [V], afin qu'elle soit condamnée au paiement des sommes suivantes :

- rappels de salaires ......................................... ..5 978 000 F CFP
- congés payés ............................................... .. 380 000 F CFP
- préavis: ......................................................... .. 152 000 F CFP
- congés-payés sur préavis .............................. .. 12 666 F CFP
- dommages-intérêts pour licenciement abusif.... 1 500 000 F CFP
- frais irrépétibles : ............................................ .. 212 000 F CFP

M.[MO] exposait avoir été employé depuis 2014 en qualité de gardien et jardinier sur la propriété de Mme [V] en produisant deux attestations et soutenait n'avoir perçu depuis le début de la relation que des avances de salaire en espèces alors qu'il aurait dû percevoir la somme mensuelle de 152 000 F CFP, n'avoir pas été déclaré à la CAFAT, n'avoir pris des congés qu'en août 2017 et avoir été congédié verbalement par téléphone de sorte qu'il convenait de constater sa prise d'acte aux torts de I'employeur et de faire droit à ses demandes salariales et indemnitaires.

Mme [V] répliquait pour I'essentiel qu'il n'y avait jamais eu de contrat de travail entre les parties, les deux attestations produites étant imprécises quant à la relation entre les parties pour établir la qualité de salarié, que M. [MO] avait été logé gratuitement dans un bungalow lui appartenant à la demande de M. [X] [I] alors qu'il intervenait en qualité de sous- traitant sur le chantier de construction de la fille de ce dernier.

Mme [V] ajoutait que M. [MO] intervenait en réalité chez des particuliers en qualité de patenté et qu'elle ne saurait prendre acte de la rupture alors qu'aucun courrier en ce sens ne lui avait été adressé.

Par jugement du 18 décembre 2020, le tribunal du travail a statué ainsi qu'il suit :

DIT que M. [C] [MO] n'est pas lié à Mme [P] [V] par un contrat de travail.

LE DÉBOUTE de ses demandes.

DÉBOUTE Mme [V] de sa demande de frais irrépétibles.

CONDAMNE M. [MO] aux dépens et dit qu'ils seront recouvrés selon les règles de l'aide judiciaire ;

FIXE à quatre (4) le nombre d'unités de valeur, le coefficient de base servant au calcul de la rémunération de Me Gustave TEHIO, avocat au barreau de Nouméa, désignée au titre de l'aide judiciaire.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête déposée au greffe le 28 décembre 2020, M. [MO] a interjeté appel de la décision.

Son mémoire ampliatif d'appel a été déposé le 25 février 2021.

Dans ses conclusions récapitulatives enregistrées au RPVA le 7 juin 2021, il fait valoir, pour l'essentiel :

- qu'il verse aux débats quatre attestations de nature à établir la réalité de son contrat de travail pour l'exécution de tâches de jardinage de juin 2014 à octobre 2017 avec du matériel fourni par Mme [V] à des horaires fixes du lundi au vendredi de 8h00 à 11h00 et de 13h00 à 17h00, soit 35 heures par semaine ;

- qu'il soutient avoir perçu en espèces de 2014 à 2018 la somme totale de 1 470 000 F CFP et sollicite que lui soit versée sur la base mensuelle d'un salaire de 152 000 F CFP la somme de 5 978 000 F CFP (7 448 000-1 470 000) ;

- que Mme [V] a profité de l'absence de M.[MO], en déplacement au VANUATU, pour téléphoner en octobre 2017 à son épouse en lui disant qu'il fallait absolument "venir récupérer ses affaires personnelles sinon, ses affaires seraient brûlées" ; qu'ainsi, la procédure légale de licenciement n'a pas été respectée et que M.[MO] a dû prendre acte de la rupture de son contrat de travail oral à compter de juillet 2018 ; qu'il y a lieu ainsi de dire que le licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence, M. [MO] demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

DIRE l'appel recevable ;

INFIRMER le jugement entrepris ;

APPLIQUER les articles Lp 121-l et Lp 121-2 du code du travail de la Nouvelle-Calédonie et l'accord interprofessionnel territorial (article 39 de l'AIT) ;

CONSTATER que M. [C] [MO], employé par Mme [P] [V], n'a jamais reçu les bulletins de paie depuis le mois de juin 2014 à juillet 2018 ;

ORDONNER à Mme [P] [V] de remettre à M. [C] [MO] les bulletins de paie, le certificat de travail ainsi que le reçu pour solde de tout compte sous astreinte de 5 000 F CFP par jours de retard dans le délai de 15 jours après signification de l'arrêt ;

CONSTATER que M. [C] [MO] n"a pas été déclaré à la CAFAT ;

ORDONNER à Mme [P] [V] d'avoir à payer les cotisations sociales à la CAFAT de 2014 à juillet 2018 dans le délai de 15 jours après signification de l'arrêt et à défaut fixer une astreinte de 5 000 F CFP par jour de retard ;

DIRE ET JUGER qu'il n'a pas perçu l'intégralité de ses salaires depuis juin 2014 ;

DIRE ET JUGER que Mme [P] [V] n'a pas respecté la procédure de licenciement ;

DONNER ACTE à M. [C] [MO] de ce qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail à compter de juillet 2018 ;

LA CONDAMNER à payer à M. [C] [MO] les sommes de :

- 5 978 000 F CFP au titre du solde des salaires dû depuis juin 2014 à juillet 2018 ;

- 380 000 F CFP au titre des indemnités de congés-payés de juin 2014 à décembre 2016 ;

- 1 500 000 F CFP à titre de dommages-intérêts à titre de licenciement sans cause réelle, ni sérieuse ;

- 152.000 F CFP au titre de l'indemnité de préavis ;

- 12.666 F CFP au titre de l'indemnité de congés-payés correspondant au mois de préavis ;

LA CONDAMNER aux entiers dépens ;

FIXER le nombre d'unités de valeur alloué à Maître [Y] [O].

*****************
Mme [V], par conclusions enregistrées au RPVA le 10 mai 2021 fait valoir, pour l'essentiel :

- que la version avancée par M. [MO] selon laquelle il aurait été son salarié ne repose sur aucun élément sérieux ;

- que les quatre témoignages produits en appel émanent de personnes ayant des liens de parenté étroits avec M.[MO], sont rédigés en des termes identiques et n'établissent aucunement une quelconque relation salariée ; qu'en outre, la cour ne pourra que constater que leurs précisions tenant notamment aux horaires et aux jours travaillés auraient nécessité que leurs auteurs soient présents tout au long de la journée et de la semaine pour démontrer leur sincérité, ce qui n'est aucunement établi ou même soutenu ;

- que si M.[MO] a effectivement pu demeurer dans un bungalow appartenant à Mme [V], cet hébergement gracieux l'avait été à la demande de M.[X] [I] alors que M.[MO] intervenait en qualité de sous- traitant sur le chantier de construction de la fille de M.[X] [I] ; que ce dernier confirme que M.[MO] n'était pas employé chez Mme [V] ; que M.[J], peintre en bâtiments, affirme n'avoir jamais vu M. [MO] travailler pour Mme [V] au cours des dix années lors desquelles les travaux du [Adresse 7] ont duré et à l'occasion desquelles il allait souvent manger chez Mme [V] ; que Mme [H] [T] et M.[B] [T], filleul de Mme [V], confirment également cet état de fait, M. [T] précisant que M.[MO] allait faire des travaux chez des particuliers en tant que patenté ;

- qu'à titre subsidiaire, elle relève que la prise d'acte avancée par M. [MO] qui aurait dû expliciter ses raisons ne lui a jamais été adressée en lettre recommandée avec accusé de réception ;

- qu'au titre de son appel incident, elle ajoute qu'elle a été meurtrie par cette procédure et qu'elle demande qu'une somme de 500 000 F CFP lui soit versée.

En conséquence, Mme [V] demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

DIRE bien jugé et mal appelé,

CONFIRMER le jugement du tribunal du travail en date du 18 décembre 2020 en toutes ses dispositions ;

DÉBOUTER M. [C] [MO] de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions dès lors qu'il est établi qu'il n'était pas lié à Mme [P] [V] par un contrat de travail ;

CONDAMNER M. [C] [MO] au paiement de la somme de 500 000 F CFP par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.

CONDAMNER M. [C] [MO] aux entiers dépens.

*****************
L'ordonnance de fixation de la date de l'audience a été rendue le 19 juillet 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

De l'existence d'un contrat de travail

Attendu que l'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité ; qu'il y a contrat de travail lorsqu'une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la subordination d'une autre, moyennant rémunération ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le pouvoir de direction et de contrôle de l'employeur s'apprécie selon la nature de la profession exercée ;

Attendu que M. [MO] entend établir l'existence d'un contrat de travail verbal par la production de quatre attestations combattues par Mme [V] qui pour sa part produit également quatre témoignages contraires ; qu'il convient d'analyser ces différents éléments ;

Attestations produites par M. [MO]

1/ M. [E] [F] :

"Mme [V] [P] a embauché [MO] [C] pour travailler sur sa propriété : gardien la nuit, travaux de jardin de 08-11h et 13h-17h, chaque jour sauf le samedi et le dimanche" ;

2/ M. [L] [Z] :

"M. [MO] [C] a travaillé pour Mme [V] [P] du lundi au vendredi de 8h à 11h et de 13h à 17h pour les travaux de jardinage et il nettoyait la propriété de trois hectares environ, il coupait les branches et les arbres et il taillait les haies.Il dormait dans un bungalow de Mme [V] de 16 m2 environ, d'une seule pièce avec une table et deux lits. Les sanitaires sont à l'extérieur à 23 ou 25 m environ. C'est gratuit, M. [MO] a travaillé de juin 2014 à octobre 2017. Il a été le gardien de la propriété. Il rendait visite à sa famille à [Localité 8] le samedi ou dimanche" ;

3/ M. [U] [A]

" De l'emploi de M. [MO] [C] en tant que gardien de nuit sur la propriété de Mme [V] [P].

En effet, M. [MO] disposait d'un bungalow sis en plein milieu de la propriété et à peu près à 200 mètres de l'entrée principale du domaine.M. [MO] vit dans le bungalow d'une superficie d'environ 16 m2 composé d'une seule pièce de séjour avec une table et deux lits et dépourvu de sanitaires situés à 25 mètres à pied à l'extérieur.

De l'emploi de M. [MO] [C] pour les travaux de jardinage.

M. [MO] s'occupe de nettoyer la propriété d'une superficie d'environ deux hectares. Il élaguait les branches d'arbres, ratissait les feuilles des nombreux arbres de la place, taillait les haies. Ses horaires étaient de 8h à 11h et de 13h à 17h, tous les jours sauf le week-end.

Du séjour quotidien sur la propriété.

M. [MO] était présent sur le domaine de Mme [V] tous les jours de juin 2014 à octobre 2017. Il dormait et travaillait sur place. Il quittait la propriété quelques fois le week-end pour rendre visite à sa famille sur [Localité 8].

En conclusion, Mme [V] employait M. [MO] [C] pour gardienner et entretenir sa propriété de [Adresse 7] de la commune de [Localité 9] (Nouvelle-Calédonie)" ;

4/ M. [R] [A]

" J'ai vu M. [MO] [C] travailler sur la propriété de [V] [P] de 2 à 3 hectares et il dormait dans un petit bungalow de Mme [V], gratuitement. Il y avait une seule pièce, une table et 2 lits et les douches et WC sont à l'extérieur (25 m environ).

Du lundi au vendredi, il nettoyait la propriété et il coupait les branches d'arbres, les haies et il faisait le jardinage du lundi au vendredi de 8h à 11h et de 13h à 17h. Il assurait le gardiennage de la propriété du mardi au vendredi. Il travaillait pour Mme [V] de juin 2014 à octobre 2017.

Il revoyait sa famille que le samedi ou le dimanche à nouméa. Mme [V] n'est jamais sur la propriété du mardi au vendredi" ;

Attestations produites par Mme [V]

1/ M. [LF] [X] [I]

" Début 2014, j'ai demandé à Mme [V] de louer un bungalow sur sa propriété pour y loger M.[MO] et ses employés sur sa propriété pour leur permettre de venir travailler sur le chantier de construction de ma fille [G] [K], [Adresse 5].

M. [MO] venait travailler en tant que sous-traitant.

Mme [V] a offert d'héberger M. [MO] gratuitement.

Je n'ai pas été satisfait du travail fourni. J'ai mis fin à cette sous-traitance quelques temps après.

Ses employés se nommaient [D] [RX] et [N]. Je suis allé dire à Mme [V] que M. [MO] ne travaillait plus pour moi.

J'atteste que M. [MO] n'a jamais été employé par Mme [V] " ;

2/ M. [W] [J]

" Dans le cadre des travaux fait dans le [Adresse 7] depuis plus de 10 ans, j'allais souvent manger ma gamelle chez Mme [V] avant de retourner sur mes chantiers.

Je n'ai jamais vu M. [MO] travailler sur le terrain de Mme [V], ni garder ce terrain.

J'ai eu l'occasion de ramener M. [MO] et deux de ses employés à [Localité 8] car ils travaillaient sur un chantier du lotissement de la [Adresse 5] " ;

3/ M. [B] [T]

"J'ai vécu à [Adresse 7] depuis toujours. Je travaillais sur la propriété de [HO] [M].

J'avais mon bungalow chez Mme [V] qui est ma marraine.

J'atteste que M. [C] [MO] n'a jamais travaillé pour ma marraine.

Je n'ai jamais entendu dire qu'il était embauché.

Il était chez ma marraine, logé et nourri comme moi.

Il allait faire des travaux chez des particuliers en tant que patenté" ;

4/ Mme [H] [T]

"Je vis à [Adresse 7] depuis toujours dans mon bungalow que m'a prêté Mme [V] [P], ma marraine.

Je confirme que M. [MO] [C] n'a jamais travaillé pour Mme [V], vu qu'il était invité à habiter chez elle pour pouvoir exécuter des travaux dans les lotissements voisins en tant que patenté" ;

*************
Attendu que la cour est conduite à relever que les attestations produites par M. [MO] pour établir l'existence de son contrat de travail présentent de fortes similitudes qui sont de nature à faire douter de leur sincérité :

- similitude dans la description du bungalow occupé par M. [MO] tenant notamment à sa superficie et à la distance des sanitaires,

- similitude quant aux horaires de travail, aux jours travaillés et au déroulement du week-end de M. [MO], ce qui aurait nécessité que ces témoins aient été en permanence aux côtés de M. [MO] pour emporter la conviction de la cour,

- similitude quant aux dates extrêmement précises de la période au cours de laquelle M. [MO] aurait été employé par Mme [V] (juin 2014 à octobre 2017) ;

Attendu que si l'on pourrait s'étonner de la bienveillance dont Mme [V] aurait fait preuve à l'égard de M. [MO] consistant à mettre à sa disposition un bungalow pendant plusieurs années sans contrepartie, il convient de souligner que tant Mme [V] que M. [MO] sont tous deux issus de la communauté vanuataise où règne une réelle solidarité et que Mme [V] était âgée et fragile ;

Attendu qu'il est par ailleurs soutenu par la partie adverse, sans réelle contradiction, que M [MO] a travaillé en 2014 quelques temps pour M. [X] [I] en qualité de sous-traitant avec deux autres personnes ([RX] et [N] [D]) dans un de ses chantiers ce qui n'est pas conciliable avec un emploi salarié à temps plein pour Mme [V] et est de nature à expliquer pour quelle raison M. [MO] a été autorisé à occuper gratuitement un de ses bungalows ; que M. [J] confirme la réalité des faits relatés par M.[X] [I] ;

Attendu que les attestations ainsi versées par M. [MO] ne sont pas de nature à établir l'existence d'un lien de subordination entre Mme [P] [V] née en 1938 placée ultérieurement sous tutelle par ordonnance du 12 novembre 2019, et M. [MO] ; que les premiers juges ont fait une juste analyse des faits, non sans avoir au préalable souligné avec pertinence que M. [MO] ne justifiait aucunement avoir réclamé un salaire alors même que la relation alléguée avait duré de 2014 à 2017, en déboutant M. [MO] de toutes ses demandes au motif que celui-ci ne rapportait pas la preuve de la réalité du contrat de travail ; que la cour confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions sans qu'il soit nécessaire d'analyser la critique formulée par Mme [V] au titre de l'irrégularité de la prise d'acte qui est un subsidiaire à sa demande de rejet des prétentions formées par M. [MO] ;

De l'appel incident

Attendu que Mme [V] sollicite que la partie adverse soit condamnée à lui verser la somme de 500 000 F CFP au titre de l'abus du droit à agir ou à tout le moins au titre de ce que la cour croit percevoir comme relevant de son préjudice moral sauf à considérer que cet appel incident ne porte que sur les frais irrépétibles ;

Attendu cependant que l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi ou s'il s'agit d'une erreur équipollente au dol ; qu'en l'espèce l'appréciation inexacte faite par M.[MO] de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute, pas plus que ne l'est le fait de fournir des attestations critiquables ;

Attendu que la cour ne trouve pas plus matière à établir et à condamner M. [MO] en ce qu'il aurait sous-entendu par sa démarche judiciaire que Mme [V] avait tenté de l'exploiter sans vergogne ;

Attendu que cette demande peut cependant s'apprécier sous l'angle des frais irrépétibles d'appel qu'il convient de fixer à la somme de 300 000 F CFP ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt déposé au greffe,

Déclare l'appel recevable ;

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Condamne M. [C] [MO] au paiement de la somme de 300 000 F CFP par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie pour la procédure d'appel ;

Condamne M. [C] [MO] aux entiers dépens d'appel ;

Fixe à quatre (4) le nombre d'unités de valeur, le coefficient de base servant au calcul de la rémunération de Me Gustave TEHIO, avocat au barreau de Nouméa, désignée au titre de l'aide judiciaire.

Le greffier,Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : 02
Numéro d'arrêt : 20/001277
Date de la décision : 25/11/2021
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2021-11-25;20.001277 ?
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